De l’habitat indigne et de l’indifférence publique : le procès de la rue d’Aubagne
Les premiers jours du procès sur les effondrements de la rue d’Aubagne, qui ont causé huit morts et des centaines de délogés, mettent en lumière une mécanique implacable de négligence et de cynisme. Les experts sont unanimes : c’est le 65, une copropriété privée et habitée, qui a déclenché la catastrophe. Cette réalité déconstruit l’idée d’un coupable idéal qu’était le 63, propriété municipale. Pendant des années, Marseille Habitat a été accusé de n’avoir pas su protéger ses biens. Mais aujourd’hui, les faits révèlent une réalité bien plus sombre : une confiance aveugle envers des propriétaires privés véreux, proches de la figure du marchand de sommeil.
Un détail glaçant ne doit pas être oublié : le 18 octobre 2018, quelques semaines avant l’effondrement, un arrêté de péril avait été pris pour le 65. Les habitants avaient été évacués dans la journée, mais les services de Julien Ruas, alors adjoint à la sécurité, leur ont assuré qu’ils pouvaient réintégrer l’immeuble dès le soir même, affirmant qu’il n’y avait pas de risque. Ce retour précipité dans un bâtiment en péril illustre à lui seul l’irresponsabilité tragique des autorités locales.
Parmi les seize prévenus jugés figurent des propriétaires, des représentants de la mairie et des experts, dont Julien Ruas et Richard Carta, architecte. Tous incarnent, à des degrés divers, une chaîne de responsabilités rompue, nourrie par un mélange toxique d’inaction, de désinvolture et de mépris de classe. À Noailles, quartier de pauvres et d’étrangers, personne n’a voulu déranger les « honnêtes propriétaires », même lorsque l’un d’eux était un élu local. Résultat : des bâtiments en ruine, des copropriétaires préférant les procès aux travaux, et une mairie détournant le regard.
Ce procès, prévu jusqu’en décembre, s’est ouvert sur des témoignages déchirants des familles des victimes, rappelant l’ampleur humaine de ce drame. Mais il dévoile aussi une crise plus large : celle d’un système où la sécurité des plus vulnérables est confiée à des propriétaires motivés avant tout par le profit. Le gaudinisme, à travers sa gestion chaotique de l’habitat indigne, a incarné ce cynisme : abandonner les services publics, déléguer sans contrôle, et sacrifier les vies.
Ce drame nous rappelle tristement notre présent, où le gouvernement Macron continue de délester ses responsabilités en transférant la vie des citoyens à un secteur privé de plus en plus avide, dont les intérêts s’éloignent de ceux du pays et de ses habitants. La même logique d’abandon se répète, exposant toujours davantage les plus fragiles.
Depuis 2018, le problème reste colossal : Marseille compte encore 40 000 logements insalubres. Si la nouvelle municipalité a pris plus de 100 arrêtés d’insalubrité depuis 2022, contre seulement 6 entre 2016 et 2018, le retard accumulé pèse lourd. Ce procès ne réparera pas les pertes, mais il représente une étape cruciale pour regarder en face un système qui tue, encore aujourd’hui.
Ce cynisme, il ne faut jamais l’oublier. Rue d’Aubagne ou ailleurs, il est le symbole d’un système qui préfère l’inaction à la justice et le profit à la vie.
Commentaires
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on a subit bien trop longtemps : “une mairie détournant le regard.”sur tellement de sujets impactant directement le quotidien des marseillais. et cette indifférence est létale dans le cas des logements insalubres.
le gaudinisme, inventé par gaudin, est largement partagé entre ses héritiers, il faut garder en mémoire le nom de ces élus et de ces gens qui ont tous détourné le regard, et profité financièrement de cet habitat indigne. (certains profitent encore)
l’quipe municipale aujourd’hui parait plus décidée, et se heurte aux procédures diverses et au manque de solutions pour loger ces habitants traités inhumainement.
il faut surtout rester très vigilant, très déterminé, car il faudra du temps, et se rappeler que c’est “un système qui tue, encore aujourd’hui”.
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