Jeux, émoi

Gros dodos

Billet de blog
le 11 Août 2016
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Le premier mercredi des Jeux a été comme une journée de repos, entre le report des épreuves d'aviron, et la petite quinzaine de titres décernés. Sans médaille pour la France, une nouvelle fois.

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Une journée de plus sans médaille française, ce qui repose les oreilles. Le spectateur commence à être un peu rongé par la fatigue, et nous ne sommes pourtant qu’au premier tiers de la quinzaine olympique.

La lassitude semble faire aussi des ravages chez les judokas. La mode est à l’immobilisation, et cinq compétiteurs français en ont été les victimes. Il s’agit de s’affaler sur son adversaire et de faire dodo sur l’oreiller pendant une vingtaine de secondes. L’arbitre vous réveille alors pour vous annoncer que vous avez gagné, ou perdu si vous êtes française ou français. C’est une tendance inattendue pour ce sport de combat, qui serait assez peu efficace dans un litige réglé dans la rue. Mais bon, les judokas interprètent leurs règlements comme ils le veulent. L’hiver dernier, Thierry Frémaux, patron du festival de Cannes et animateur de l’Institut Lumière à Lyon, par ailleurs ceinture noire, avait présenté au public un film rarissime : « La légende du grand judo », le premier de l’immense cinéaste japonais Akira Kurosawa. Il y était montré comment le judo s’était peu à peu imposé aux autres arts martiaux japonais, et on peut vous assurer que cela ne ronflait pas sur les tatamis !

Comme les escrimeurs l’ont aussi démontré malgré eux dans les épreuves individuelles, ce qui pêche souvent chez les Français, c’est la défense. Pour ça, ils savent attaquer. Flamberge au vent, panache, on fonce, ça passe ou ça casse… Mais en défense, c’est aussi efficace que la ligne Maginot, comme l’ont encore prouvé les Français au rugby à VII, perdant sur le fil une place en demi-finale au profit du Japon.

Or s’il faut marquer des points, il faut aussi éviter d’en encaisser en plus grand nombre. Il est manifeste que les principaux succès obtenus par les Français dans les sports collectifs -football, basket, handball, volley – tiennent aux progrès qu’ils ont su réaliser en défense. Ce qui demande une grande solidarité, une aussi grande capacité à accepter les erreurs de ses partenaires, une bonne observation des forces de l’adversaire, dont découle la possibilité de trouver des failles dans la défense adverse. Ce n’est pas dans l’ADN national, il faut donc travailler sur ces points.

Ce qui amoindrit également les forces des compétiteurs, c’est l’attente. Pensez que le Marseillais Florent Manaudou aura dû patienter une semaine avant de se mettre à l’eau et participer au 50 m nage libre. Tout ça pour trois longueurs de bassin à parcourir en moins de 22 secondes. Remarquez que l’attente concerne tout le monde, et que certains compétiteurs se sont entraînés comme des caluts pendant quatre ans pour s’arrêter au bout de quelques secondes, et attendre la fin des Jeux en faisant la fête au village olympique.

Parce que les Français sont des Français, on les soupçonne vaguement de ne pas rester inactifs dans les rencontres avec leurs homologues étrangers, pour occuper cette attente. On imagine mal les Nord-Coréens, au hasard, se déconcentrer au village en allant boire un pot. Cela peut avoir un effet indirect sur le tableau des médailles.

Comme il ne se passait pas grand-chose sur l’écran, on en a profité pour faire la paperasse en retard. Du coup, on s’est couché encore plus tard que d’habitude, mais avec un sommeil plus léger.

On a rêvé aussi du palmarès de Fabian Cancellara, le cycliste suisse surnommé « Spartacus », ce qui ne va pas trop avec son attitude débonnaire et souriante. Il va conclure à 35 ans son immense carrière professionnelle (3 Paris-Roubaix, 3 Tour des Flandres, 1 Milan-San Remo, et 11 étapes du Tour) en rééditant un succès pas trop espéré, vu la difficulté du parcours, sur le contre-la-montre. Il en avait déjà été une fois champion olympique en 2008, quatre fois champion du monde, et dix fois champion de Suisse, un pays où on s’y connait en matière de montre.

A Rio, quand on leur évoque la Suisse, les Français pensent plutôt au chocolat, dont ils font une consommation effrénée pour le transformer en médailles.

Pour parvenir à ne pas ronfler devant l’écran, on doit absolument éviter de regarder les épreuves de plongeon par couples et de natation synchronisée, dont on se demande toujours ce qu’elles font au programme olympique, sauf pour soigner les insomniaques.

On peut en revanche remercier les escrimeurs, même si la plupart des touches accordées restent incompréhensibles au profane, en dépit de la multiplication des ralentis. Cela va généralement très vite, et cela permet une nouvelle fois d’admirer la capacité des Hongrois à obtenir des succès dans les épreuves très techniques. Dans l’histoire des Jeux, quatre nations surpassent toutes les autres au palmarès : l’Italie, la France, la Russie et la microscopique Hongrie, qui a obtenu hier avec Aron Szilagyi une énième médaille d’or au sabre, après l’argent récolté à l’épée par son camarade Geza Imre. Le dernier sabreur français Vincent Anstett, avait été sorti au finish par le surprenant Iranien Motjaba Abedini, qui a échoué à gagner la médaille de bronze.

Même la Grande-Bretagne, qui n’a pas précisément besoin d’importer des combattants valeureux, s’est dégoûtée de cette domination ; elle n’a obtenu dans l’histoire que neuf médailles et un seul titre, et pas une seule breloque pour l’instant à Rio, seulement une 4e place au fleuret masculin. Alors que la Tunisie a obtenu au fleuret féminin la première médaille (de bronze) de son histoire en escrime avec Inès Boubakri, ce qui récompense la prometteuse prestation globale de son équipe. Ce n’est pas la première médaille obtenue par l’Afrique, comme il a été dit, puisque l’Egypte avait obtenu l’argent du fleuret masculin à Londres en 2012 grâce à Aladin Abouelkassem. Boubakri est par ailleurs l’épouse du fleurettiste marseillais Erwan Le Pechoux. Pour plusieurs raisons, sa médaille nous fait d’autant plus plaisir.

VIGNETTES

# Les basketteurs français ont eu raison de gagner (sur le fil) leur match contre la Serbie, contre laquelle ils restaient sur trois défaites. Cela les obligera à affronter les intouchables Américains en demi-finale, s’ils parviennent jusqu’à ce niveau. Mais cela renforce aussi la confiance d’une belle sélection qui en manque encore, ce qui lui permettra peut-être d’aller chercher la médaille qu’elle rêve d’offrir à son leader Tony Parker.

# Les boxeurs français continuent de faire bonne impression, notamment Mathieu Bauderlique au style bien ordonné, en -81 kg.

#  Le gymnaste japonais Kohei Uchimura a confirmé de justesse le titre olympique qu’il avait obtenu à Londres. On préfère la gym masculine, pardon de le dire, parce qu’au contraire de son homologue féminine, elle n’emploie pas, ou pas trop, d’artifices destinés à séduire les arbitres et le public. Et elle ne met pas à profit la mise en esclavage de bambins. Elle a su aussi entretenir le suspense dans ses compétitions jusqu’au dernier passage au dernier des appareils.

# La natation mondiale a probablement trouvé son nouveau leader avec la révélation de l’Australien Kyle Chalmers, qui a écrabouillé le 100 m à seulement 18 ans, ce qui semble un peu trop jeune pour pisser violet. Les Français, plutôt pisse-vinaigre, n’ont pas de promesse équivalent dans leur pays presque trois fois plus peuplé.

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