Pour la rentrée, la gauche se cherche un salut collectif

Pour la rentrée, la gauche se cherche un salut collectif

La gauche marseillaise est en jachère depuis les dernières municipales et la défaite de son candidat Patrick Mennucci. Terrassée par un maire pourtant en place depuis 18 ans, elle peine à retrouver de l'élan. En plein été, les bonnes volontés se dévoilent et s'organisent pour mettre en place les conditions d'un rebond à la rentrée. Dernière initiative en date revenue par la bande aux oreilles de Marsactu, un collectif dit des "défricheurs" se prépare. Monté par quelques jeunes socialistes proches de Patrick Mennucci, amendé par l'ancien élu Modem Christophe Madrolle et d'autres, l'idée aurait déjà séduit l'ancien député communiste Frédéric Dutoit, l'ancienne adjointe écologiste de Jean-Claude Gaudin France Gamerre ou la militante d'Europe écologie-les Verts Aïcha Muniga.

Le manifeste – encore provisoire – qui circule expose la démarche : "Nous ne rejetons pas les partis politiques, dont certains d'entre nous sont issus, mais ils doivent maintenant changer leurs pratiques. Face aux enjeux et aux besoins d'innovations politiques qui sont ceux de notre ville, nous pensons qu'il est temps de dépasser les querelles de personnes, les querelles de chapelles, et de se mettre au travail pour Marseille." L'appel est suffisamment vague pour que chacun y pioche ce qui l'intéresse.

"Recréer le lien avec les citoyens"

"On s'est dit qu'on ne pouvait pas laisser une opposition en jachère pendant un an, explique Christophe Madrolle qui a aussi fondé un parti avec son compère Jean-Luc Bennahmias, le Front démocrate. Quant à notre propre autocritique, elle ne peut se suffire d'explications liées à la personnalité de Patrick [Mennucci], des primaires ou de la critique du gouvernement. Nous sommes censés pousser notre analyse plus loin que le « tous pourris ». Or, le vrai problème à Marseille c'est de recréer le lien avec les citoyens sans retomber dans la guéguerre entre les personnes et les partis." "Ce n'est pas un parti, précise en écho Frédéric Dutoit, ce n'est pas une force politique qui se constitue. Cela n'a peut-être pas vocation à perdurer. Les défricheurs, ça porte bien son nom. Tout est à remettre à plat."

Ces travaux agricoles ne sont pas les seuls à à poursuivre l'ambition de redonner du souffle à la gauche. Les initiatives se sont multipliées ces derniers mois. Vaincue aux primaires puis dans son secteur du 4/5, l'ex ministre redevenue députée Marie-Arlette Carlotti relance son association "Marseille et moi". L'ex conseillère municipale Nathalie Pigamo fonde la sienne, "Marseille réflexion citoyenne", tout comme Annie-Lévy Mozziconacci avec "Innovons pour Marseille Métropole". Cette dernière, tête de liste dans le 6/8 et proche de Patrick Mennucci, est accompagnée par la conseillère régionale EELV Laurence Vichnievsky. Le désormais ancien député européen écologiste Karim Zeribi a son think tank "Écologie et république au centre" lancé avec des personnalités de divers horizons plutôt marquées au centre-gauche. Le tandem des GAM Jean Viard et Jacques Boulesteix se réunit sur le mode "le jour d'après"…

Cette liste sûrement partielle tant l'éclatement de la gauche marseillaise est important pourrait être étoffée avec la suite de la candidature de Pape Diouf. En devenant un parti à part entière, Changer la donne entend aussi renouveler l'offre politique. Même si, au lendemain des municipales, certains militants dont l'écologiste à l'origine du projet Sébastien Barles ont choisi de ne pas poursuivre.

"Pas le moment du bilan"

Tous ces groupes de réflexion prospèrent à l'ombre de partis mal en point sonnés par les échecs électoraux. Le PS se remet doucement d'un an de tutelle parisienne. La fédération dirigée par Jean-David Ciot proposera un large débat à la rentrée avec ses états généraux. Quant à Europe écologie-les Verts, les tensions nationales croisent les frictions locales essentiellement cristallisées autour de l'ancien chef de file du parti aux municipales, Karim Zeribi.

On ne retrouve ni dans ces formations ni dans les divers collectifs déjà mentionnés de place réservée pour exercer un droit d'inventaire collectif. "Ce n'est pas le moment du bilan des municipales, tranche Nathalie Pigamo. C'est trop tôt ou trop tard. Dans le personnel politique, personne ne reconnaît ses erreurs. Les leçons de l'échec, quand vous avez fait deux réunions-bilan, vous entendez toujours la même chose. Le vrai problème, c'est d'aller à la rencontre des citoyens. Un grand danger nous guette aux régionales avec le Front national. A la limite, il faudrait presque commencer le porte-à-porte maintenant parce que je suis persuadée qu'en expliquant ce que l'on fait, notamment au gouvernement, les gens comprennent. Par exemple sur les rythmes scolaires, il faut expliquer que c'est la faute de Gaudin si ça se passe mal et pas celle du gouvernement."

L'urgence des élections de l'année prochaine se fait déjà sentir et relègue en arrière-plan l'introspection. La gauche est en effet en position de perdre la région Provence-Alpes-Côte d'Azur qu'elle dirige depuis 1998 avec Michel Vauzelle à sa tête. "Toutes les initiatives peuvent à court terme aider Vauzelle, veut croire un des inspirateurs des défricheurs. Si un début de dynamique se crée, il peut en profiter pour dynamiser sa campagne." Et peut-être éviter les querelles d'ego et les rivalités d'écuries que chaque groupe nouvellement créé jure vouloir éviter.

Actualisation le 4 août : Un des membres des défricheurs nous précise que la première rencontre du collectif a été décalée au mois d'octobre, histoire d'éviter le télescopage le 13 septembre avec les états généraux du parti socialiste que nous soulignions dans une première version de cet article.