Extinction Rebellion exige de l’État l’évacuation des embarrassants déchets de Saint-Chamas
Une cinquantaine d'activistes se sont rassemblés devant la préfecture avec banderole et slogans pour demander à l’État de débarrasser les 13 000 tonnes de bordilles encore en place depuis l'incendie de l'entrepôt illégal de fin 2021.
Action d'Extinction Rebellion devant la préfecture des Bouches-du-Rhône pour demander l’évacuation des déchets illégaux de Saint-Chamas, le 10 avril 2024. (Photo : PID)
“Saint-Chamas, 13 000 tonnes de déchets toxiques, abandon criminel de l’État”. Le message est inscrit sur une banderole qui barre la porte d’entrée de la préfecture des Bouches-du-Rhône. Ce mercredi 10 avril à 14 heures, une cinquantaine d’activistes d’Extinction Rebellion (XR) habillés de combinaisons blanches et de faux masques à gaz s’installent par surprise sur le trottoir devant l’imposant bâtiment. “Pour l’avenir de Saint-Chamas nous on est là. Pour la nature qui défend ses droits nous on est là”, chantent-ils sur l’air du célèbre “On est là !” des gilets jaunes.
13 000 tonnes de déchets. Cette masse est encore à l’air libre, plus de deux ans après l’incendie – déclaré fin décembre 2021 et qui a duré plus d’un mois – d’un entrepôt de déchets à Saint-Chamas, sur fond de trafic mafieux. “Nos revendications auprès du préfet sont d’évacuer les déchets sous quinze jours. De rendre public les études environnementales qui ont été réalisées, qui ne le sont toujours pas malgré les recours du collectif d’associations locales Cistude”, expose Gilbert*.
Demande de transparence et de fermeté
Initialement, à Saint-Chamas, ce sont 30 000 tonnes de déchets que les pompiers ont découvert fin décembre 2021. Là où l’autorisation d’exploitation prévoyait un maximum de 1000 tonnes. Neuf personnes – dont deux placées en détention provisoire – ont été mises en examen un an et demi après l’incendie. Elles sont poursuivies pour gestion irrégulière de déchets, transfert irrégulier de déchets, exportation illicite de déchets, abandon illégal de déchets, escroquerie, exploitation irrégulière d’installation classée et destruction par incendie, le tout en bande organisée.
Contacté par Marsactu, Christian Marquis du collectif Cistude nous précise avoir multiplié les procédures pour obtenir un rapport de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) concernant l’impact des déchets. D’abord auprès de la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada) qui a donné raison à l’association. Puis en ayant déposé un recours au tribunal administratif depuis environ un an, qui n’a pas audiencé à ce jour. “C’est aberrant d’en arriver à des procédures juridiques alors que, selon le code de l’environnement, ce type de document est communicable de droit”, affirme le militant. Il souhaite qu’un autre rapport, dont il diffuse des éléments depuis son site internet, soit rendu officiellement accessible au public. Il s’agit des travaux de l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) portant sur les conséquences de l’incendie.
Au delà de la transparence, les militants réclament plus de fermeté sur le trafic de déchets. Depuis le pied de la préfecture, Gilbert* souhaite que l’État “s’empare de la question des déchets, pour ne plus laisser proliférer ce genre de situation. Nous voulons un durcissement de la loi. Pour l’instant c’est un panier percé dans lequel des entreprises mafieuses s’engouffrent.”
Toujours pas de feuille de route
Une partie a donc été enlevée, mais la route pour assainir complétement le site semble encore bien longue. Depuis début 2024, “la négociation est en cours pour l’achat du terrain, rappelle le maire de Saint-Chamas Didier Khelfa, joint pas téléphone. L’établissement public foncier (EPF) Paca s’en porterait acquéreur. Mais encore faut-il que le propriétaire soit vendeur. Tout dépend du prix et de l’intérêt pour vendre”, précise-t-il. C’est donc l’acquéreur qui deviendrait responsable des déchets et une solution pourrait être trouvée entre l’État et la métropole pour définitivement nettoyer le site. Contactées, ni la métropole, ni la préfecture n’ont répondu à nos questions dans les délais de publication de cet article.
“La métropole a déjà intégré le terrain dans l’extension future de la zone d’activités des Plaines du Sud”, détaille pourtant le maire. Enfin, toujours selon l’élu, les plans “vert” du ministère de la Transition écologique et pour “le recyclage des friches” du ministère de l’Économie pourraient être sollicités pour participer au financement. Le coût pourrait être de 3 millions d’euros pour enlever les déchets, selon l’estimation faite début 2024 par la métropole.
En attendant qu’une solution se dessine enfin, Didier Khelfa se veut rassurant concernant de potentielles disséminations de bordilles, affirmant que le site est sous contrôle. “Il n’y a pas d’infiltration sur la nappe phréatique ou sur la Touloubre”, ajoute le maire. Un point de vue que ne partage pas Christian Marquis du collectif Cistude. “Par fort Mistral comme aujourd’hui, on voit les plastiques s’envoler, s’accrocher au grillage ou aller plus loin. Il n’y pas de bac de rétention pour l’eau. Le bas construit pour retenir l’eau qui a servi à éteindre l’incendie a la bâche déchirée, ce qui contribue à la pollution plastique”, raconte le militant. “Les arguments des pouvoirs publics ne sont pas étayés. On ne veut pas se contenter de déclarations, on veut des preuves”, ajoute-t-il.
Plutôt que d’être reçu par le préfet ou d’avoir une promesse de rendez-vous, comme ils le demandaient, une partie des activistes d’Extinction Rebellion ont été interpelés. Au bout d’un quart d’heure après le début de l’action, les forces de l’ordre leur ont demandé de mettre fin au rassemblement. Une fois la banderole roulée et les panneaux rangés, 14 militants ont été malgré tout interpelés pour “participation à une manifestation avec le visage dissimulé”, selon la préfecture de police. Celui que les policiers ont considéré comme “le meneur” a été emmené menotté au commissariat de Noailles. Tous ont été placés en garde à vue.
*Le prénom a été modifié.
Commentaires
L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.
Vous avez un compte ?
Mot de passe oublié ?Ajouter un compte Facebook ?
Nouveau sur Marsactu ?
S'inscrire
Erreur: rendre publiques les études.. a la place de rendre public les études….
Enfin, je crois bien…:)
Se connecter pour écrire un commentaire.
Au delà de la question environnementale grave que cet accident a mis en lumière sur le trafic de déchets c’est la dernière partie de l article qui devrait nous alerter .
Je suis effarée de lire que les militants après 15 mn de manifestation ont été interpellés et placés en garde à vue . En terme de liberté d’expression et de recours abusif aux forces de police c’est inquiétant. Cette chasse systématique contre les militants écologiques pour les bâillonner est l illustration d’un État qui n en a rien à faire de l’urgence écologique et surtout de son mépris pour les “petits ” que nous sommes.
Se connecter pour écrire un commentaire.
La politique du gouvernement actuel est très explicite : traiter les activistes écolo comme des terroristes. Le petit Darmanin les désigne comme des “éco-terroristes”. S’en prendre aux messagers pour n’avoir pas à répondre au message, c’est une technique vieille comme le monde chez les irresponsables.
Se connecter pour écrire un commentaire.
et comme ils n’ont aucun argument valable, il s’arrête sur : “participation à une manifestation avec le visage dissimulé” et le meneur menotté !
mais on est où là ?
même pasqua, jadis, faisait mieux !
Se connecter pour écrire un commentaire.
Bien sur dans cette affaire le danger ce sont les manifestants !!! Le bruit des bottes …
Se connecter pour écrire un commentaire.
“Une cinquantaine d’activistes” et non “une cinquantaine de militants”, ou comment les messages subliminaux des agences de presse font leur travail.
Se connecter pour écrire un commentaire.
Ajout : même pb aux Camoins avec une volumétrie moindre et non brûlée mais c est tout pareil… solidarité avec ces courageux manifestants
Se connecter pour écrire un commentaire.