Le dessin prend ses quartiers au château de Servières

Le dessin prend ses quartiers au château de Servières

A quelques heures de l'ouverture du premier salon international du dessin contemporain de Marseille, l'odeur de la peinture fraîche envahit les galeries du château de Servières (4e). Pour l'heure, la plupart des oeuvres repose à l'abri de cartons, avant le grand déballage puis l'accrochage sur les murs encore nus. Peu à peu, la ruche prend vie et les premiers dessins se dévoilent. Tout le week-end, l'événement baptisé poétiquement "Paréidolie" va mettre à l'honneur un genre pendant longtemps délaissé des galeristes.

Ébauche ou croquis, base pour une autre oeuvre plastique, aquarelle ou simples traits de crayons, "le dessin est un médium transversal dans la pratique artistique", explique Martine Robin, directrice du château de Servière. Paréidolie met à l'honneur le dessin à proprement parler, avec très peu de choses dans l'espace, axé sur cette discipline dans ses composantes les plus simples, ajoute-t-elle. Nous nous sommes orientés vers quelque chose qui s'accroche au mur, avec un format intimiste". Pour cette première édition qui a germé progressivement et réalisée en parallèle avec le salon d'art contemporain Art-O-Rama, dix galeries internationales ont fait le déplacement. Cette année, elles sont essentiellement européennes : française, suisse, espagnole, allemande et belge.

Accents macabres

Dans une alcôve de la salle, la galerie belge A.L.I.C.E affiche les dessins du collectif Hell'Monsters, qui réunit trois artistes : Jérôme Meynen, François Dieltiens et Antoine Detaille. Il ressort de cette association un mélange d'iconographies médiévales et contemporaines, colorées, aux accents parfois macabres et pourtant humoristiques. Autre galerie, autre ton : cette fois il s'agit des dessins de Christian Lhopital, présentés par la galerie Chantiers Boîte Noire de Montpellier. Sur de grandes feuilles blanches s'étalent des décors ésotériques où les silhouettes discrètes et fines de lapins émergent, au milieu d'atmosphères nocturnes. "Il y a dix galeries avec dix regards différents" présente Lydie Marchi, membre du comité de pilotage du salon et elle-même directrice d'Hydrib, une plateforme dédiée aux arts visuels.

Si le dessin a longtemps été considéré comme un art mineur, la pratique serait en plein boom depuis sept ou huit ans d'après Lydie Marchi. "D'abord le dessin est moins cher, mais en plus de cela le public a une relation de l'ordre de l'intime avec lui. C'est quelque chose qui renvoie à l'enfance : tout le monde dessine et crayonne à un moment donné". Une dizaine d'années plus tôt, le dessin restait à la galerie. "Aujourd'hui, il a atteint ses lettres de noblesse", poursuit Lydie Marchi, également directrice de la communication de l'événement. L'artiste marseillaise Michèle Sylvander, qui fait également partie du comité de pilotage du salon, ne la contredit pas. Elle rêve de montrer un jour tous les croquis préparatoires de son travail. "Tous les artistes griffonnent dans leurs carnets. Les dessins portent en eux tous les concepts que j'aborde dans mes réalisations".

Au détour d'une autre galerie (Contemporary art gallery), sa propriétaire Eva Meyer déballe les oeuvres de Jan Kopp – cartons grattés ou encre sur papier – et celles de Stéphane Berard. "Ce dernier travaille sur le côté absurde des engagements en général. Le titre de l'une de ses oeuvres est « tentative logistique d'aide aux premières heures de Garde-à-vue : droits du citoyen face à la police transférés sur tee-shirt de manière à pouvoir être lu par le porteur ». Toutes ses oeuvres et les titres de celles-ci sont des propositions humoristiques d'amélioration d'une situation". Une diversité de genres réunis dans une même discipline, dont la richesse n'est plus à prouver.

Renseignements : Paréidolie au Château de Servières, 19 boulevard Boisson, 13004, Marseille. Ouverture samedi 30 août de 11 h à 19 h et dimanche de 11 h à 20 h. Entrée gratuite.