Écologie urbaine à Marseille

Qu’est-ce qu’une écologie urbaine ?

Billet de blog
le 10 Sep 2016
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Nous souhaitons engager ici une série de propos consistant dans la recherche de ce que l’on pourrait appeler une écologie urbaine à Marseille. Il s’agit d’une approche de la ville et de la politique urbaine qui a trop longtemps été négligée à Marseille, et qui pourrait constituer une approche renouvelée de la politique de la ville dans la ville et dans la métropole.

Il faut commencer par se rappeler le sens du terme même, écologie. Imaginé au XIXème siècle, au moment de l’émergence des critiques contemporaines de l’économie et de la société inscrites dans un projet global de renouvellement du politique, écologie est issu de deux termes. « Logie » désigne, à partir du grec ancien logos, le discours et, au-delà, la rationalité. En ce sens, le discours sur l’écologie s’inscrit dans une logique qui cherche à élaborer une rationalité du politique, cette rationalité se fondant sur une exigence critique. Ce qui est propre à l’écologie, c’est l’autre partie du terme, « éco », qui est, finalement, le même terme que celui que l’on retrouve dans « économie ». Éco est issu d’un radical du grec ancien, oik, que l’on retrouve, d’abord, dans le mot oikia, qui désigne la maison, l’endroit où l’on habite.

Cela nous permet de mieux comprendre le terme écologie, que l’on a tendance à réduire à la préoccupation politique de l’environnement, et, en particulier, de la préservation de la nature, menacée par l’industrialisation et le libéralisme. C’est cette menace qui a conduit l’écologie à un courant politique fondé sur la critique du libéralisme, et c’est la raison pour laquelle, dans tous les pays où elle est présente, l’écologie politique est plutôt une orientation de gauche. Mais écologie ne saurait se réduite à la question strictement environnementale : oikia, c’est davantage : ce terme désigne l’espace quotidien, l’espace de la vie ordinaire. Il ne s’agit pas de la maison au sens d’un espace privé, il s’agit de la maison au sens d’un espace de la sociabilité ordinaire. La différence entre oikia et agora, par exemple, autre espace de la cité, c’est que l’agora désigne l’espace du débat et des identités politiques, tandis qu’oikia désigne l’espace du quotidien, en quelque sorte avant que l’exigence du quotidien ne s’inscrive dans un projet proprement politique.

C’est qu’il devient intéressant d’avoir un regard sur un autre terme des langues anciennes, qui nous permet de mieux comprendre oikia : il s’agit du latin vicus, dont un dérivé, vicinus, est l’étymologie du mot français voisin. Tous ces termes désignent, ainsi, l’espace proche, l’espace des voisins, de ceux qui partagent le même lieu que nous, de ceux qui habitent le même espace que nous. L’écologie désigne, ainsi, la politique ordinaire, ce qui la distingue des grands projets politiques qui engagent l’État et qui engagent les relations avec les autres pays : l’écologie désigne la politique de l’espace proche et du temps quotidien. L’exigence écologique vient nous rappeler que le politique ne se fonde pas seulement sur les grands projets et sur les grandes idées, sur les pouvoirs, sur les acteurs et sur les partis politiques, mais qu’elle consiste aussi dans l’expression politique des projets quotidiens, de l’ordinaire de la cité, de son espace et de son temps.

Le projet politique d’une écologie urbaine consiste, ainsi, à exprimer dans des identités et dans l’imaginaire d’un projet, la préoccupation de l’ordinaire de la ville : finalement, l’écologie urbaine vient nous rappeler que la ville est un espace que nous habitons avant même de l’aménager et de le construire. En élaborant une écologie urbaine, on articule la citoyenneté urbaine et l’espace de la ville, l’imaginaire politique du projet urbain et la réalité quotidienne de la vie en ville. Même s’ils en font partie et s’ils ont contribué à sa fondation, il ne faut pas réduire l’écologie politique à la prise en considération d’impératifs environnementaux, mais il s’agit de reconnaître ces impératifs comme des fondements des institutions, des pouvoirs et de la citoyenneté.

Dans le projet d’une écologie urbaine, la critique politique et le discours de la politique de la ville articulent pleinement la question de la fonctionnalité et celle du sens, les impératifs de l’économie politique et ceux de l’habiter, qui devient, de cette manière, un des enjeux fondamentaux de la politique de la cité. Sans doute ne s’agit-il pas seulement de la ville, mais d’une autre façon de penser le politique et de mettre en œuvre une vie politique réelle, située au-delà des pouvoirs, des débats, des élections et des institutions : une vie politique qui tienne compte du fait que le politique se vit.

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