Accusé à tort de radicalisation, Sofiane T. obtient devant la justice d’intégrer les impôts
Accusé de radicalisation puis blanchi par sa hiérarchie, Sofiane T. s'était vu refuser un poste d'agent des impôts. La justice vient d'annuler la décision et donne trois mois à l'administration pour l'intégrer. Dans ce dossier, l'ex ministre de la justice avait assuré en 2019 qu'il n'y avait "plus la moindre suspicion de radicalisation".
Accusé à tort de radicalisation, Sofiane T. obtient devant la justice d’intégrer les impôts
C’est une première victoire en justice pour Sofiane T. Depuis plusieurs années, ce surveillant pénitentiaire entend faire reconnaître le traitement discriminant dont il estime avoir fait l’objet après avoir été soupçonné de radicalisation par son employeur, l’administration pénitentiaire. Le 13 juillet, le tribunal administratif de Marseille lui a donné raison dans l’un des principaux pans de son combat.
En 2018, après des années de tension avec sa direction aux Baumettes, puis une mutation à sa demande au centre pénitentiaire de Salon-de-Provence, Sofiane T. passe les concours pour intégrer la direction des Finances publiques en tant qu’agent administratif des impôts. Mais le 23 mai de cette année, à quelques jours de son changement d’administration, son nouvel employeur l’informe par courrier qu’il ne sera finalement pas possible de prononcer sa nomination “compte tenu des éléments” dont il a eu connaissance (lire notre article de 2018 sur la carrière brisée du maton Sofiane T. accusé sans preuves de radicalisation). Des éléments non spécifiés et insuffisants, a confirmé ce lundi la juridiction administrative, qui a annulé la décision des Finances publiques et demandé à ce que Sofiane T. puisse accéder au poste qui l’attend depuis deux ans.
Une “note blanche” à l’origine contestée
“L’autorité administrative n’a pas mis à même le requérant de comprendre les raisons qui fondent la décision contestée”, démarre le jugement rendu par le tribunal administratif avant de revenir sur le seul document fourni par le ministère des Finances publiques. Celui-ci a en effet versé au dossier un document présenté comme une “note blanche”, “émanant des services de police territoriaux mettant en cause le comportement du requérant lorsqu’il exerçait ses fonctions à la maison d’arrêt des Baumettes, en 2015”. Un court texte sur une plage blanche “non signé et non daté” relève le tribunal, et dont Marsactu avait déjà révélé des extraits en 2019.
Selon ce texte, Sofiane T. aurait été le membre d’un groupe de surveillants radicalisés “le 2e plus actif du groupe”. “Il a par exemple plaidé la cause d’un détenu placé à l’isolement suite à son prosélytisme religieux. Il avait également l’habitude de discuter en arabe dans les cellules avec certains détenus et de se faire surnommer « frère Sofiane»”, pouvait-on notamment y lire. Des faits que l’intéressé a toujours vivement contestés, pointant des incohérences factuelles et produisant de nombreux documents attestant d’un mode de vie “occidental”.
Lors de l’audience qui se tenait le 3 juillet dernier, l’avocat de Sofiane T., Me Sylvain Carmier, avait lourdement interrogé la véracité de cette note. “Comment imaginer que les renseignements se trompent sur le nombre d’enfants, sur son adresse même ? Cette note blanche est un ramassis de mensonges orientés”, a-t-il ainsi défendu. Avant de pointer le délai qu’ont mis les impôts pour la présenter, malgré plusieurs relances et une saisine de la commission d’accès aux documents administratifs.
“Absence de preuve de radicalisation”
“Il n’est nullement établi en l’espèce que l’unique document dont se prévaut de l’autorité administrative pour fonder sa décision, constitue une « note blanche » émanant du ministère de l’Intérieur”, taclent d’ailleurs les juges. Ils y opposent le fait “que l’enquête interne [concernant les soupçons de radicalisation] a conclu à l’absence de preuve de radicalisation ou de dangerosité et que M. T. a toujours donné satisfaction dans sa manière de servir”. Le ministère des Finances publiques, écrit-elle “ne produit en particulier aucun rapport d’enquête, et aucun signalement ou sanction disciplinaire dont l’intéressé aurait fait l’objet à raison des faits susmentionnés”.
En juillet 2019, interrogée par Marsactu après des accusations venant du député LR Éric Diard craignant que le groupe des “barbus des Baumettes” se trouve réuni au sein de l’équipe de l’établissement pénitentiaire pour mineurs de la Valentine, la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, avait coupé court à toute spéculation. “Les personnes concernées, au moment où je vous parle, ne font plus du tout l’objet de la moindre suspicion de radicalisation”, confirmait alors la ministre de la justice.
Trois mois pour rejoindre les Finances publiques
Aux yeux de son avocat, Sofiane T. aurait en fait été victime de malveillance de la part de son ancienne direction. “Il y a sans doute eu un coup de fil de la part de la pénitentiaire, a-t-il envisagé devant les juges. Il était en conflit avec sa hiérarchie, il a déposé une plainte au pénal pour discrimination et harcèlement de la part d’une partie de la direction”. Et de pointer une fois plus l’ironie de la situation : “Monsieur T. est toujours en poste dans l’administration pénitentiaire, il manie des armes lourdes, des grenades, et encore aujourd’hui on lui refuse un poste aux impôts ?”
Dans un court communiqué envoyé à Marsactu ce vendredi, Sofiane T. se félicite de la décision du tribunal administratif. “Ce n’est que la première étape de mon combat contre la discrimination, pour la justice et le rétablissement de mon honneur”, écrit-il, se déclarant “victime de dérives inacceptables”. “J’ai été volontairement faussement signalé et accusé il y a 5 ans par une partie de mon ancienne direction, accuse-t-il. Ce qui a engendré des très lourdes conséquences en cascade sur ma vie personnelle et professionnelle, et ce encore actuellement”.
Le ministère des Finances publiques dispose de deux mois pour faire appel de la décision du tribunal administratif. Lors de l’audience, il n’était représenté que par un observateur, qui n’a pas pris la parole. S’il se conforme à la décision rendue cette semaine, il devra intégrer Sofiane T. au sein de son administration dans un délai de trois mois, dans les conditions initialement prévues. Le syndicat CGT, qui accompagne le requérant dans ses démarches, a d’ores et déjà pris contact avec l’administration pour s’assurer que la décision soit suivie et l’intégration réalisée dans de bonnes conditions.
Actualisation le 17 juillet 2020 à 17h : ajout des extraits du communiqué envoyé par Sofiane T. à Marsactu après la parution de l’article.
Commentaires
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En République, il y a lieu de féliciter Monsieur Sociale T. pour sa ténacité et son exceptionnelle confiance dans la Justice et la Fonction publique.
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M. Sofiane T. a été accusé de radicalisation parce qu’il parlait arabe ( entre autres ), c’est juste irréaliste et un corse qui parle corse , est-il d’office un poseur de bombe ? , certains détenus l’ont appelé « frère Sofiane « , la belle affaire ! C’est juste une question de culture, un évangéliste appellera un autre évangéliste : mon frère ou frère un tel ( exemple parmi d’autre ) c’est assez scandaleux.
Par contre, vous « « Zumbi « vous avez choisi un pseudo si vulgaire et si grossier que cela en est une honte et marque votre mépris pour les abonnés de marsactu, c’est à la limite du vice !
Changez de pseudo, » chmatss «
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zumbi
Pourquoi l appelez-vous “Social T”et non Sofiane T ?
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C’est long , très long, trop long le travail de la Justice.
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Bonjour je suis la personne concernée.
Toutes ces accusations sont fausses comme je le prouve. Aucun détenu m’appellerai frère sofiane a moins d’être peut-être dans un monastère. Toutes ces accusations sont une pure invention Ma directrice de l’époque m’a convoqué pour m’informer qu’elle me prenait pour un détenu à cause de mon faciès alors que j’étais en uniforme et tout cela devant témoin. Toutes ces accusations sont au conditionnel. “Il paraîtrait qu’il se fasse faire appeler frere sofiane” et de cette déclaration on en fait une preuve? Serieux c’est c’est vraiment grave.
De pllus je ne parle malheureusement pas l’arabe.
Mr diard suite à son rapport sur la radicalisation à donné de fausses informations sur l’histoire des barbus des baumettes dont je faisais sois disant parti. Les journalistes mis à part marsactu et médiapart n’ont jamais entendu ma version malgré mes sollicitations, ni même les hauts fonctionnaires ou l’Élysée.
Il est hors de question que j’accepte cette discrimination et ce racisme primaire sous couvert du combat contre le terrorisme ni être comparé à ces personnes sans armes ni foi.
Je ne me cache pas. Mais la vérité éclatera à un moment et tout ce qui ont utilisé cette histoire a des fins personnelles comme mr Diard, ou on participé à cette injustice que je vis depuis plus de 5 ans devront avoir des arguments solides car je ne lâcherai rien. Dsl pour les fautes d’orthographes syntaxe ou autres.
Cordialement sofiane
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Bon courage à vous pour la suite !
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Je rectifie pour éviter les quiproquos.
Sans âme ni foi le correcteur a modifié et je ne me suis pas du tout relus
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Le premier alinéa de l’article premier de notre Constitution dispose : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. » Le quatrième alinéa de son article deux précise : « La devise de la République est « Liberté, Égalité, Fraternité ». En conséquence si nous sommes de vrais Républicains, que nous travaillons pour réaliser l’idéal fixé par notre constitution, nous devons tous nous considérer comme des frères, quels que soient nos origines, notre race ou notre religion. C’est pourquoi, je me permets de vous appeler, Monsieur Sofiane T : mon cher frère . Tenez bon et une pleine réussite dans vos nouvelles fonctions.
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