Bailleur social de la Ville, Marseille habitat tente de sortir de l’inertie
Appelée à un électrochoc par la chambre régionale des comptes, la société para-municipale, qui gère 3000 logements, pose une nouvelle stratégie à dix ans, avec 150 millions d'euros d'investissement. Pour la Ville, l'enjeu de remettre en état de marche un de ses derniers outils dans le domaine du logement.
Un immeuble condamné.
10,5 millions d’euros pour relancer une société municipale en difficulté. Un mois après la publication d’un rapport alarmant de la chambre régionale des comptes (CRC), Marseille habitat a dévoilé le montant nécessaire pour accompagner sa stratégie sur 10 ans. Les actionnaires – Ville de Marseille en tête avec 53 % des parts, et les groupes publics Caisse des dépôts et Action logement immobilier – devront se partager cet effort d’investissement via une recapitalisation.
“À notre arrivée en septembre 2020, nous avons tout de suite lancé une reprise en main de cet outil”, retrace la présidente Audrey Gatian, élue municipale (PS), après “une période compliquée, de désengagement” sous la précédente mandature, documentée par la CRC. Cette remise au carré débute par ce qui semble être des évidences : avoir des élus présents lors des conseils d’administration, respecter les règles d’attribution de logements sociaux et celles de la commande publique. Cette “reprise en main” a toutefois été émaillée de changements multiples de direction générale, la titulaire du poste entre mars 2021 et septembre 2022 ayant pris des libertés en s’octroyant un logement et en augmentant seule son salaire.
Pessimiste dans son analyse de la stratégie actuelle de Marseille habitat, validée sous la gouvernance d’Audrey Gatian en 2022, la CRC ne voyait “pas comment la société pourrait changer de rythme de croisière sans moyens, ni réforme profonde de son fonctionnement”. Elle appelait donc la société à “réinterroger rapidement sa stratégie”. Arrivé en mai 2023, le nouveau directeur général Frédéric Pâris a donc eu la lourde tâche de poser un nouveau cap, après plus de dix années de retards et d’objectifs non atteints. “Il s’agit de répondre aux enjeux de la ville et de consolider un outil qui avait été fragilisé.”
“De l’oxygène” pour éponger les pertes des parkings
À commencer par le “mur de la dette” de Protis, cette filiale dédiée aux parkings. En juin dernier, Marseille habitat a soldé les comptes de la société en l’absorbant et mis un premier montant sur cette déroute initiée en 2007 : l’estimation table sur une valeur négative de – 2,2 millions d’euros. En conférence de presse, Frédéric Pâris tente de minimiser le risque : “Sur 700 places, il nous en reste environ 350, dont l’échéance de mise à disposition gratuite arrive en novembre. À ce moment-là, nous mettrons donc en vente ces parkings. La recapitalisation permet de donner de l’oxygène par rapport à ça, nous verrons après les ventes quel est le solde, s’il faut compléter la recapitalisation”, avance-t-il. La chambre régionale des comptes a décortiqué par le menu comment la société avait dû se défaire à de tout petits prix de ces places de parking acquises avec de l’argent public.
“C’est un sujet épineux dont on parle à chaque conseil d’administration depuis septembre 2020″, reconnaît Audrey Gatian, qui déplore “qu’au moment où nous décidons de ne pas augmenter les loyers pour nos locataires, on connaisse des soucis financiers pour des histoires de parkings”.
Produire du logement social, mais à sa petite mesure
“Se recentrer sur le cœur de métier, là est l’idée de la stratégie 2024-2033, pour Frédéric Pâris. Marseille habitat, c’est le bailleur social de la Ville. C’est un petit bailleur mais avec des spécificités, avec un parc dans le diffus, dans le centre-ville, souvent issu d’un habitat dégradé.” Une part des 150 millions d’euros d’investissements prévus sur 10 ans vise donc à remplir cette mission de base en rénovant les deux tiers des 3000 logements du parc, décrit comme “vieillissant” par la CRC.
En parallèle, Marseille habitat entend “prendre sa part” dans les objectifs de création de logements sociaux du programme local de l’habitat en cours de finalisation par la métropole. “On part sur 65 logements par an, ce qui correspond à notre quote-part du parc total, 2 %”, calcule Frédéric Pâris. Le bras armé est donc modeste pour une municipalité qui tente de relancer la production en berne. Mais cette ambition est jugée plus réaliste que les 100 à 200 logements par an promis par les précédentes moutures, non atteints et de loin. “Pour les deux ou trois prochaines années, nous avons déjà engrangé les agréments correspondants à cet objectif (…). Construire 65 logements sur un parc de 3000, cela paraît abordable”, assure le directeur général.
À côté de ce cœur de métier, Marseille habitat va devoir trouver sa place dans un paysage mouvant. “Nous devons être complémentaires des autres acteurs. Nous travaillons avec la métropole, avec la SPLA-IN, dont l’intervention sur l’habitat indigne est très ciblée géographiquement”, rappelle-t-il. Si elle n’entend pas abandonner l’habitat indigne, objet d’un contrat historique avec la métropole, la société se repositionne aussi sur le rachat de rez-de-chaussée commerciaux en centre-ville, en phase avec une politique municipale de revitalisation du centre-ville. Et quand il faut offrir un avenir pérenne au tiers-lieu d’hébergement d’urgence et d’économie sociale et solidaire Coco Velten, Marseille habitat se fait “aménageur” pour son actionnaire principal. Plutôt que la Soleam, société habituelle dans ce type d’opérations, mais aux mains de la métropole. Chacun son “outil”, chacun son bilan.
Commentaires
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“Chacun son “outil”, chacun son “bilan”. Oui, c’est bien exact : chacun se partage allègrement fonctions juteuses, incompétence et évidemment la gabegie pour couronner le tout.
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entre recentrage et dispersion, le cap semble encore un peu flou
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Payan aurait dû profiter de la venue du Pape pour faire ses dévotions à Sainte Rita qui est la patronne comme chacun sait, des causes perdues .
Un miracle ,l’on ne sait jamais.
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