Jean-Noël Guérini se fait voter les pleins pouvoirs

Jean-Noël Guérini : 40 voix. Martine Vassal (UMP) : 17. Alors qu’il ne lui en fallait que 29 pour être réélu à la présidence du conseil général des Bouches-du-Rhône, le désormais ex-premier secrétaire du PS13 a réalisé un beau coup ce jeudi. « Avec tout ce qu’on a dit sur moi le magouilleur, le clientéliste : vous voyez j’arrive à rassembler », a-t-il glissé à la presse.

Traître(s) à droite

Avant de noter qu’« il n’a pas manqué une voix au sein du groupe socialiste ». Un constat qu’on peut élargir des 30 conseillers PS aux 6 élus communistes et le divers gauche Roger Tassy, qui sont sans exception rentrés dans le rang. Quant aux trois voix restantes, « le vote est secret », a noté avec malice JNG, qui s’est payé le luxe d’accuser en séance Martine Vassal d’avoir tenté hier de recruter sur son nom des socialistes. Le bigot a aussi bien dû carburer de son côté, et tous les regards se tournent évidemment vers les deux « non inscrits » Eric Le Dissès (maire de Marignane et ex-UMP) et Maurice Bres (élu à Orgon).

Mais le compte n’y serait toujours pas, ce qui n’a pas manqué de jeter le trouble dans les rangs de l’opposition. « On comprend mieux, peut-être, mon échec à la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, en 2008″, commente aujourd’hui Renaud Muselier dans l’Express. De quoi relancer la chasse aux  »traitres » qu’il avait mené à l’époque cette fois-ci sur les bancs du CG13 ?

L’appui du vieux Loo

Toujours est-il que pour son troisième mandat, JNG boit du petit lait, et s’est même adjoint le soutien d’un historique : Charles-Emile Loo, qu’il côtoie à la Socoma, bastion du PS sur le port. « J’ai en mémoire toutes les élections depuis la Libération, vous ne trouverez nulle part une élection à 40 voix. C’est la meilleure réponse au ni Guérini ni FN », avance l’ancien bras droit de Defferre, âgé de 89 ans.

Mieux, à propos des affaires, il assure que depuis sa première carte au parti en 1936, il n’a « jamais vu une telle répétition de nullité, une telle gesticulation. Il y a presque quelque chose d’irrationnel et les bornes ont été dépassées ». Un sujet qui a de nouveau été longuement abordé par Jean-Noël Guérini lors de son premier discours de 3e mandat :

Et cette nouvelle gouvernance promise en guise de « je vous ai compris » aux électeurs et aux socialistes qui se sont démarqués ces derniers mois ? Elle sera présentée le 14 avril, lors de la prochaine séance publique, a-t-il indiqué. « Je souhaite que l’on revoie la préparation du travail de la commission permanente, qui ne peut plus être une banale chambre d’enregistrement. Tout en repensant les commissions qui la précédent et la mise en place d’une véritable commission des finances. S’ils la veulent bien, j’en confierai la présidence à l’opposition », tout comme la vice-présidence de la commission des appels d’offres (CAO).

Autre commission, qui serait elle créé, celle des délégués « au sein de laquelle l’ensemble des élus pourront prendre connaissance de l’avancement des grands dossiers » tandis qu’ »une inspection générale des services pourra rendra compte à la commission des délégués de son travail de contrôle, de gestion. » Et la présidence d’Habitat 13, l’office HLM soupçonné d’être le premier instrument clientéliste du CG, à l’opposition, ose Xavier Monnier de feu Bakchich ? « Oui et la tête de vos journaux aussi… » La nouvelle gouvernance a ses limites…

Main tendue

Pour la commission des finances et la CAO, ce sera en tout cas sans l’UMP, qui a rejeté la proposition. « Nous voulons ne voulons pas être mêlés », justifie Sabine Bernasconi, qui assure « qu’en commission les rapports arrivent tout faits ». Président de la fédé départementale du Nouveau Centre, Bruno Genzana est sur la même ligne : « en tant que centriste, je suis favorable à la présence d’élus de l’opposition à des postes où ils peuvent exercer un contrôle. Mais force est de constater que dans ce département les conditions ne sont pas réunies », argumente-t-il, qualifiant cette ouverture de « factice ».

« Il fallait s’y attendre », glisse le socialiste Michel Pezet, l’un de ceux qui auraient pu mener une candidature face à JNG. Avec cette main tendue rejetée, ce dernier aura en tout cas à l’avenir tout loisir de moquer les exigences de transparence de l’opposition. Quand on vous dit pleins pouvoirs…

Une main tendue qui, dans les éléments de langage qui prévalent maintenant au 9e étage du Paquebot bleu, marquent le signe d’un « nouveau Jean-Noël ». S’affichant ostensiblement en patron, allant serrer les mains à tout va à son arrivée dans l’hémicycle, prenant la pose au moment de voter au point d’en agacer les élus de l’opposition qui supervisaient le vote, il tente de renverser la vapeur, fort du vote sans faille de son camp et des défections dans l’opposition. Et même si un tour dans le bureau du juge Duchaîne n’est toujours pas à exclure. « A force de monter en puissance, on arrive à un pic et puis on redescend plus vite que l’on n’imagine », lance-t-il à propos des affaires.

Avant de se présenter en homme comme les autres, qui boit du Coca, est blessé mais debout, et qui est même prêt à passer l’éponge :

L’ère glaciaire

Un homme qui sait surtout que ceux qui ont tenté de se démarquer ces dernières semaines accusent le coup. Michel Pezet nous récite un « certains changements font apparaître ce que nous espérions, à savoir une nouvelle dynamique ». Marie-Arlette Carlotti, qui avait assuré qu’elle ne lui donnerait pas un « blanc-seing », insiste sur « les consignes très nettes données par Martine Aubry » de soutenir Jean-Noël Guérini. Quant à la nouvelle gouvernance, et à d’éventuelles représailles, « si je paie je vous le dirai », promet-elle. « J’attend de voir ce qui va se passer dans les prochains jours. On va voir déjà les vice-présidences. »

On a vu. Parmi les 15 vice-présidents, seulement trois nouvelles têtes : Christophe Masse, Mario Martinet, proche du grand ami de JNG Serge Andreoni, ainsi que Richard Eouzan, élu d’Allauch. « C’est l’ère glaciaire, il n’y a pas beaucoup de sang neuf », ironise Bruno Genzana. « Tous ceux qui dans cette assemblée partagent nos analyses ont été écartés. »

S’il conserve une vice-présidence, Hervé Chérubini, à qui l’on avait prêté des velléités d’indépendance vis-à-vis de Guérini, quitte d’ailleurs la présidence du groupe socialiste, confiée à Mario Martinet. Ejecté ? « Je suis maire de Saint-Rémy de Provence, président de la communauté de communes de la Vallée des Baux-Alpilles et sans en dire plus je vais avoir prochainement d’autres responsabilités que le CG13″, répond-il. Le même genre de grosse fatigue qu’Eugène Caselli, qui avait démissionné de la fédé PS13…

Le cas de la Fédé

En parlant de la Fédé, Guérini a-t-il démissionné de son poste de premier secrétaire, en contradiction avec les statuts du parti ? C’est fait. Et qui pour le remplacer ? Voyons, ce sera « aux militants de décider », nous rappelle-t-il. Mais il « fera connaître le moment venu sa préférence », qui irait pour « une jeune femme ». Selon nos informations, ce serait Samia Ghali, dont le mari Frank Dumontel figurait parmi les invités, qui tiendrais la corde. Tout en précisant qu’il « souhaite une coupure définitive entre la fédération et le CG13″. Cela tombe bien, Marie-Arlette Carlotti estime que l’évolution « ne peut pas être que de façade ».

Ce qui veut dire notamment plus de secrétaires de sections salariés du CG13 ? Toujours aussi peu bavard, Michel Pezet s’en remet à la commission d’enquête présidée par Alain Richard, « qui doit apporter des pistes de réflexions et de propositions ». Alain si tu l’entends…

> la liste des Vice-Présidents :