Carlotti : les Roms "ne seront pas traités différemment, mais au moins ils seront traités"

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le 28 Août 2012
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Carlotti : les Roms "ne seront pas traités différemment, mais au moins ils seront traités"
Carlotti : les Roms "ne seront pas traités différemment, mais au moins ils seront traités"

Carlotti : les Roms "ne seront pas traités différemment, mais au moins ils seront traités"

Les expulsions de l'été ont provoqué l'indignation des associations et d'une partie de la gauche, alimentant l'idée d'une continuité par rapport à la politique de Nicolas Sarkozy. Dans les Bouches-du-Rhône, où vivraient environ 2000 Roms, la table ronde instituée n'a ainsi pas enrayé la destruction du camp de l'Arbois. En réponse, et pour prendre en compte de manière plus globale cette problématique, les préfets ont reçu dimanche une circulaire. Lundi à Evry et ce mardi à Lyon, de nouvelles évacuations de campements ont rappelé l'urgence de sa mise en application, à partir de mercredi. La ministre marseillaise Marie-Arlette Carlotti, chargée d'en coordonner la rédaction, détaille son contenu.

Marsactu : quel est l'esprit de la circulaire ?

Marie-Arlette Carlotti : On va essayer de donner un guide, des procédures types à l'ensemble des préfets de France, pour que les choses soient cohérentes et leur dire deux choses. D'abord, il y aura recours à la force publique lorsqu'il y a problème de sécurité ou d'hygiène graves et pour faire respecter les décisions de justice. Ca ça ne changera pas, c'est la règle de la République. Pas de stigmatisation des Roms, pas de politique chiffrée, uniquement la sécurité, l'hygiène etc. Par ailleurs, le volet social sera pris en compte, donc on a les deux facettes.

C'est ce qui manquait, soulignaient les associations et de nombreux élus…

La procédure d'expulsion prend beaucoup de temps quand le propriétaire, public ou privé, fait un recours devant le tribunal. On demande au préfet, dès qu'il aura connaissance d'un campement, de mettre en place une task force, composée d'élus locaux, d'associations, des bailleurs sociaux, de tous ceux qui sont intéressés. Il faut mêler solutions collectives – assurer la sécurité, assurer l'hygiène – et l'accompagnement personnel.

Concrètement, comment vous allez vous y prendre ?

Il faut faire adhérer à la démarche les Roms eux-mêmes, ce sera aussi le rôle de la task force : discussion avec eux, sur les mesures, sur les moyens, sur ce qu'ils veulent pour leur famille et pour leur avenir. Discussion aussi avec les riverains : information précise point par point de ce que nous allons faire pour qu'ils sachent ce qui est en train de se passer sous leur fenêtre, pour qu'ils sachent qu'une solution est en train d'être cherchée. Il y a aujourd'hui deux drames côte à côte : celui des Roms et celui des riverains, qui vivent des situations de galère et ne sont pas les gens les plus nantis. Car c'est bien souvent dans les quartiers les plus populaires ou à la périphérie des villes que les campements s'installent.

Etat, élus, associations : ça ressemble à la table ronde mise en place par le préfet, Hugues Parant ?

Le préfet de région a effectivement réagi, il a mis en place deux tables rondes, mais il l'a fait de manière globale pour parler de la situation des Roms dans le département. Ce qu'on va lui demander maintenant c'est de prendre exemple sur ce qu'il a fait, mais de le faire le plus en amont possible, chaque fois qu'on voit un campement. On va ensuite lui demander de savoir avec plus de précision où ils sont, combien ils sont. Ce qui est difficile parce que, vous savez, quand on chasse un campement, il s'en crée un autre ailleurs et, parfois désormais, dans le département d'à côté.

Mais les acteurs de la table ronde attendent surtout des moyens de l'Etat…

Le soutien financier, c'est essentiellement en matière d'hébergement. Il y a des moyens européens, on a des possibilités dans les moyens existants. Ce n'est pas à moi de développer cette question puisqu'elle est en cours de réflexion (par Cécile Duflot, la ministre du logement, ndlr). Les moyens financiers, c'est aussi de les prendre en charge dans le cadre du droit commun, la PMI (protection maternelle infantile, ndlr) pour les enfants, la scolarisation pour les plus grands. Les inciter à s'inscrire à Pôle emploi, ce qui permettra de savoir quelles qualifications ils ont… Je ne crois pas que ça demande des moyens financiers si lourds que ça. En tout cas, la situation est telle qu'on n'en a pas des kilos à débloquer…

Le conseil régional d'Île-de-France, la communauté urbaine de Lille et d'autres collectivités utilisent déjà des fonds européens. Il semble qu'à Marseille les élus soient moins sensibilisés au recours à ces crédits. La circulaire prévoit-elle un volet sur ce sujet ?

Il y a des politiques et des fonds européens pour les Roms, qui vont souvent à l'aménagement ou à la réhabilitation d'hébergements d'urgence. Ce sera dans la directive, on demandera au préfet d'utiliser l'ensemble des moyens de droit commun. Ceci dit, il faut mettre des fonds locaux en face, trouver la part qui manque.

Quelle solution alternative pour le logement pouvez-vous proposer, notamment à Marseille ?

On a demandé un recensement de tout ce qui est disponible, pas forcément le département des Bouches-du-Rhône. J'ai lu dans la presse que nous allions être précurseurs, je ne sais pas pourquoi nous le serions. On va lister les possibilités d'hébergements dans l'ensemble de la France. Il faut partir d'un constat. Cécile Duflot a la maîtrise de ça. Quand le constat sera fait, on en reparlera, on verra comment on fait à la fois dans l'habitat diffus et les centres d'hébergement. Mais, vous savez qu'en particulier à Marseille, ces derniers sont complètement overbookés et il y a l'hiver qui arrive, les difficultés des SDF. Je vais avoir à prendre en main tout ça et ça va être très compliqué. On va voir aussi les terrains, et qu'est-ce qu'on y fait. Les associations ont des positions différentes : certaines nous disent « on fait des villages d'accueil », d'autres nous disent « attention ce sont de nouveaux ghettos avec des problèmes de sécurité à l'intérieur ». Tout ça se discute et ça ne viendra pas d'en haut. On propose au préfet un guide de conduite, pour qu'il y ait une équité dans ce pays, mais la décision se fera au plus près du local. Je n'ai donc pas de réponse à vous apporter concrètement pour la Ville de Marseille par exemple parce que ça viendra après et Cécile Duflot est en train d'y travailler.

Concernant l'hébergement justement, à Marseille par exemple, beaucoup de demandes de logements sociaux sont en attente. Vous ne craignez pas des réactions de rejet de la population marseillaise ?

Je ne crains pas ça pour la bonne raison que je ne crois pas qu'aujourd'hui, ils soient capables de monter des dossiers avec les critères exigés. Ce sont des Européens, mais en France, il faut avoir un travail pendant trois mois. Eux, on les empêche d'en avoir un. Pour l'instant, c'est plutôt accès aux hébergements d'urgence, aux campements particuliers… Il faut innover en la matière. Mais ils ne vont pas concurrencer les 35 000 à Marseille qui sont en recherche de logements et pour lesquels Cécile Duflot a fait d'autres propositions.

L'accès à l'emploi, qui est vous le disiez très compliqué, va être libéré ?

Il y avait trois solutions. Le maintien du statu quo, qui fait que peu de métiers – 150 – sont ouverts aux Roms, pas aux Roms d'ailleurs, aux Bulgares [et aux Roumains, ndlr ] en général. C'est-à-dire une discrimination particulière qui les met dans une situation d'extrême précarité, parce que du coup ils n'ont pas droit au droit commun qu'il y a derrière. Soit on ouvre les métiers et on supprime la taxe, on clarifie, on simplifie les parcours, notamment pour les employeurs qui veulent les employer dans la ferronnerie, dans le bâtiment. On va faire de l'accompagnement personnalisé, mais dans le cadre de Pôle emploi. Je veux que ce soit dit clairement, il n'y aura pas de mesures spécifiques. On va essayer de voir si on trouve des formations, c'est-à-dire ce qu'on fait pour tous les Français et les Européens qui sont en difficulté. Ils ne seront pas traités d'une manière différente, mais, au moins, ils seront traités. Aujourd'hui, ils n'ont aucun droit. Vous savez qu'ils n'ont pas droit à la CMU, ils n'ont pas le droit au RSA et pour cause, ils ont droit à l'AME (aide médicale d'Etat, ndlr) et à l'hébergement d'urgence. C'est tout. C'est très discriminatoire et c'est ce que nous ne voulons plus. [1]

Pourquoi ne pas avoir levé totalement les mesures transitoires, qui tomberont de toute façon fin 2013 ?

Ce n'est pas le choix qu'on a fait. Pas vis-à-vis des Roms mais parce qu'on veut d'abord et très précisément négocier avec les pays d'origine pour les mettre devant leurs responsabilités.

Pour ceux qui seront reconduits, quel avenir dans les pays d'origine justement ?

Le ministre des Affaires européennes (Bernard Cazeneuve, ndlr) va prendre contact avec les pays d'origine de manière à ce que ces populations soient respectées, que les fonds européens soient utilisés. On va sensibiliser ces pays et même les sensibiliser fortement, si vous voyez ce que je veux dire. La discussion doit avoir lieu et on doit le faire fermement – car vous savez qu'il y a des discriminations dans le pays d'origine – mais aussi en tendant la main pour que là-bas aussi on ne renvoie pas les gens à la frontière, savoir comment ils vont être accueillis. On va essayer de développer des coopérations décentralisées, avec les élus locaux et les préfets, pour aider là-bas l'accueil des Roms.

Interview réalisée samedi aux université d'été du PS de La Rochelle

Actualisation le 29 août à 11h : la circulaire a été publiée, en voici les 7 pages :

Circulaire inter-ministérielle Roms

[1] Invité à préciser le sens de ces propos, qui à la relecture nous ont paru ambigüs, le cabinet de Marie-Arlette Carlotti nous a indiquéé qu'il ne s'agissait pas de prendre directement des mesures pour faciliter l'accès au RSA et la CMU mais d'arriver, via l'emploi, à ouvrir de nouveaux droits. Retour à l'article

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Commentaires

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  1. Alain Le Lougarou Alain Le Lougarou

    C’est ce qui s’appelle parler pour ne rien dire .MAC que F.HOLLANDE va présenter en 2014 contre JC.GAUDIN dit tout et son contraire dans cet entretien, histoire de n’effaroucher personne.Le problème ROMS est devenu drama

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  2. Alain Le Lougarou Alain Le Lougarou

    Le problème ROMS est devenu dramatique à Marseille . Les habitants n’ent peuvent plus de voir ces campements qui se multiplient, la mendicité à chaque coin de rue, des femmes enceintes qui ont déjà de très jeunes enfants dans les bras etc…etc… JC.GAUDIN etson équipe ont laissé pourrir la situation en laissant s’installer tout un système qui révulse le peuple de Marseille déjà touché par l’insécurité, le chômage et le manque de logements sociaux. Il faut saluer d’ailleurs une élue socialiste SAMIA GHALI qui depuis longtemps a le courage de dire tout haut ce que les autres pensent tout bas.S.GHALI parle juste sur ce sujet .Marseille ne peut plus rester dans cet état en recevant toute la misère du monde.

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  3. Anonyme Anonyme

    En ce qui concerne les Roms,c’est la forme de la table qui pose problème.

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  4. jean bernard jean bernard

    vous rendez vous compte que vous parlez d’hommes, de femmes, d’enfants,
    aujourd’hui les roms, demain les tsiganes, les pd, et black, les rebeux,

    et c’est socialiste!!!

    j’espere qu’il n’y a pas en plus des handicapés roms

    j’aime pas l’eau de valls , le petit caudillo, me fait trop pensez au vichy

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  5. pmo pmo

    Madame CARLOTTI,la population des”roms” en FRANCE est estimée à 20.000 personnes maxi !!!! J’ai du mal à comprendre qu’une ou des solutions humaines ne puissent être mises en application dans un pays de 67 millions d’habitants environ . Pour être franc,j’ai honte !!!!

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  6. François Levigan François Levigan

    Je n’ai même plus besoin de lire les commentaires de M. Lougarou, alias bien connu du trublion et “politicien” Alain Persia, pour connaître leur contenu :
    – attaques contre Jean-Claude Gaudin, sa tête de turc, parfois à la limite de l’injure publique,
    – attaque contre certaines personnalités de Gauche, comme Patrick Mennucci ou Marie-Arlette Carlotti (comme par hasard, ceux qui veulent rénover la Gauche),
    – encensement de figures de la Gauche héritière d’un fameux système installé et clientéliste, qui a fait la renommée et la risée de Marseille. Ici Samia Ghali, qui rejoint désormais Stéphane Gatignon et Christian Vanneste sur l’utilisation de l’armée pour régler le problème de la délinquance dans les zones excentrées des grandes villes…
    Faites des propositions, Monsieur, au lieu de passer votre temps sur le net à critiquer : votre parti est invisible, vos programmes inexistants. C’est à croire que la Droite dont vous vous réclamez n’a d’autre but que la déroute de l’UMP, du Nouveau Centre, voire d’autres formations… pourtant de votre famille politique.

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  7. Elipriscilyne Elipriscilyne

    Nousq sommes furieux de la fermeture de la clinique bonneveine !

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  8. guido guido

    Que des propres imbéciles! Un oxymore batard! Analysez bien la phrase, si vous le pouvez… Et sous-ministre en plus! Lui confier Marseille.

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