Rendez-vous au tribunal le 8 novembre pour le Grand conseil de la mutualité

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le 3 Nov 2011
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Le comité d’entreprise a finalement été consulté dans les formes ce jeudi matin. Et la date de l’audience est fixée : le Grand conseil de la mutualité (GCM) ira au tribunal de grande instance de Marseille le 8 novembre pour se déclarer en cessation de paiement, ce qui devrait ouvrir la voie à la nomination d’un administrateur judiciaire et – si la liquidation n’est pas directement prononcée ce que personne n’imagine – à une période de redressement de plusieurs mois. Avec un déficit de 4 millions d’euros en 2010, l’exercice 2011 devant se terminer sur une perte de 4,5 M€, sa banque avait mis le holà la semaine dernière, provoquant un conseil d’administration extraordinaire.

Émanation de mutuelles, avec 1200 salariés au compteur et 200 000 personnes soignées chaque années, le GCM est un poids lourd dans le département. Son réseau couvre 11 centres de santé, des centres dentaires, d’optique, des pharmacies, une clinique, un foyer pour personnes âgées… Ces difficultés d’un acteur essentiel de l’accès aux soins inquiètent, notamment dans le 15e arrondissement de Marseille, où un comité de soutien au centre Paul Paret s’est monté :

Maintien des centres mais fermeture de la clinique Bonneveine

Au cours d’une conférence de presse, la présidente du conseil d’administration Sandra Allais-Camilieri a tenu a rassurer : « nous souhaitons maintenir l’activité de tous les centres de santé » et le plan de redressement présenté au juge ne comprendra « aucun licenciement ». En revanche, dans la foulée de la fermeture de la clinique de La Feuilleraie, l’activité de la clinique de Bonneveine sera « externalisée ».

Un mot poli pour dire que le GCM cherche un repreneur pour transférer patients et salariés de cette établissement de 120 lits, le fermer, et revendre les terrains. « Il est quasiment le seul dans les Bouches-du-Rhône à être isolée, la tendance est au regroupement à la mutualisation », justifie Patrick Verdeau, directeur du secteur hospitalier et médico-social au GCM. Qui précise que les contacts se tournent exclusivement vers les autres acteurs à but non lucratif et que les autres activités (consultations, centre dentaire, imagerie médicale, laboratoire d’analyse etc.) ont vocation à rester sur place. « Par exemple en cas de construction d’un immeuble d’habitation on peut imaginer de louer le rez-de-chaussée ».

Une perspective qui soulève toutefois l’opposition sur place, notamment de l’élue communiste Marie-Françoise Palloix ou du comité d’intérêt de quartier. « Il ne s’agit pas de faire une opération immobilière, des bénéfices comme on l’entend mais de réduire l’endettement »; répond Jean-Paul Benoît, vice-président de la Fédération des mutuelles de France, qui est venu prêter main forte aux dirigeants lors de la conférence.

Celle-ci fait en effet suite à un long silence, Marsactu ayant notamment cherché à obtenir sans succès un entretien depuis cet été, où l’on a pu avoir l’impression que le combat n’était porté que par les salariés eux-mêmes et les usagers des comités de soutien. Avec, selon Jean-Paul Benoît des « déclarations intempestives relayées par la presse, parfois à la limite de la diffamation » . Pas plus de précision mais on pense forcément à l’idée lancée par le syndicat des médecins selon laquelle la mutualité ne serait pas vraiment à l’ouvrage pour sauver le GCM et souhaiterais plus particulièrement se désengager des centres de santé.

Prière d’augmenter votre productivité

Si la parole est revenue du côté des dirigeants, les mots restent toutefois feutrés et les piques codées. « Ceux qui décident de bloquer prendront leurs responsabilités », prévient Jean-Paul Benoît. Visé là encore, le syndicat des médecins, en référence à l’une des portes de sortie de crise avancées par Sandra Allais-Camillieri : « il faut en moyenne que chaque médecin fasse quatre consultations de plus chaque jour ». En effet, explique-t-elle, les médecins sont payés au mois mais l’assurance maladie rembourse par actes.

« Aujourd’hui, cette activité est insuffisante pour équilibrer la charge des salaires ». Jean-Paul Benoît est plus précis : la « norme » pour être à l’équilibre serait de 6000 consultations par an par médecin, soit quatre par heures, un chiffre qui serait de « moins de 4000″ dans les centres du GCM. Comment l’augmenter ? Le discours de la présidente ne le disait pas. Mais Jean-Paul Benoît finit par lâcher : « Il faut être clair, cela passe par un changement des contrats ». Autrement dit le passage du salariat à une rémunération à l’activité.

Des chiffres et une analyse contestés par Dominique Eddi, secrétaire du syndicat des médecins, pour qui « on est dans la moyenne du département » et le GCM cherche « des boucs émissaires ». Il affirme également que, même s’il est « fondamentalement opposé » à un paiement à l’acte « car c’est contraire à notre pratique », le directeur général n’a jamais négocié ce point avec le syndicat. Une information que nous n’avons pu en retour confirmer auprès du GCM.

A missions d’utilités publiques soutien public

On touche en tout cas là à la principale rupture entre les uns et les autres. Pour les premiers, le salut peut amplement venir d’un soutien externe pour toutes les « missions d’utilité publique » assurées par le GCM : accueil plus personnalisé, prévention, suivi commun des dossiers médicaux, tiers payant etc. Jean-Paul Benoît est sur la même ligne concernant la « discrimination » que subit le Grand conseil : écart de remboursement de charges par la Sécurité sociale, coût du tiers payant (3 euros par consultation) non compensé… Mais pour lui, « l’augmentation de la productivité des médecins généralistes est une condition nécessaire même si elle n’est pas suffisante ». Et de laisser entendre que les partenaires avec lesquelles le GCM s’est entretenu (collectivités, Etat) l’exigent avant tout soutien.

Sur ce front là, « plusieurs communes ont affirmé qu’elles étaient prêtes à nous soutenir mais sans concrétiser cette aide. C’est tout le problème de ces 10 derniers mois », déplore Jean-Louis Benoît. Mais le mouvement est peut-être enclenché, avec l’annonce de l’engagement du conseil général des Bouches-du-Rhône. « C’est la première institution qui dit, enfin, je met la main à la pâte, et qui chiffre : 300 000 euros par an sur trois ans et 700 000 euros en investissement pour la radiologie, en lien avec le dépistage du cancer du sein. C’est une première enveloppe qui peut
en amener d’autres »
, se félicite Dominique Eddi.

Qui croit savoir que le centre de santé de Miramas est bien parti pour être labellisé « maison régionale de santé » via l’appel d’offres lancé par le conseil régional. « Nous étudions les possibilités d’y répondre et nous considérons déjà satisfaire toutes les conditions », confirme la présidente, qui ne cite en revanche pas de centre particulier, assurant que les 11 pourraient concourir.

L’Etat « ne peut pas se dédouaner »

Reste l’agence régionale de santé (ARS), et plus largement l’Etat. Déjà, alors que le GCM demandait « une aide ponctuelle pour passer ce cap difficile, l’ARS a répondu qu’elle n’était pas compétente en la matière et qu’elle n’avait pas d’enveloppe », rappelle Jean-Paul Benoît. Pour les financements sur la durée par exemple pour contrebalancer les mauvais traitements dénoncés ou via des dispositifs existants comme le Fond d’intervention pour la qualité et la coordination des soins c’est donc mal parti.

Pourtant « avant les collectivités, c’est en premier lieu la responsabilité de l’Etat, il ne peut pas se dédouaner », estime Dominique Eddi. Hasard du calendrier, le 8 novembre, jour du passage devant le tribunal du GCM, est aussi celui qui avait été choisi par les syndicats et les usagers pour manifester devant la préfecture…

Un lien Le Grand conseil sur la voie de la cessation de paiement, sur Marsactu

Un lien Centres mutualistes : les pistes pour les sauver, sur Marsactu

Un lien Le rapport Acker, qui fait le point sur les possibilités de financement public des centres, sur Marsactu

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Commentaires

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  1. Pas Hypochrate Pas Hypochrate

    S’ il apparait depuis quelque temps que des modifications structurelles s’imposent c’est sans doutes que les mêmes insuffisances de gestion – productivité, contre lesquelles certains protestent, existent, malheureusement, depuis plus longtemps …
    Tout usager ( ou visiteur ) attentif pourra remarquer la fréquence et la durée de bavardages de certains médecins généralistes avec des personnels non médicaux et, plus généralement la lente et paisible nonchalance du comportement de certains … D ‘ autres, qui ne s’ accommodaient plus de cette ambiance, ont préféré exercer ailleurs mais cela ne change rien aux causes fondamentales de la situation ; les prétentions éthiques devraient amener les premiers à ne consacrer leur temps qu’aux patients ; quel que soit le temps qu’ils estiment devoir donner à certaines consultations, au moins celui là ne sera t’ il pas perdu .
    La médecine mutualiste est le meilleur compromis possible dans notre système de santé mais ses responsables ( eux-mêmes également trop nombreux et, parfois, gestionnaires médiocres, peut-être parce qu’ idéologues dogmatiques ) ont parfois préféré prendre des décisions manquant de rigueur, la situation actuelle découle sans doute de tout cela .

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