Pour Jean-David Ciot, la meilleure attaque c’est la Défense

Pour Jean-David Ciot, la meilleure attaque c’est la Défense

“Au fait, tu crois que les intervenants sont au courant que c’est pour la campagne ? Parce que dans l’invitation ce n’est pas évident…” Suppléante de Jean-David Ciot, candidat socialiste dans la 14e circonscription, Noëlle Ciccolini-Jouffret est saisie d’un doute et s’en ouvre à un militant, en ce mercredi soir. Quelques minutes plus tard, le député sortant va participer à un débat au théâtre d’Aix avec le chercheur Julien Nocetti et le consultant Frédéric Lenquette. Si ses affiches tapissent les murs derrière le buffet, le thème n’annonce effectivement pas forcément un meeting électoral : “La cybermenace 4.0 va t-elle déstabiliser le monde ?”

Sur un plateau exclusivement masculin, interrogé par l’ancien rédacteur en chef de France 3 Jacques Maleyran, Jean-David Ciot déroule sur les effectifs consacrés au numérique au sein du renseignement français et réagit même à chaud sur l’annonce de la création d’une “task force” contre le terrorisme par Emmanuel Macron. “C’est un pied de nez à plein de choses, notamment au fait que le débat a été éludé pendant la campagne présidentielle où on a beaucoup parlé de l’écume”, assume le candidat.

De quoi faire lever des sourcils chez ses adversaires d’En marche présents ce jeudi pour accueillir le ministre des relations avec le Parlement Christophe Castaner. “Pour un meeting de fin de campagne à Aix, on aurait pu s’attendre à un discours de politique générale, commente Thomas Melget, référent des Jeunes avec Macron dans le département. C’est comme si, au grand meeting de Bercy, Emmanuel Macron avait fait un exposé sur la baisse de la CSG et ses conséquences.”

“Un quinquennat marqué par la crise sécuritaire”

En mars déjà, Jean-David Ciot avait proposé un débat similaire à la fondation Vasarely sur le thème “Le cerveau connecté 4.0 peut-il se passer de l’homme ?” Et dans ses documents de campagne comme dans ses apparitions médiatiques, cette tonalité technique demeure, avec un accent sur les questions sécuritaires, d’industrie et d’éducation. Une stratégie téméraire dans une élection à haut risque pour le député sortant.

Pour sauver son siège au sortir d’un “quinquennat marqué par la crise sécuritaire, là où le quinquennat Sarkozy avait été marqué par la crise économique”, il semble jouer sur son expérience de de député, membre de la commission de la Défense pour se démarquer d’Anne-Laurence Petel, sa rivale officiellement investie par La République en marche, une étiquette qu’il a tenté d’obtenir sans succès. Cette stratégie de différenciation vaut aussi pour Stéphane Paoli, prétendant LR soutenu par la maire d’Aix Maryse Joissains. “Les sujets industriels sont extrêmement impactants sur notre territoire. Je ne dirais pas que c’est une question de compétence, car ce serait prétentieux, mais d’implication, sur la connaissance des dossiers”, avance Jean-David Ciot.

Une manière aussi de localiser son discours dans la partie non-aixoise de la circonscription dont il est lui-même un édile. Entre Sainte-Victoire, viticulture et micro-électronique, elle regroupe environ la moitié des électeurs. “Anne-Laurence Petel a fait deux réunions publiques hors d’Aix”, souligne-t-il, fier d’achever le tour exhaustif des communes ce vendredi avec sa ville du Puy-Sainte-Réparade. Au cours du débat, il citera notamment Technicatome – qui équipe les sous-marins nucléaires français – et ses 1200 salariés dans la circonscription.

La contre-attaque Castaner

“Il fait partie des 150 derniers pour l’activité à l’Assemblée. Emmanuel Macron veut supprimer un tiers des députés : il serait dedans !”, rigole Anne-Laurence Petel. Autour d’un café cours-Mirabeau, Christophe Castaner tente pour sa part de rassurer les militants sur les premiers pas de leur candidate une fois élue au palais Bourbon : “Je suis celui, avec mon cabinet, qui sera chargé d’épauler les parlementaires. Les jeunes députés peuvent parfaitement prendre des responsabilités. Bien sûr, la première session sera difficile, surtout qu’on ne sait pas quand elle va se terminer. Mais ensuite vous avez les moyens de bosser et d’être un député influent.”

Christophe Castaner en visite de soutien à Anne-Laurence Petel.

Derrière ce travail de déminage, un terme, un soupçon – godillot – dans lequel s’engouffre Jean-David Ciot. “La lecture que je fais de Macron, ce n’est pas le parti unique”, clame-t-il. “Le Parlement a besoin de gens qui viennent d’horizons divers, que chacun reste avec ses valeurs mais pour se dépasser et porter le projet d’Emmanuel Macron”, défendait-il déjà dans une interview à Anonymal TV. D’ordinaire tout en ouverture, Christophe Castaner tâche de repousser ce pied dans la porte : “Ici la cohérence s’appelle Anne-Laurence Petel. Jean-David Ciot est bien toujours premier secrétaire du PS ? Il est bien le candidat investi par le PS ? Une trentaine de parlementaires socialistes ont été courageux et ont rejoint En Marche. Lui voulait manifestement le beurre et l’argent du beurre, cogne-t-il. Ceux qui ont cherché à jouer sur tous les tableaux seront demain capables de faire de même. D’ailleurs je trouve dommage qu’il ne mette pas le logo du PS…”

No logo

Il n’est pas le seul. “À titre personnel ça m’a gêné qu’il n’affiche pas le logo du PS, raconte un représentant de l’aile gauche du parti qui s’est pourtant lancé dans sa campagne, comme “beaucoup de militants en opposition avec Emmanuel Macron mais qui sur la circonscription essaient de défendre notre député. Je n’ai pas les mêmes convictions que lui, sur Macron, sur le code du travail. Mais les autres partis de gauche sont divisés comme jamais et c’est malheureusement le seul dans notre circonscription qui a encore des valeurs de gauche tout en étant en capacité de gagner.”

À Aix, qui a la particularité d’être à cheval sur deux circonscriptions, certains autour de la conseillère municipale Gaëlle Lenfant ont préféré se tourner vers la 11e et Dorian Hispa, candidat EELV soutenu par le PS. “Je ne vous cache pas que les hamonistes ne sont pas là, reconnaît Noëlle Ciccolini-Jouffret. Mais le gros de nos troupes si.” Réunis par le plus petit dénominateur commun ou chacun chez soi, la question se pose plus largement dans une fédération socialiste dont il est toujours le premier secrétaire. “La question n’est pas le PS des Bouches-du-Rhône. C’est un débat politique qui se réglera nationalement”, estime-t-il.

Candidats, enjeux, résultats : notre dossier sur la 14e circonscription des Bouches-du-Rhône