Dans le 15/16, le Printemps marseillais débauche sur le fil la tête de liste des écologistes

Jean-Marc Coppola et Lydia Frentzel le 25 février à l'Estaque (Image LC)

Transfert de poids dans les quartiers Nord. Mardi, la tête de liste écologiste Lydia Frentzel dans les 15/16 annonçait rallier le Printemps marseillais, et prendre la deuxième place, derrière le communiste Jean-Marc Coppola dans ce même secteur.  “C’est une décision que j’ai prise doucement, en arpentant le terrain, j’y ai mûrement réfléchi, et notamment après ce qu’a dit Soly [Mbae, fondateur de B Vice ndlr] lors de l’hommage à Ibrahim Ali. Les gens me demandaient pourquoi je partais toute seule. À un moment, il faut être responsable face au risque RN”, explique ainsi celle qui siège au conseil municipal depuis 2014. Elle et six autres personnes prévues pour figurer sur sa liste écologiste et citoyenne Debout Marseille rejoignent ainsi le Printemps marseillais.

Un ralliement à moins de trois jours du dépôt définitif des listes, qui vient redonner un coup de fouet au Printemps marseillais qui menait ces dernières semaines une campagne atone. Le mouvement d’union de la gauche tient là une occasion de se présenter en véritable force de rassemblement face à la liste écologiste accusée de diviser la gauche depuis son départ en solitaire en septembre dernier. Cela permet de faire passer au second plan l’échec des discussions dans le secteur voisin des 13/14.

“Si le Front est trop haut, on appelle à quoi ?”

“Je lance un appel à ce que ça puisse se faire dans les autres secteurs. Jusqu’à jeudi soir, tout est possible. On crée les conditions, on ne veut pas vivre ici ce qui s’est passé dans le 7e secteur [le 13/14, NDLR]”, a renchéri le communiste Jean-Marc Coppola lors d’une conférence de presse à l’Estaque mardi après-midi. “Je ne dis pas que dans tout Marseille il faut faire pareil, modère Lydia Frentzel. Mais à certains endroits, ça craint. Et si le Front est trop haut, on appelle à quoi ? Cette réflexion il faut l’avoir maintenant.” 

Un des premiers membres d’EELV à avoir fait la démarche de s’éloigner du parti pour rejoindre le Printemps marseillais avec Michèle Rubirola, Théo Challande, se félicite de “ce premier dénouement, qui est naturel. S’il y a bien une personne qu’on respecte éminemment pour ce qu’elle est, pour là d’où elle vient, c’est Lydia”, déclare-t-il, revendiquant aujourd’hui “une trentaine d’écologistes historiques” au sein du Printemps.

“Construire le groupe écologiste, c’était important, argumente celle-ci. Mais après on peut se remettre autour de la table. Réfléchir seulement au second tour, il y a des endroits où on ne peut pas s’amuser à ça”. Lors d’un comité de pilotage dimanche, Lydia Frentzel a ainsi demandé à pouvoir travailler à un rapprochement avec l’autre liste à gauche avant le dépôt des listes. Devant une fin de non recevoir de son parti, elle a donc plié bagages. “Le programme j’y ai participé à fond, de tout mon cœur. J’aurais aimé que EELV entende mon appel”, défend-elle.

“Pressions” et “vieilles magouilles” pour Sébastien Barles

Du côté des écologistes, la riposte a été lancée dès lundi soir via un communiqué qui met l’accent sur les “pressions” et “vieilles magouilles” qui seraient à l’origine de ce départ. Pour l’équipe de Sébastien Barles il n’est pas question de voir le départ de Lydia Frentzel comme un ralliement face au risque RN mais plutôt comme une défection, “un épiphénomène”, déclare le candidat à la mairie centrale. Debout Marseille maintiendra donc sa liste dans ce secteur, avec en tête une personnalité non-encartée, Chahida Soilihi, “cheminote et syndicaliste CGT”.

“Je le voyais venir, assure Sébastien Barles. C’était de plus en plus compliqué d’avoir accès à cette liste, et ma crainte c’était de voir des personnalités marquées Guérini-Andrieux. On a demandé à voir [la liste,ndlr] en fin de semaine dernière, et dimanche, Lydia nous a fait part de ses interrogations”. La tête de liste écologiste joue donc la carte du bon débarras face au départ de cette dernière conseillère municipale encartée, la seule implantée dans les quartiers Nord, la renvoyant à sa participation en 2015 aux listes de Jean-Noël Guérini pour les départementales.

“J’ai senti une tentative de déstabilisation de la part des vieux réseaux”, affirme-t-il. Des pressions, qui prendraient donc la forme de noms “marqués guérinistes”  que l’ex candidate aurait voulu placer sur les listes. Sébastien Barles reconnaît ne pas être en mesure de confirmer cet entrisme. Néanmoins, aux yeux du candidat, l’argument du risque RN serait “un prétexte”. “Sur le 15-16, il y a moins de danger. En revanche, sur les 13-14 où le RN est déjà installé, ils nous ont tous plantés”, appuie-t-il. En quittant le mouvement d’union à gauche, les Verts avaient laissé ouverte la possibilité de s’unir dans ce seul secteur. Aujourd’hui, il est persuadé que dans le 15/16 les résultats des “trois forces de gauche” – Printemps, Debout Marseille, et Samia Ghali – rassemblées permettront de défier la candidate RN, Sophie Grech au second tour.

“Pas plus de pression sur moi que sur les autres”

Lors de la conférence de presse du Printemps, la question de ces supposées pressions a fait bondir Lydia Frentzel et Jean-Marc Coppola. “Il n’y a pas plus de pression sur les autres que sur moi, les pressions en politique, elles sont partout. Il n’y a pas plus de pressions guérinistes qu’autre chose”, assure la première.

Interrogée sur les rumeurs la désignant comme proche d’Alexandre Guérini, frère de l’ancien président du conseil départemental mis en examen, elle répond agacée ne pas avoir de relations actuelles avec lui. “Cela fait 30 ans que je suis au département, ce serait mentir de dire que je ne sais pas qui c’est”, balaye-t-elle. “Ce n’est pas un sujet, martèle quant à lui Jean-Marc Coppola. Après six ans au conseil municipal, avec des mépris, des injures, c’est du niveau du caniveau qu’on dise qu’elle subit des pressions”. 

Dans le secteur, le Printemps marseillais engrangeait le même jour un autre soutien important, celui de Roger Ruzé, l’actuel maire de secteur qui a succédé à ce siège à Samia Ghali, pour cause de non-cumul des mandats. Au sein des listes de Jean-Marc Coppola, l’argumentaire est déjà rodé pour fustiger la sénatrice : “comme l’a dit Roger Ruzé, quand on cherche à se rapprocher de Muselier, Bruno Gilles, Macron, on est dans une stratégie électoraliste et pas dans des valeurs de gauche”. Dans la circonscription qui recouvre en bonne partie ce secteur, lors des législatives de 2017 Sophie Grech, candidate RN aussi pour le scrutin de mars, est arrivé en tête avec 23,06% au premier tour, avant de s’incliner avec 41,61% au second. Il faudra que le Printemps marseillais réalise un score magistral pour se passer de nouvelles discussions avec l’ensemble des forces de gauche.