Se déplacer dans Marseille
La politique marseillaise des transports et des déplacements
À propos de l’inauguration de la rocade L 2 par le président de la République, nous avons engagé une réflexion sur la politique des transports et des déplacements à Marseille. Nous y revenons aujourd’hui.
En évoquant la venue de F. Hollande à Marseille pour inaugurer la rocade L 2, nous avons abordé la question de la politique des transports à Marseille et dans la métropole marseillaise. Il importe, en effet, aujourd’hui, de repenser cette politique des déplacements pour donner une véritable consistance à ce que l’on peut appeler le fait métropolitain. Nous partirons, pour ce plan, d’une réflexion d’A. Dell’Umbria, dans son Histoire universelle de Marseille (Agone, 2006). « Un sous-développement aussi délibéré des transports collectifs dans l’agglomération marseillaise va de pair », écrit-il[1], « avec le refus d’un urbanisme ramassé : on en arrive à un tel étalement du tissu urbain, avec l’extension illimitée des zones pavillonnaires, qu’il rend presque impossible, ou en tout cas très onéreux, une éventuelle desserte par bus ou tramway ». Pour une ville qui, comme Marseille, entend devenir pleinement une métropole, la question des transports est fondamentale pour deux raisons. La première, c’est qu’il importe que tous les lieux de l’aire métropolitaine soient convenablement desservis par les transports en commun, pour que l’identité de la métropole se manifeste dans l’espace. La seconde raison est que c’est par l’usage des transports en commun que les habitants de la métropole expriment ce que l’on peut appeler une identité urbaine partagée : c’est en se côtoyant dans les transports en commun et en se retrouvant dans les mêmes parcours, les mêmes flux, les mêmes déplacements, que les habitants de l’aire métropolitaine expriment leur appartenance commune et leur citoyenneté partagée.
Quels sont les modes de transport en commun de la métropole marseillaise ?
Le métro a été ouvert à Marseille en 1977, et la première ligne (La Rose-Castellane) a été achevée en 1978, pour être prolongée jusqu’à la Timone en 1992, puis jusqu’à La Fourragère en 2010. La deuxième ligne a été ouverte en 1984 sur le parcours Joliette-Castellane, pour être prolongée jusqu’à Bougainville et Sainte-Marguerite en 1986 et en 1987. C’est en 2007 que le tramway a été mis en service à Marseille, sur trois lignes : Noailles-Les Caillols, La Blancarde-Arenc le Silo, et Arenc Le Silo/Les Castellans. À cela, s’ajoutent les transports maritimes, qui, en-dehors du « ferry-boat » qui traverse le Vieux-Port, proposent trois lignes : La ligne Vieux Port-Pointe Rouge a été lancée en 2012, la ligne Vieux Port-L'Estaque en 2013, et la ligne Pointe Rouge-Les Goudes en 2015. Il s’agit donc d’une offre assez diversifiée, mais on peut faire deux observations. La première est que, s’il s’agit d’une offre diverse, les parcours proposés par le métro et le tramway restent limités au centre et à quelques lieux que l’on peut considérer comme privilégiés. Toute l’aire métropolitaine marseillaise n’est pas desservie par le R.T.M., et, en particulier, on peut regretter l’insuffisante desserte des banlieues et des quartiers Nord. Par ailleurs, on peut regretter que l’offre de transports en commun soit encore insuffisante dans le temps, et, en particulier, en fin de journée et les jours fériés.
La métropole en réseaux
L’organisation des transports en commun, dans une ville, représente ce que l’on peut appeler l’institutionnalisation des réseaux. À partir du moment où elle est desservie par des transports en commun, une aire urbaine se structure en réseaux, qui structurent les déplacements de ses habitants et, surtout, instituent les relations entre les quartiers et la ville ainsi que les relations des quartiers entre eux. C’est ainsi que l’on peut observer, un décalage considérable entre les flux des réseaux au centre de la ville et la diminution des réseaux dans les espaces périphériques. Au-delà, sans doute peut-on même dire que c’est l’organisation des réseaux de transports en commun qui définit la centralité dans une aire urbaine, en particulier à Marseille. Cela permet de mieux comprendre ce que l’on peut appeler la signification politique de l’organisation des transports en commun dans une métropole comme Marseille : la logique des réseaux et l’articulation entre eux des réseaux de transports, des réseaux de distribution de l’eau et de l’énergie, mais aussi l’organisation des réseaux de diffusion de l’information, instituent le fait urbain, font pleinement vivre la ville en permettant à ceux qui s’y trouvent de pleinement l’habiter. Enfin, c’est par la maîtrise des réseaux que se manifestent les logiques de pouvoir dans une métropole.
La politique des transports et la politique de la ville
C’est ainsi que la politique des transports en commun ne peut se séparer de ce que l’on appelle désormais la politique de la ville. Ce que l’on appelle la politique de la ville peut se définir comme l’ensemble des politiques mises en œuvre par les pouvoirs municipaux et métropolitains pour lutter contre l’exclusion et pour favoriser l’intégration de tous les habitants, en particulier dans une ville comme Marseille où la diversité culturelle est élevée et où, par conséquent, les faits d’exclusion peuvent survenir facilement. C’est pourquoi on peut regretter que l’insuffisance de l’offre de transports en commun, en particulier l’insuffisante desserte par le métro des lieux de la ville, empêche la politique des transports en commun de contribuer à la lutte contre l’exclusion et pour l’intégration. C’est sur ce plan que la politique engagée par les pouvoirs municipaux et métropolitains devrait faire porter l’effort de leur intégration. C’est qu’il y a une véritable urgence à améliorer l’intégration de toutes les populations qui vivent à Marseille et de leur permettre de pleinement habiter la ville en leur permettant une meilleure appropriation de l’espace urbain en leur facilitant les déplacements.
[1] Histoire universelle de Marseille, p. 579.
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