Tensions sociales et manifestations
MARSEILLE, LA MÉCONTENTE
À plusieurs reprises, au cours de ce mois d’avril, Marseille s’est, en quelque sorte, réveillée : elle a exprimé son mécontentement devant la politique engagée par le président de la République, E. Macron, et le gouvernement dirigé par É. Philippe. Marseille semble devenir de nouveau la ville de « La Marseillaise », celle d’un mouvement de confrontation.
Un mécontentement manifeste dans l’espace de la ville
Les manifestations qui ont eu lieu à Marseille le 14 et le 19 avril, en attendant celle qui aura lieu le 1ermai, comme tous les ans, mais avec, cette année, sans doute, une tonalité particulière, expriment une forme de mécontentement global, manifesté par plusieurs acteurs sociaux, dans plusieurs domaines. Qu’il s’agisse du mécontentement des cheminots devant la réforme en cours de la S.N.C.F., du mécontentement qui se manifeste même dans les rangs de la majorité devant le projet de loi sur l’immigration et le droit d’asile présenté par G. Collomb, ou encore du mécontentement des lycéens, des étudiants et des enseignants face aux nouvelles modalités de l’accès des bacheliers à l’enseignement supérieur, c’est l’ensemble des activités engagées dans l’espace politique qui manifeste le rejet de la politique engagée. À Marseille comme dans un grand nombre de villes françaises, l’espace de la ville devient, de nouveau, comme tant de fois dans l’histoire, l’espace dans lequel s’exprime le mécontentement. Ce que le philosophe allemand de l’école de Francfort, J. Habermas, appelle l’espace public, à propos de l’espace urbain de Paris à la veille de la Révolution de 1789, semble devenir de nouveau, aujourd’hui, un espace de critique et de mécontentement, un espace de dénonciation et de remise en cause. L’espace public cesse de n’être qu’un espace dans lequel on habite et travaille, pour devenir, une fois de plus, un espace dans lequel s’exprime la politique – le discours de la polis, de la ville.
Des manifestations réunissant syndicats et partis
Une fois de plus comme dans tant d’autres occasions, ces manifestations réunissent des syndicats et des partis dans un discours commun. Au cours de son entretien avec E. Plenel, de « Mediapart », et de J.-J. Bourdin, de B.F.M.-TV et de R.M.C., le chef de l’État a trouvé un joli nom pour désigner cette réunion des mécontentements dans un usage commun de l’espace public : une « coagulation », nomme-t-il ce rassemblement, pour dire que, justement, il n’y en a pas. Freud avant, en son temps, trouvé un nom pour désigner cette façon de notre inconscient de ne pas reconnaître un réel qui s’oppose à lui : la Verneinung, la « dénégation ». Mais, comme nous l’explique Freud, qui est souvent utile en politique, car la psychanalyse, ne nous y trompons pas, est, sans doute, une science pleinement politique, dénier un fait ou un sentiment, dénier un désir ou une puissance, c’est justement une façon de reconnaître son existence. En effet, c’est bien cette association entre syndicats et partis – même des députés de La République en Marche votent contre des propositions du ministre de l’Intérieur sur le droit d’asile et l’immigration – qui constituent justement une forme de coagulation.
Le rejet global d’une politique
C’est que la signification de cette « coagulation »est le rejet global d’une politique. Quand, par exemple, à Toulouse, comme nous l’apprend Mediapart, des étudiants s’unissent à des syndicalistes et à des demandeurs d’asile dans un mouvement commun, il c’est bien le rejet global d’une politique qui s’exprime dans ce mouvement de solidarité et dans cette dynamique globale de confrontation et de manifestations. Peut-être faut-il lire, finalement, dans ce rejet global une forme de réponse à la politique globale proposée par le président de la République qui entend se situer, depuis le début, au-delà de l’opposition entre la gauche et la droite. Peut-être est-ce justement en se situant au-delà de l’opposition classique entre la gauche et la droite dans un engagement politique global que la politique mise en œuvre par le président de la République et son gouvernement suscite un rejet lui aussi global. À Aix ou à Marseille, comme dans le reste du pays, en particulier comme à Notre-Dame des Landes dans la banlieue de Nantes, où la population est parvenue à empêcher la construction de l’aéroport, c’est la polyphonie des voix qui expriment le même mécontentement qui permet de comprendre la diversité et la pluralité de ses expressions.
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