PROPOS SUR LE PERMIS DE LOUER

Billet de blog
le 29 Sep 2019
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Les élections municipales ont lieu demain

PROPOS SUR LE PERMIS DE LOUER

Comme « Marsactu » l’a rappelé, les multiples effondrements et accidents d’immeubles qui ont eu lieu récemment à Marseille disent l’urgence qu’il y a à ouvrir, en particulier à l’occasion des élections municipales, le débat sur le « permis de louer ». Mais il faut aussi réfléchir sur les implications et les significations de ce qui constituerait une avancée majeure.

 

Régulation du logement et autorité municipale

Le « permis de louer » est une des institutions qui manifestent l’autorité des municipalités sur l’espace et sur le logement, à côté, par exemple, des permis de construire ou des offices municipaux de logement social. En donnant aux municipalités le pouvoir d’autoriser ou d’interdire une location, le permis de louer rappelle que le logement fait partie du domaine du politique, il est une des façons par lesquelles les municipalités exercent les pouvoirs qui leur ont été démocratiquement confiés, lors des élections, par les citoyens qui habitent les villes. Alors que l’autorité de l’État semble reculer de plus en plus, alors que l’emprise de l’État semble s’affaiblir dans des domaines de plus en plus nombreux, le permis de louer serait une façon de rappeler que l’État existe, continue à exercer son autorité sur l’espace social. Au fond, l’existence du permis de louer est une façon de rappeler que le logement ne fait pas seulement partie de l’espace privé, mais qu’il occupe une part de l’espace de la ville, sur lequel s’exerce l’autorité municipale.

 

Il existe un permis de conduire, pourquoi n’existerait-il pas un permis de louer ?

Ce n’est pas un hasard si l’expression, « permis de louer », commence à s’imposer dans le débat public. C’est que tout le monde commence à s’accorder sur l’idée selon laquelle il pourrait exister un système permettant d’autoriser un propriétaire de louer un logement ou de le lui interdire, de la même façon qu’il existe depuis longtemps un système permettant d’autoriser quelqu’un à conduire s’il est jugé apte à la conduite ou de le lui interdire. En France, c’est en 1889 qu’il s’est institué : il s’est donc imposé dès le début de la généralisation de la conduite automobile, mais sans doute parce qu’on se trouvait au début de cette pratique sociale, justement, et que cela suscitait sans doute un peu d’inquiétude. Mais alors, pourquoi le souci de la sécurité s’est-il imposé avec une force de loi dans le domaine de la circulation, mais non dans celui du logement ? Nous voilà, une fois de plus, confrontés à la loi du marché : la circulation a été protégée des excès de l’absence de normes et de contraintes, tandis que l’immobilier et le logement, eux, ont été laissés à la seule loi du marché, comme si le souci de la sécurité se limitait à ‘usage des rues et des espaces publics et s’arrêtait à la porte du logement.

 

Au-delà de la sécurité, la régulation des prix

Sans doute une des raisons pour lesquelles la loi s’est ainsi arrêtée au marché du logement est-elle, justement, qu’il ne s’agit pas seulement de sécurité. Si la sécurité avait été seule à s’imposer comme une norme de la régulation du logement, peut-être le permis de louer aurait-il existé – et encore, d’ailleurs, on n’en est pas sûr. Mais le problème est qu’il ne s’agit pas seulement de la sécurité, mais qu’il s’agit aussi des prix. Un logement, au fond, a deux dimensions, si l’on y prend garde : la première est celle de l’espace dans lequel on vit, l’espace où l’on habite, et la deuxième est celle de ce qu’il représente dans le marché : un logement n’est pas seulement un espace dans lequel on vit, c’est aussi un bien de consommation et un objet de transaction entre des partenaires de l’échange. Et c’est sur ce plan que la régulation cesse de s’imposer comme une loi. Dans la culture du libéralisme, le marché met en relation des personnes sans que les pouvoirs politiques aient à s’imposer – ou, s’ils parviennent à imposer leur présence, c’est le moins possible. C’est bien la raison pour laquelle il faut réfléchir à la figure du « permis de louer » au-delà de la question des prix, pour en faire un des instruments de la régulation des échanges dans le domaine du marché et de l’immobilier.

 

Tenter d’empêcher l’emprise du libéralisme effréné du marché

C’est bien de cela qu’il est question dans le débat sur le permis de louer. Il faut réfléchir et débattre au-delà de la seule question du logement : le logement n’est, finalement, qu’un des domaines dans lesquels s’engage, aujourd’hui, le débat entre la tendance au libéralisme effréné du marché et le souci d’empêcher les excès du libéralisme en imposant la loi du politique sur l’ensemble des domaines de l’espace de la société. Ce n’est pas un hasard si le métier du président des Etats-Unis d’aujourd’hui, D. Trump, qui est, sans doute, l’un des présidents les plus libéraux que ce pays ait connus, est l’immobilier : en effet, l’immobilier est l’un des domaines dans lesquels le libéralisme le plus échevelé s’impose aujourd’hui. En même temps, c’est l’un des domaines dans lesquels il est le plus urgent d’agir pour réguler le libéralisme et pour que la loi protège les citoyens de ses excès.

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