[Mon bungalow sur la Côte Bleue] Les soirées
Dans ce dernier épisode, notre chroniqueur estivant observe comment les campeurs se rencontrent dans les soirées animées des campings de Martigues.
La plage de Sainte-Croix à La Couronne. Photo : Emilio Guzman.
La série
En juillet, Michel Samson a passé une semaine au camping Pascalounet, juste avant l'incendie qui a ravagé les alentours. Objectif : prendre le pouls post-confinement de cette saison touristique.
Lundi soir à 19 h 30, dîner-spectacle au restaurant du Marius. “Le cœur du camping, le lieu où tout le monde se rencontre”, m’avait dit Mme Cavalier. Il faut s’inscrire et à l’heure dite il n’y a pas encore grand monde. Carpes koï, nénuphars et bambous logent dans le petit bassin décoratif où l’eau coule en permanence. Peu à peu arrivent les dîneurs-spectateurs. Chacun est un peu mieux habillé qu’en journée, mais les tenues des 80 convives restent décontractées.
Les plats sont copieux et l’ambiance est très exactement bon enfant. “Non, ce n’est pas pour vous”, me glisse la serveuse qui sert à la table voisine une friture de jols, ces petits poissons dont on mange tout. Bière et rosé arrosent le tout. Au milieu des bavardages, il me semble qu’on ne parle que de plages, de visites et de famille. Confinement et politique sont absents.
À 20 h 40 “il” arrive, vêtu de noir, installant son matériel derrière le petit rideau noir qui cache le comptoir. On n’en voit qu’un haut-parleur. Puis, Patrick Torres, passe entre les tables et demande à chacun de choisir un mot, dont il ne veut rien savoir. À 21 h 10, “le spectacle va commencer, il est interdit de faire des vidéos du spectacle, notre artiste ce soir va lier le mentalisme et l’humour”, dit le haut-parleur qui présente l’artiste comme “un magicien mentaliste”. Les plats sont finis. Patrick Torres commence chacun de ses numéros en convoquant un spectateur. Il lui fait envoyer à une table un mot écrit en cachette. La personne qui l’a reçu, le regarde et hop, Torres trouve ce mot ! Applaudi, il salue, il est 22h, on l’applaudit encore, le spectacle est fini. On reprend le dîner, en général avec des glaces. Peu à peu la terrasse se vide…
Gagner le droit d’être applaudi, c’est tout
Jeudi soir 19h30, soirée festive au Pascalounet. Les tables sont de 4, 8 ou 12, pleines de pastis, perroquets, rosés, magrets, patates sautées et toujours de moutarde et mayonnaise. L’animateur, micro à la main, est le pilier du camping en toutes matières. Il lance le jeu. Le but : deviner le titre du film dont on entend la musique qu’envoie le jeune homme derrière le sound system qu’il a installé dans l’après-midi. “Un film français…”, donne-t-il en indice. Une dîneuse lève le doigt et répond. “le Passager, ouiiii !”, s’enthousiasme l’animateur. La musique est forte, on finit de dîner, on lève le doigt, on applaudit le gagnant. “Non pas les Papys flingueurs, les Tontons flingueurs, mais vous avez gagné !” Gagné le droit d’être applaudi, c’est tout.
C’est dans son propre camping qu’on se lie, pas dans le voisin, celui qui est plus cher, plus luxueux.
Les glaces sont servies, c’est l’heure de danser. Musique binaire, simple, très forte. Sous la terrasse couverte les jeunes gens sont les premiers à se trémousser, des enfants rient sur la piste. Les adultes rejoignent ces danses en ligne que chacun semble connaître, gestes collectifs, pouce levé, mains sur les fesses, dandinements rythmés, sauts de puce… Vers 22h30, une voix se fait très forte : “qui est-ce qui fait la vaisselle ce soir ?” Tout le monde rit, il est temps d’aller se coucher. Les serveurs rangent les tables et vident les poubelles en cinq minutes. Retour aux tentes et bungalows, le silence s’abat sur le camping, jusqu’au lendemain matin 8 heures.
Les animations regroupent les campeurs. Ils font mieux connaissance. Ils rient ensemble tous âges confondus. C’est probablement lors de ces soirées, que chaque camping organise une ou deux fois par semaine, que se nouent les amitiés durables entre des gens de régions ou de pays différents dont chaque camping se vante. Au Pascalounet, c’est dans son propre camping qu’on se lie, pas dans le voisin, celui qui est plus cher, plus luxueux. Comme quoi, camping ou pas, les “gens de peu” ont peu de chance de croiser les plus riches, qui fréquentent désormais à nouveau les campings, comme lorsqu’ils ont été inventés en Angleterre à la fin du XIXème siècle. À cette époque on n’y rencontrait pas les “gens de peu”…
Il aura fallu les congés payés, l’exportation des cabanons marseillais, la politique de Martigues la rouge pour qu’on rencontre dans les campings des représentants de toutes classes sociales…
Les précédents épisodes de cette série sont à retrouver ici.
Commentaires
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Bien dommage la fin de cette série estivale. Merci Michel Samson pour cette régalade. J’y ai respiré l’odeur du pin chaud, entendu les cigales, les cris sur la plage et les portes des bagnoles qui claquent la nuit entre les chants des grillons. Des souvenirs de vacances à la pelle sont revenus.
C’était putain qué bon !
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