Loyer du stade Vélodrome : les Marseillais passeront à la caisse

Billet de blog
le 4 Nov 2016
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Le président de l’OM vient de doucher les espoirs de la municipalité d’obtenir une augmentation substantielle du loyer qu’elle perçoit auprès du club pour l’utilisation du stade Vélodrome. Dans cette affaire, Jean-Claude Gaudin a fait preuve de beaucoup de légèreté et les marseillais auront, une fois de plus, à payer de leur poche les conséquences d’une gestion incompétente.

Jean-Claude Gaudin et Frank Mac-Court lors de la conférence de presse à l
Jean-Claude Gaudin et Frank Mac-Court lors de la conférence de presse à l'hôtel de ville (photo : B.G.)

Jean-Claude Gaudin et Frank Mac-Court lors de la conférence de presse à l'hôtel de ville (photo : B.G.)

Lors de l’engagement le 29 août dernier de la phase de négociations exclusives pour la vente de l’OM entre Margarita Louis-Dreyfus et Frank McCourt, Jean-Claude Gaudin a fait le choix de figurer en bonne place sur la photo et d’endosser le costume du marieur pour tirer avantage d’un succès annoncé. Ce faisant, le maire a privilégié la réussite de la transaction sans pour autant jouer les rares mais réels atouts que possédait encore la Ville pour exiger que soit négocié dans ce cadre un rééquilibrage de ses relations financières avec le club. L’interview du président de l’OM publiée le 29 octobre dernier, où il tire à boulets rouges sur la perspective d’augmentation du loyer, montre que la Ville a attendu l’aboutissement de la transaction sans jamais chercher à y faire valoir ses intérêts.

Dette abyssale

En 2013, la Chambre Régionale des Comptes (CRC) a chiffré le coût net de la dette contractée par la Ville pour la rénovation du stade vélodrome à 551 millions d’euros. C’est, à titre de comparaison, le tiers de la dette déjà abyssale de la Ville de Marseille. Cette somme est évidemment difficilement supportable pour des finances municipales exsangues, alors même que les travaux du stade n’ont été au fond justifiés que parce que l’OM en est le prestigieux club résident.

Pour alléger cette lourde facture, remboursable sur 30 ans, la CRC a estimé dans son rapport que l’usage qui est fait du stade par le club justifierait non seulement de doubler le loyer actuel pour qu’il atteigne 8 millions d’euros par an, mais aussi d’y ajouter une part variable assise sur son chiffre d’affaires. L’équation est simple : si le loyer de l’OM était augmenté à la hauteur de ce que la CRC estime être une juste rémunération de l’usage du stade, la Ville percevrait du club près de 200 millions d’euros supplémentaires au cours des trente prochaines années.

Menace, chantage et petit mensonge

Reste-t-il un espoir de renégocier le loyer à la hauteur de la préconisation de la CRC ? Du côté de l’OM en tout cas plus rien ne l’y oblige et le nouveau président du club n’a pas hésité à pousser son avantage en maniant menace et petit mensonge. Menace à peine voilée quand il prend à témoin un soi disant “peuple marseillais”  qui exigerait que l’OM investisse dans des joueurs plutôt que dans une hausse du loyer. Les supporters de l’OM érigés en lobby électoral, la ficelle est un peu grosse mais sans doute efficace tant une large majorité de mes collègues, élus de gauche comme de droite, les craignent lorsqu’ils surgissent dans le débat public écharpe autour du cou. Petit mensonge quand il affirme par ailleurs que le loyer de l’OM est “déjà le plus élevé de France”. Au moins deux clubs de ligue 1 payent plus pour une infrastructure moindre en capacité comme en équipements dédiés. Et parfois même à des conditions bien plus contraignantes comme c’est le cas du club des Girondins de Bordeaux qui, contrairement à l’OM, a une obligation de louer pour les 30 prochaines années.

Cette dernière prudence, la municipalité Gaudin n’y a même pas pensé avant de précipiter la Ville dans le projet de rénovation du stade. Résultat, elle restera longtemps soumise au chantage, déja manié par l’OM en 2014, d’un déménagement du club dans un autre stade. Cette hypothèse ne fait plus rire aujourd’hui que ceux qui n’ont pas étudié de près les clés du succès financier de Frank McCourt dans le domaine sportif.

Incompétence municipale à tous les étages

Faut-il donc s’étonner de la Berezina qui s’annonce ? Pas si l’on songe que, au cours des vingt dernières années, ni Jean-Claude Gaudin ni ses adjoints successifs n’ont jamais développé le niveau de rigueur et de prudence qu’une collectivité publique se doit d’avoir dans ses relations avec des entités privées. Pour ne prendre que les affaires liées au sport, souvenons nous du projet dispendieux et heureusement avorté d’accueil de la Coupe de l’America en 2002, du tapis rouge déroulé en 2007 devant la candidature d’un escroc au rachat de l’OM, du montant sous-estimé que le maire donna de la rénovation du stade Vélodrome avant qu’il ne l’attribue finalement pour plus du double, du gouffre financier du Palais de la Glisse, des piscines municipales laissées à l’abandon ou encore du récent épisode du naming qui devait être selon lui un moyen supplémentaire de réduire la charge du stade pour la Ville, et qui ne lui rapportera finalement rien. Pensons enfin, pour l’avenir, à ce qui constituera sans doute l’apothéose de ce bilan calamiteux, le label de “capitale européenne du sport 2017” qui, en l’absence de toute reconnaissance officielle, privé de subventions publiques et de sponsors de poids, promet de nouveaux réveils douloureux pour les contribuables marseillais.

La frustration face à tant d’inconséquence, les élus de l’opposition la ressentent comme tous les marseillais, de plus en plus nombreux à penser qu’il faut s’atteler enfin à la préparation d’une alternance politique large et crédible, capable de mettre fin à ce grand n’importe quoi, et qui aura pour premier projet d’instaurer à Marseille une gestion municipale compétente et dédiée au bien commun.

Laurent Lhardit, Conseiller PS des 4e et 5e arrondissements, Marseille

Commentaires

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  1. Renardsauvage Renardsauvage

    A quel titre les contribuables marseillais devraient ils payer pour le stade. Avec les sommes astronomiques qui circulent dans ce milieu, il est impensable que les quelques malheureux ponctionnés jusqu’à la moelle paient. Personnellement je ne m’intéresse pas du tout à ce jeu. Cela de plus ne relève en rien de l’intérêt général mais d’intérêts privés et même très privés. Alors comme le dirait le maire : arrêtons de dire et de faire n’importe quoi. Moi je ne veux plus participer à cette gabegie qui

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  2. Renardsauvage Renardsauvage

    N’a plus de nom, un gouffre, une abysse, un désastre !

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  3. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Moi non plus, je ne veux pas payer pour ce stade qui n’est pas d’intérêt général, n’apporte rien à la qualité de la vie des Marseillais et, de surcroît, a été rénové ou reconstruit deux fois en quinze ans. Dans une ville pauvre où la fiscalité locale est concentrée sur une partie seulement de la population, et donc extrêmement lourde, l’utilisation de l’argent du contribuable devrait être particulièrement mesurée.

    Mais la magie du monde politique, c’est qu’il échappe aux contraintes économiques : ce sont les contribuables qui paient les erreurs, dont les auteurs ne sont jamais sanctionnés, et quand il n’y a plus d’argent, il y en a encore, il suffit d’augmenter les impôts.

    Dans un article sur les nouveaux stades de l’Euro 2016, l’attitude de la ville de Marseille a été qualifiée de “surréaliste” par un spécialiste des PPP qui constatait l’absence d’accord avec l’OM sur le montant du loyer préalablement à la conclusion du contrat avec Bouygues (http://www.bastamag.net/Euro-2016-de-nouveaux-stades-trop-grands-et-trop-chers-qui-beneficieront-d). Grâce à l’incompétence de l’équipe municipale, nous sommes engagés jusqu’en 2045 (donc pendant cinq mandats municipaux !) à financer collectivement ce monument au détriment d’autres dépenses plus utiles et plus urgentes dans cette ville.

    Mais si la CRC estime à 8 millions d’euros la part fixe du loyer annuel “normal” de l’OM, cela ne veut-il pas dire que, si ce loyer n’est pas atteint, la différence constitue une aide publique illégale au profit de l’OM ?

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  4. LaPlaine _ LaPlaine _

    Incompétence, impéritie, incurie…tout çà ensemble ma foi.

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  5. Laurent Malfettes_ Laurent Malfettes_

    Bravo à l’auteur, tout est à peu près dit. J’ajouterai deux choses :

    1) Pour avoir détourné 740 000 euros d’argent public (ce qui est mal et personne ne songerait à passer l’éponge) Sylvie Andrieu a écopé de 4 ans de taule et d’une peine d’inéligibilité. Pour cramer bêtement, aux seuls profits apparents du groupe Bouygues (Arema) et d’un milliardaire américain (McCourt), la modique somme de 3 ou 400 millions d’euros en engageant les cinq prochaines municipalités, de quelle manière les coupables (pas seulement responsables) de cette gabegie sont-ils punis ?

    2) La piste ouverte par Électeur du 8e (sur l’aide publique illégale) est très pertinente. Explorons-la un peu. La loi Buffet sur les clubs de sport professionnels prévoit un plafonnement des subventions par les collectivités territoriales. Pour un club comme l’OM : la Ville + le CD + la Région n’ont pas le droit de verser, ensemble, plus de 2 ,3 M€ par an (et encore sous réserve de contreparties données par le Club sous forme d’actions d’intérêt général, sans quoi le plafond est ramené à 1,6 M€). Supposons par exemple que le quota de la mairie soit de 1M€. En consentant un rabais de 4M€ sur le loyer, le plafond est dépassé d’au moins 3M€ / an. Ce constat pourrait obliger un tribunal, s’il était saisi, à constater l’infraction. Conséquences ? En théorie, j’en vois au moins trois possibles, mais il y en a sans doute davantage :

    a/ Réintégration de ces 3 M€ dans le résultat fiscal de l’OM. Cela peut faire un peu de bien si le club gagne de l’argent. On y croit on y croit.

    b/ Rejet des comptes par l’autorité de contrôle de la LFP (La DNCG). En théorie toujours, la DNCG a le pouvoir de reléguer administrativement un club si elle juge que ses comptes ne sont pas sincères. On rigolerait bien.

    c/ Il faudrait faire cesser l’infraction. Et l’OM devrait enfin payer (intérêts et principal) !

    Ceci étant dit en se limitant au terrain administratif… Alors, cher Laurent Lhardit, que comptez-vous faire ? Attaquer l’OM au vu et au su des supporters qui sont aussi, pour certains d’entre eux, vos électeurs ?

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    • Laurent Lhardit Laurent Lhardit

      Notre devoir est de défendre les intérêts des citoyens, pas des supporters. Et lorsque ces citoyens sont des supporters, de tenter de les convaincre sur la base d’argument qui qui sont ceux de l’intérêt général.
      Et oui, pour ma part, je considère que l’OM a des devoirs envers la ville qui qui l’a encore sauvé il n’y a pas encore si longtemps.
      Mais je n’oublie pas non plus les responsabilité de la municipalité, c’est elle qui est censée défendre les intérêts des Marseillais et c’est elle qui est entièrement responsable de la situation de faiblesse dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui dans cette affaire.

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    • Laurent Malfettes_ Laurent Malfettes_

      Merci d’avoir fait l’effort de répondre mais je ne vous cache pas ma déception. Alors que je vous demande comment vous entendez agir concrètement pour rechercher les responsabilités et faire cesser un gaspillage qui n’est pas inéluctable, vous répondez par des formules vagues et peu contraignantes telles que “il faut convaincre” et “je n’oublie pas les responsabilités de la municipalité”. Mais qu’elles est la responsabilité de l’opposition dans cette affaire ? Qu’a t’elle fait pour empêcher cette mascarade ? Et maintenant, ne dispose t’elle pas de moyens pour (re)agir ? N’est ce pas tout simplement son devoir ? Attend elle, comme il y a deux ans pour les temps d’activités périscolaires, que les citoyens prennent l’initiative et obtiennent eux mêmes une condamnation de la ville pendant que les conseillers socialistes roupillent ou s’entredechirent ? Et si vous laissiez tomber la langue de bois 5 minutes ? Ici c’est Marsactu 😉

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    • Laurent Lhardit Laurent Lhardit

      @ Laurent Malfettes
      Ce sujet est à l’ordre du jour d’une réunion de notre groupe le 17 novembre. J’y porterai, comme d’autres, des propositions d’action sur le sujet. Et je pourrai alors vous dire ce qu’il en est.
      Je suis le premier à être critique lorsque le politique ne fait pas son travail, mais vous faites en l’occurrence un mauvais procès à notre groupe sur le sujet des écoles. Nous avons été, Anne Levy en tête, toujours sur le pont concernant l’état des écoles et ce bien avant que le miracle médiatique n’opère, car c’est bien la Une de Libé qui a entraîné une réaction en chaine des medias, puis enfin une réaction de la mairie. Et oui il y a eu des actions déterminantes menées par des associations, et nous les avons soutenues.

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    • Laurent Malfettes_ Laurent Malfettes_

      Merci @Laurent Hardy. J’attends donc avec intérêt le résultat de cette réunion qui, je l’espère, conduira votre groupe à prendre des initiatives et à passer à l’action au-delà des positions de principe. Les moyens d’agir pour changer la donne existent, n’écoutez pas ceux qui vous disent que c’est impossible.

      En ce qui concerne les écoles, je ne conteste pas la sincérité et l’engagement de Annie Lévy que je connais et estime. Mais il faut bien constater que ses prises de position ne pèsent pas grand chose face à un maire, vieux routier de la politique, qui transige uniquement lorsque le rapport de forces lui est défavorable. C’est ainsi le cas, on l’a vu nettement, lorsqu’un juge le rappelle à l’ordre ou quand la presse nationale braque les projecteurs sur ses manquements. La critique publique de son action dans l’enceinte du Conseil municipal est certes nécessaire, mais elle reste un simple jeu de rôle. Une posture. Elle ne suffit plus car elle est dépourvue d’efficacité réelle face à une administration à la fois toute puissante, arrogante et finissante. Pour ma part je rêve d’une opposition qui préparerait sérieusement la relève. Elle ferait preuve d’une réelle combativité en employant toutes les armes à sa disposition et ne se résignerait pas à regarder passer les trains sous prétexte qu’elle est minoritaire. En ce jour d’élection de Donald Trump, quatre mois après le “brexit” et alors que les policiers français s’affranchissent de leurs syndicats pour manifester dans les rues, chacun doit prendre conscience qu’une base exaspérée peut partout, à tout instant, déborder sans ménagement ni préoccupation de ses propres intérêts, une élite jugée au mieux incompétente, au pire corrompue.

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    • LaPlaine _ LaPlaine _

      Les commentaires de Laurent Malfettes sont tout à fait le reflet des échanges que l’on constate sur les réseaux sociaux. De plus en plus d’habitants grondent face à cette gestion “bananière” de la ville mais ne trouvent aucun relai auprès d’une autre classe politique et surtout ne peuvent même pas envisager d’alternative et c’est très frustrant et usant. Sur les dossiers de la propreté (de plus en plus scandaleux) et bien d’autres l’opposition est inaudible voire inexistante. Peu ou pas de communication, peu ou pas de relais dans la presse, des élus nationaux qui prennent la parole deux fois par an sur un sujet de circonstance. Les débats en CM sont effectivement limités aux jeux de rôles et aux “plaidoiries” du sieur Moraine, cela ne fait avancer aucun dossier et ne perturbe aucunement la somnolence du Grand Timonier.

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    • neomars neomars

      Les rapports de la cour des comptes qui restent lettre morte faute de plaignants sont aussi un phénomène assez désespérant pour les citoyens.
      En effet les seuls “fait d’armes” qui m’ont marqués récemment sont ceux de citoyens héroïques: maitre Candon qui met fin au “fini parti”, un collectif de parents que maitre Candon défend pour rappeler le Maire à son obligation de ne pas prendre sa population en otage, une institutrice pour dénoncer l’état des écoles …
      Quant aux supporters de l’OM, ils y en a de moins en moins qui viennent au stade, ils viennent souvent de trop loin pour être des électeurs, il s’agit plus d’un mythe que d’une réalité. Annoncez aux marseillais -15% sur les taxes d’habitation et foncière, sans pseudo-guerre civile à chaque “grand match” et je pense que vous gagnerez des suffrages, des vrais, ceux d’électeurs qui se rendent plus sûrement aux urnes qu’au stade.
      On compte sur vous !

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  6. Valentine Verne Valentine Verne

    Sur ce sujet ce qui m’interroge le plus c’est pourquoi le financement d’un stade de foot est municipal au lieu d’être métropolitain (au regard de la fréquentation notamment auprès des abonnés). Je vis à marseillais, j’aime aller au stade et je paie le même tarif que les spectateurs ne venant pas de Marseille.
    idem pour les piscines, pour ma part je vais à cassis au regard de l’offre locale… toutefois cette piscine a été financé par MPM…Comment décide t-on qu’un établissement sportif peut avoir une vocation intercommunale et un autre non? quelle est la cohérence ?

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  7. Renardsauvage Renardsauvage

    Comme au temps des Romains, on donne des jeux au peuple pour les distraire de la vie de la cité et les détourner de sa gestion. Assez de tout cela, mairie, métropole, pays, conseil départemental, conseil régional, prefecture, État. Oů se situe la prise de décision, qui sont ces nouveaux potentats. On en a plus qu’assez d’entendre n’importe qui donner des leçons, la gauche est pourrie, la droite aussi. L’Europe nous a affaiblis, nous a fait perdre notre identité et les jeunes connards et les vieux cons ( Brassens les vieux cons d’aujourd’hui sont d’anciens jeunes cons) d’y aller de leurs promesses. Alors qu’un maire presque sénile ou qui le deviendra ait peur d’un Yankee inculte qui vient avec ses eurodollars nous faire la nique, c’est trop. S’il veut le stade qu’il paie et s’il n’est pas content qu’il aille voit Trump!

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