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SNCM : la compagnie dans l’antichambre du tribunal
Après plusieurs reports, les quatre candidats à la reprise de l'armateur marseillais ont défilé devant le tribunal de commerce. Le procureur s'est prononcé pour l'offre de Patrick Rocca. De leur côté, les salariés estiment que les inconnues sont trop nombreuses pour pouvoir boucler la procédure.
La salle des pas perdus du tribunal de commerce de Marseille. Photo d'illustration. JV.
“Marcel, est-ce qu’il y a des plateaux repas ?” Réunis devant le tribunal de commerce de Marseille ce mercredi après-midi, les salariés de la SNCM savent que l’audience va s’étirer jusque dans la soirée. Marcel Faure, secrétaire du comité d’entreprise, vient de leur annoncer l’audition successive des quatre candidats à la reprise de la compagnie maritime.
Un peu douchés par la pluie, réfugiés pour certains dans les cafés environnants, les personnels sont bien moins nombreux que lors des rendez-vous précédents. Les banderoles CGT et les camarades de lutte sont rares, les élus d’ordinaire attentifs à la situation absents. “Les audiences se succèdent tellement qu’on ne sait jamais si c’est l’ultime ou pas”, commente Jean-François Simmarano, secrétaire CGT sédentaire.
Le premier appel d’offres date de décembre 2014. Mais après avoir accordé deux délais, le tribunal avait rejeté l’ensemble des candidatures le 10 juin 2015. La procédure du deuxième appel d’offres a elle aussi connu plusieurs reports, en septembre et octobre, pour aboutir à cette audience du 4 novembre. “C’est pénible parce que ça dure mais en même temps ça fait trois ans qu’on met la liquidation en échec”, souligne Maurice Perrin (CFE-CGC).
Défilé des candidats
Ce mercredi, le comité d’entreprise, qui représente le personnel lors des audiences, demande d’ailleurs un nouveau report de l’examen des offres. Le tribunal préfère suivre la direction et fait enfin défiler devant lui les candidats. Entourés de leurs avocats en robe, épaulés pour certains par leurs communicants, ils tentent de tuer le temps écouteurs sur les oreilles ou en pensant eux aussi au tardif repas du soir. Venus en nombre, les membres du consortium Corsica Maritima semblent caler les derniers détails. À sa sortie après 45 minutes d’audition, Christian Garin ne glisse que quelques mots aux caméras de France 3 pendant que Patrick Rocca lui succède. Ce rythme de 45 minutes est respecté pour l’entrepreneur corse, suivi par Baja Ferries et Corsica Maritima. Comme l’a annoncé Corse-Matin, le procureur a ensuite indiqué sa préférence pour l’offre de Patrick Rocca, entrepreneur corse qui propose de reprendre 845 salariés. C’est aussi le cas des juges commissaires et de l’agence de garantie des salaires. Commence désormais une attente plus longue jusqu’à la décision du tribunal prévue le 20 novembre.
À l’extérieur, l’audience est appréciée de manière plus distanciée par Jean-François Simmarano. “Le problème, c’est que l’on n’a pas les contours de la future DSP (délégation de service public, ndlr). Toutes les offres qui sont proposées sont donc virtuelles, justifie-t-il. Le gros risque, c’est un deuxième plan social derrière.”
En 2013, le groupement SNCM – La Méridionale avait remporté le marché pour la desserte de la Corse jusqu’en 2020. Mais ce contrat crucial en termes d’activité a été annulé par le tribunal administratif de Bastia en avril 2015. Promis pour octobre, le cahier des charges de la future DSP n’a pas encore été publié par la collectivité territoriale de Corse. Ce mardi, à Marseille, son président Paul Giacobbi a annoncé que ce document faisait l’objet de discussion avec la commission européenne pour limiter les risques de recours. À l’écoute du débat des élections territoriales en Corse, Maurice Perrin s’inquiète d’une volonté politique de réduire l’enveloppe du contrat.
Pas d’accord sur le volet social
Avant même un éventuel deuxième plan social, toute reprise s’accompagnerait de la suppression d’au moins 600 postes sur 1450. “Aujourd’hui il n’y a pas d’accord avec la direction sur les mesures du plan social, notamment sur les conditions de départ en cas de licenciement sec, qui ne conviennent pas”, estime Jean-François Simmarano. Les deux syndicalistes regrettent également le manque de réponse sur l’actionnariat salarié (aujourd’hui les personnels détiennent 9% du capital) et la représentation des personnels dans la gouvernance.
Malgré ces inconnues, les fusées de détresse sont pour l’instant rangées. La dernière grève d’ampleur date de l’été 2014, alors qu’actionnaire et État poussaient au placement en redressement judiciaire, acté quelques mois plus tard. “Depuis un an et demi, le corps social a fait preuve d’une grande responsabilité en ne faisant pas de faux pas, salue Maurice Perrin, qui se félicite de la “très grande cohésion de l’intersyndicale”.
Cette stratégie de repli défensif a notamment permis de limiter la casse lors de la saison estivale, laissant plus de 50 millions d’euros dans les caisses de la SNCM. Elle pourrait arriver à son terme. “Si le tribunal persiste à vouloir attribuer la compagnie avant que toutes ces questions soient réglées, le repreneur arrivera le lundi et aura un conflit le mardi, prévient Jean-François Simmarano. Il commencerait son histoire dans la SNCM avec un conflit ?” Avec un délibéré attendu dans deux semaines, le calendrier va désormais s’accélérer.
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