Taxe sodas : menace fantôme de Coca-Cola, montée en pression d'Orangina
Taxe sodas : menace fantôme de Coca-Cola, montée en pression d'Orangina
« Une erreur de communication ». Voilà comment qualifiait jeudi soir Hubert Patricot, PDG pour l’Europe de Coca-Cola, l’annonce faite par la filiale française le matin même d’ajourner un investissement de 17 millions d’euros destinés à l’usine d’embouteillage des Pennes-Mirabeau, à quelques kilomètres au nord de Marseille. La multinationale américaine aux 26 milliards de chiffres d’affaires mondial (en 2010) expliquait n’avoir pas apprécié, mais alors vraiment pas, l’annonce de la nouvelle taxe sur les boissons gazeuses sucrées incluse dans le plan d’austérité du gouvernement.
Ballon d’essai ?
Une cacophonie difficile à expliquer. Ballon d’essai pour mesurer la capacité du pouvoir à résister contre ce puissant lobby des boissons gazeuses après le rétropédalage du gouvernement sur le relèvement du taux de TVA des parcs à thème ? Ou manque réel de communication entre les différentes branches du groupe, très surprenant à ce niveau-là surtout sur un sujet crucial pour toute politique industrielle, l’investissement.
L’annonce a tout en cas fait beaucoup réagir, la classe politique qualifiant allègrement cette annonce de « chantage ». C’est le cas de la députée UMP Valérie Boyer, qui se dit « absolument choquée et scandalisée qu’une entreprise privée tente de dicter la politique fiscale d’un pays », ou d’Eva Joly, candidate à la présidentielle d’Europe Ecologie – les Verts (EELV), interrogée lors de son déplacement à Fralib, avant que la multinationale ne fasse volte-face :
« On parle de santé publique »
Valérie Boyer aimerait même aller plus loin en proposant à l’Assemblée de mettre en place une fiscalité sur les aliments en fonction de leur valeur nutritionnelle : « Est-ce que vous trouvez normal que les boissons sucrées soient taxées de la même façon que la viande ou les légumes ? L’obésité, c’est quatre milliards d’euros par an dans le budget de la sécurité sociale, et contrairement à ce que peut dire l’industrie agroalimentaire, beaucoup d’études démontrent la corrélation entre les boissons sucrées et l’épidémie d’obésité qui touche la France ».
Elle ne se dit pas surprise par le revirement de la société et n’exclut pas la thèse du ballon d’essai, quelques semaines avant que les parlementaires ne débattent de cette fameuse taxe : « C’est vrai que c’est assez énorme pour être une simple bévue, mais la stratégie ne m’intéresse pas, on parle de santé publique », nous expliquait-elle samedi.
Soutien syndical
C’est que le géant d’Atlanta a du mal à avaler cette nouvelle taxe sur le secteur (d’ailleurs initialement proposé par Bernard Reynès, député UMP des Bouches-du-Rhône lui aussi, mais pour permettre de venir en aides aux agriculteurs) qui devrait rapporter 120 millions d’euros à l’Etat. Dans le communiqué initial, Tristan Farabet, président de Coca-Cola entreprise France, pointait « une taxe bien injuste » qui stigmatise les boissons sucrées aux côtés de la cigarette. Une fois n’est pas coutume, les syndicalistes de l’usine, qui emploie 210 salariés, ont soutenu hier cette annonce de gel, qui menacerait pourtant leur site, mettant en cause directement le gouvernement. Ils estiment que cette taxe est susceptible de peser sur les emplois et que la lutte contre l’obésité est plus un prétexte qu’autre chose.
Mais reste qu’il ne comprennent toujours pas comment une telle erreur de communication a pu être commise : « A moins que Tristan Farabet ait voulu passer au zapping, on voit mal comment il a pu faire cette déclaration sans le feu vert européen. On a peut-être voulu bouger le gouvernement et ça a marché. Après, il est impossible pour nous de savoir exactement ce qui s’est passé. Ce qui est sûr, c’est que c’était très maladroit, on peut s’attendre à tout maintenant », explique à Marsactu Franck Vernier, délégué syndical Force ouvrière. Pour lui, l’annonce de cette nouvelle taxe et cet imbroglio gazeux « sont deux choses tout à fait différentes ».
Bientôt au tour d’Orangina ?
Dans le sillage de Coca, Orangina – créée en 1936 à Marseille avant d’être racheté par Cadbury-Schweppes en 2001 puis par le japonais Suntory en 2009 – a fait également connaître son mécontentement. Dans le quotidien Les Echos de vendredi, le président du groupe pour la France, se dit « très choqué par le lien fait par le gouvernement entre obésité et boissons sucrées », justifiant que ces dernières ne représentent que 3,5% en sucre des apports journaliers pour les Français. Orangina est « scandalisé (décidément, NDLR) et déterminé à se battre jusqu’au bout contre le projet de Bercy ».
Elle l’était moins il y a quelques mois pour l’inauguration de l’exposition que consacrait à son fondateur Jean-Claude Béton la Chambre de commerce et d’industrie Marseille Provence, présidée par l’ancien PDG d’Orangina France Jacques Pfister, en présence du maire Jean-Claude Gaudin et de Christian Frémont, directeur de cabinet du président de la République. Recevoir les honneurs est une chose, en partager les fruits en est une autre…
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