Mes châteaux d’If: “Viens avec tes doutes, repars sûr de toi.”*

Mes châteaux d’If: “Viens avec tes doutes, repars sûr de toi.”*

Ou ne reviens pas. C’est avec un beau slogan comme celui-ci qu’on attrape à chaque génération des petits gars qui vont mourir pour la patrie.

A chaque fois, leurs familles apprendront trop tard quelle boucherie ce fut et combien leurs combats furent non seulement vains mais qu’ils ne rapportèrent de médailles qu’aux invisibles financiers et à la formidable industrie de guerre. A nous les monuments aux morts, à eux la vie trépidante. C’est dans une salle d’attente que j’ai eu la surprise de trouver un numéro du journal des gueules cassées. Avec la mention Sourire quand même. Croiriez vous que cette revue fusse pacifiste? Que nenni. Si elle prend en charge les personnes atteintes de ces morsures atroces de la chair, la revue ne conçoit pas de rancune envers le militarisme. Tout le contraire du livre de Pierre Lemaitre, Au revoir la Haut.

Avec la livraison de chars légers ou lourds à l’Ukraine, (On se fout d’ailleurs de leur poids) la France assume son rôle de pourvoyeuse de morts, de vendeuse d’armes. Elle a le beau rôle, minaudant dans son refus officiel d’entrer en guerre avec l’URSS. Après avoir vendu aux Émirats Arabes Unis, 85 rafales, après avoir armé l’ Arabie Saoudite pour foutre sur la gueule du peuple yéménite, tenté de vendre à la Colombie des avions…la France passe à l’attaque.La Pologne explose son budget militaire. La Norvège tend ses muscles et la Suède mobilise ses civils en cas de guerre.

Depuis un an, le mouvement pacifiste, mort né devant les canons médiatiques anti-russes, ne parvient pas à exister face aux discours guerriers. La population européenne est nourrie à la peur de l’invasion russe. Cela permet à toute l’industrie de guerre de se refaire une santé. L’Europe n’a plus d’argent pour ses hôpitaux mais elle en trouve pour ses chars. Les écoles françaises ne parviennent pas à absorber les réfugiés ukrainiens alors que la France se permet de vendre du matériel de mort à l’Ukraine.

Le Japon ou l’Allemagne ont décidé d’un fantastique et inédit réarmement tandis que l’Inde ou la Corée du Nord poursuivent leurs importations. La France se réjouit de ventes records partout dans le vaste monde.

“La guerre c’est simple: c’est faire entrer un morceau de fer dans un morceau de chair.” ( Mourir à Madrid. Frédéric Rossif)

Une des rares revues à s’opposer au réarmement mondial et au militarisme, est La Décroissance. Dans son numéro de mars, elle règle son compte aux Verts KAKI, parti va-t-en guerre, surtout pour les autres. L’Obs de son coté a réalisé quelques reportages sur les objecteurs et insoumis ukrainiens. Et le Monde Diplomatique dans son édition de mars 2023 tente encore une fois de montrer comment les médias sont entrés en guerre, la bonne, la dernière…

Les ukrainiens et les Russes crèvent pour que les industries de l’armement vivent. Frédéric Gros, philosophe, explique dans son livre Pourquoi la guerre? les ressorts des guerres.

« Ce que fut la guerre (celle de 14-18) pour tant de très jeunes garçons : quatre ans de grandes vacances ».

Dans Journal d’une invasion (Les Cahiers Ukrainiens), IGORT écrit ” Une guerre n’est jamais qu’une saloperie de guerre. Il n’y a pas d’épopée, pas de gloire, que de la misère.” Igort n’élude pas le fait qu’il pense qu’il s’agit d’une invasion mais s’autorise à raconter aussi la tristesse de ces jeunes hommes engagés coté russe. Eux n’ont plus n’ont pas choisi ce conflit. Ces cahiers ukrainiens réalisés dans un temps très court n’ont pas la force d’une fiction mais sont une réponse en images à cette guerre.

Dans un style féministe sans être belliqueux, Virginie Augustin et Julien Hervieux sortent TOUJOURS PRÊTES, une série instructive et en images de huit histoires de femmes combattantes. Pour le coup, l’auteur a fait fort en découvrant certaines femmes très invisibles et traités ainsi par l’Histoire.

L’une d’elles, Nancy Wake, une journaliste australienne ne supporte pas les nazis quand elle débarque en Allemagne. Mariée en France, elle devient spécialiste de l’évasion et hérite du surnom de Souris Blanche.

Une guerre avant, Milunka Savic sa fait passer pour un homme pour combattre contre les Bulgares en 1913. Elle attaque seule les lignes ennemies. Elle redeviendra femme de ménage après le conflit et complétement anonyme. L’ histoire des sorcières de la nuit, ces aviatrices russes qui ont combattu à partir de 1941, n’est pas là pour faire briller la sublime URSS. Comme bien des combattants, elles disparaitront des podiums pour s’effacer devant la gloire éternelle du petit père des peuples, comme dirait le leader maximo des Bouches du Rhône, Olivier Mateu. Le secrétaire départemental de la CGT s’en sort plutôt bien dans la page que lui consacre le journal com-interne de la CMA-CGM, La Provence. Mis à part sa mise au pilori pour stalinisme et son appartenance à la FSM, un panier de staliniens, plutôt qu’à la confédération européenne des syndicats, un nid de truands, son pacifisme de classe rappelle les jours anciens de la CGTU. Avant qu’ils tuent Jaurès. La Provence a du coup payé le prix de cet article en étant disjoncté hier par solidarité énergétique. Cela montre en tout cas, qui a le pouvoir.

En matière de pacifisme, il faut toujours relire Giono. La sortie de L’experience Giono de Jean Luc Sahagian, auteur marseillais, est une plongée originale dans sa propre découverte de l’œuvre de Giono, ce besoin de paix que l’auteur va découvrir dans son exil en Cévennes. Cette lecture libertaire ne trahira pas les pensées de Jean Giono.

*SLOGAN DE RECRUTEMENT DE L ARMÉE FRANÇAISE.

Le dernier livre de Frédéric GROS diffusé sur France Inter : Pourquoi la Guerre?