Les métallos de Fos ne veulent pas voir s’éteindre leur filière

Actualité
le 16 Mar 2018
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Les salariés du sidérurgiste Arcelormittal, de l’aciérie Ascométal ainsi que leurs sous-traitants sont inquiets pour leurs emplois. Rachats, délocalisation et investissement moindre... Ils dénoncent le "jeu des multinationales" qui met en péril leur avenir au sein de des usines à Fos-sur-Mer.

Manifestation à Fos. Photo : Violette Artaud.
Manifestation à Fos. Photo : Violette Artaud.

Manifestation à Fos. Photo : Violette Artaud.

Ils sont une petite centaine ce jeudi à déployer banderoles et drapeaux sur le parking venteux des arènes de Fos-sur-Mer. Rassemblés dans un élan national et par un temps plus que maussade, les “métallos”, comme ils se nomment eux-même, tiennent à faire savoir leur inquiétude quant à l’avenir des sites sidérurgiques du bassin de Fos. “La sidérurgie est une filière clef pour notre industrie et occupe une place importante dans le département, mais elle est percutée par le jeu des multinationales”, attaque au micro Christian Pantoustier, délégué central CGT d’Ascométal Fos, devant une assemblée de “camarades” et de journalistes. Comme lui, les autres salariés du numéro un européen du roulement à bille ou encore ceux du géant mondial de la sidérurgie ArcelorMittal, ainsi que leurs sous-traitants, voient dans l’actualité de leurs entreprises des signaux aussi menaçants que le ciel au-dessus de leurs têtes.

Rachats et “concurrence interne”

Le dernier en date hérisse le poil des métallos. Il s’agit du rachat à venir de l’aciérie Ilva, à Gênes en Italie, par ArcelorMittal. “Ilva est un gros site avec une super capacité, il a quasiment la même position géographique que nous, automatiquement on va rentrer dans une forme de concurrence interne”, envisage Olivier Dolot, technicien opérateur et délégué CGT à ArcelorMittal Fos. Annoncé en septembre dernier, ce rachat n’a pas officiellement eu lieu, la commission européenne ayant quelques réticences à donner son feu vert. L’institution craint en effet que cette opération place le leader mondial de la sidérurgie dans une position de quasi-monopole. “Cette concentration” risque de “réduire la concurrence en ce qui concerne un certain nombre de produits plats en acier au carbone” a fait savoir la commission qui a du même coup lancé une enquête. Au niveau de la direction, on fait savoir que “des mesures correctives dont ArcelorMittal espère qu’elles apporteront les réponses aux interrogations de la Commission européenne sur le sujet de la concurrence en ce qui concerne l’acquisition d’Ilva” ont été transmises ce jeudi à Bruxelles, sans donner plus de détails. La Commission devrait rendre son avis le 25 avril prochain. D’ici là, l’inquiétude reste intacte.

Un autre rachat s’est invité dans l’agenda des industriels du bassin de Fos. Il s’agit de celui d’Ascométal par le Suisse-Allemand Schmolz and Bickenbach annoncé le mois dernier. Une annonce qui n’a pas manqué de dépiter les salariés du spécialiste du roulement à bille. Ces derniers voyaient il y a quelques semaines encore une possibilité d’éclaircie dans l’offre d’un autre repreneur, qui a finalement été écarté par le tribunal de Strasbourg. Il va donc falloir maintenant composer avec le candidat dont l’offre était la moins disante socialement. “Dans deux semaines, nous allons nous mettre pour la première fois autour de la table avec le nouveau repreneur. On va devoir se battre pour conserver nos acquis sociaux et contre la fermeture du service de fils”, annonce Christian Pantoustier. En effet, s’ils sont revenus sur leur projet de suppression de 44 postes – 27 embauches ont même été annoncées -, les nouveau patrons d’Ascométal n’ont apporté que peu de garanties sur l’avenir du site. Ils visent toujours une fermeture prochaine de l’atelier qui produit le fil pour ressort. Un service qui occupe un tiers des effectifs.

“On risque de mourir faute de combattants”

“Les embauches sont une bonne nouvelle, entame Jean-Luc Le Dez, secrétaire du comité d’établissement à Ascométal Fos. Et les clients vont peser pour que le service fils ne ferme pas tout de suite, mais à long terme, nous n’avons aucune vision.” Au vu des carnets de commandes, le fonctionnement de ce service devrait être assuré pour les deux prochaines années. Au-delà, l’avenir de ce service clef reste compromis. Les syndicalistes voient également se profiler un autre obstacle. “Le risque, c’est que les départs à la retraite ne soient pas remplacés. Les gars ne veulent plus rester, les patrons ne délivrent aucun message pour les rassurer. Beaucoup saisissent la première opportunité pour partir, poursuit Jean-Luc Le Dez. On risque de mourir faute de combattants”. 

Mais les salariés des usines ne sont pas les seuls concernés par ce contexte peu rassurant. “Un emploi direct égale trois emplois indirects”, rappelle dans son mégaphone Christian Pantoustier. Justement, ceux que l’on appelle “les sous-traitants” ont fait le déplacement. “Nous dépendons à 100 % d’Arcelor, explique Jean-Marie Pozo, délégué syndical CGT de Phoenix Service France, une entreprise spécialisée dans le recyclage des déchets de l’aciérie. Si Fos ferme, ce sont 2500 ou 3000 sous-traitants qui vont se retrouver sur le carreau”, évalue l’homme qui constate que “chaque année, les contrats diminuent”.

L’investissement comme signal

Ce qui inquiète ces “sous-traitants” ? L’investissement, ou plutôt le non-investissement dans les infrastructures de l’usine. “Ils n’investissement plus comme avant. Le plus inquiétant, ce sont les machines. Elles sont dans les normes mais elles sont vétustes et on ne les remplace pas. Du coup, la production baisse et, donc, il faut moins de monde pour faire tourner tout ça…”, ajoute un autre employé de Phoenix Service qui cite des exemples de chaudières ou de ponts que l’on use jusqu’à la rupture. Du côté de la direction, en revanche, on argumente en sens inverse à coups de chiffres : “Depuis 2000, le site a bénéficié de plus d’1,2 milliards d’euros d’investissements. Cette année, 50 millions d’euros sont investis à Fos. Cette année, 100 postes sont à pourvoir dans les métiers de la maintenance (CDI)”, fait-on savoir par réponse écrite. Ce qui reste insuffisant pour les syndicalistes. “Il faudrait au moins 60 millions d’investissement par an pour qu’un site comme le nôtre soit compétitif”, estime Olivier Dolot.

Si, pour les syndicalistes, les industriels semblent lésiner sur l’investissement dans leurs infrastructures françaises, ils n’ont en revanche d’autre choix que d’investir lorsqu’ils se font épingler pour des problèmes de pollution. C’est précisément ce qui arrive régulièrement à Arcelormittal. Il y a tout juste deux mois, un arrêté de mise en demeure a été adressé à la direction d’ArcelorMittal pour l’intimer de limiter ses émissions de polluants, qui dépassent régulièrement les normes en vigueur.

Parfaitement au fait de ces dépassements récurrents, les salariés et syndicalistes présents ce jeudi évoquent volontiers ces questions d’environnement. Ils considèrent même cette problématique comme liée à leurs intérêts. “On sait que fabriquer de l’acier sans polluer a un coût. Mais on sait aussi que l’on peut se démarquer grâce à cette maîtrise, veut croire Olivier Dolot, délégué syndical à ArcelorMittal. Si demain on fait de l’acier proprement, et on sait le faire, on peut le vendre plus cher et se sauver. Avec la délocalisation, on délocalise aussi ce problème”.

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Commentaires

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  1. barbapapa barbapapa

    “On sait que fabriquer de l’acier sans polluer a un coup” …de girafe ?

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    • Benoît Gilles Benoît Gilles

      Merci pour le coût sur le bec… C’est corrigé.

      Signaler

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