[Document] Le rapport d’inspection sur les musées pointe les défaillances de la hiérarchie
Marsactu a mis la main sur un document confidentiel qui synthétise l'épais rapport de l'inspection générale des services sur la gestion des musées de Marseille. Il confirme les éléments déjà révélés et pointe les "défaillances nombreuses de la totalité de la chaîne hiérarchique de ce service".
Le musée d'histoire de Marseille en 2013. Jopa Elleul/Flickr.
Entre le “circulez y a rien à voir” et la sévère remise en question de la hiérarchie des musées municipaux. Marsactu a mis la main sur une version définitive du rapport de l’Inspection générale des services (IGS) sur la gestion des musées de Marseille. Ce document de 11 pages daté du 15 février est une très mince synthèse du rapport définitif rendu à l’administration. Il confirme en de nombreux points le document que nous publiions il y a quelques jours (lire notre article).
S’y retrouve le même constat sévère sur la gestion des musées et la responsabilité de la hiérarchie dans leur dérive. Agents livrés à eux-mêmes, salles fermées sans information de la hiérarchie, défaut de contrôle des absences comme des agents réellement présents, bagarres dans les salles devant les visiteurs, surveillante voilée écoutant le Coran à fort volume… Il y a bien un problème, voire des problèmes, dans les musées marseillais.
En revanche, le rapport de l’IGS est loin de confirmer les allégations d’Arthur Gordon, mystérieux groupe d’agents qui avait choisi une voix anonyme pour dénoncer des “passe-droits, emplois fictifs et emplois du temps aménagés”. Ainsi quatre des cinq chefs d’équipe cités par le dénonciateur anonyme sortent blanchis de l’enquête interne. “Leur présence est confirmée par leur hiérarchie et les autres agents interrogés”, indique le document. D’autres agents eux-mêmes cités feront l’objet d’un rappel à l’ordre. C’est le cas d’un technicien rattaché au musée Cantini dont le rapport note qu’il “gère lui-même son emploi du temps et développe son autorité au-delà même de ses fonctions”.
“Très souvent absent de son poste”
Son frère qui occupe un poste similaire est “le plus souvent inconnu des personnes questionnées”. Bien que “très souvent absent de son poste”, sans fiche de poste connue, l’intéressé actuellement en congé de longue maladie n’a pu être interrogé. Une cheffe d’équipe est également pointée sur sa capacité à s’absenter de son poste sans contrôle. Elle est également citée pour bénéficier d’un grand nombre de dimanches et jours fériés travaillés cumulés à l’année. “Au total, des compléments de salaire pour dimanches et jours fériés entre 2 000 et 2 500 €/an [et par agent. Ndlr] sont justifiables et régulièrement versés”, pour l’ensemble des surveillants de salle. Au-delà, ils ont attiré l’attention de l’IGS. Et c’est particulièrement le cas de cette agent cité par Arthur Gordon.
Un autre agent du Musée d’art contemporain est pointé pour avoir pris sept semaines de congés dans une période estivale où “le règlement intérieur en autorise deux”. Entre le 14 juillet et le 6 septembre, il a ainsi cumulé 55 jours d’absence. Au musée d’histoire, c’est une agent voilée – ce qui lui est interdit en tant que membre de la fonction publique – qui “écoute le coran en salle d’exposition” qui a été dénoncée par des visiteurs sur le site Tripadvisor. Averti de ce comportement, l’administration du musée n’a pas sanctionné son comportement.
Le fusible des ressources humaines
Quant à la responsable de la cellule “ressources humaines” déjà passablement au centre de discussions relatées par Marsactu, elle en prend pour son grade au point d’apparaître comme le véritable fusible. Décrite par ses subordonnées comme “autoritaire et imprévisible”, cette cadre A a vu ses “capacités d’encadrement” usées par “le déficit d’encadrement”, des “comportements individuels propices aux conflits” sans compter “des locaux en open space inadaptés à la confidentialité des informations”. Étrangement, le secrétaire général des musées, souvent cité comme l’alter ego de cette responsable, n’est jamais cité et n’a pas été interrogé par les inspectrices.
Sur les emplois du temps et les rémunérations, les constats dressés par le rapport ne sont pas plus rassurants. L’inspection générale des services note que des “suppléments salariaux indus” ont pu être générés par le biais d’heures supplémentaires non vérifiées dans leur réalité. De la même façon, “les déclarations de présence réalisées en début de journée ne permettent pas d’attester durablement de la présence des agents”.
Face aux absences récurrentes et imprévisibles des agents de surveillance de salle, les chefs surveillants, en charge des feuilles de présence, peuvent se trouver en situation de négociation sur des présences factices les week-end, ou sur des repos compensatoires cumulés avec le paiement d’heures supplémentaires (conférences au musée d’Histoire, journées du Patrimoine, …) afin de maintenir les musées ouverts.
“Conflits et défaut de management à tous les niveaux”, “constat de défaillances nombreuses de la totalité de la chaîne hiérarchique”, le rapport est sans appel sur la responsabilité de l’encadrement du service : “informée et consciente des dérives comportementales individuelles, qu’elle n’a pas résolues, la hiérarchie peut être considérée comme complaisante à l’égard des faits décrits”, écrit l’inspectrice générale Odile Blanc, en conclusion.
14 recommandations
L’ensemble de ces constats débouchent sur 14 recommandations. Deux concernent trois agents dénoncés par Arthur Gordon dans ses mails anonymes. Les douze autres visent à rationaliser le fonctionnement des musées en renforçant le contrôle de la chaîne hiérarchique, à partir des conservateurs et chefs d’établissements. Les inspectrices conseillent de mieux former les agents, de faire passer des contrôle d’aptitudes aux chefs d’équipe et de permettre une meilleure reconnaissance salariale des chefs d’équipe tout en les dotant d’un véritable statut.
Ce document de synthèse n’est pas destiné à une large diffusion au-delà de la direction du service. Lors du prochain comité technique, le 29 mars prochain, le secrétaire général du SDU/FSU compte demander la communication du rapport complet aux représentants du personnel municipal. Pour l’heure, à entendre l’administration, cette demande ne sera pas satisfaite.
Commentaires
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Il est simplement incompréhensible qu’avec, à la mairie, une direction des ressources humaines pour l’essentiel assurée par le syndicat qu’il vous faut et son “ingénieur” que le monde entier nous envie, de tels errements aient pu se produire. Ce rapport est sans nul doute un tissu de diffamation anti-syndicale…
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à vomir…..pendant ce temps la certains fonctionnaires volontaires et travailleurs se font harceler et mettre au placard…où est la notion de mérite?
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Le résultat d’une gestion municipale faible et couarde où l’on préfère fermer les yeux qu’affronter les réalités. Tout concoure à ce qu’un certain nombres d’individus sans vergogne, profitent de ces faiblesses, avec pour certain la “protection” du syndicat, et s’aménagent une petite vie selon leur bon plaisir, sans rendre de comptes à personne. On est là dans l’ignominie, le paradis du tricheur et du cossard. Que ces élus dégagent et vite.
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Il faut faire une grosse pub de ce document pour développer un tourisme d’un nouveau genre, unique en France, les attractions muséales ne seraient pas les pauvres croûtes, mais le personnel des Musées de Marseille, on y verrait des bastons entre gardiens, des zen’uniformes avec écouteurs dans les oreilles, la folle d’allah, des feignasses dans les recoins…
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Vieille Charité : la collection du Mexique, probablement la plus importante et intéressante en France, est fermée faute de personnel, pendant l’exposition Picasso. Pauvre Picasso voyageur imaginaire, cette salle aurait été un contre champ magnifique…
En revanche, il y avait samedi 4 caissières à l’accueil pour une billetterie qui n’en nécessitait pas plus de deux.
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Lors de ma visite de l’expo Jack London (très évocatrice au demeurant) j’ai donc pris mon billet à l’accueil. Il y avait une personne à la caisse et un homme et une femme devant cette même caisse qui semblaient soit parader soit tenter de tuer le temps (la hiérarchie peut-être?). J’ai payé avec un billet, l’employée m’a rendu la monnaie et là devant mes yeux ébahis, intervention énergique de la “responsable” vis à vis de l’employée : “quand on vous règle en billet, demandez l’appoint au gens s’il vous plaît” ceci dit avec l’autorité de l’ambassadeur qui dit son fait au dictateur local. Lors de la visite, une surveillante commence à taper la discute avec deux jeunes hommes, visiblement flattée de l’intérêt qu’on lui portait, le volume sonore de la discussion approchant celui d’une discussion en terrasse de café sur des sujets n’ayant aucun rapport avec l’expo (même si çà avait été le cas çà ne changeait rien à l’affaire). Pendant ce temps les (rares) visiteurs présents tentaient de rester concentrés sur les textes et les images présentés… Tout cela est peut-être anecdotique mais pour moi montre bien quel niveau a atteint cette ville en regard de ce que l’on peut voir ailleurs. L’irrespect est présent partout ici.
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Autre innovation récente, avoir confié la sécurité à la société privée ONET pour l’expo Picasso à la Charité. Après avoir ouvert son sac, ces zélés personnages ont quand même confisqué une pomme à ma maman (77 ans) au cas où elle aurait voulu commettre un acte dadaïste, sans doute.
Pour ma part j’ai eu une sorte d’altercation avec un gardien de la 3e salle qui me reprochait d’avoir un sac à dos (personne ne m’ayant rien dit auparavant) et qui s’est mis à me parler comme un videur de boite de nuit (certainement sa formation initiale) du genre “si vous êtes pas content, je vous sors !”. J’ai bien laissé dans le livre d’or de l’expo mes impression sur ce personnage aimable comme un chalet de Biot (contrepèterie)…
quoi qu’il en soit nous avons tous regretté les aimables personnels municipaux, (…pas toujours des foudres de guerre, on le sait) mais qui font d’habitude aussi bien le travail de gardiennage d’un musée et elles/eux, au moins sans la moindre agressivité totalement déplacée dans un tel lieu !
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Très concrètement, au delà des 14 recommandations – après un tel constat – que peut-il, que va-t-il se passer ?
Si seule la nullicipalité doit régler le problème, je ne vois pas l’intérêt de telles recommandations
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Oui, il ne va rien se passer au moins jusqu’en 2020, après ou çà repart pour un tour ou çà bouge un peu,. Je penche pour la première solution, c’est ingérable, des décennies de travail de sape, et pour tout re-tricoter, d’autres décennies.
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N ‘oubliez pas que nous sommes ici à cagole’ s city
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Donc:
-c’est la faute à tout le monde et à personne … alors qu’on verrait bien certains pouvoirs plus ou moins dans l’ombre aux manettes
-on découvre (mais pour un service seulement !) que entre les agents de catégorie C pilotés par des A voire A+ qui font leur cour au pouvoir, il faudrait des catégorie B pour établir une chaine hiérarchique efficace
-et pour une fois, on ne conclut pas qu’il faut tout externaliser à Vinci/Onet/Veolia/Europacorps ou que c’est l’Etat qui nous prive de moyens
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Une chaîne hiérarchique A / C, c’est assez classique dans les musées. Les postes B, quand il y en a, sont souvent consacrés à de la médiation et sont un peu à part, l’encadrement direct des catégories C est assuré par des agents de maîtrise de catégorie C, en lien avec les responsables d’établissement (A).
C’est parfois un peu complexe parce que les conservateurs de musée (cat A donc) tirent traditionnellement leur légitimité de leur expertise scientifique et technique sur leurs collections, et ont parfois eu du mal à prendre en charge leurs responsabilités administratives (ça a beaucoup changé ceci dit).
Bon, bien sûr, là on est dans autre chose, parce que les chefs surveillants C sont complètement livrés à eux-mêmes, avec des situations difficiles à gérer, des responsabilités lourdes à prendre, pas de prise en compte des aptitudes et des compétences avant la nomination à leur poste (c’est pas parce que quelqu’un est légalement promouvable qu’il sera compétent à un poste au niveau au dessus, il y a des personnes compétentes à leur poste qui détestent l’encadrement), pas de formation et d’accompagnement, pas de légitimité et de reconnaissance, c’est juste n’importe quoi.
J’aime aussi beaucoup ce principe génial qui consiste à ne pas donner aux responsables des musées les moyens de gérer leur personnel et leur budget.
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