Un opposant historique du FN à Toulon sous la mairie du 13/14

Un opposant historique du FN à Toulon sous la mairie du 13/14

Face à l'arrivée du Front national à la mairie de Toulon en 1995, Gérard Paquet a choisi la voie d'une opposition radicale. À l'époque, il est le directeur du Théâtre national de la danse et de l'image de Châteauvallon. En en faisant un "lieu de résistance", il devient une des figures de l'opposition au Front. L'acteur culturel a depuis quitté le Var et fini par implanter à Marseille l'association qu'il préside, Planète émergence. Depuis 2013, la structure est installée sous les voûtes de la bastide Saint-Joseph fraîchement rénovées avec le soutien de la majorité socialiste du secteur aujourd'hui sortante et de la députée de ces quartiers Sylvie Andrieux qui a accordé en 2013 50 000 euros à l'association via sa réserve parlementaire. Juste au-dessus, dans le même bâtiment, Stéphane Ravier s'installera ce vendredi matin dans le fauteuil de maire de secteur.

Avec l'arrivée de cet élu front national, l'histoire repasse les plats pour Gérard Paquet. Son combat toulonnais a marqué bien des militants des droits de l'homme. Dès l'arrivée de Jean-Marie Le Chevallier à l'hôtel de ville de Toulon, son théâtre devient un des épicentres de la résistance. Il refuse toute subvention de la ville, son principal financeur depuis la naissance du lieu en 1964. NTM vient y donner un concert pour le plus grand dégoût du frontiste qui ne peut s'empêcher de développer l'acronyme pour mieux dénigrer le groupe de rap. Le maire poursuit l'acteur culturel en justice. Paquet finira par perdre son job dans cette lutte politique où il aura dû essuyer plusieurs critiques sur sa gestion notamment portées alors par le préfet et proche de Charles Pasqua, Jean-Charles Marchiani.

Gérard Paquet pose forcément un regard particulier sur l'arrivée du FN dans un secteur où il développe son action culturelle et sociale. À ses yeux, le parallèle entre les deux situations est imparfait. "Forcément, tout cela ressemble un peu à une redite mais les périodes sont différentes. En 1995, il y avait eu une sidération. Cette fois-ci, c'est beaucoup plus limité, il y a un côté plus spectateur. Cela s'est banalisé, la nature du vote a changé. Ils sont aussi bien plus implantés qu'avant", analyse-t-il.

Installé là jusqu'en 2016

Le Front national a encore montré à Hénin-Beaumont qu'il pouvait du jour au lendemain couper les moyens à une association, en l'occurrence la Ligue des droits de l'homme. Forcément, l'arrivée de Stéphane Ravier, qui n'a pas donné suite à notre demande d'entretien mais avait fait de la limitation des moyens à "la nébuleuse associative" un de ses axes de programme peut susciter le même genre d'inquiétude. Cependant, la convention d'occupation signée lors de la précédente mandature par Planète émergence en mars 2013 court jusqu'en 2016. Qui plus est, cet accord, s'il est symboliquement signé par le maire de secteur, dépend en réalité de la mairie centrale où siège un vieux soutien de Gérard Paquet. À l'époque de Châteauvallon, Jean-Claude Gaudin, alors président de région, avait fait voter au sein de son institution une motion de soutien et une subvention au lieu culturel. Des éléments qui semblent de nature à rassurer l'association.

Gérard Paquet se dit cette fois prêt à une forme de coexistence pacifique. "La situation est différente de 1995. J'étais dans un théâtre national, un lieu que j'avais fondé. Symboliquement, j'étais un peu chez moi, explique-t-il. Là, on est dans les locaux même de la mairie, c'est un peu différent. On est dans une autre logique. On a commencé à travailler avec une population très large. On veut poursuivre ce travail. On acceptera de le faire si on peut continuer en toute indépendance."

"Retrouver un discours d'avenir"

L'association a ainsi proposé pour la capitale de la culture une exposition photo mettant en avant des femmes des quartiers Nord pour défendre à sa manière les droits des femmes. C'est cette démarche artistique, ancrée dans le quotidien de ses quartiers que Planète émergence entend poursuivre. "Les gens se sentent abandonnés, c'est une tragédie contemporaine. Entre ceux qui le sont déjà, et ceux qui craignent de l'être, il y a une angoisse profonde, remarque-t-il. Il faut retrouver un discours d'avenir. C'est le rôle de la culture de dessiner cet avenir qui n'est pas forcément catastrophique. Et puis, il faut surtout essayer de contribuer au fait que les êtres humains prennent conscience du monde dans lequel ils vivent et décident de le prendre en main."

Ce vendredi vers dix heures, Gérard Paquet n'ira pas jeter un oeil dans la salle du conseil d'arrondissements : il sera loin de Marseille. Comme tous les matins, les voûtes, seront fermées. Mais, l'après-midi, le lieu d'exposition s'ouvrira pour présenter la suite du projet artistique autour des femmes des quartiers Nord et de ce qu'elles incarnent. Dans un dernier clin d'oeil, Gérard Paquet glisse : "Tous les membres du conseil municipal pourront venir, on ne va pas filtrer à l'entrée."

Ajout le 11 avril à 14 h : Mention du soutien de l'ancienne majorité socialiste de la mairie du 13/14 et de la députée Sylvie Andrieux.