Mes châteaux d’If: Ce que je sais de Rokia.

Mes châteaux d’If: Ce que je sais de Rokia.

En recevant ce premier album édité chez Futuropolis, je me suis dit: “ Oh encore un album sur les migrants. Décidément c’est la mode, les films,( Green Border a l’air d’être bien flippant, mon préféré va aux nageuses syriennes), le théâtre, les romans, stop! rien n’est plus ringard que ce sujet.” Voyez la générosité du gars. On peut passer à autre chose, une autre guerre, un autre massacre avec des armes frenchies, comme d’habitude.

Puis surtout j’ai le sentiment que les Français ne sont pas plus accueillants avec les étrangers, ni compréhensifs, puisque pas une semaine ne passe, sans qu’un déséquilibré en plantant un couteau criant Allak Akbar, ne serve les plats au R.N ou à ses séides, les autres partis sécuritaires ou patriotes. Si en plus, le narvalo plante un juif, Nétanyou lui balance trois tonnes de bombes…mais sur Gaza. Faut bien passer sa colère quelque part. Mais, je le redis, toujours avec des munitions bien de chez nous, des armes made in France. C’est ce qu’on fait de mieux, bien avant le champagne ou Alain Delon.

Donc c’était mal parti mais…

Finalement, le dessin de Francesca Vartuli fait bien les choses. La lumière et les contours agréables de ses personnages, la peinture de la Rochelle ou des Alpes rendent le sujet paisible. Les ocres sont magnifiques et la variation des couleurs est habile.

L’intrigue qui commence avec l’accueil d’un jeune femme débarquée du Liberia, pour cause d’ Ebola, colle à la réalité des familles d’accueil qu’on trouve en France. Mais le scénario va plus loin en montrant comment il peut être difficile d’accueillir chez soi. Le silence de Rokia est pesant pour Marion qui tente tout pour établir des ponts avec sa jeune protégée. La jeune réfugiée est aussi une jeune fille. Silencieuse, elle commencera à porter le voile et inquiétera la famille. Amoureuse d’un jeune homme vivant en Allemagne, sa vie va connaitre un chamboulement avec sa réadmission en Italie selon les accords de Dublin. Non Dublin n’est pas la capitale de l’Italie. (Avis à ceux qui pompent.)

Si le début de l’histoire est assez lent, subitement tout va s’accélérer. On s’arrêtera donc sur cette bande dessinée qui vaut carrément la détour. Ouvrira-t-elle les yeux des plus hermétiques de nos concitoyens. Mystère? Faudrait déjà qu’il ferment leurs écrans.

Bonus: Ce récit présente le double avantage de parler du parcours d’une femme. Bon nombre de récits comme l’excellent Partir et Raconter de Bruno Le Dantec. sont le récit d’hommes.

Ce que je sais de Rokia. Futuropolis. 2024. Quitterie Simon/ Francesca Vartuli.