“Ô ministres intègres ! Conseillers vertueux !…”
« Ô ministres intègres ! Conseillers vertueux !… »
C’est par ces mots ironiques que Victor Hugo, en 1883, amorce la célèbre tirade de Ruy Blas qui dénonce la corruption et l’incurie de la noblesse et du pouvoir espagnols à la fin du XVII siècle.
Nos sociétés ont, depuis, profondément évolué vers une plus grande transparence et un contrôle inimaginables à l’époque.
Il n’en demeure pas moins que la délinquance financière, le détournement de biens publics, la prise illégale d’intérêt, la favoritisme, le recel d’abus de biens sociaux,… restent des réalités que la justice nous rappelle régulièrement.
Toujours condamnables, ces « errements » le sont plus encore lorsque le coupable est élu ou dépositaire d’une mission de service public. Sans les confondre, l’honnêteté et la vertu vont de pair, en particulier dans l’utilisation des biens publics. Les pays du nord de l’Europe l’ont bien compris qui appliquent une intransigeance pouvant entraîner la démission d’un ministre qui se sert de sa carte de crédit ministérielle pour s’acheter des confiseries ou utilise son chauffeur de fonction pour aller passer le Week end dans une résidence secondaire… A l’exemple de la Suède où la modestie est de mise et les dépenses des membres du gouvernement consultables sur internet !
L’indice de perception de la corruption établi par Transparency International situe la France au 23ème rang mondial sur 180. En contradiction évidente avec une nation qui se veut exemplaire en matière de droits de l’Homme et de démocratie.
La moralisation de la vie publique est devenue un impératif qui conditionne le rétablissement de la confiance entre le peuple et ses élus. La majorité actuelle l’a bien compris en choisissant d’y consacrer la première loi de la législature dès septembre 2017. Peut-être encore insuffisante dans son périmètre, celle-ci n’en demeure pas moins une avancée réelle permettant d’interdire la poursuite de comportements dont l’ancienneté et la fréquence nous en avaient fait oublier la gravité.
Cette prise de conscience nationale doit maintenant se traduire d’une part dans les comportements des élus et comme critère de jugement des électeurs et, d’autre part dans une application ferme et rapide de la Loi (le délai moyen entre la commission d’une infraction et le prononcé d’une décision de justice définitive est de 7 ans). Elle doit aussi « irriguer » nos régions et nos départements où la force des habitudes et le clientélisme nous font malheureusement relativiser les comportements malsains de quelque élus ou chefs d’entreprises.
Il y a bien sûr, parfois, de la fumée…sans feu. Mais cette possibilité ne peut tenir devant la répétition.
Dans plusieurs villes du département, dont Aix en Provence, plusieurs décennies d’observation permettent difficilement de croire aux coïncidences ou aux complots politiques répétés. Condamnations judiciaires, affaires récurrentes, alertes et constats ponctuels semblent borner des « petits arrangements entre amis » associant des acteurs politiques ou économiques qui s’exonèrent de la moralité, parfois au prétexte d’une bonne santé financière de la cité.
En nombre d’affaires jugées et portées sur la place publique, la Région Sud se classe deuxième sur 33 (après l’Ile-de-France), et les Bouches du Rhône sont dans le top 5 des départements (Métropole et Outre-mer confondues). Regrettable palmarès probablement dû aux effets combinés du pastis et du soleil qui, dans les deux premières villes du département, font par exemple oublier des comptes ouverts en Suisse ou confondre proximité affective et compétences professionnelles…
La condamnation sans retard ni faiblesse de la minorité d’élus coupables de faits délictueux dans l’exercice de leurs fonctions est une preuve de la bonne santé de notre système politique ; toutefois l’application de la Loi n’est pas suffisante pour accompagner une société plus vertueuse. L’inéligibilité prévue par la Loi, qui peut être perçue par l’électeur comme une limitation de sa liberté de choix, ne doit-elle pas aller de pair avec une information (une éducation ?) de l’électeur de telle sorte qu’il ne soit plus tenté d’apporter sa voix à un délinquant ?
Les prochaines échéances municipales seront l’occasion de rappeler à une poignée d’élus ou leaders politiques, quelles que soient leur énergie ou leurs qualités de gestionnaires, que la chose publique est exigeante et que son exercice engage à servir la collectivité et non pas…à servir ses intérêts.
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