Sabrina Agresti-Roubache : le relais de Macron à Marseille entre au gouvernement

Sabrina Agresti-Roubache en 2022 lors de la campagne des législatives. (Photo : Emilio Guzman)

Il lui aura fallu attendre le gouvernement Borne 3. Alors que son nom circulait dès le début de l’été 2022 pour une entrée au sein de la deuxième équipe gouvernementale formée par Elisabeth Borne, Sabrina Agresti-Roubache décroche finalement son maroquin ministériel à la faveur d’un “ajustement ministériel” comme on le définit à l’Élysée, ce 20 juillet 2023. La députée de la 1ère circonscription des Bouches-du-Rhône est nommée secrétaire d’État chargée de la Ville rattachée au ministère de l’Intérieur et au ministère de la Transition écologique. Elle succède à Olivier Klein qui cumulait les délégations Ville et Logement. Sabrina Agresti-Roubache permet à Marseille de revenir dans le jeu ministériel, dix ans après la nomination de la socialiste Marie-Arlette Carlotti. Elle est en outre la première élue marseillaise à la Ville depuis… Jean-Claude Gaudin en 1995.

“C’est une nomination amplement méritée”, se réjouit Sylvain Souvestre, le maire – ex Les Républicains désormais centriste – des 11e et 12e arrondissements de Marseille qui a fait campagne pour elle durant les législatives sur son secteur. “Cela vient couronner une ascension impressionnante où se mêlent beaucoup de travail, d’énergie et une grande fidélité au président”, observe-t-il. Didier Parakian, suppléant de Sabrina Agresti-Roubache aux législatives, qui occupera bientôt son fauteuil à l’Assemblée nationale, se félicite “d’une grande reconnaissance pour la ville et tout le territoire”. Lionel Royer-Perreaut, député de la majorité comme elle, souligne, de son côté, “qu’au lendemain des émeutes il y a une forte attente pour tracer une impulsion nouvelle en matière de politique des quartiers sensibles. Sa fougue et son dynamisme y contribueront.”

Artisane du rapprochement LR-LREM

Proche du couple présidentiel, productrice audiovisuelle à la ville, mariée à Jean-Philippe Agresti, recteur de Corse, Sabrina Agresti-Roubache, 46 ans, est élue conseillère régionale en juin 2021. C’est son premier mandat. Renaud Muselier, alors encarté LR, façonne contre l’avis de son parti de l’époque, des listes qui réunissent candidats de droite et marcheurs. En coulisses, la native de la cité Félix-Pyat qui a passé une grande partie de son enfance à Salon-de-Provence, est la principale artisane de ce rapprochement LR-LREM qui permet à Renaud Muselier de l’emporter face au Rassemblement national. Ce jeudi, le président de région se réjouit sur Twitter de “l’excellent choix” d’Emmanuel Macron.

L’obtention de ce portefeuille vient confirmer que l’intéressée est sans conteste le relais le plus important d’Emmanuel Macron à Marseille. L’Élysée confirme d’ailleurs à Marsactu que sa feuille de route contient le suivi du plan Marseille en grand. “C’est tout à fait crucial pour la suite du plan Marseille en grand qui a clairement besoin d’être incarné localement, car la mairie de Marseille ne le fait pas“, estime Sylvain Souvestre. Comme lui, plusieurs observateurs soulignent l’importance de son portefeuille : “La ville, c’est vraiment la meilleure délégation qu’on puisse donner à une Marseillaise, avec ce qui s’est passé rue d’Aubagne puis rue de Tivoli, avec tout ce qui a trait à la rénovation urbaine et aux problématiques liées à l’urbanisme et aux quartiers…” De fait, depuis des décennies, Marseille cristallise ces différents enjeux.

“Sabrina va mettre son énergie pour faire avancer tout ça, quand certains projets, comme celui de la réhabilitation d’Air-Bel, patinent du fait de tiraillements politiques”, pique encore Sylvain Souvestre. Un caillou jeté dans le jardin de Samia Ghali, maire-adjointe chargée notamment de lʼégalité et lʼéquité des territoires, qui a fait de la rénovation urbaine une de ses dossiers de prédilection. Elle devra donc composer avec la nouvelle secrétaire d’État. “Entre les deux, ça peut faire des étincelles !”, pronostique un élu marseillais.

En juin dernier, prenant appui sur Marseille “où la situation du logement est plus critique que jamais”, la députée portait une proposition de loi visant “à modifier le code de l’urbanisme afin de permettre à l’État de reprendre la main sur l’attribution des permis de construire”. Texte aux airs d’attaque frontale contre la municipalité de gauche, engluée dans la crise autour de la démission de son adjointe à l’urbanisme, Mathilde Chaboche.

Attendue sur des “réponses concrètes”

Sans rancune, le maire de Marseille Benoît Payan salue ce jeudi, sa nomination par un communiqué : “elle aura à défendre les intérêts de Marseille et je sais qu’elle saura travailler avec nous à trouver des solutions pour faire avancer le plan Marseille”. Un message assorti du rappel appuyé que “la politique de la ville est un ministère important qui doit apporter des réponses concrètes et rapides à la résolution des nombreux défis que Marseille doit relever”.

Est-ce qu’elle a les épaules? Non. Pas parce qu’elle n’est pas capable. Mais parce que ces dossiers  demandent une vraie connaissance technique, qu’elle n’a pas.

Un adjoint marseillais

À gauche, on regarde cette nomination avec un rien de circonspection. Arguant que, dans les domaines de son futur portefeuille, elle n’est pas expérimentée. “la Ville, c’est LE poste pivot de l’apaisement social. Ce n’est pas un poste pour quelqu’un que l’on remercie mais pour quelqu’un qui a des compétences, est ancré dans le réel et sait porter une vision”, grince un adjoint au maire de Marseille. Une autre élue s’interroge : “Est-ce qu’elle a les épaules ? Non. Pas parce qu’elle n’est pas capable. Mais parce que ces dossiers, s’ils sont politiques, demandent surtout une vraie connaissance technique, qu’elle n’a pas.”

Au sein de la majorité municipale on lui reproche aussi son “rond de serviette” sur les plateaux de la chaîne d’extrême-droite CNews où “elle intervient pour tout et n’importe quoi !” Le fait que Sabrina Agresti-Roubache “squatte cette antenne sans y porter la contradiction, même quand on y dit que Jean-Marie Le Pen avait raison, c’est quand même rédhibitoire”. Un autre y voit “un gros problème d’incohérence politique.” Quant à voir dans son ascension fulgurante et l’obtention de ce poste une rampe de lancement vers les municipales de 2026, les élus du Printemps marseillais l’écartent. Une cadre de la majorité en sourit : “On a déjà vu des maires devenir ministres, mais l’inverse…” 

Actualisation à 22 H 30 : Sabrina Agresti-Roubache a été nommée secrétaire d’État et non pas ministre, contrairement à ce que nous écrivions dans un premier temps. 

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