Législatives : Marine Le Pen prête à parachuter un de ses proches à Vitrolles

Enquête
le 20 Sep 2016
2

Si elle n'est pas certaine de gagner la présidentielle, Marine Le Pen prépare déjà le coup d'après : une forte présence de députés FN à l'assemblée nationale. Pour cela, elle est prête à parachuter certains de ces proches. Notamment dans la 12e circonscription de Vitrolles et Marignane où un cadre du parti, Jean-Lin Lacapelle, est pressenti.

Marine Le Pen lors des Estivales à Fréjus - Photo d
Marine Le Pen lors des Estivales à Fréjus - Photo d'illustration

Marine Le Pen lors des Estivales à Fréjus - Photo d'illustration

Aux Estivales de Fréjus, la flamme du Front national a été gommée. La campagne est pour l’heure celle d’une seule femme, Marine Le Pen qui se veut désormais plus respectable que son parti. En coulisses pourtant, on sait que l’objectif présidentiel sera très compliqué à atteindre. On prépare plutôt une entrée massive à l’assemblée nationale, persuadé, comme le sénateur-maire de Fréjus David Rachline “que le système majoritaire sans proportionnelle, s’il peut exclure quand vous êtes à 30 %, peut vous servir de levier quand vous grimpez plus haut encore”.

Les circonscriptions les plus favorables ont donc été scrutées de près et, parmi elles, figurent en bonne place plusieurs circonscriptions des Bouches-du-Rhône. La première et la plus symbolique d’entre elles, la 12e, renvoie à un secteur que le Front connaît bien, celui qui englobe Marignane et Vitrolles, deux villes que le parti a dirigé à la fin des années 90. Aujourd’hui occupé par l’élu socialiste Vincent Burroni, le siège sera vacant puisque ce dernier a choisi de ne pas se représenter.

Jean-Lin Lacapelle, cadre méconnu mais influent du Front

Aux régionales, la candidate FN Marion Maréchal-Le Pen y a dépassé dès le premier tour les 50 % des voix et est montée au-dessus des 54% au second tour en duel face au candidat LR Christian Estrosi. Conclusion tout en euphémisme d’un stratège de la droite : “Que le Front envisage de gagner la circonscription ne me paraît pas incongru”. Marine Le Pen l’a bien compris et envisage, selon nos informations, d’y parachuter un de ses proches, Jean-Lin Lacapelle. Celui-ci pourrait même être désigné dès le 23 septembre par le parti. Conseiller régional d’Ile-de-France, l’homme est surtout connu au sein du parti pour son poste de secrétaire général adjoint chargé des fédérations, les antennes locales. Persuadé qu’il faut élever “le niveau d’exigence” du parti pour sélectionner cadres et candidats, il a récolté grâce au Figaro un surnom – qu’il assume en partie – de “nettoyeur”. Au Front, même s’il n’est pas en première ligne médiatique, ce proche de la présidente est un homme qui compte.

Pour l’ancien para, un saut dans la 12e n’aurait rien d’impossible mais personne ne confirme encore son arrivée. “Ce n’est pas parce que je suis secrétaire de la commission nationale d’investiture (CNI) que je suis habilité à vous répondre”, balaie l’intéressé. Tout juste le sénateur et secrétaire départemental du parti dans les Bouches-du-Rhône Stéphane Ravier lâche-t-il : “Tant que la CNI n’a pas tranché, c’est une rumeur. Je l’entends beaucoup moi aussi. Disons que ce n’est pas forcément infondé.”

Le casting correspondrait en tout cas à la volonté affichée par Marine Le Pen. “La présidente souhaite que nous ayons à l’Assemblée nationale une équipe constituée de gens chevronnés”, explique l’eurodéputée aubagnaise Joëlle Mélin qui anime les comités d’action programmatiques de la candidate. “Nous n’avons pas les mêmes moyens que les autres partis de bénéficier de nombreux parlementaires. Quand nous avons une occasion, nous envoyons nos meilleurs éléments”, explique David Rachline, nommé ce week-end directeur de la campagne présidentielle.

Oppositions locales

La greffe Lacapelle n’est pourtant pas gagnée d’avance au sein du FN local. “Le nettoyeur” risque d’avoir du travail en arrivant sur zone. De longue date, Jacques Clostermann, qui a fondé avec le député du Gard Gilbert Collard un collectif confidentiel “Mon pays la France” se voit candidat. “Marine Le Pen me l’a assuré”, assure aujourd’hui le fils de Pierre Clostermann, héros de guerre élu huit fois député gaulliste.

L’homme a aussi la particularité d’être en bataille contre les méthodes de Stéphane Ravier, qu’il juge trop brutales comme nombre d’élus, actuels ou démissionnaires, du Front. “Marine Le Pen m’a demandé de l’aider à redorer son image dans la fédération mais il n’y a plus rien à faire”, grince Clostermann. Ravier qui lui a envoyé un courrier en juin pour l’interdire de présence à Fréjus le lui rend bien et sourit à l’idée d’un parachutage : “Clostermann [pilote de ligne de profession, ndlr] risque de rester cloué au sol.” Quant à Lacapelle, il la joue philosophe : “Des tensions, il y en a dans toutes les fédérations, pas plus dans les Bouches-du-Rhône qu’ailleurs”. Reste que Clostermann pourrait faire partie de ceux qui seraient tentés par une investiture par les comités Jeanne de Jean-Marie Le Pen et donc par une dissidence.

En face, on veut jouer sur “la proximité”

Les opposants de droite comme de gauche l’espèrent en tout cas et se préparent à une élection difficile. “La situation est complexe effectivement, admet Loïc Gachon le maire socialiste de Vitrolles alors que le PS n’a toujours pas désigné son candidat. Mais l’on connaît leurs méthodes avec les parachutages. À Vitrolles, ils n’ont pris que fugacement la mairie [avec Bruno Mégret puis sa femme, ndlr] et n’ont jamais réussi à gagner les législatives.”

Son de cloche à peine différent pour Éric Diard, maire de Sausset-les-Pins et député de la circonscription jusqu’en 2012 : “Le FN n’a jamais gagné cette circonscription. Les législatives, ce n’est pas les régionales. On n’avait pas de représentativité, le premier candidat du coin était 32e sur la liste et les gens ont exprimé un ras-le-bol.” Investi par Les Républicains, il n’a qu’un mot face au potentiel parachutage du cacique FN : “la proximité. Les gens veulent un élu présent sur le terrain, qui fassent des permanences pour venir le voir quand ils ont des problèmes, qui soit le VRP des entreprises de la circonscription, pas quelqu’un qui vient une fois tous les cinq ans !” Cette fameuse “equation personnelle” suffira-t-elle à rattraper le retard pris depuis les précédents scrutins ?

Cet article vous est offert par Marsactu
Marsactu est un journal local d'investigation indépendant. Nous n'avons pas de propriétaire milliardaire, pas de publicité ni subvention des collectivités locales. Ce sont nos abonné.e.s qui nous financent.

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

  1. Karim Karim

    S.Ravier secrétaire départemental du FN dans les Bouches-du-Rhônes au service de sa propre carrière . Comme à son habitude, tout tourne autour de son ego hypertrophié. A part ses quelques fans, qui est dupe?

    Signaler
    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      C’est d’ailleurs vrai de tous les petits marquis du FN, non ? Ils disent parler “au nom du peuple”, mais la cheftaine habite un château et n’a jamais travaillé de sa vie, se fait parachuter dans le Nord, où elle n’a jamais habité, parce qu’une circonscription y est “gagnable”, cumule les mandats, etc. Et elle est bien imitée par ses lieutenants.

      Critiquer le système, ça rapporte des voix, mais l’essentiel est quand même d’en profiter à fond. Le peuple, c’est un détail, l’essentiel est de lui raconter ce qu’il a envie d’entendre – tiens, comme c’est étrange, c’est aussi la stratégie de communication de Sarkozy actuellement.

      Signaler

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire