IHU de Marseille : les ravages d’une expérimentation sauvage contre la tuberculose
Depuis 2017, l’IHU de Marseille mène une expérimentation sauvage contre la tuberculose, provoquant chez plusieurs patients, dont un mineur, de graves complications. En 2019 et 2020, l’ANSM n’a pas autorisé cet essai mené en toute irrégularité. Une enquête de notre partenaire Mediapart.
Didier Raoult lors d'une conférence de presse en septembre 2020. (Photo : Emilio Guzmán).
La crise du Covid a révélé comment le professeur Didier Raoult pouvait s’affranchir des règles de méthodologie scientifique et d’éthique, en prescrivant comme traitement l’hydroxychloroquine, dont l’inefficacité a depuis été prouvée.
Pour justifier de telles pratiques, Didier Raoult brandissait alors l’urgence de la pandémie et la méconnaissance scientifique du virus.
Mais ces méthodes ne sont pas nouvelles. Inquiets de voir des patients mis en danger, en dehors de toute situation d’urgence sanitaire, des membres de l’Institut hospitalo-universitaire (IHU) ont décidé de nous alerter sur une expérimentation sauvage menée contre la tuberculose au sein de l’Institut, initiée par son directeur, Didier Raoult, et son adjoint, Michel Drancourt.
Des comptes rendus d’hospitalisations et des échanges de courriels que Mediapart a pu consulter révèlent que depuis au moins 2017 et jusqu’en mars 2021, l’IHU a prescrit, malgré les refus de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), une combinaison de quatre médicaments, dont l’efficacité dans le traitement de la tuberculose n’a jamais été démontrée, ni même évaluée, et qui pouvait même être toxique.
Plusieurs patients, dont un mineur de 17 ans, ont eu de graves complications médicales provoquées par ce traitement. En novembre 2019, alertée par le Centre nationale de référence (CNR) de la tuberculose, la Société de pathologie infectieuse de langue française (Spilf) est intervenue auprès de Didier Raoult et de son équipe alertant, en vain, sur la “perte de chance” pour les patients ainsi traités.
Une situation “pas admissible” pour l’ANSM
Contacté par Mediapart, le directeur de l’Assistance publique-hôpitaux de Marseille (AP-HM), François Crémieux, déclare qu’”en lien avec les autorités de tutelle, l’ANSM et l’ARS, l’AP-HM donnera suite à toutes les alertes sur cet essai non autorisé et sur ses complications”. Il annonce également que “des enquêtes seront diligentées sans délai, des mesures prises en cas de manquements, afin qu’aucun essai clinique ne puisse plus être mené en dehors de toute réglementation”.
“Alertée sur de possibles manquements de l’IHU de Marseille à la règlementation des essais cliniques” concernant d’autres maladies, l’Agence de sécurité du médicament précise avoir “mené des investigations” ayant confirmé que certaines études n’ont pas été menées “conformément à la législation encadrant les recherches impliquant la personne humaine“. Réagissant à nos informations, l’ANSM estime que cette situation “n’est pas admissible” et signale que “les suites adéquates sont initiées”. Sans apporter davantage de précisions sur la nature des actions engagées mais en rappelant que selon le Code de la santé publique, enfreindre la législation en matière d’essais cliniques est passible d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
Contactés, le directeur de l’IHU, Didier Raoult, son adjoint, Michel Drancourt, le chef de pôle des maladies infectieuses, Philippe Brouqui, ainsi que l’infectiologue Philippe Parola, n’ont pas répondu à nos questions.
Des antibiotiques non-recommandés par l’OMS
Comment en est-on arrivé là ? En France, la tuberculose, infection due à une mycobactérie qui atteint le plus souvent les poumons, affecte chaque année près de 5 000 personnes. Elle est particulièrement contagieuse : dès qu’un cas est détecté, il doit faire l’objet d’une déclaration, déclenchant une enquête des autorités sanitaires, en l’occurrence les centres de lutte antituberculeux (Clat), afin d’isoler la personne pour éviter la propagation de la maladie au sein de la famille ou de l’entourage.
“Depuis vingt-cinq ans, il existe des traitements efficaces contre la tuberculose (non résistante, dite “à bacille sensible”). En France, on parvient à guérir 95 % des patients avec ces traitements, tout en en limitant les effets indésirables”, nous précise le professeur Vincent Jarlier, ancien directeur du centre national de référence de la tuberculose, de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris.
Ce traitement consiste à associer, pendant six mois, quatre antibiotiques recommandés par les instances sanitaires nationales et internationales, dont l’OMS.
“Pour la tuberculose multirésistante ou ultrarésistante, c’est-à-dire résistante aux antibiotiques standards, on parvient, en France, depuis plus de cinq ans, à traiter efficacement la majorité des patients. Le traitement est lourd et long, de neuf à vingt-quatre mois, et nécessite de vérifier quels antibiotiques peuvent être actifs”, précise-t-il. Il existe une liste d’antibiotiques recommandés par l’OMS et classés selon leur degré d’efficacité, réévaluée chaque année.
Deux des quatre molécules incluses dans le protocole non autorisé de l’IHU (la sulfadiazine et la minocycline) ne sont pas dans cette liste. Or une tuberculose doit être traitée avec au moins trois à quatre antituberculeux. Les deux autres (la clofazimine et le pyrazinamide) y figurent, avec une efficacité limitée pour l’une, et faible pour l’autre.
Didier Raoult s’est “entêté”
La tuberculose touche majoritairement des personnes précaires. L’une des difficultés inhérente à la longueur du traitement et aux conditions de vie des patients est notamment d’éviter l’interruption de la prise des médicaments. C’est pourquoi l’un des axes de recherche est la réduction du temps de traitement.
Interrogé sur le protocole sauvage mené par l’IHU, Vincent Jarlier précise en avoir été alerté en 2019, lorsqu’il dirigeait le centre national de référence, à la Pitié-Salpêtrière, à Paris.
“Ce traitement ne correspond à aucune recommandation internationale. L’IHU associe quatre antibiotiques dont deux, la minocycline et la sulfadiazine, n’ont pas prouvé leur efficacité contre la tuberculose, par exemple dans des modèles animaux. La sulfadiazine peut entraîner des complications, notamment dermatologiques. Ne pas appliquer les recommandations internationales représente une perte de chance pour les patients”.
Il a voulu trouver dans d’anciens antibiotiques un traitement efficace en essayant de réduire drastiquement le temps de prise en charge des patients.
“On l’a vu pour le Covid, Didier Raoult veut avant tout faire parler de lui. Il ne se préoccupe plus de la santé des patients mais davantage de sa renommée. Pour la tuberculose, il a voulu trouver dans d’anciens antibiotiques un traitement efficace en essayant de réduire drastiquement le temps de prise en charge des patients”, nous explique Laurent* , qui a dû prescrire ce protocole pour l’IHU.
“Mais il n’y avait pas de données scientifiques permettant réellement de présupposer de leur efficacité et de les tester directement sur l’homme. Didier Raoult a eu une idée qu’il pensait géniale et s’est entêté sans reconnaître ses erreurs. Ces essais ont été menés en toute illégalité, et il fait porter la responsabilité sur les jeunes médecins et internes de son équipe”, regrette-t-il. Pour un médecin, prescrire un traitement dans le cadre d’un essai non autorisé avec des risques de complications peut déclencher à la fois des sanctions ordinales prises par le Conseil de l’ordre (pouvant aller jusqu’à la radiation) mais aussi des poursuites pénales, s’agissant d’une infraction au Code de la santé publique.
Laurent poursuit : “Nous avons constaté de graves complications rénales sur certains patients mais je ne sais pas si ces effets ont été officiellement déclarés puisque cet essai n’était de toute façon pas autorisé. C’est bien de faire de la recherche mais encore faut-il la mener en respectant les patients”.
Des équipes sous pression
Les équipes de l’IHU travaillent “de leur côté, de façon assez isolée. On se laisse pénétrer par l’idéologie selon laquelle on est les meilleurs. Et de ce fait, on fonctionne en autarcie en perdant de vue les règles scientifiques et médicales”, précise-t-il.
Laurent a pu parfois éviter de prescrire ces médicaments mais le plus souvent, “sous la pression”, il a dû s’y plier. “La majorité d’entre nous dépend de Didier Raoult et de l’IHU pour la validation des diplômes, déplore-t-il. Nous sommes coincés dans une situation humainement intenable. Au quotidien, il veut faire du buzz en perdant de vue toute réflexion autour de la santé. C’est une perte de sens de notre métier”.
Comme Laurent, Alban travaille pour l’IHU et témoigne également sous couvert d’anonymat parce qu’il peut “tout perdre en dénonçant cette situation. Didier Raoult fait régner la terreur. Mais la goutte d’eau a été de voir deux patients finir en urgence au bloc opératoire pour des complications rénales qu’on aurait pu éviter. Ils sont roumains et ne porteront jamais plainte. Ils ne se doutent même pas qu’ils ont été utilisés pour des essais interdits. Je suis épuisé de constater qu’il met en danger les patients en tout impunité, en se présentant auprès de l’opinion publique comme un sauveur. Ce qu’il n’est pas ou plus”.
Didier Raoult utilise des patients, précaires et souvent étrangers comme des cobayes. C’est inhumain.
Alban ne “supporte plus de voir des patients dont la guérison est plus longue, repartir chez eux et contaminer une famille, parfois des enfants, parce que le traitement n’est pas efficace. Didier Raoult utilise des patients, précaires et souvent étrangers comme des cobayes. C’est inhumain”.
Il vivait pourtant son arrivée au sein de l’IHU comme “une consécration. Je pensais être au cœur d’une recherche d’excellence au service des patients. Mais je sers un tyran avide de renommée. Aujourd’hui, je n’ai qu’une envie : en partir au plus vite“.
Alban s’interroge également sur l’inaction des instances sanitaires et “leur peur d’interférer dans les pratiques de Didier Raoult”.
Dès 2019, l’ANSM refuse d’autoriser des essais humains
Le 6 août 2019, alors qu’il administre le traitement depuis au moins deux ans, l’IHU soumet à l’ANSM un dossier de demande d’autorisation pour pratiquer un “traitement court de la tuberculose pulmonaire”, avec les quatre antibiotiques précités. L’investigateur de cet essai, en charge de le diriger et le surveiller, est l’IHU. L’AP-HM en est le promoteur, c’est-à-dire celui qui en assume le financement et la responsabilité.
Le 12 septembre 2019, l’ANSM adresse à l’IHU une série de questions et d’observations, soulevant sans détour le bien fondé d’un tel essai. Les remarques sont sans appel. “Aucun argumentaire scientifique n’est apporté sur le choix des molécules, l’association, la posologie et la durée du traitement envisagée”. Les références bibliographiques citées ne permettent pas “de justifier du rationnel de l’essai”, voire “sont extrêmement limitées et contradictoires”.
Il n’y a aucune donnée « in vivo », pas même dans un modèle animal, permettant d’avancer l’efficacité de certains antibiotiques comme la sulfadiazine. De même pour la minocycline. Si l’étude prise comme référence par l’IHU apporte des données intéressantes, l’ANSM rappelle néanmoins qu’il s’agit de “données préliminaires” et “qu’un essai doit être réalisé dans la tuberculose du macaque”. La conclusion de l’ANSM est là encore catégorique : “Ces données ne permettent pas en l’état actuel des connaissances scientifiques de passer à un essai humain directement”.
L’Agence rappelle également que l’une des études avancées par l’IHU, réalisée par ses équipes ayant prescrit ce traitement en 2013, ne permet pas de conclure à une quelconque efficacité car non seulement le protocole n’a été suivi que 90 jours, “ce qui est insuffisant pour conclure à une guérison”, mais, de surcroit, y a été ajouté, au bout des trois mois, un autre antibiotique, la bédaquiline, à l’efficacité démontrée et faisant partie des recommandations de l’OMS.
Le comité d’évaluation s’interroge sur l’utilité d’un tel essai proposé par l’IHU pour remplacer un “traitement de référence qui fonctionne dans plus de 95 % des cas, dont les risques sont bien connus et qui, en cas de résistance ou d’intolérance, comporte des alternatives avec les nouvelles molécules qui ont prouvé leur efficacité”.
L’IHU ne déclare pas les effets indésirables constatés
L’ANSM relève également de nombreuses carences dans l’encadrement des patients et le risque de rechute. Un certain flou règne dans la présentation scientifique et médicale de cet essai : les critères d’inclusion d’un patient ne sont pas spécifiés et le plus grand doute plane sur le type de tuberculose traitée (sensible ou multirésistante). L’IHU ne dit rien de sa responsabilité en tant qu’investigateur, alors qu’il est normalement obligé de déclarer les complications liées au traitement. L’Agence lui rappelle que l’Institut se doit d’alerter sans délai le promoteur (AP-HM) en cas d’effets indésirables. Ce qu’il ne fera pas.
L’Agence de la sécurité du médicament ne recevra pas non plus les précisions demandées. Contactée par Mediapart, l’ANSM déclare qu’à la suite “des questions et des demandes d’informations au vu des insuffisances notables du dossier, soulevant de nombreuses interrogations sur la justification de l’étude , au regard de la sécurité des participants à la recherche et de leurs modalités de suivi”, l’AP-HM a informé l’ANSM de “sa décision de retrait de sa demande d’autorisation d’essai clinique le 26 septembre 2019. Cette recherche n’a donc pas été autorisée”.
Alban témoigne : “La demande a été abandonnée parce que l’Agence, à juste titre, a soulevé un grand nombre de questions sur l’efficacité du traitement et la sécurité des patients”.
“Qu’a fait l’ANSM pour se donner les moyens de contrôler de telles pratiques ?”
“Cet essai a donc été mené en tout illégalité : avant, pendant et après cette demande d’autorisation abandonnée. Qu’a fait l’ANSM pour se donner les moyens de contrôler de telles pratiques ?”, s’interroge-t-il.
Cet essai, qui ne figure dans aucune base internationale des essais cliniques, n’a reçu aucune autorisation alors même qu’étant de type “interventionnel” 1, c’est-à-dire impliquant une intervention sur la personne non justifiée par la prise en charge habituelle et non dénuée de risque, il a obligation d’obtenir l’autorisation préalable de l’ANSM.
En juillet 2020, une autre demande a été faite par l’IHU sur un protocole similaire au premier. Là encore, elle a reçu, en décembre 2020, un refus de l’ANSM. La combinaison des quatre médicaments est la même, à une différence près : l’un des antibiotiques, la sulfadiazine, induisant des complications rénales, a été remplacé par un autre (dont l’efficacité dans le traitement de la tuberculose n’a pas davantage été évaluée).
À la suite de graves complications provoquées par la sulfadiazine, des médecins de Marseille ont par ailleurs fait part de leurs préoccupations auprès du CNR des mycobactéries et de la résistance des mycobactéries aux antituberculeux, à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, en charge de surveiller les nouveaux cas d’infections, à l’échelle nationale et de proposer des traitements adaptés.
À partir de novembre 2019, des alertes vers le CNR affluent. Des médecins du centre de lutte antituberculeuse des Bouches-du-Rhône et de l’hôpital public de la Timone font part de leur incompréhension sur les médicaments prescrits par l’Institut.
Plusieurs cas graves de complications rénales après le traitement
La situation est inquiétante. Parmi les comptes rendus hospitaliers que Mediapart a pu consulter, l’un révèle qu’un mineur de 17 ans, d’origine tchétchène, diagnostiqué pour une tuberculose multirésistante et suivi (du 27 septembre au 24 octobre 2019) par le service d’infectiologie de l’IHU, a été traité avec cette combinaison de médicaments non autorisée. L’un des antibiotiques, la sulfadiazine, a provoqué une grave complication rénale, une hématurie (du sang dans les urines pouvant compromettre le fonctionnement du rein touché).
En décembre 2019, une alerte est lancée par un autre médecin, infectiologue, qui signale “un cas de prise en charge “inadaptée”” d’un patient âgé de 62 ans, “mis sous traitement pour une tuberculose pulmonaire en octobre 2019 selon un “protocole IHU””.
Résultat : il a fini au bloc opératoire pour une réaction à la sulfadiazine provoquant une insuffisance rénale aigüe, compromettant le fonctionnement du rein et nécessitant la pose d’une sonde (dite JJ) pour le désobstruer.
Il n’est pas le seul à avoir fini au bloc. Un autre patient, un Roumain de 39 ans, sans domicile fixe, suivi par l’IHU en juin 2019 pour une tuberculose multirésistante (MDR), a lui aussi dû être opéré en urgence pour une “pyélonéphrite obstructive sur cristallurie à l’Adiazine [nom commercial de la sulfadiazine – ndlr] », une insuffisance rénale aigüe obstructive sur laquelle s’est rajoutée une infection. Là encore, une intervention en urgence a été nécessaire pour sauver le patient et lui poser une sonde qu’il a dû garder plus de neuf mois.
“C’est honteux de prescrire encore de la sulfadiazine”, commente le chef de service des maladies infectieuses de la Pitié-Salpêtrière, le professeur Éric Caumes, qui connaît bien cette molécule pour l’avoir prescrite “dans les années 80-90, dans les cas de toxoplasmose cérébrale (infection du système nerveux centrale) du sida et même aujourd’hui, on estime que le médicament est très toxique et on le prescrit avec les plus grandes réserves”.
Le pire est que les complications rénales dues à la sulfadiazine sont connues et elles doivent être systématiquement prévenues.
Éric Caumes, chef de service à la Pitié-Salpêtrière
“Je suis horrifié de savoir qu’un tel traitement puisse être ainsi prescrit contre la tuberculose, poursuit-il. Le pire est que les complications rénales dues à la sulfadiazine sont connues et elles doivent être systématiquement prévenues par le fait de boire une certaine eau gazeuse, sauf que ça a un prix et que c’est évidemment inabordable pour des patients souvent en grande précarité”.
Des patients qui restent contagieux
Non seulement ce traitement peut induire de graves complications, mais, peu efficace, il est susceptible de rallonger le temps pendant lequel le patient reste contagieux, voire de compromettre sa guérison et d’accroître les risques d’infection pour l’entourage.
C’est le cas rapporté par le service de pédiatrie de l’hôpital public de la Timone. L’un des médecins signale, en septembre 2019, l’hospitalisation d’un nourrisson de 11 mois, dont la “radiographie thoracique anormale laisse suspecter une tuberculose”, nécessitant d’autres examens dont une fibroscopie des bronches.
Selon l’enquête menée dans son entourage, l’origine de l’infection de ce nourrisson s’oriente vers son grand-père, qui en a eu la garde durant trois mois, de mars à mai 2019. La suite du compte rendu médical est affligeante. Son grand-père était également suivi pour une tuberculose multirésistante par le service d’infectiologie de l’IHU. Il avait, de janvier 2017 à août 2018, été mis sous le protocole non autorisé, provoquant à deux reprises des épisodes de cristallurie, complication rénale due à la sulfadiazine. Il avait arrêté lui-même son traitement, entraînant une rechute. Malgré ces éléments, une consultation n’avait été programmée avec l’IHU que 9 mois après l’arrêt de son traitement, soit en mai 2019.
Il y a en moyenne soixante-dix cas de tuberculose par an dans le département des Bouches-du-Rhône. Combien de patients ont ainsi été traités ? Combien ont eu des complications ? Impossible de le savoir, compte tenu de l’absence de cadre éthique lors de cet essai.
La Société de pathologie infectieuse “coincée”
Très préoccupés par la situation et l’absence de discussion possible avec leurs collègues de l’IHU, les médecins du Centre national de référence ont tenu à en informer, à partir d’octobre 2019, la Société de pathologie infectieuse de langue française (Spilf).
“Ça fait peur (…) On ne peut laisser faire. Il y a clairement une perte de chance pour les patients”. C’est dans ces termes qu’en novembre 2019, la Société de pathologie infectieuse réagit à l’un des courriels d’alerte du CNR, au regard des dossiers médicaux de plusieurs patients.
Le 14 novembre 2019, la Spilf fait part de ses inquiétudes par courriel à l’IHU. Il est question d’un patient atteint de tuberculose et suivi à l’Institut depuis décembre 2018, selon un ” traitement alternatif”. Non sans précautions, la société se dit “coincée entre deux considérations”. La première est de respecter la “non-ingérence, considérant la qualité de vos équipes”. La seconde, et non des moindres, est “la perte de chance très probable pour ce patient, si on considère qu’il lui manque deux des trois principales molécules recommandées par l’OMS et les experts (les deux dont le bénéfice a été démontré par de belles études randomisées)”.
La société poursuit en signalant que la multirésistance de la tuberculose de ce patient est “déjà le résultat d’un premier traitement qui ne semble pas adapté…”.
La réponse de l’IHU ne se fait pas attendre. Quelques heures plus tard, le chef de pôle marseillais des maladies infectieuses, Philippe Brouqui, ayant mis dans la boucle des échanges son mentor Didier Raoult, et ses affidés, son adjoint, Michel Drancourt, le chef du service des hospitalisations de l’IHU, Jean-Christophe Lagier, ainsi que le chef de service des maladies infectieuses de l’IHU, Philippe Parola, répond : « Je pencherai pour le petit un », la non-ingérence.
Des patients en danger, “en dehors de tout cadre éthique”
Contacté par Mediapart, le président de la Spilf, le professeur Pierre Tattevin, n’a pas souhaité commenter la situation. Le directeur du centre national de référence des mycobactéries, le professeur Jérôme Robert, confirme quant à lui que “le protocole cité ne suit pas les recommandations de l’OMS pour le traitement des malades atteints de tuberculose multirésistante aux antibiotiques”.
Certes, il comprend qu’“un régime thérapeutique non recommandé et non éprouvé puisse être utilisé mais cela dans les cas “désespérés” c’est-à-dire ceux pour lesquels les antibiotiques de la liste recommandés par l’OMS ne sont pas utilisables“. Toutefois, il souligne que “tout nouveau traitement doit suivre les règles de tests d’efficacité dans un cadre extrêmement strict et réglementé des essais de recherche clinique”.
Une spécialiste de la tuberculose, elle aussi alertée sur les complications des patients pris en charge par l’IHU,s’interroge : “Qu’on fasse de la recherche et que parfois on tente des traitements pas forcément classiques, cela peut arriver pour sauver un patient pour lequel il n’y a plus d’option thérapeutique disponible. Mais qu’on conduise un essai clinique de la sorte mettant en danger des patients en dehors de tout cadre éthique, au-delà d’être illégal, est inacceptable déontologiquement. Mais a-t-on suffisamment alerté ?”.
“Soulagé que la presse s’empare du sujet “, cette médecin estime qu’elle aurait “dû aller plus loin. Je n’en ai pas dormi de la nuit. Face à une telle situation, notre intervention peut être vue comme une dénonciation par nos collègues, et pour autant, on ne peut pas laisser faire. Mais, par ailleurs, qui alerter quand c’est toute une structure qui dysfonctionne ?”
Commentaires
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On est là dans le domaine de la folie pure. Contrairement au covid, maladie nouvelle contre laquelle, légitimement, on pouvait tenter de trouver un traitement en exploitant des intuitions, la tuberculose se soigne bien avec les médicaments disponibles.
Quand les autorités médicales siffleront-elles la fin de la récréation dans cet IHU, où les malades sont au service de quelques ego surdimensionnés, et non l’inverse ?
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Cet institut, avec son patron me fait penser de plus en plus au Dr Strangerlove.Dr Folamour in french.
Finalement ,les scénaristes,entre les politiques locaux ,les furieux avec leurs “ego”,les assassinats et la drogue n’ont pas trop à se casser la nénette.
Voyez Macron avec son idée de Bollywood marseillais n’est pas forcément à côté de de ses pompes
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On attend avec impatience la réaction de Vassal, Muselier et Rubirolla !
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Je ne me prononcerai pas sur le sujet de la tuberculose, que je ne connais pas. Votre enquête semble fouillée et accablante.
En revanche, votre premier paragraphe “La crise du Covid a révélé comment le professeur Didier Raoult pouvait s’affranchir des règles de méthodologie scientifique et d’éthique, en prescrivant comme traitement l’hydroxychloroquine, dont l’inefficacité a depuis été prouvée” est très tendancieux : je connais beaucoup de malade du COVID qui ont été soignés par le cocktail hydroxychloroquine + azitromycine. J’imagine qu’ils ont arrêté là la lecture de votre article… et ça fait beaucoup de monde ! Si Marsactu est si sûr de la démonstration de l’inefficacité de ce cocktail (et éventuellement des autres traitement testés à l’IHU), vous devriez faire un article dessus… mais je vous suggère de commencer par un sondage à Marseille, vous risqueriez de perdre pas mal de lecteurs…
Une chose que j’ai cru comprendre de la crise du COVID, c’est que notre système de santé et bien corrompu par l’industrie du médicament et que l’ANSM est un des acteurs de ce système. Du coup c’est la guerre entre l’IHU et l’ANSM et, dans cette guerre, le dossier de la tuberculose ressort. On en aurait jamais parlé sinon…
Mais encore une fois, je ne connais rien à ce second dossier, et je peux tout à fait imaginer que l’IHU ait déconné.
Clairement Didier Raoult est un désobéissant. J’avoue trouver ça sympathique et même trouver rassurant que notre système de santé ne soit pas fait que de robots obéissants… mais effectivement si l’IHU s’est trompé pour la tuberculose et a persisté dans l’erreur, c’est bien malheureux pour les victimes et l’IHU doit le reconnaître. Mais à cause de votre 1er paragraphe, je ne suis pas totalement convaincu par votre enquête…
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il n’ose pas dire que Raoult est un génie mais il le dit tout de même …Comment il se tortille pour le défendre …!!!
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Il me semble bien avoir lu à différentes reprises que plusieurs études scientifiques, françaises et mondiales, CNRS compris, ont toutes conclu à l’inefficacité de l’hydromachinquine dans tous les cas de covid. Après, on peut aussi penser que a fait partie du complot mondial contre les marseillais et contre Raoult.
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Par chance, le consensus scientifique ne se construit pas par sondage dans les rues de Marseille. Mais quand bien même ce serait le cas, je doute fort que, contrairement à ce que certaines personnalités politiques locales pensaient non sans arrière-pensées électoralistes, Raoult soit considéré comme un sauveur par la majorité des habitants de la ville.
Son “protocole” (dont on ne sait plus s’il contient de l’hydroxymachin ou de l’ivermectine, puisque l’IHU prescrit les deux au petit bonheur la chance) a surtout “guéri” des gens jeunes et en bonne santé. Et aurait tué quelques personnes âgées au Brésil, où il est examiné par la Justice.
Raoult est d’abord un mandarin à l’ancienne, avec un melon qui ne passe plus les portes. Contrairement à l’image qu’il se donne, c’est tout sauf un contestataire, sinon il ne serait pas arrivé là où il est : il est surtout d’accord avec lui-même et ne supporte pas la contradiction, même quand il se trompe et s’enferre dans l’erreur.
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Je n arrive pas à croire ce que vous écrivez 1 an après l affaire.
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je connais plein de gens qui ont été guéris de la covid par le grog voire par rien du tout, je n’en fais pas une généralité.
Et la validité d’un traitement ne se vérifie pas par un sondage auprès des lecteurs marseillais… Toutes les études concernant l’hydroxychloroquine ont confirmé son inefficacité .
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Il y a un consensus scientifique très solide pour affirmer que le protocole Raoult est plus dangereux que bénéfique. C’est pas les sondages qui comptent Pascal. Cette histoire d’essais sauvages sur des personnes fragiles attentes de la tuberculose est un scandale de plus.
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J’irai dans votre sens. Cet article sur les essais non autorisés d’un traitement de la tuberculose semble bien étayé. Par contre il ne faut pas tout mélanger et l’affirmation introductive du journal sur l’inefficacité de la chloroquine me semble très hasardeuse si ce n’est victime du concert ambiant.
Ce n’est pas faire de complotisme que de se souvenir qu’en mai 2020, les essais cliniques de la chloroquine ont été arrêtés par le ministre sur la foi d’un article du journal The Lancet. Or cet article était au départ biaisé car reposant sur des statistiques hospitalières portant forcement sur des malades hospitalisés et gravement atteints alors que Raoult avait toujours préconisé la chloroquine en phase précoce de la maladie (en phase aggravée, la charge virale a diminué et c’est un processus pulmonaire inflammatoire qui prend le relais et tue le malade). Qui plus est, on s’est aperçu que les statistiques sur lesquelles étaient basées l’article étaient complètement bidonnées à tel point que The Lancet a retiré cet article. J’avais alors trouvé très bizarre que le gouvernement maintienne une décision prise sur des bases aussi falsifiées.
On peut aussi se souvenir du Remdesivir de Gilead commandé à grand frais par l’UE, au moment où Raoult préconisait la chloroquine, et dont les effets avaient été désastreux. Bizarrement aussi, plus personne n’en parle.
Ce dossier de la chloroquine n’est définitivement pas clair et Marsactu devrait faire preuve d’un peu plus de circonspection dans ses affirmations péremptoires.
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Pascalbazile, Raoult et vous l’oubliez gentiment fait totalement partie du système et en a bien profité au passage.L’avis des Marseillais,quand on glorifie un repris de justice tout cela pour un match de foot ,laissez moi esquisser un sourire en coin.Un médecin qui n’est pas un toutou, le mythe du pseudo révolté, sauf qu’il joue pour de vrai avec la vie des gens et considère donc ses patients comme des cobayes ,en dehors de toutes règles, éthique et déontologie.
Après ,succombez si cela vous chante au complot mondial anti Raoult,cela vous occupe.
Il a été, il n’est plus et ne sera sûrement plus.
Voilà ce qui arrive à ceux qui oublient de se mesurer la circonférence des chevilles le matin en se levant.
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Je n’aime pas tout mélanger. Le dossier de la tuberculose est une chose, celui sur la chloroquine est différent et appelle la plus grande circonspection (mon commentaire ci-dessus).
Il faut aussi noter que Raoult a depuis longtemps été reconnu par ses pairs et investi par les autorités des plus hautes responsabilités, ce que vous rappelez à juste titre. Si le système accordait de telles charges à un charlantan, cela signifierait qu’il est lui même gangrené par la corruption ou l’incompétence (ou les deux) et de fait, toutes ses décisions seraient donc suspectes, y compris celles évoquées par l’article.
Je ne le pense pas mais il faudrait peut être dépassionner le dossier Raoult et, après l’avoir porté au pinacle, ne pas l’accuser de toutes les turpitudes.
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Dans la démarche scientifique, les arguments d’autorité ne valent rien : ce n’est pas parce qu’on est reconnu et investi de hautes responsabilités qu’on est infaillible. Le cas Montagnier, qui a complètement fondu les plombs, est là pour nous le rappeler : on peut être prix Nobel et sénile.
Le consensus scientifique sur l’hydroxymachin ne repose pas sur l’article du Lancet, qui a été retiré (démarche elle aussi normale dans la recherche, quand on constate des failles dans une étude), mais sur le fait qu’on n’a jamais pu prouver de façon robuste un bénéfice supérieur aux risques.
Sur ce sujet, le seul tort de Raoult est d’avoir cru qu’il était infaillible, et que son intuition valait certitude, sans jamais admettre qu’il s’était trompé. Si l’hydroxytruc est un remède miracle, pourquoi n’est-il pas venu à bout de la maladie dans le monde, où globalement tout le monde se moque des bisbilles franco-françaises ?
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Le bénéfice ne peut-être supérieur au risque si l’évolution de la maladie ne justifie plus l’administration d’un traitement qui aurait été efficace en début de pathologie. Ce n’est pas compliqué à comprendre et c’est ce que nous pratiquons tous pour des affections moins graves. Ce biais avait pourtant été adopté par un journal aussi réputé semble-t-il que The Lancet., ce qui est en soi curieux. Cerise sur le gâteau, toutes les statistiques sur lesquelles cet article se basait étaient fausses, ce qui est incompréhensible de la part d’un journal sérieux et hautement spécialisé.
Quant à l’efficacité de ce médicament sur la pandémie, peut-être avez-vous eu connaissance de statistiques provenant de pays l’ayant utilisé ? Personnellement je n’en sais rien mais permettez moi simplement de rappeler des faits troublants qui soulèvent des interrogations, à plus forte raison dans le contexte d’une pandémie ayant déclenché de mirifiques effets d’aubaine pour des acteurs économiques
financiarisés qui placent le profit au dessus de tout.
En ce sens, ne trouvez vous pas curieux qu’on ait tout basé sur la vaccination (Je vous rassure, je ne suis pas antivax et le vaccin a sauvé mon père) quant bien même son utilité ne doive pas être remise en cause? Depuis bientôt deux ans, aucun traitement de la pathologie n’a été proposé. On vous renvoie chez vous en vous conseillant de prendre du Doliprane et on ne vous administre des antibios qu’après évolution la maladie, contre les surinfections. Les labos ont ils tout simplement jugé bon de prioriser la recherche vaccinale a priori plus rentable, au détriment de toute autre recherche?
En vérité, tout ce dossier sur la pandémie reste opaque et la chloroquine n’en est qu’un épisode.
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“Depuis bientôt deux ans, aucun traitement de la pathologie n’a été proposé.” C’est quand même étrange d’affirmer une telle contre-vérité : https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/traitement-contre-le-covid-19-cinq-choses-a-savoir-sur-le-molnupiravir-dont-la-france-a-commande-50-000-doses_4823367.html
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