Mes châteaux d’If: Vivre en livre.

Billet de blog
le 22 Mai 2024
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Mes châteaux d’If: Vivre en livre.
Mes châteaux d’If: Vivre en livre.

Mes châteaux d’If: Vivre en livre.

Un tigre de papier s’est échappé de sa cage et dévore des chroniques. José Rose signe un hommage sous forme de découverte des niches du livre depuis sa disparition. Si  l’on sait que le livre vit dangereusement, on connait moins ses cachettes. Le livre qu’on a cru un jour mort à l’arrivée du Tout internet, comme il y eut un tout à l’égout, a trouvé ses refuges partout en ville et en campagne. José Rose, fervent défenseur du livre qu’il aime sans doute religieusement s’est pris pour un livre. Mais un bouquin en ville. On le rencontre alors à la bibliothèque, errant de thèques en théques, aux archives, ou traine Yves, ou à la Girafe où on trouve peu de livres de fafs. José Rose évoque lui aussi  l’écrivain créole Patrick Chamoiseau et son livre  Frère Migrants ( décidément Chamoiseau est à la mode) dans un colloque. L’exil et son royaume au cœur des livres sont un thème cher à l’auteur.

Chaque chronique débute par une rime. “ Collé à même le mur, je n’ai pas fière allure“. José nous rappelle cette librairie d’occasion nommé La Faute à Voltaire qui voulait essaimer la lecture. Il revient sur l’opération Lire en short dont l’objet était la lecture à la plage. Heureux temps car désormais il vaudrait mieux installer des bornes Ouifi sur les récifs tant les estivants ont du mal à décrocher des écrans. C’est vrai que la mer, c’est tellement plat! Comme les écrans, me direz vous.

Le livre de José, lui, est tout embusqué, il est caché, dans les bus, dans la rue, sur une serviette de plage. José le débusque et nous raconte une histoire. Méfi, si vous ramassez un livre, regardez bien autour que José ne soit à vous regarder et à inventer une histoire.

Chaque amateur de livres a connu ce moment de grâce: Quelqu’un vous appelle pour vider une bibliothèque. Une fois, c’était chez un vieux professeur de français qui achetait compulsivement des livres chez Maupetit sans même les ouvrir. Pas de bol, il n’achetait quasiement que des livres d’écrivains de droite. J y’ prenais des auteurs allemands, italiens comme Brancati ou Moravia et Pays Perdu de Pierre Jourde. J’y débusquais tout neuf le livre de Charles Maurras sur les Jeux olympiques. Mauvais comme toute son œuvre.

Une autre fois. Une bibliothèque d’un CE d’entreprise vidait son stock de livres abandonnés. Un trésor pour moi. J’ y trouvais la Prise de la Moncada par Fidel Castro, Wilfred Burchett fustigeant le régime australien, un vieux Maspero, Journal de Bolivie de Che Guevara expliquant la guérilla, ou une défense de l’Occitan et de l’école buissonnière. Toutes les années 70 et leur vent de liberté flottaient vers moi, me transportait. On m’avait tout caché. Normal, tout était rangé dans des rayons poussiéreux d’une grande entreprise du pneu. Heureusement une seconde vie reprenait pour eux. Le Che était ressuscité, Fidel toujours jeune et j’allais pouvoir comprendre pourquoi l’occitan était si mal traité à Brive.

Un conseil: N’hésitez jamais à vous séparer d’un bon livre. Les milliers de boites à livres, les rebords de fenêtres sont des refuges pour cette espèce. Les livres meurent souvent dans nos bibliothèques. Seuls, ils ne côtoient qu’un titre de chaque coté. Imaginez Nada de Manchette coincé entre un Musso et un Barbara Cartland.

Prenez exemple sur mes voisins qui ont vidé la bibliothèque d’un appartement récemment acheté. Ils ont déposé une dizaine de cartons sur la chaussée. Et ces orphelins, abandonnés depuis des années ont trouvé preneur. J ‘y ai trouvé un Simenon envoutant, Le déménagement. Je n’ai pas pu m’empêcher de penser qu’ils auraient du le garder. Le lendemain est apparu Ernest le Rebelle, joué par Fernandel,  du génial auteur du Caporal Épinglé, Jacques Perret.

Il y a quelques mois, la Girafe m’avait tendu Rue du prolétaire Rouge de Nina et Jean Kehayan. Je me suis empressé de lire cette référence sur le stalinisme au temps de Brejnev. Peu après je rencontrais la pimpante Nina qui vit toujours à Marseille. Les livres voyagent et nous font voyager. L’ animal, si je me souviens bien m’a souvent glissé un René Fallet. Quelle langue que ce parler des années d’après guerre et ces formules et réparties sur la vie. Lisez au moins La grande ceinture.

J’ai du accumuler pas moins de quatre exemplaires de Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France de Pierre Goldman.Impossible de me séparer de ce texte. J ‘ai découvert dans les rayons de Claudine, ma vieille et tendre amie, Corps à Corps d’ Alain Dreuilhe, un des premiers livres sur les victimes du SIDA. Ce livre n’a pas vieilli. Raconté comme  la guerre d’un soldat contre la maladie, il reste un grand livre qui devrait être réédité. A une époque où les bouquineries comme les Frères de la Cote, cours Julien, pullulaient littéralement, je passais mon temps à chercher Ringolevio d’ Emmett Grogan. Un jour dans une petite échoppe vers Bayonne, je tombais sur la version poche. Oh joie. Quelques mois plus tard, Gallimard rééditait le bouquin.

Livres en ville. José Rose. Gaussen Editeur. 2024. 16 euros.

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