Pollution de l’air : le patron du port de Marseille garde son cap sur la croisière
Alors que les croisières s'apprêtent à reprendre, la question de la pollution de l'air est toujours sur le bord du quai. Sous le feu des critiques pendant le confinement, le Grand port de Marseille va continuer d'accueillir ces paquebots sans restriction. Le président du directoire du port, Hervé Martel, répond de ces choix auprès de Marsactu.
(Photo : Violette Artaud).
Le 30 juin, les paquebots de croisière pourront à nouveau faire escale en France. À Marseille, ce sera même dès le 20. Alors que l’activité reprend, le port marseillais va ouvrir avant les autres. Une dérogation “à titre d’expérimentation” accordée par le préfet des Bouches-du-Rhône. Durant de longs mois, le Grand port maritime de Marseille a été plein à craquer de bateaux en attente. Et la ville a subi des épisodes de pollution bien au-delà de la moyenne, selon une étude d’Atmosud, l’association chargée par l’État d’évaluer la qualité de l’air.
Sollicité par Marsactu, Hervé Martel, le président du directoire du Grand port maritime de Marseille a accepté d’évoquer les questions de santé publique posée par cette activité. S’il met en place des mesures pour “verdir” la croisière, le patron du port compte bien conserver le cap en terme d’accueil de ces géants des mers.
La semaine dernière le député Saïd Ahamada, référent des questions portuaires à l’Assemblée nationale, vous interpellait par communiqué de presse pour demander de restreindre le nombre de bateaux de croisière dans le port de Marseille pour éviter de nouveaux pics de pollution. Que lui répondez-vous ?
Le député Ahamada a eu la courtoisie de m’écrire
avant d’envoyer son communiqué. Tout le monde a été un peu choqué ou gêné par la présence d’un grand nombre de navires en stationnement pendant cette période où ils ne naviguaient pas. Nous avons eu jusqu’à 17 bateaux en stationnement simultanément. Cela n’arrive jamais en temps normal où nous avons plutôt trois ou quatre, exceptionnellement cinq, navires en même temps.
Il s’agissait de navires sans passagers, qui faisaient tourner leur moteur pour des raisons de sécurité mais de façon moins intensive. Visuellement cela donne une impression particulière. Effectivement, la question pourrait se poser si un confinement et donc un arrêt des croisières devait intervenir à nouveau. Dans ce cas, nous pourrions limiter le nombre de navires qui pourraient être accueillis en stationnement de longue durée au port. C’est une idée tout à fait raisonnable.
À la lecture du communiqué de Saïd Ahamada on comprend plutôt qu’il évoque la reprise de l’activité économique et qu’il demande donc de limiter la présence de paquebots dans le port à l’avenir.
Oui, il y a une petite ambiguïté. Je n’ai pas encore eu l’occasion de lui parler. Mais on parle bien des navires en stationnement. S’agissant des navires en exploitation, cela va redémarrer tout doucement, fin juin puis début juillet pour des opérations commerciales. Mais le pic d’activité n’est pas en juillet ni en août. Il est plutôt avant et après l’été. Dans la meilleure hypothèse des armateurs, on aurait trois navires simultanément dans le port pour la première fois le 29 ou le 30 août. D’ici là, nous n’aurons jamais plus de deux navires dans le port, et parmi ces deux, il y aura très souvent un navire au gaz. Limiter le nombre d’escale dans ces conditions… chacun peut comprendre que ce n’est pas forcément le sujet. Moins que un, ça fait zéro.
Si je résume, vous pourrez envisager de limiter les paquebots à quai uniquement si la croisière venait de nouveau à s’arrêter. Revenons sur cet épisode du confinement : vous avez sûrement vu passer l’étude d’Atmosud – révélée par Marsactu – selon laquelle les paquebots ont pollué six fois plus pendant le confinement à Marseille. Prenez-vous cette étude au sérieux et comprenez-vous le sentiment des riverains qui s’inquiètent ?
Bien sûr que je comprends. Nous rencontrons les riverains assez régulièrement. J’ai vu l’association Cap au Nord il y a quelques semaines, après la diffusion de cette étude. Très franchement, je ne vais pas dire que les navires ne polluent pas. Ces gens là ont les navires sous les yeux et le voient bien. Quand il y en a 17, visuellement ça peut faire peur.
Sauf que selon l’étude d’Atmosud, ce n’est pas que visuel…
Évidemment. Nous prenons très au sérieux cette étude, au point que nous allons peut-être travailler avec Atmosud pour clarifier les hypothèses. Il faut d’abord connaître la pollution émise à sa source. Puis il y a une question de diffusion, en fonction du vent notamment. C’est sur la diffusion que se situe toute la difficulté de leur modèle d’analyse. Mais ce sont eux les experts, nous n’avons là aucune compétence.
En ce qui concerne la pollution émise par les navires, nous avons proposé à Dominique Robin [directeur d’Atmosud, NDLR] de travailler de façon très précise plutôt que de prendre des moyennes ou des standards. Lorsque vous connaissez le nom de navire et le carburant qu’il utilise, vous connaissez parfaitement ses émissions. Les navires sont très contrôlés et il existe des bases de données très précises.
Vous vous engagez donc à transmettre ces chiffres à Atmosud pour que ses équipes puissent réaliser un travail plus poussé. Pourquoi ne pas l’avoir fait avant ? Atmosud dit demander ces chiffres depuis plusieurs mois sans réponse de votre part.
On peut toujours regretter de ne pas avoir fait les choses plus tôt mais ce qui compte c’est de les faire un jour. Je ne crois pas qu’Atmosud nous avait demandé d’approcher les choses de cette façon. Mais peu importe ne regardons pas derrière, regardons devant. Il y a une volonté d’être transparent. La profession n’a pas à rougir de la situation, ni le port. Quand on regarde la réalité des choses, tout le monde fait beaucoup plus que ce qu’imposent les réglementations. Nous ne sommes pas en zone SECA, les zones de contrôle des émissions atmosphériques [établies par l’Organisation maritime internationale pour réduire les émissions d’oxydes de soufre, d’oxydes d’azote et de particules, NDLR] et pour autant les armateurs se sont engagés dans le cadre de la charte bleue à changer de carburant à la prise de pilote, à réduire la vitesse, mais aussi à investir dans le gaz naturel… Toute l’approche dans la baie de Marseille se fait comme si nous étions en zone SECA.
Il existe une autre solution qui est le branchement à quai. L’une des promesses du port était que la totalité des paquebots pourraient se raccorder d’ici à 2025. Êtes-vous toujours dans ce calendrier ?
L’engagement ne concerne pas la totalité des escales mais que l’on puisse brancher simultanément deux paquebots. Il faut savoir qu’un navire c’est 12 mégawatts, c’est une puissance incroyable, comme une petite ville. Nous sommes toujours sur une logique 2025.
Le conseil de surveillance nous a posé deux questions. La première est : y a-t-il suffisamment de subventions mises en place pour que le projet soit viable ? En l’occurrence il est soutenu par le plan de relance de l’État et il va être soutenu par la région, même si les décisions ne pas encore formellement signées. La seconde est : êtes-vous vraiment sûrs que la croisière va repartir ? Manifestement c’est le cas. Les clients de ces armateurs sont très impatients de remonter à bord des navires.
Donc avec trois ou quatre navires au gaz dans la flotte, ce qui représente 150 ou 200 escales par an, plus deux navires qui peuvent se brancher, on devrait couvrir 80 ou 90% des escales.
Vous prévoyez donc de ne brancher que deux paquebots alors que vous aviez laissé entendre lors de l’annonce du projet en juillet 2019 que cela concernerait l’ensemble des bateaux de croisière à quai. En ce qui concerne le raccordement des ferries qui desservent le Maghreb depuis le Cap Janet, visez-vous toujours 2021 ? Combien de bateaux pourront alors être branchés en même temps ?
L’idée est qu’à quelques mois près, nous soyons en mesure de brancher les navires à l’ouverture du terminal, qui est prévue en 2022. Ici, le sujet n’est pas la capacité. Ce sont des navires qui consomment beaucoup moins. La question est “est-ce que les navires eux-mêmes sont équipés ?”. Nous avons travaillé avec les Tunisiens, la CTN, et avec le port de la Goulette. Si le navire peut se brancher au Nord et au Sud il rentabilise deux fois plus son investissement. Mais on se heurte à des questions de capacité financière.
Plus généralement, quand on voit le nombre d’argent investi pour l’électrification, les taxes, la pollution émise… Ne pensez-vous pas que l’on devrait restreindre cette activité plutôt que de continuer à miser autant sur la croisière ?
Mon métier n’est pas de restreindre, c’est de développer l’activité économique au plus grand bénéfice du territoire et de l’emploi, que ce soit au niveau du trafic de marchandises ou de l’activité passagers vers la Corse, vers le Maghreb, des touristes et de la croisière. La raison d’être d’un port est de créer de la richesse autour de l’activité maritime. Cette question de restreindre une activité me semble anti-intuitive.
Mon rôle est d’assurer le développement de l’activité, dans des conditions acceptables par tous. Je ne vois pas de vraies raisons de réduire une activité si on trouve les bonnes solutions. Aujourd’hui, le port de Marseille pollue bien moins qu’il y a vingt ans. Il y a un niveau d’acceptation par la société qui est moins important, dont acte. C’est pour cela que l’on fait nos meilleurs efforts. Mais je ne vois objectivement aucune urgence à mettre des quotas. Non pas pour le chiffre d’affaire du port, pour lequel c’est assez marginal et pour qui cela fait du boulot et de l’investissement, mais surtout pour les territoires. Posez la question aux taxis, aux boutiques, aux tours opérateurs….
Sauf qu’il y a justement débat sur les chiffres exacts des retombées économiques des visites des croisiéristes qui sont compliquées à évaluer précisément.
Il peut y avoir débat sur tout. Quand je suis arrivé au Grand port de Marseille il y avait une étude du cabinet BVA, qui a calculé en 2019 que la croisière a rapporté 430 millions d’euros sur le territoire avec les impacts indirects, les activités d’entraînement, etc. L’une des particularités de Marseille, c’est que seulement 10 % des passagers restent à bord et que ceux qui descendent ont une moyenne de 45 euros de dépense par passager.
On nous dit aussi parfois que les excursions ne permettent pas de retombées économiques mais ce n’est pas vrai. Les autocars, l’agence de voyage… Bref, ceux qui organisent les excursions bénéficient de retombées économiques. Il suffit de prendre un taxi, quand vous dites que vous travaillez pour le port il vous dit “mais quand est-ce que la croisière redémarre ?”.
Commentaires
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Quelle mauvaise foi !
La ville n’a rien à gagner à accueillir des hordes de radins d’un jour, ou plutôt de quelques heures. Il faudrait aussi calculer le prix du traitement de l’asthme et des cancers du poumon à l’hôpital Nord et à la Timone, le coût de la pollution visuelle de ces immenses barres d’hlm dans la rade, sans compter qu’en plus ils réclament des subventions !
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Vous..respirez la mauvaise fois.meme pas la peine de discuter avec des gens comme vous
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“From” dans le pseudo, c’est pour “fromage” ?
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Parce que les barres d’hlm sur les collines c’est moins polluant visuellement ?
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Je suis là pour faire du pognon, la pollution ? .Quelle pollution ?.Atmosud, il va falloir qu’ils mesurent comme je veux. Et puis plus cela pollue,plus les taxis sonts contents.
Il s’est vite adapté Martel ,le Grand Pollueur Métropolitain Marseillais /GPMM
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Pff…atmosud on attend qu’ils viennent faire des études sur des vrais chiffres plutôt que des extrapolations…Il n’est pire aveugle que celiit qui ne veut pas voir..’Le port de Marseille et les armateurs ont signé une charte et appliquent qui ça BIEN au-delà de normes qui ne sont même pas encore miseS en place? Le port assure avec l’électrification une réduction supplémentaire des nuisances…Marseille est un port. Il assure sur toute l’économie le développement n du territoire …Vous voulez quoi en fait?
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Il faudra que Saïd Ahamada explique à son collègue Gilles le Gendre que la violence peut s’exprimer autrement que par une simple gifle.
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Belle interview et réponses brillantes et claires..et encore il a été gentil
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Pour être clair il l’a été.Rien à foutre de tout.
C’est vrai il est brillant, nous sommes le premier port de France entre Corbières et Callelongue,après en Europe et au niveau mondial ,c’est plus la même chanson.
Encore un lecteur de la Provence
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Grande classe !
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