“C’est pas nous la vache” : les habitants de Font-vert contestent la flambée des charges

Reportage
le 6 Juin 2023
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Une centaine de locataires de la cité Font-vert (13e) manifestaient lundi devant le siège de leur bailleur social, pour contester le rattrapage brutal de deux années de charges. Soit plusieurs centaines, voire plusieurs milliers d'euros par foyer.

Une centaine de locataires de Font-Vert se sont donnés rendez-vous devant le siège de Logirem pour contester l
Une centaine de locataires de Font-Vert se sont donnés rendez-vous devant le siège de Logirem pour contester l'augmentation de charges. Photo : B.G.

Une centaine de locataires de Font-Vert se sont donnés rendez-vous devant le siège de Logirem pour contester l'augmentation de charges. Photo : B.G.

Un, puis deux puis une centaine de locataires de Font-vert (14e), cité d’habitat social du grand Saint-Barthélémy, font le pied de grue ce lundi devant le siège de Logirem, boulevard National (3e). La plupart ont en main les feuillets qu’ils viennent de recevoir de la part de leur bailleur social et qui résument en quelques chiffres leur rappel de charges. Et les sommes s’envolent. Certains locataires se voient réclamer plusieurs centaines, voire plusieurs milliers d’euros, correspondant au moins à deux ans de charges cumulées. “Logirem, c’est des fous, s’esbaudit Nassim Aouid qui vient de quitter un T3 pour un T4. D’un coup, ils me prélèvent 1079 euros. Il y a 2019, 2020 et 2021, en rappel de charges”.

Au fur et à mesure des arrivées, la litanie s’élargit. Mohamed Allal évoque 2500 euros, brusquement réclamés. Son voisin d’un autre bâtiment, Guergui Manvessian, fontvertien depuis 14 ans, ne comprend la flambée des charges, passées brutalement de 105 à 158 euros mensuels pour un T2. “On est à Font-vert, pas à Cadenelle !”, rigole un grand gaillard qui a bossé comme gardien pour la copropriété luxueuse du Sud de la ville.

Des rappels de charges sur deux ans au moins

Guy Lucchesi, coordonnateur CLCV pour les quartiers Nord, tente de résumer la situation : “contrairement à ce que la loi prévoit, Logirem n’a pas régularisé les charges, année après année, pour 2019, 2020 et 2021, explique le représentant de cette association de locataires. Résultat, le bailleur réclame jusqu’à 2500 euros de rappel à certains. Une somme qui vient s’ajouter à l’augmentation de loyer en vigueur depuis janvier et la flambée du prix de l’énergie, répercutée sur certaines charges”.

La vache, c’est pas nous“, énonce une pancarte, tenue à bout de bras par une locataire qui harangue ses voisins pour reprendre un “tous ensemble” de rigueur. Les problèmes de charges ne forment que la partie émergée d’une montagne de reproches, née d’un quotidien, vécue comme une relégation. “Nous on habite les bâtiments C, juste en face du bassin de rétention qu’ils ont construit au moment du chantier de la L2, explique une dame à la tête couverte d’un foulard. Depuis, le bruit est infernal. Nuit et jour, on doit subir le vacarme de l’arrivée d’air de la rocade. Mais nous, on n’a rien demandé.”

Le sentiment de délaissement est accentué par un effet de contraste. Font-Vert est situé de l’autre côté de Picon et de la Busserine, deux cités dont le visage a été profondément modifié par des projets de renouvellement urbain, en partie justifiés par l’arrivée de la rocade qui traverse le quartier en souterrain. Mais du côté droit du chantier, rien, ou presque. Inscrit dans la prochaine vague de projets de rénovation urbaine, la cité attend encore les derniers arbitrages financiers pour savoir à quelle hauteur elle sera rénovée.

“Les rats, les cafards, les délinquants”

En attendant, les habitants se focalisent sur un cadre de vie qui dévisse inexorablement. “Le propriétaire est censé être le garant d’une certaine quiétude, expose Zhaya Bostami. À Font-vert, c’est tout le contraire. On vit avec les rats, les cafards et les délinquants qui nous pourrissent la vie. La dernière réhabilitation date de 1995. On est en 2023, et y’a rien qui va”. À côté d’elle, une voisine souligne ses volets impactés par un tir d’arme à feu et “jamais changés malgré nos demandes”. “On a beau demander, ils ne font rien, poursuit Zhaya. C’est ni oui, ni non, walouh !

La construction de la cité a été amortie depuis longtemps, analyse Tahar Bahou, la cinquantaine qui a grandi dans la cité. Avec ce qu’on paie, il aurait pu refaire dix fois déjà. Mais ils continuent à réparer avec des pansements et du sparadrap“. Un autre locataire évoque les chicanes mises en place par le réseau pour protéger ses affaires “et qu’on est obligés de déplacer nous-mêmes parce que le bailleur ne veut pas intervenir”.

Côté bailleur, on ne nie pas tout à fait la flambée des charges. Le directeur général délégué, Frank Nicol prend le temps d’aller au devant des manifestants. “La période du Covid et l’absence de certains collaborateurs a provoqué un important retard dans la régularisation des charges générales. Nous sommes donc contraints de régulariser les charges des deux dernières années, de façon progressive”. Il évalue à 20 euros l’augmentation moyenne des charges en rattrapage de ces deux années oubliées. Un communiqué de Logirem avance une fourchette “entre 13 et 35 euros par mois et par logement”.

“Ils jouent à la ploum avec les locataires”

À ces charges fixes, il faut ajouter le rattrapage d’eau et de chauffage qui peut provoquer une flambée supplémentaire, très variable selon les foyers. “Il suffit d’une chasse d’eau qui fuit, vous savez”, commente le directeur général adjoint. Sur certaines feuilles que nous présentent les locataires, la consommation d’eau peut brusquement passer de 28 à 95 mètres cubes annuels.

“Logirem, justifie nos charges”, peut-on lire sur les pancartes. (Photo : BG)

À l’issue du rassemblement, le bailleur a accepté de recevoir une délégation des différentes associations de locataires. Une permanence bihebdomadaire doit permettre de régler les cas individuels. Dans sa communication, le bailleur met également en avant un fonds de solidarité destiné à venir en aide aux “locataires les plus fragilisés par la conjoncture”.

On dirait qu’ils ont joué à la ploum avec nous, formule Jasmine Ziani, 20 ans qui vit à Font-vert avec ses quatre frères et sœur. L’augmentation de charges ne correspond à aucun service. Quand la femme de ménage passe dans notre bloc, ça laisse juste une odeur nauséabonde. Ils ne se rendent pas compte qu’en nous laissant vivre dans ces conditions, cela nous déshumanise“.

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Commentaires

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  1. Dark Vador Dark Vador

    “explique une dame à la tête couverte d’un foulard”… Pourquoi cette précision?
    Il y avait aussi beaucoup d’hommes avec casquette et même un monsieur avec un chapeau qui ne sont pas mentionnés…

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  2. Dark Vador Dark Vador

    La question importante étant le retard de régularisation des charges évidemment, pour quelles raisons cet “oubli” dans un organisme aussi important et sensible…

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    • julijo julijo

      bonne question !
      je propose : parce qu’ils s’en foutent !

      fontvert est situé de l’autre côté de la l2, elle était avant situé de l’autre côté de la voie rapide qui passait sous le carrefour et le théâtre. depuis la construction de cette voie (40 ans ?) la cité a été dissociée de ses voisines picon et busserine (anciennes “trois cités”) et abandonnée à elle-même.
      la rénovation attend les derniers arbitrages financiers ? gageons que cela va durer encore 10 ans…

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