Avec La Cocarde, l’ultra-droite tente un retour par les urnes à l’université d’Aix-Marseille

Actualité
le 10 Nov 2023
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Ressuscité en 2022 par une nouvelle génération d'étudiants à Aix et Marseille, le syndicat identitaire La Cocarde a présenté une liste aux élections universitaires.

La faculté Saint-Charles à Marseille. (Photo Foudebassans / Licence Creative commons BY-SA.)
La faculté Saint-Charles à Marseille. (Photo Foudebassans / Licence Creative commons BY-SA.)

La faculté Saint-Charles à Marseille. (Photo Foudebassans / Licence Creative commons BY-SA.)

L’extrême droite radicale n’a pas disparu des bancs de l’université et projette même de s’implanter davantage à Aix et à Marseille. Elle s’incarne aujourd’hui à travers La Cocarde, une organisation étudiante d’envergure nationale déterminée à mener la “bataille des idées” contre le “gauchisme culturel”. Et, plus largement, contre “le péril migratoire venu du Sud, l’insertion d’une religion conquérante et la colonisation culturelle de notre continent par l’Amérique”, comme on peut le lire sur le site internet de la structure.

Dans les Bouches-du-Rhône, l’antenne locale avait connu une première existence. En 2015, La Cocarde avait présenté une liste aux élections universitaires d’Aix-Marseille. Avant de disparaitre. Puis de renaitre de ses cendres, cette année. En février 2023, le groupuscule reformé quelques mois plus tôt a déposé ses statuts et pris la forme d’une association. Et la voici donc ressuscitée et positionnée ces 8 et 9 novembre, dans le cadre du scrutin qui permet d’élire les représentants aux conseils centraux de l’université.

Comme on peut le lire sur l’arrêt qui recense les listes, La Cocarde a positionné six candidats pour l’élection du conseil d’administration, et deux pour la commission de la formation et de la vie universitaire, en section droit-science politique. Une fois le conseil d’administration formé, ses membres choisiront en janvier le futur président d’AMU. Contacté, le président actuel (et candidat à sa succession) Éric Berton explique “ne pas être en mesure de commenter le scrutin en cours”.

Objectif Marseille

Traditionnellement, les mouvements de jeunesse d’extrême droite sont plutôt associés au paysage universitaire aixois. Mais dans la profession de foi rédigée par La Cocarde à l’occasion de ce scrutin, c’est Marseille, et même le centre-ville, qui est d’abord ciblé. On y lit : “aujourd’hui, l’université est en première ligne face aux difficultés de notre époque. Au cœur de ces enjeux se trouvent les problèmes profonds qui minent Marseille, avec notamment la menace omniprésente de la drogue.”

Il y a une impunité autour de cette mouvance qui nous inquiète. Mais ils restent très peu visibles sur les campus.

Leonardo Pérez, Unef

Et de citer l’exemple du campus de Colbert, “où les activités de trafic de drogue ont quasiment forcé l’interruption de nos cours”. Ce n’est pas la présidence de l’université qui dira le contraire. Celle-ci avait en effet failli fermer les portes de ce campus en octobre, avant de se rétracter et d’accepter une présence policière quotidienne sur place. “Cet épisode, ça a été du pain bénit pour l’extrême droite étudiante. Il y a une impunité autour de cette mouvance qui nous inquiète. Mais ils restent très peu visibles sur les campus”, commente Leonardo Pérez, président de l’UNEF, classé à gauche.

Sur les réseaux sociaux, La Cocarde s’est filmée quelques jours avant le scrutin en train de tracter sur les campus de la Canebière, Luminy, la Timone et Saint-Jérôme. À Aix, elle aura du mal à rivaliser avec l’UNI, un autre syndicat classé très à droite et déjà très bien implanté dans la ville.

La tête de liste passée par la garde à vue

La ligne de La Cocarde n’est pas uniquement sécuritaire. Le profil de sa tête de liste, le marseillais Marc Solina, apparait très radical sur d’autres sujets. Il s’est fait remarquer en juin dernier, en marge du concert de soutien à l’ONG de sauvetage de migrants SOS Méditerranée, en déployant une banderole de plusieurs mètres avec cette inscription : “qu’ils retournent en Afrique”. Un hommage aux propos tenus, et sanctionnés, en novembre 2022 à l’Assemblée nationale par le député RN Grégoire de Fournas, interrompant la prise de parole de l’élu LFI Carlos Martens Bilongo avec les mêmes mots.

 

En juin, Marc Solina, a fait de la garde à vue après avoir déployé une banderole “qu’ils retournent en Afrique” lors du concert de soutien à SOS Méditerranée.

Suite à cette banderole, Marc Solina avait fini en garde-à-vue avec quatre autres militants. L’action a été revendiquée par une autre organisation d’extrême droite : Défends Marseille, considérée comme la jeune garde du sénateur Reconquête Stéphane Ravier. Sur le compte X (ex Twitter) d’une organisation antifasciste marseillaise, une photographie montrant l’élu aux côtés de Marc Solina, après sa garde-à-vue, a été publiée hier. Une proximité assumée par l’entourage du sénateur. “Défends Marseille, c’est un peu les jeunes de chez nous, même si certains préfèrent rester sans étiquette”, avance son assistant parlementaire Antoine Baudino, responsable départemental du parti Reconquête.

Toujours sur le même compte X, les militants assurent, photo à l’appui, que Marc Solina a participé à la manifestation nationale du 9 mai dernier à Paris, considérée comme “le rendez-vous annuel des néofascistes et des néonazis”. Pour finir, le jeune homme est aussi soupçonné de faire partie de l’Active Club, un groupe de suprémacistes amateurs de sports de combat. Contacté à ce sujet, Marc Solina a simplement décliné nos questions : “déjà que je ne parle pas aux journalistes, mais alors à Marsactu…”

Quoi qu’il en soit, toutes ces références disent quelque chose du renouveau de l’ultra-droite locale, depuis la dissolution de l’Action française, de Bastion social puis de Génération Identitaire. Le groupe Défends Marseille, auteur de la banderole, a été créé fin 2022, plus ou moins comme La Cocarde. Quant à l’Active Club, selon nos informations, une section 100 % marseillaise a été montée au printemps. Le tableau est enfin complété par Tenesoun, une structure provençale nationaliste et identitaire implantée à Avignon et Aix. Avec, à l’instar de Marc Solina, des individus qui naviguent parmi ces structures. Le tout, avec la bénédiction d’un sénateur marseillais.

Des résultats anecdotiques
Actualisation le 10/11/23 : La Cocarde est arrivée en dernière position des cinq listes qui se présentaient au scrutin pour élire le conseil d’administration avec un total de 177 voix. La liste arrivée en tête est celle présentée par la FAMI, avec 4591 voix.
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Commentaires

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  1. Franck Franck

    Excellente initiative !

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