Christophe Castaner ou la tentation du centre
Coincé entre une liste EELV et Front de gauche et des candidats de droite et d'extrême droite sous les feux médiatiques, le candidat socialiste se cherche une place. Il espère conquérir un électorat au centre et se fait peu d'illusions sur sa notoriété.
Le candidat socialiste lors de la visite du camp des Milles par le président Hollande. © Patrick Gherdoussi
Ce samedi à l’ombre des platanes du boulevard Chave, Christophe Castaner occupe le centre de la longue table du Dernier métro, où se déroule un repas de presse organisé au débotté. La place lui sied. Il y trouve l’oreille des journalistes et une place qui correspond au positionnement général de sa campagne. Au centre, donc.
En effet, après la constitution d’une liste née de l’union du Front de gauche et d’Europe Écologie/Les Verts, Christophe Castaner se retrouve avec un espace amoindri sur sa gauche. Et ce n’est pas le score stalinien du référendum sur l’unité organisé par le parti socialiste (96,7% du oui) qui va rabibocher les anciens alliés au conseil régional. Christophe Castaner est seul avec les forces d’appoint de petits partis – UDE, MUP, MRC – sans surface, ni militants. Et dans un contexte politique complexe. Il le dit avec une lucidité presque désarmante : “Je n’ai pas la notoriété nationale et le national ne m’aide pas. Le contexte n’est pas favorable. Les élections régionales sont des élections de mid-term à l’américaine. Par le passé, nous avons gagné parce que les électeurs sanctionnaient Sarkozy ou Chirac. Là, ça nous est défavorable.”
“Je suis rassurant”
Contre mauvaise fortune, bon cœur, Castaner assume de se positionner au centre face à un “Christian Estrosi [qui] a la plus grande notoriété négative de France. Les gens du centre sont mal à l’aise. Face à lui et Marion Maréchal-Le Pen, je suis rassurant”. Il revendique donc une surface politique élargie qui part de la gauche historique et tire jusqu’au centre-droit. “Dans les Alpes-Maritimes, nous sommes rejoints par des gens de l’UDI ou du Modem qui vont figurer sur nos listes car ils ne sont pas à l’aise avec le positionnement droitier d’Estrosi”, assure-t-il.
Ancien vice-président de la région en charge du développement économique en 2010, le député et maire de Forcalquier cultive son image d’amis des patrons. De quoi ramener sur le devant de son col l’étiquette déjà collante de rapporteur de la loi Macron. Un épouvantail chez les déçus de Valls et Hollande. “Arrêtez avec ça. Je n’ai été rapporteur que du volet investissement, sur l’épargne salariale pas sur les sujets clivants”, fait-il mine de s’énerver. Il sait que sur sa gauche, son profil libéral fait de lui une cible idéale. Et dans la campagne, il craint la dent dure des militants Front de gauche. D’ailleurs, il conserve quelques banderilles sur les divisions au sein de cette liste d’union rouge-vert mais ne les distille que si on pose le stylo. Cela va aussi des sondages auxquels il ne faut pas se fier mais dont il détaille les quelques extraits non diffusables qui lui sont favorables.
“Pas une gauche sectaire”
“Nous sommes une liste de gauche mais une pas une gauche sectaire, insiste Christophe Madrolle, tête de liste dans les Bouches-du-Rhône et pièce rapportée Union des écologistes. Avec des adversaires aussi à droite, nous pouvons aller chercher des électeurs au centre-droit, chez ceux qui sont d’accord avec Bayrou ou Cohn-Bendit. En tout cas, il n’est pas question d’aller à la baston avec nos amis du Front de gauche et d’EELV. Ce sont des copains.” Lui aussi a quelques piques en stock sur les divisions chez ses anciens “copains” écolos mais c’est pour mieux les appeler à l’unité.
En effet, la stratégie centriste de Castaner a pour objectif d’élargir leur base électorale dans la perspective d’une liste de rassemblement au soir du premier tour. “Nous avons plutôt intérêt à ce qu’ils fassent un bon score pour nous créer un vrai réservoir de votes”, analyse Castaner. Un réservoir dont le niveau doit être limité pour éviter qu’il ne déborde celui qui veut y puiser.
Les délices du Petit journal
Plus que ce problème de positionnement, Christophe Castaner souffre surtout d’un déficit de notoriété. Dans le récent sondage Odoxa pour Le Parisien et BFM, 69% des 927 personnes interrogées disent “ne pas connaître sa personnalité”. Il est conscient de cette difficulté. Il n’y a qu’à l’entendre raconter avec délice comment il s’est récemment fait épingler par le Petit journal dans la foulée du maire de Nice. L’un et l’autre ont un peu trop cherché les lumières télévisuelles derrière le président Hollande en visite dans les zones inondées des Alpes-Maritimes.
Dans une région qui se gagne dans les Bouches-du-Rhône, il ajoute à sa lacune médiatique personnelle celle de Christophe Madrolle, un quasi-inconnu non-socialiste comme tête de liste. De quoi faire râler dans son parti, surtout ceux qui espéraient que Castaner prenne lui-même la place de Jean-David Ciot, empêché par le retour en appel de son procès au côté de Jean-Noël Guérini. “Il aurait dû y aller, grince un élu municipal de Marseille. Le fait qu’il reste planqué dans son département peut laisser croire à un manque de courage de sa part.”
Même Christophe Madrolle va dans ce sens : “Même moi je pensais que c’était mieux si c’était lui. Il y a eu un repas avec les parlementaires en présence de Jean-David Ciot et de Castaner et mon nom est sorti.” Depuis il affirme recevoir un soutien sans réserve des militants et de ses colistiers. Les hostilités internes n’arrivent pas jusqu’à lui. “De toute façon, ils auraient râlé même si cela avait été Linda Lemay”, rigole Castaner. Au moins ils rient en plus de râler.
Commentaires
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Le PS peut évidemment rejeter par avance sur “le contexte” et sur la “division” à gauche, donc sur les autres, la responsabilité de la claque qu’il va probablement se prendre une nouvelle fois.
Mais avec un peu de lucidité, il s’apercevrait que c’est lui qui a été au pouvoir ces dernières années dans la plupart des grandes villes, dans la majorité des départements, dans la quasi totalité des régions, et au gouvernement : c’est donc un peu trop facile d’éviter toute autocritique.
Le problème du PS, c’est qu’il est devenu un parti de technocrates et d’élus coupés des réalités quotidiennes, sans aucun contenu idéologique, dont la politique au niveau national, souvent menée à la hussarde – les énarques savent ce qui est bon pour le pays -, pourrait pour l’essentiel être assumée par la droite, quoi qu’elle en dise. Et c’est quand il n’y a plus de différence entre la droite et la gauche que les électeurs se détournent de cette dernière et cherchent des alternatives : l’abstention pour le plus grand nombre, la peste brune pour d’autres.
En PACA, le bilan de la majorité sortante n’est pas mauvais, loin de là. Mais heureusement qu’il y a eu EELV et parfois le FdG pour peser sur certains choix.
D’ailleurs, quand le PS prêche l’unité et cherche à la forcer avec un “référendum” ridicule, pourquoi faudrait-il toujours qu’elle se fasse derrière lui ? Un peu plus de modestie de sa part, en particulier dans les Bouches-du-Rhône où il est gangrené par le guérinisme, aurait peut-être aidé…
A propos de “score stalinien”, le “référendum pour la gauche” a recueilli 96,4 % de “oui”…
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Bonjour Electeur du 8e. Je souscris jusqu’à : « sans aucun contenu idéologique ». Si justement, les contenus sont devenus idéologiques, ils se meuvent dans des croyances révolues, comme au FdG, qui garde néanmoins des accents protestataires dans les vœux pieux qu’il exprime.
Et à Marseille, Coppola, en quête de voix (si je ne me trompe, il est d’ailleurs à la Région grâce au désistement demandé à une élue en titre), a voulu torpiller le projet de chantier mer-rail-route de Mourepiane. Alors que c’est la montée en puissance des TER qui rend le passage à niveau du coin problématique. La région n’a pas encore envisagé de transformer cet élément d’infrastructure. Le projet du port a été érigé en bouc émissaire et hop le tour de la question est bouclé.
Sa colistière écolo réfléchit davantage sur les questions économiques et d’aménagement.
Le contrat de génération de Hollande, sans doute conseillé par de vieilles barbes de l’énarchie socialiste qui ne savent plus rien de la réalité, est tombé à plat, parce que le savoir des anciens à transmettre est le plus souvent devenu caduc. L’entreprise fermera, laissant la place à une nouvelle, avec des recrutements de personnels à jour dans leur formation. Ce jeu de massacre coûte 15 Ma€ par an sur 800 Ma€ de valeur de notre tissu industriel (puisé chez les anti Piketty : le Capital au XXI siècle, le bouquin le plus acheté et le moins lu). Les avancées sont bloquées parce que les partenaires sociaux et l’Etat se meuvent dans des croyances et non dans une connaissance renouvelée du réel.
Le crédit d’impôt recherche, c’était mieux, bien qu’usine à gaz, ce qui fait des emplois de conseil, mais les grandes enseignes commerciales en ont largement profité, alors qu’elles ne sont pas à plaindre et que ça visait l’industrie. Mais on a réformé ses règles depuis je crois.
A la gauche du PS on proteste avec impuissance, et en référence au monde où nous vivons, le PS ne réfléchit plus, il ressasse.
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Bonjour JL41, content de vous revoir ici.
Je ne suis pas sûr que nous ayons la même définition du mot “idéologie”. Ce n’est pas seulement une question de “croyances” ou de “voeux”, mais aussi de convictions et de volonté politique d’agir pour concrétiser une vision du monde voulu.
Pour le PS désidéologisé, la ligne de plus grande pente tient lieu d’idéologie. Le libéralisme et la déréglementation sont à la mode ? Libéralisons et déréglementons. Pour les dégâts sociaux, on verra plus tard.
Entre les impasses du modèle productif actuel, qui se heurte aux limites de la planète, la crise économique et sociale (d’ailleurs due à ces impasses de mon point de vue) et la rapidité, voire la brutalité, des changements liés aux technologies de la communication (la fameuse “uberisation”), on est un peu coincés ? Surtout, évitons d’inventer un autre modèle, et attendons la “croissance” comme d’autres attendaient Godot.
Warren Buffett aurait dit un jour : “La lutte des classes existe, c’est ma classe, celle des riches, qui l’a gagnée.” Pour les sans grade, le monde est de plus en plus violent. Je préfère pour ma part ceux qui protestent et essaient d’imaginer autre chose à ceux qui se contentent d’une posture purement gestionnaire.
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Les réflexions sont plurielles et il y a plus de voies que celles de la protestation ou de la posture purement gestionnaire. Je n’ai sans doute pas été assez clair. Mais c’est vrai que l’on peut donner au mot idéologie plusieurs contenus. Il faut aller des croyances peu remises en question vers une foi plus solide. Apparaissent alors des capacités d’agir.
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Castaner, une déroute annoncée.
Déjà, le bilan de Vauzelle est abyssalement catastrophique (mises en examen, détournements de subventions, impôts et endettements explosés, Villa Vauzelia qui ne sert à rien,…).
Mais quad on voit e nombre d’élus du PS et qu’ils prennent comme candidat le maire de Sisteron ( habitants) alors que la région se gagne dans es Bouches du Rhône et les Alpes Maritimes, ca veut dire qu’ils savaient la défaite connue et qu’ils n’ont pas eu le courage de s’y associer. Courage fuyons !!!!
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