Un rapport sénatorial pointe les incertitudes financières du plan écoles à Marseille
Le Sénat a passé au crible le volet du plan Marseille en grand consacré au bâti scolaire. Il pointe les incohérences de calendrier, les flous du financement étatique et questionne la capacité de la Ville à soutenir sur le chantier sur la durée.
La cour de l'école de Malpassé - Les Oliviers. (Photo : B.G.)
Dans les contes, les bonnes fées entourent le berceau du nouveau-né. En matière de comptabilité publique, ce sont plutôt les contrôleurs qui inspectent les projets, calculettes en main. Après les magistrats de la Cour des comptes, c’est au tour du Sénat de scruter les contours du plan Marseille en grand et, en particulier, du volet écoles de ce dernier. Le rapport d’information rédigé par les sénateurs Stéphane Sautarel (LR) et Isabelle Briquet (PS), qui a été présenté à la commission des finances le 19 juin, dresse un tableau très critique de la conduite du projet et notamment sa soutenabilité financière, comme le souligne La Provence dans un article ce mardi 25 juin.
Le rapport reprend pour l’essentiel les critiques déjà émises par la Cour des comptes et la chambre régionale des comptes sur le plan Marseille en grand : le discours d’Emmanuel Macron au Pharo comme seule feuille de route, l’absence de contractualisation avec les collectivités territoriales, ou le flou qui entoure les sommes colossales promises à Marseille par le chef de l’État.
Mais les deux sénateurs vont plus loin dans l’examen financier du plan et “l’utilisation des crédits dédiés au financement du volet « écoles » du plan”, qui constitue leur objectif. Ainsi, les deux parlementaires ont refait les additions des annonces successives du gouvernement sur le financement de ce plan. Ils arrivent à un trou de 65 millions entre la promesse de 400 millions et les 334,85 millions de subventions, issus des différents fonds publics. “À ce stade, personne n’a été en mesure de nous indiquer leur provenance, ce qui est problématique puisque l’équilibre général du financement du projet est basé sur ce montant“, constate Stéphane Sautarel, en commission des finances le 19 janvier.
Additions mal ajustées
Plus largement, les deux sénateurs s’interrogent sur la soutenabilité du projet pour les finances municipales. Là encore, ils ont additionné les coûts lissés pour la Ville de la rénovation des 188 écoles, via la redevance versée à la société publique des écoles marseillaises pendant 25 ans (60 millions), créée pour porter le plus gros du chantier, mais aussi celle de la maintenance et du gros entretien (13 millions), ainsi que des dépenses de fonctionnement (21 millions).
À cela, il faut ajouter les 40 millions annuels pour l’entretien du reste des écoles, qui restent à la charge de la Ville. Ils arrivent donc à un coût global évalué entre 103 et 113 millions d’euros par an, soit 30 % de la capacité d’investissement annuel de la municipalité. “Dans un contexte où la commune affiche d’importantes ambitions d’investissement dans d’autres domaines comme le verdissement, l’accès au logement, à la santé et à la culture, se pose la question de la soutenabilité à long terme de cet investissement au profit des écoles“, interroge le rapport.
Interrogé par Marsactu, l’adjoint aux finances, Joël Canicave balaie les craintes parlementaires : “Cette soutenabilité a été examinée par le ministère des Finances, qui a dit que ce plan était financièrement soutenable. Ce n’est pas la Ville qui est mise en cause dans ce suivi, mais l’État. La Ville supporte cette montée en charge : c’était soutenable pour elle et cela le reste en l’état”. La seule inconnue est à ses yeux le risque d’une nouvelle flambée du prix des matières premières, qui a déjà lourdement affecté le montant des premiers marchés.
Problèmes de vagues
Le rapport sénatorial émet également des doutes sur le calendrier très serré des différentes vagues de travaux. En effet, pour tenir le délai de rénovation de 188 écoles en dix ans, les travaux doivent être lancés à un rythme accéléré. “Seule une montée en puissance rapide de la Spem et l’élaboration de bilans intermédiaires permettant de capitaliser l’expérience acquise lors des deux premiers marchés subséquents seront de nature à favoriser la poursuite du projet dans le calendrier initial“, commentent les sénateurs.
Un point critique à mettre en regard avec la faiblesse des outils de suivi partagés par la Ville et la préfecture dans le cadre du plan Marseille en grand. À titre d’exemple, les sénateurs évoquent une réunion mensuelle sur ce thème entre l’État et la municipalité. Mais elle n’a démarré que début 2023, soit, estiment-ils, dix-huit mois après le lancement effectif du plan.
Toujours au titre du suivi, les deux sénateurs soulignent de nombreuses incohérences dans les données fournies par la société publique des écoles (Spem), la Ville et la Préfecture sur le déroulement des vagues de construction, voire même leur périmètre. “Il est impossible, au regard des documents communiqués, d’avoir une liste stabilisée des écoles concernées par chacune des vagues“, constatent les rédacteurs.
Sortie du périmètre
On apprend ainsi que l’école des Abeilles, celle de Montolieu ou de Saint-Louis gare, sont sorties du périmètre d’action de la Spem, notamment pour respecter le plafond maximum de l’accord cadre, fixé à 1,813 milliard d’euros, entre les deux entités publiques.
“L’absence d’un document consolidé sur l’ensemble des écoles à rénover durant les 10 prochaines années et leur répartition au sein des sept vagues envisagées parait plus surprenante“, soulignent encore les deux parlementaires. Parmi les 11 recommandations finales du rapport, deux ciblent la nécessité d’un “document consolidé” et partagé qui permette de connaître les écoles visées et les travaux prévus dans chacune des vagues.
Enfin, pour tous ceux qui douteraient de la nécessité d’un grand plan d’ampleur pour rénover les écoles marseillaises, le rapport sénatorial met en avant une donnée : les établissements passoires thermiques représentent aujourd’hui une “surconsommation estimée à 20 000 mégawatts par an, soit la consommation électrique annuelle totale d’une ville de 7000 habitants“.
Commentaires
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Je crains que Ville, dans l’état actuel de son fonctionnement, soit malheureusement incapable d’absorber ce plan.
Car ce n’est pas qu’une question de finances.
Les services sont déstructurés. On remplace les fonctionnaires par des contractuels , on entretient depuis le début une défiance envers les gens alors en place comme s’ils avaient tous été estampillés Gaudin sur le front (une centaine de cadres A seraient en attente de poste selon une indiscrétion de la direction du personnel), on instaure une instabilité au niveau des hauts fonctionnaires (pourquoi le premier directeur général a-t-il donc été viréau bout de 6 mois, un homme pourtant expérimenté qui venait de la Courly lyonnaise?) alors qu’on garde dans des placards dorés du côté de la rue Fauchier (urbanisme) ou à des postes de responsabilité du côté de Borély de vrais protégés du gaudinisme. Le climat est délétère, les gens les plus sérieux complètement dégoûtés… Comment voulez vous avancer avec ça? Je suggérerais aux journalistes de Marsactu une enquête sur le sujet comme ils savent si bien les faire.
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“Mala malus mala mala dat”
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Et oui, que des pommes pourries d’un pommier bien mal planté….
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Ce rapport laisse entendre que les grandes annonces et les grands discours des macronistes et associés, sur ce plan “Marseille en grand”, ne sont que de l’enfumade, puisque plan mal chiffré et non contractualisé avec les collectivités locales…
Tout ça pour des raisons électoralistes ? Faire croire que l’on (le gouvernement, l’état, la métropole…) se soucie de l’état de Marseille et que l’on agit pour les écoles marseillaises, en soutenant la politique de la municipalité, alors que dans les faits, rien n’est consolidé, ce plan ne serait que de la comm’ ? Étonnant, n’est il pas ?
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Nulle part il n’est dit que ce plan n’est que de la com’, les constats sont analytiques et chiffrés – et de ce point de vue méritent d’être débattus point par point : ni un rapport de la Cour des Comptes (qui parfois dit des conneries énormes, je l’ai vu jadis dans un domaine que je connais, celui de l’enseignement…) ni un rapport du Sénat ne sont parole d’Évangile, mais des documents de travail soumis à l’appréciation de l’administration, des politiques et des citoyens.
Ici il s’agit de dire que ce qui a été engagé n’est pas totalement calibré financièrement, ce qui est à peu près toujours le cas des grands investissements publics. Pour ne pas parler de ceux qui sont sciemment sous-évalués, au hasard l’EPR ou Iter (mais pas touche, on peut faire n’importe quoi en agitant le chiffon bleu-blanc-rouge de l'”indépendance énergétique” du pays !), ou du grand n’importe quoi des colossaux gaspillages sur la base de devis mensongers dans le cas des Jeux Zolympiques.
Rien dans l’un ou l’autre rapport ne dément le bilan qui a été à la source des engagements du Printemps Marseillais sur les écoles – à savoir le bilan d’un quart de siècle d’incurie totale de la Gaudinie dans ce domaine – ; rien dans ces rapports ne dit que ce qui a déjà été fait ne devait pas l’être ; rien dans ces rapports ne dit que la suite des travaux prévus ne doivent pas être exécutés. En revanche l’alerte porte sur l’insuffisance de financements, ça mérite d’être sérieusement pris en considération, et sur les délais qui ne seront pas intégralement tenus.
J’ajoute un autre problème : à ma connaissance l’administration municipale, qui veut faire travailler le plus d’entreprises locales possible, se heurte plus d’une fois à l’insuffisance en nombre et en compétences du tissu économique marseillais. Curieusement le Medef local, la Chambre de Commerce et autres organismes patronaux locaux (où sont surreprésentés les gens de l’immobilier) préfère faire campagne pour Macron et Vassal plutôt que d’envisager comment on pourrait reconstituer un écosystème robuste et qualifié dans le domaine du bâtiment, rénovation et construction, et de la décroissance de la consommation d’énergie. Apparemment le fait que mon gamin ait passé pendant plusieurs années des mois de juin avec des après-midi où il faisait plus de 35° dans plusieurs salles de classe de notre école de quartier n’émouvait personne jusqu’à ce que le PM mette les pieds dans le plat.
Je fais partie de ceux qui se contrefoutent des éventuels calculs politiciens de Macron, d’Agresti-Roubache ou de Vassal s’ils abondent réellement les efforts en cours, je suis pour que les organes de contrôle des dépenses publiques fassent leur travail et qu’à la suite d’un débat sérieux on puisse éventuellement redresser les erreurs commises, car je suis surtout pour que dans un délai raisonnable aucun journal n’ait de raison de titrer “Écoles de Marseille : la honte de la République”. Bon, pendant ce temps-là l’ex-dauphin de Gaudin, après avoir esquivé une condamnation en “plaidant coupable” dans l’affaire des procurations escroquées, loin de disparaître de notre horizon politique, annonce qu’il votera RN au deuxième tour. Qu’il continue à se vautrer dans l’abjection, je préfère décidément, quels que soient leurs défauts, celles et ceux qui construisent ou reconstruisent les écoles où iront un jour mes petits-enfants.
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Zumbi, commentaire intéressant.
Il est vrai que sous les mandats Gaudin il n’y avait même pas de “plan école” de nature à répondre aux nouveaux besoins.
Quelles que soient les insuffisances des financements, la désorganisation des services et les flottements dans la gouvernance, quelque chose s’est mis en place.
Au passage, rien ne permet dans le code des marchés publics de privilégier les entreprises locales, ce qui est un problème. De très grosses entreprises soumissionnent sur des marchés modestes et ensuite en soutraitent la presque totalité, au détriment souvent du suivi et de la qualité des travaux.
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tout à fait en accord avec les propos de zumbi.
le flou et les doutes, sont vraiment directement imputables à l’état et à l’approximation du plan marseille en grand.
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Je ne dis pas autre chose, Zumbi vous semblez me répondre mais je suis tout à fait d’accord avec vous. Là où je vois de la comm’ politicienne c’est dans l’emphase des discours de certains politiques sur ce plan, alors qu’ils n’ont pas fini de le ficeller pour qu’il soit effectif.
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