Accusé de ne pas en faire assez sur le logement social, Benoît Payan passe à l’offensive
Deux mois après le coup de semonce du préfet, le maire lui répond sur la faiblesse de la production de logements sociaux à Marseille. Au-delà des aspects techniques, le maire renvoie la métropole et l'État à leurs responsabilités, en appelant à jouer collectif. Y compris à l'intérieur de la majorité municipale.
Benoît Payan lors de la clôture des états généraux. Photo : Emilio Guzman.
Les cinq pages très détaillées ont une vocation plus politique que technique. Elles décrivent clairement un retour sur un mode offensif de l’exécutif municipal, plus de deux mois après le courrier du préfet de région Christophe Mirmand, faisant état de sa volonté de constater l’état de carence de la Ville de Marseille, en ce qui concerne ses efforts de construction de logements sociaux. C’est après avoir pris connaissance de cette réponse signée du maire Benoît Payan que Christophe Mirmand en référera à la commission ad hoc et au ministre, avant de prendre la décision d’un constat de carence et d’une pénalité financière associée.
Dans le courrier en réponse dont La Marseillaise et La Provence ont fait état, que nous publions l’intégralité, Benoît Payan (DVG) ne nie pas l’évidence. Il va au contraire loin dans un mea culpa, dont son adjointe à l’urbanisme Mathilde Chaboche a fait les frais, en se voyant contrainte à la démission. “Ce bilan triennal, tel que vous l’avez établi, est clairement insuffisant. Avec 38 % de l’objectif de 7 674 logements sociaux sur trois ans“, écrit-il. Le bilan est encore plus sévère quand on retranche à ce chiffre les logements démolis au titre du renouvellement urbain, entre 2019 et 2022. Le chiffre n’est plus que de 982 logements supplémentaires sur trois ans.
La Ville n’entend donc pas ergoter sur les chiffres, que l’on parle logement social en général ou même des populations visées par les appartements proposés. Il n’y a ainsi eu aucun logement très social livré en 2022 alors qu’ils visent les habitants les plus précaires.
Passe à l’aile à la métropole
Sur les raisons mises en avant, le maire insiste sur le fait que cette compétence “comme celle de l’aménagement” relève de la métropole depuis 2018. Comme le soulignait régulièrement Mathilde Chaboche elle-même, ce bilan est, selon lui, “largement imputable à des choix antérieurs”. Une manière de rappeler que lors des précédents bilans, en 2019, la situation marseillaise n’était pas plus reluisante, mais que le préfet, alors, n’était pas décidé à en faire le constat.
Le maire relève donc à l’envi les endroits où la faible production de logements trouve ses origines, tantôt dans le “contexte national” de “blocage profond du marché“, tantôt dans les freins internes à la métropole. Il pointe ainsi l’abandon très politique du projet de programme local de l’habitat par la présidente Martine Vassal, à la veille des élections municipales, en 2019. Il dénonce encore “l’absence de lancement de toute nouvelle opération d’aménagement significative impulsée par la métropole depuis près de 10 ans”, mais aussi l’absence de politique volontariste sur le volet foncier.
L’enterrement du “stop au béton”
La sortie a été peu appréciée par l’opposition de droite à laquelle appartient Martine Vassal (DVD). Dans un communiqué, le groupe Une volonté pour Marseille rappelle ainsi que Benoît Payan, en campagne, demandait “un moratoire sur les permis de construire”. Un petit refrain “stop au béton” auquel n’était pas insensible son adversaire de droite, Martine Vassal, qui plaidait également pour une régulation drastique des autorisations d’urbanisme, dans les quartiers Est et Sud de la ville.
Interrogée en marge d’une présentation de son bilan à mi-mandat de sa politique économique, la présidente de la métropole, Martine Vassal ne prend pas de gants dentelés dans sa réponse : “Avec Benoît Payan, ce n’est pas compliqué, quand ça ne va pas, ce n’est pas lui, quand ça va, c’est lui, tacle-t-elle. Si c’est la faute de la métropole, pourquoi a-t-il remercié Mathilde Chaboche ?” Elle évoque “une catastrophe” et caresse même l’idée de “faire signer les permis par le préfet”, une prérogative exceptionnelle sur laquelle elle ne dispose d’aucun levier.
Jouer collectif au sein du Printemps
Une fois passé, le jeu politique des échanges de piques, l’État, la métropole et la Ville sont censées jouer collectif, dans la droite ligne des états généraux du logement, qui s’étaient conclus par la signature d’engagements concrets. Et ce jeu collectif commence au sein même de la majorité municipale. Nouvellement chargé de la signature des permis de construire, Éric Méry entend y associer son collègue chargé du logement Patrick Amico.
“Dès lors qu’il sera question de logement, il sera associé très en amont à l’instruction des projets de promotion immobilière, explique le nouvel élu à l’urbanisme. Il sera associé tout au long du processus d’instruction pour faciliter la délivrance des permis et augmenter la production de logements, et notamment de logements sociaux“. En gage de l’héritage de l’ère Chaboche, la charte de construction durable est maintenue en l’état et les permis, affirme-t-il, continueront d’être délivrés à son aune. L’élu promet également de nouvelles embauches au service de l’urbanisme pour fluidifier leur obtention.
Ce jeu collectif répond à la réputation solitaire de sa prédécesseuse. Éric Méry entend le mener avec Laurent Lhardit sur les projets économiques comme avec Samia Ghali, sur les dossiers ayant trait au renouvellement urbain. “Elle a une connaissance des procédures ANRU [Agence nationale de la rénovation urbaine, ndlr] que je n’ai pas, explique-t-il. Je n’ai aucune difficulté à évoquer un trinôme avec elle et Patrick Amico sur ces dossiers. Quand quelqu’un va chercher les financements ANRU comme elle l’a fait, je ne vois pas pourquoi elle ne serait pas associée à la validation des projets.“
Binôme avec Amico, trinôme avec Ghali
Quant aux ateliers d’urbanisme auxquels la maire de secteur, Nadia Boulainseur, demandait à être pleinement associée, “ils se déroulent chaque semaine et n’ont jamais cessé d’être menés en pleine association avec les mairies de secteur“, plaide-t-il, reprenant ainsi un argument déjà développé par Mathilde Chaboche. En début d’année, la maire des 15/16, proche de Samia Ghali, avait rédigé une question écrite sur ce thème, qui illustrait la profondeur de la rupture entre les deux élues.
Mais pour tenir les engagements du programme local de l’habitat qui doit être adopté à l’automne, le jeu collectif ne doit pas se limiter à la délivrance des permis. Pour construire des logements, il faut trouver des terrains où le faire, sans artificialiser plus de terres. Cela oblige à passer en revue les zones d’aménagement concerté – où de nouvelles constructions sont déjà prévues – dans le but d’y “intensifier la ville“, nouvelle expression en vogue, pour dire construire plus, en consommant moins de terrains.
Cela passe notamment par une révision du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI- dont la troisième modification est encore en cours. Or, pour permettre au programme local de l’habitat d’être mis en œuvre, le PLUI doit entièrement refondé, dans une forme accélérée. Benoît Payan appelle à des”changements d’ordre législatif”, passant par “le droit à l’expérimentation” sur ce thème. La venue régulièrement annoncée du président de la République à Marseille, pourrait permettre de nouvelles annonces sur cette question désormais centrale du logement.
Commentaires
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Comme dans les années 60/70, va- t- on construire n’importe quoi n’importe où, mener une politique du chiffre pour complaire à l’administration d’état? Administration qui se réveille aujourd’hui alors qu’elle n’a rien dit pendant les 25 ans de gaudinisme!? Quelles sont donc ses motivations et ses jeux d’influences?
Construire plus sans consommer plus de terrain, cela veut dire construire plus haut. Que nos fonctionnaires d’État lèvent la tête de leurs tableaux excel et qu’ils aillent faire un tour à la Savine, aux Flamants. Ils pourront voir ce que ça donne. Ce sont les résultats des opérations ” coup de poing” d’Albin Chalandon, dans les années 70. A peine construits, il fallait déjà les réhabiliter. Veut on alimenter la politique de la ville pendant encore 50 ans et construire une ville encore plus invivable?
Il y a des solutions mais si on veut de la qualité, faire de l’urbanisme et non de la construction, cela prend du temps. On ne rattrape pas 25 ans d’inaction en deux ans!
La politique de Mme Chaboche était la bonne. Elle jouait solutaire dit on, mais qui sont véritablement ces autres élus qu’elle aurait dû associer à son action, Amico, Ghali, qui doivent aujourd’hui se frotter les mains?
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Et l’urbanisme est de la compétence de la Métropole pas de la Ville qui elle se contente d’appliquer le PLUi de Mme Vassal
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Simple précision, le PLUi est, dans les textes, de compétence métropolitaine mais une très large initiative avait été laissée aux communes pour son élaboration.
Vu le niveau de réflexion de la Métropole dans le domaine de l’urbanisme et la qualité de ses responsables, il valait sans doute mieux et le résultat en a été probablement “moins pire”.
Il n’en reste pas moins que l’urbanisation de Marseille reste à repenser. Pourcexemple, on ne peut appliquer sur la totalité de la commune le quota de logements sociaux de manière indifférenciée comme on le ferait à Carry le Rouet. D’ailleurs, cette commune en construit elle? Qu’en pense donc le Préfet?
Pour un meilleur équilibre territorial, les quotas devraient être fixés par arrondissements. Mais ceci, sans doute, n’arrangerait pas Mme Ghali qui a construit sa piscine dans le 7me Sud côté mer…
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On peut construire très dense sans forcément construire très haut : Paris est un exemple d’urbanisme dense avec pour l’essentiel des immeubles qui ne dépassent pas 6 étages.
Il ne suffit pas de dire “stop au béton”, comme Mme Vassal durant sa campagne municipale, pour trouver la solution. Surtout quand ses propres amis de la nullicipalité Gaudin voulaient au même moment construire des tours de 54 m de hauteur à côté du Corbusier. Oui, l’urbanisme ça se réfléchit, c’est une politique de long terme et pas seulement une question de volume de permis de construire.
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Electeur, Paris est une ville qui a été quasiment reconstruite au milieu du 19me sur la base de gros immeubles dits haussmanniens. Ce n’est pas le cas de Marseille. Il faut par contre aller voir porte d’Italie (13me), pour ce qui a été construit dans les années 70 et du côté de Bercy, pour la période récente, où les immeubles d’habitation ressemblent à s’y méprendre à ceux d’Euromed, ces “magnifiques” châteaux de cartes du promoteur Nexity .
Certains voudraient d’ailleurs augmenter la hauteur des immeubles parisiens. Je n’y vois qu’appât du gain sous des prétextes d’économie d’emprise au sol. Est ce cela qui nous attend? C’est bien possible.
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@Andre, paradoxalement (du moins en apparence), les quartiers récemment urbanisés de Paris ne sont pas toujours les plus densément peuplés, même si l’on y trouve des immeubles de grande hauteur. Et pour cause : quand vous construisez des tours, vous devez laisser une grande distance entre elles, simplement pour que la lumière du jour arrive jusqu’au sol. La densité de population de Paris, qui est l’une des plus élevée du monde, ne doit donc rien aux nouveaux quartiers.
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Cet arrangement de nommer en lieu et place d’une adjointe à l’urbanisme un pion “conseiller spécial à l’urbanisme” qui va maintenant être chapeauté par les deux qui voulaient sa place. Mon dieu mais quelle tambouille : ce n’est vraiment pas très encourageant pour la suite.
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D’autant qu’il est déjà très occupé à rénover les églises et leurs orgues. Le titre permet certainement de cibler une indemnité particulière pour le job. Nous attendons toujours la transparence et la communication sur le patrimoine municipal et son affectation (privé de la ville et par direction).
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Depuis quand, mis à part dans votre esprit, une attribution particulière de charge pour un conseiller municipal équivaut à une “indemnité particulière” ? Soit one st adjoint au maire, soit on est conseiller municipal. Les attributions qui suivent ne changent rien à l’indemnité.
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Je vous conseille d’écouter Madame Chaboche dans l’excellente série podacst Marsiens sur Agence Dunk. Elle y parle très bien des promoteurs qui veulent faire du neuf dans les quartiers Sud/Est et aucune action réhabilitation où il y a besoin…
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Benoît Payan, le chef de la tribu des “pas nous pas nous”…
C’est simple, si problème, dans l’ordre c’est la faute de :
1/ Gaudin qui n’a rien fait (en même temps c’est pas tout à fait faux)
2/ la Métropole et Martine Vassal,
3/ Mathilde Chaboche qui bossait seule dans son coin sans que personne ne sache ce qu’elle faisait.
Ah oui, j’oubliais, les fonctionnaires municipaux qui sont incompétents.
Pathétique et désespérant.
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C’est difficile de ne pas faire de gags avec ces commentaires qu’on ne peut pas modifier même quand on a oublié quelque chose comme :
2/ la Métropole et Martine Vassal, qui ne font absolument rien (ce qui n’est pas faux du tout)
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@Pascal L
On va le dire sérieusement, puisque l’humour, voire l’ironie vous gênent. Votre remarque sur la ´Métropole ne me pose aucun problème. Pas complètement faux. Elle ne retire rien à mon commentaire sur la méthode du Maire et de sa garde rapprochée. Et ceci ne fait pas de moi un soutien de M. Vassal et de ses alliés.
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Le préfet menace avant la venue du président … un scénario “good cop & bad cop” ?
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La question que je me pose: le préfet a-t-il fait son travail partout de la même façon?
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Dans votre question il y a la réponse et je suis de votre avis.
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