Et à la fin, c’est la marque qui gagne, ou pas…

Billet de blog
par Lagachon
le 14 Fév 2014
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Suite d’une courte série sur les élections municipales, après le MAC, un autre sujet qui semble mettre les deux candidats d’accord : la marque Marseille. Pour Gaudin et Mennucci, il faut lancer une démarche de marketing territorial !

Mais qu’est-ce qu’une démarche de marketing territorial ? Quel nom ? Et qu’y a-t-il derrière ? Analyse des programmes, critiques et propositions.

Côté Gaudin, on propose une communication économique unifiée qui serait proposée à tous les partenaires institutionnels. Mais aussi une marque métropolitaine en liaison avec l’Agence Française des Investissements Internationaux, et une “académie des ambassadeurs”.

On est donc avec Gaudin sur une marque essentiellement économique, qu’on appelle aussi de développement, il propose de regrouper Provence-Promotion à ce que peut faire la Ville, la Région et bientôt la métropole dans un seul bureau. Si je ne me trompe pas c’est ce qui est prévu quoiqu’il arrive par la Métropole. Quant à l’académie des ambassadeurs, il me semble qu’elle existe déjà, à l’initiative de la CCI et du Club Top 20 sous le nom de Massilia Mundi. Le candidat envisage-t-il de se baser sur cet outil ou d’en créer un en parallèle ?

A ma gauche, Mennucci propose d’être lui-même un “Maire-ambassadeur” et se contente d’une courte ligne dans son programme : “une marque métropolitaine Marseille-Provence sur le modèle d’Onlylyon”.

Outre l’investissement personnel difficilement appréciable, il nous donne deux choses assez concrètes : le nom de la marque et son modèle. A condition que ce soit vraiment applicable et appliqué, ça voudrait dire une marque métropolitaine qui couvre bien au-delà de l’économie. Pour mémoire, Onlylyon regroupe 19 partenaires (collectivités, CCI, Office du tourisme et des Congrès, Aéroport, Université, Medef… mais aussi EDF, Renault Trucks, Sanofi)  et couvre l’ensemble des cibles d’une métropole (entreprises, touristes, nouveaux habitants, étudiants, congrès…). Lyon a mis plusieurs années à travailler sur la collaboration avant de lancer la marque en 2007 et environ 5 ans à la rendre pleinement opérationnelle, est-ce vraiment réaliste de penser le faire en 6 ans à Marseille et dans les Bouches-du-Rhône ?

Si l’on a la quasi-certitude qu’une démarche de marketing territorial veuille être engagée à l’issue des élections, notons que seul Mennucci propose une vraie marque territoriale (au sens d’Ashworth et Kavaratzis, chercheurs référents sur le sujet) car elle couvre l’ensemble des partenaires et des cibles. En revanche, le projet de Gaudin, moins ambitieux, semble plus réalisable à court terme puisqu’il se base essentiellement sur de l’existant ou du prévu par la loi, et n’est pas conditionné à l’inclusion de partenaires extérieurs qui pourraient importer leur dynamisme et bousculer les collectivités (CCI), ou arriver avec leurs divisions internes (Université) et rajouter de la confusion là où il y en a déjà beaucoup.

Propositions pour les candidats

Mennucci pourrait préciser un calendrier sur 6 ans de mise en place de cet “Onlylyon sauce aïoli” qui le rendrait plus crédible, avec par exemple une réunion des collectivités métropolitaines dans un premier temps, puis, une fois la situation stabilisée et les bonnes pratiques intégrées, l’extension de la marque vers les partenaires qui le souhaitent (Port, Office du tourisme, CCI et aéroports, Université, APHM, entreprises privées…) sous réserve de l’acceptation d’un cahier des charges clairs.

Quant à Gaudin, il gagnerait à être un peu plus ambitieux et à situer cette proposition a-minima comme une réalisation de l’année 1 avant une montée en puissance, notamment vers le tourisme qui semble être une de ses priorités. Il pourrait aussi s’exprimer sur le nom de la marque, ou au moins la méthode pour arriver à un nom de marque.

Le nom et la substance

Mennucci parle de “Marseille-Provence”, facile car utilisé par la CCI, l’Aéroport et MP2013, mais qui impose une identité duale à la marque, presque en oxymore. “Marseille” et “Provence”, l’urbanité désordonnée et métissée, l’industrie, le Port et le large, tout ça relié par un petit tiret du 6 à la ruralité sereine et carte postale touristique, la lavande, Giono et le terroir. Alors oui, c’est aussi CMA-CGM, Eurocopter, Rousset et Cadarache, mais n’empêche qu’il y a comme une impression de choix par défaut dans ce nom, une sorte de cache-sexe qui serait le “Grand-Marseille” ou “Marseille-Métropole”… Et en même temps pourquoi pas, puisque nous sommes comme ça ! Mais fait-on une marque pour satisfaire l’interne ou pour rayonner à l’extérieur ? Quelle que soit la réponse, avant de s’avancer, il serait bon de faire travailler quelques professionnels de la marque (universitaires, sémiologues, publicitaires…) et de réaliser plusieurs tests sur les populations cibles.

Mais avant de penser au nom, il convient de se poser la question du contenu. Une marque n’est qu’un outil de marketing parmi d’autre, un outil puissant lorsqu’il est bien utilisé, mais qui reste un outil dont le succès un conditionné à l’intention et qui ne règle rien toute seule. De nombreuses villes ont lancé des marques sans substance, qui n’ont eu qu’un impact confidentiel (cf Marseille on the move).

Alors une marque pour quoi ? Une marque opère comme un haut parleur, on y place une identité, une personnalité, du sens et elle le projette vers ceux que l’on vise, assurant une cohérence à l’ensemble. Tout dépend donc de ce que l’on met dans le haut parleur, et là il existe plusieurs méthodes : soit on part de ce que veulent les cibles (enfin, ce qu’elles disent qu’elles pensent qu’elles veulent), on adapte le produit (touristique, universitaire, économique…) à ce qu’elles veulent et on le leur montre ensuite en espérant qu’elles n’aient pas changé d’avis. Soit on part de ce que l’on a à offrir, et on cherche à entrer en contact avec ceux à qui ça plait.

Je suis personnellement partisan de la seconde méthode, notamment utilisée par les grandes marques de luxe et plus généralement les marques patrimoniales. La subtilité consiste à opérer de très subtils changements dans l’offre pour rester proche des exigences de la cible, sans jamais modifier l’essentiel. Dans le cas qui nous intéresse, elle nécessite dans un premier temps de définir ce qui est essentiel dans “Marseille” et “Provence”, et de voir comment l’articuler ensuite avec les exigences de l’époque, et plus particulièrement celles de nos publics-cibles. Tout ça prend du temps, j’y travaille notamment dans ma thèse.

Mais après tout, on ne sera plus à un an près !

Commentaires

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  1. Est ce elle ? Est ce elle ?

    Ça ressemble à une bonne digestion du fameux bouquin Mercator, avec un soupçon de sociologie urbaine : elle porte sur quoi exactement cette thèse ? ça m’intéresse aussi !

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    • <a href=lagachon" src="https://secure.gravatar.com/avatar/?s=96&d=mm&r=g" class="avatar avatar-50 photo" width="50" height="50"> lagachon

      Merci, elle porte sur le patrimoine des marques de ville (l’intégration des éléments patrimoniaux dans la stratégie de marque pour une ville). Tu bosses dans quoi toi ?

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