Interview – L’agroforesterie : une solution locale face au changement climatique.

Billet de blog
par Le Sonar
le 16 Oct 2020
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Joel Guiot. / crédit Rémi Moquillon

Joël Guiot, paléoclimatologue, directeur de recherche au CNRS à Aix-en-Provence, présente les conséquences du changement climatique dans la région Sud et propose des pistes de réflexion.

Quelles sont les conséquences du changement climatique en région Sud?

L’augmentation de la température est plus élevée dans notre région. Au niveau du globe, c’est 1 degrés [ ndlr par rapport à l’époque pré-industrielle], pour nous c’est 1,5 et en été c’est plus de 2 degrés. Si on vit en ville, on rajoute encore quelques degrés. Ce qui a des effets directs sur notre santé et notre mode de vie: maladie cardiovasculaires, pulmonaires, mais aussi l’amplification des allergies, car les plantes produisent plus de pollens et il y a plus d’acariens avec la chaleur.

L’autre conséquence du changement climatique c’est la baisse des précipitations.

La saison sèche en Méditerranée durait de juin à août, elle pourrait s’étendre sur 5 mois. La végétation va devenir de plus en plus sèche, ce qui aura des effets sur l’agriculture et les forêts.

La région va-t-elle manquer d’eau dans les années à venir?

Les réserves en eau diminuent. Pour le moment, ce n’est pas trop grave pour la région Marseillaise, car l’eau vient des Alpes, mais d’ici 2050, on s’attend à des pénuries. L’eau est de moins en moins stockée sous forme de neige, résultat elle s’infiltre régulièrement dans le sol et n’arrive plus en bout de versant.
L’agriculture est la première perdante. Dans le sud, on a tendance à cultiver des produits qui ont besoin de beaucoup d’eau: maïs, fruits et légumes. Il va moins pleuvoir, il faudra donc davantage irriguer à partir du canal de Provence. Le problème: c’est que cette eau vient des Alpes, on va devoir l’utiliser de manière plus parcimonieuse.
Les vignes, doivent aussi faire face à la hausse des températures. Le raisin mûrit plus tôt, il faut donc le cueillir en avance. Sauf que les polyphénols, qui font la qualité du vin, n’arrivent pas plus tôt. Les viticulteurs vont donc devoir utiliser d’autres cépages.

La montée du niveau des océans, va-t-elle impactée la région?

Depuis le début du 20ème siècle, le niveau de la mer a augmenté de 20 centimètres. Quelques soient les baisses d’émission de gaz à effet de serre, en 2040, on aura 20 centimètres de plus. Si on continue à émettre au même rythme qu’aujourd’hui, en 2100 on arrivera à 1 mètre. Si on a un scénario écologique, on monterait qu’à 50 centimètres.

Pour notre région, il y aura un risque occasionnel: quand il y aura des tempêtes, le niveau montera de plusieurs mètres pendant quelques jours.

En Méditerranée, on construit près du littoral, il y a des endroits où les gens ne pourront plus habiter. Il faut vivre avec l’idée, qu’on va peut-être perdre la moitié de la Camargue. Dans des villes comme Marseille, il y aura des problèmes d’évacuation des eaux usées.

Quelles sont les solutions adaptées à notre région?

Le piégeage du carbone dans les sols, passe par une agriculture raisonnable, alors que celle intensive détruit les sols. Il faut aussi mélanger des arbres et des plantations: l’agroforesterie aide à lutter contre les maladies, les insectes qui touchent les cultures et ainsi éviter les pesticides et les engrais. Dans la région, l’agriculture se fait en petites parcelles avec un mélange des cultures, elle pourrait se convertir en agroécologie. L’absence de ces pesticides et engrais, améliore les sols, qui ainsi peuvent séquestrer davantage de carbone. Dans une parcelle cultivée, où on utilise de l’engrais, le sol est un émetteur de carbone. Si on remplace par de l’agriculture écologique, le sol peut devenir un puits de carbone, pour absorber le CO2 déjà présent dans l’atmosphère. Il faut cependant arriver en 2050 à des émissions neutres, en n’utilisant plus d’énergies fossiles.

Si on produit avec moins d’intrants et de pesticides, ce sera meilleur pour la santé, et sur le long terme on diminue les émissions de gaz à effet de serre et donc le changement climatique.

Emilie Méchenin

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