Aux prud’hommes, d’anciens livreurs d’un sous-traitant d’Amazon tentent de se faire entendre

Actualité
le 9 Juin 2023
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Fast despatch, sous-traitant d'Amazon pour la livraison, a été liquidé l'année dernière. Une partie de ses salariés de Bouc-Bel-Air passaient jeudi devant les prud'hommes pour obtenir des rattrapages de salaires. Si beaucoup ont accepté les sommes proposées, certains ont souhaité aller plus loin pour faire reconnaître des conditions de travail qui étaient selon eux dangereuses.

Une dizaine d
Une dizaine d'employés du sous-traitant d'Amazon, Fast Despatch Logistics, s'est rassemblée en août devant l'entrepôt de Bouc-Bel-Air. (Photo SL)

Une dizaine d'employés du sous-traitant d'Amazon, Fast Despatch Logistics, s'est rassemblée en août devant l'entrepôt de Bouc-Bel-Air. (Photo SL)

Il y a un an débutait à Marseille un mouvement de contestation chez les livreurs de colis de Fast despatch. En septembre 2022, l’entreprise créée en 2018 était liquidée par le tribunal de commerce de Bobigny. Ce jeudi 8 juin, les anciens salariés du dépôt de Bouc-Bel-Air de l’entreprise Fast despatch étaient les premiers à passer devant le conseil des prud’hommes d’Aix-en-Provence. Les ex-employés de ce prestataire du géant Amazon avaient saisi cette juridiction pour contester le non-paiement de leurs salaires et l’état jugé dangereux des véhicules qu’ils avaient à conduire. Lors de cette première audience les dossiers de 15 anciens employés ont été examinés, dont la plupart a accepté d’entrer en conciliation avec le liquidateur.

Parmi les anciens salariés de cette première série d’audience, un seul s’était déplacé ce jeudi. “C’est mon avocat qui me l’a rappelé”, avoue le jeune homme en arrivant, en retard. Représenté par Emmanuel Molina, l’ex-livreur s’est vu proposer 6263 euros de dommages et intérêts, ainsi que 1 237 euros en rappels de salaires. Les montants issus des conciliations obtenus pour les autres demandeurs n’ont pas été communiqués. En tout, douze salariés ont accepté les sommes proposées et un autre a vu son affaire renvoyée au 3 octobre en raison d’un “dépôt de plainte pour faux et usages de faux en écriture” dans le cadre de son dossier.

Respect du contrat de travail…

Deux livreurs ont cependant décidé de refuser l’offre et de continuer à poursuivre Fast despatch.Les demandes sont simples : c’est l’exécution du contrat de travail”, introduit leur avocate. Ses clients attendent notamment la régularisation des primes et des indemnités pour les repas. “Certains salariés les ont perçues dès l’embauche et d’autres ont dû attendre sans qu’on puisse donner de raison objective. Il y a une inégalité de traitement”, défend leur conseil.

De son côté, l’avocat des liquidateurs de Fast despatch, Laurent Grisoni, estime qu’“aucun élément ne va dans ce sens” et que “les salariés ne rapportent pas la preuve de l’inégalité de traitement”. “L’AGS a déjà avancé des sommes aux salariés”, avance quant à lui Pierre Lebart pour le régime de garantie des salaires.

… et du droit de retrait

Mais le point crucial de leur dossier est celui de l’usage de leur droit de retrait. Pendant plusieurs semaines, des salariés ont cessé le travail pour dénoncer les cadences infernales et l’état des véhicules, s’estimant directement mis en danger par les négligences de l’employeur. Jugeant que ce recours au droit de retrait n’était pas valable, Fast despatch avait retenu sur les salaires les jours non travaillés.

“L’exercice du droit de retrait est reconnu en cas de dénonciation d’un risque ou d’un danger grave et imminent”, rappelle l’avocate des livreurs. Et pendant cette période, l’inspection du travail est venue”. Consulté à l’époque par Marsactu, un courrier de l’inspection du travail résultant de cette visite faisait état de plusieurs manquements. Avec comme exemples des véhicules avec des plaquettes de frein “particulièrement usées” et des rétroviseurs ou pare-chocs fixés au scotch. 

Mon client était susceptible d’utiliser ces véhicules, fustige l’avocate. L’employeur n’avait pas à exercer une retenue de salaire sur ce droit de retrait.” En raison de ces conditions de travail, les deux livreurs demandent maintenant au liquidateur 5000 euros chacun de dommages et intérêts pour manquements aux obligations de sécurité de Fast despatch. Ils évoquent aussi l’absence de visites médicales préventives ou encore de vérifications des extincteurs. “Il ne peut pas être contestable que ces éléments sont susceptibles de mettre en danger la santé des salariés”, conclut leur représentante. “Ils nous ont mis dans un pétrin lamentable. Certains ont perdu leur appartement. Alors qu’on roulait dans des cercueils ambulants pour eux”, résume, amer, un ancien salarié qui n’était pas à l’audience ce jeudi.

Pas de proposition de reclassement

L’autre point attaqué, au cœur des conflits avec les géants du commerce en ligne, est le reclassement des salariés après la liquidation judiciaire des sous-traitants. Le mandataire aurait dû faire une recherche sérieuse et réelle de reclassement. Il y a eu un manque de loyauté”, plaide leur avocate. Du côté des liquidateurs on affirme avoir effectué “toutes les recherches”, mais “en absence de propositions il n’a pas été possible de distribuer des offres”. Amazon n’a pour sa part jamais fait de geste en direction des salariés ni soumis d’offre de reclassement. Le nom de l’entreprise n’a jamais été prononcé au cours de l’audience de ce jeudi. 

La décision des prud’hommes sera rendue en septembre. Elle sera particulièrement scrutée, car pour le site de Marseille l’audience a été reportée à février 2024 et d’autres dépôts Fast despatch à travers la France attendent aussi leur tour. Au président de la séance du conseil des prud’hommes qui s’interrogeait sur le faible nombre de dossiers présentés ce jeudi, l’avocat des liquidateurs a annoncé : “Vous serez sans doute saisis d’ici peu par une nouvelle série de salariés.”

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