Michea Jacobi vous présente
Le nouveau piéton de Marseille

B comme …

Chronique
le 18 Juin 2016
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B comme …
B comme …

B comme …

Michea Jacobi est un artiste marcheur qui arpente la ville et, de temps en temps, en fait la chronique. Ecrivain, graveur, dessinateur, il fait un inventaire à hauteur d’homme des curiosités qu’offrent la ville et ses paysages. Il trie ce qu’il voit en suivant les 26 lettres de l’alphabet. Après les lettres Z et A nous voici à B comme… bites. À Marseille, elles n’occupent pas que les trottoirs pour repousser les voitures, elles s’attaquent aussi aux murs.
Continuons d’éplucher la ville par les deux bouts de l’alphabet. Nous avons commencé par Z de Zaha Hadid ; nous sommes ensuite allés au A des maisons d’Angle. Pour continuer notre approche de la substantifique Moelle, le M de Marseille, passons au B. Mais auparavant, un mot d’explication …

À Marseille, comme dans toutes les villes d’Europe, les façades nues, les usines et les hangars abandonnés, les bords d’autoroutes et de voies de chemins de fer, les transformateurs et les postes d’aiguillages sont ornés d’une litanie de noms tracés en lettres géantes, déformées, boursouflées, entremêlées. Ce sont les nouveaux maîtres du graffiti qui ont mis leurs « blases » en tous lieux de leur principauté, comme les seigneurs mettaient autrefois leurs blasons aux quatre coins de la leur. Ces typographes sont les lointains continuateurs des peintres de la préhistoire : leurs ancêtres projetaient leur peinture avec la bouche sur les parois des grottes, eux se servent d’aérosol pour couvrir celles de la ville. Mais ils sont aussi des artistes ultracontemporains : tout le message de leurs œuvres tient en quelques lettres : celles de leur signature. Le tag est donc finalement un art très éthéré. Autrefois les garçons (le graffiti est une activité essentiellement masculine) étaient plus frustes et moins persuadés de leur valeur. Ils ne faisaient rien de savant, ils s’oubliaient simplement à tracer de manière anonyme et grossière le signe de leur virilité, réelle ou imaginaire. Il reste à Marseille quelques retardataires  pour continuer ce genre.

… Le B consistera donc en une déclinaison de Bites, puisqu’il convient d’appeler ainsi les indélicates figures que ces obscurs phallocrates des murailles, des portails et des rideaux de fer trouvent bon de nous donner encore à voir.

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(Pour une navigation optimale, cliquez sur les deux flèches qui s’affichent en haut à droite en survolant ce portfolio et découvrez les photos de Michea Jacobi en plein écran)


À lire ou à voir

Pour la sociologie du tag

Je vous salis ma rue, un film écrit par Virginie Grandhomme sur la vidéothèque du CNRS : http://videotheque.cnrs.fr/doc=4167

Pour l’histoire des représentations phalliques

Les images sexuelles masculines de la préhistoire : http://www.hominides.com/html/art/images-sexuelles-masculines-art-prehistorique-perigord.php

Le sexe et l’effroi, de Pascal Quignard, Folio Gallimard

Michea Jacobi
Michéa Jacobi est graveur et écrivain. Il est l’auteur d’une quinzaine d’ouvrages. Chroniqueur à Marseille l’Hebdo pendant plus de dix ans, il a rassemblé ses articles dans un recueil intitulé Le Piéton chronique (Éditions Parenthèses) et il a écrit pour le même éditeur une anthologie littéraire Marseille en toutes lettres.

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