Pour 2024, Martine Vassal assume son “programme” métropolitain

La présidente de la métropole et du département Martine Vassal (DVD) lors de ses vœux à la presse pour l'année 2024. (Photo : ML)

“Je ne vois pas ce qui vous choque dans les relations avec la Ville de Marseille, on ne voit pas les choses de la même manière. Il ne vous a pas échappé qu’on n’avait pas le même programme en 2020. La vision n’est pas pareille et donc il est sûr que l’interprétation n’est pas pareille non plus.” Désormais, la présidente de la métropole et du département Martine Vassal (divers droite) assume les divergences qu’elle entretient avec la mairie de Marseille. Son action ne saurait donc plus se résumer à la métropole des maires, sorte de synthèse d’une intercommunalité qui ne serait qu’une facilitatrice, mais elle s’étend à la réalisation d’un “programme”. Un programme dont lors de ses vœux à la presse ce 8 janvier, elle a cherché à dégager la cohérence en mêlant quelques commentaires piquants et des annonces soigneusement distillées. Petite revue des points saillants de son discours.

Martine Vassal veut porter dans le cadre du plan Marseille en grand, initié par le président de la République, de nouveaux projets de transports vers le Sud de la ville. Ils seront présentés lors du prochain Groupement d’intérêt public (GIP) Mobilité, qui réunit les acteurs du territoire dans ce domaine, le 19 janvier. L’annonce intervient après que la secrétaire d’État Sabrina Agresti-Roubache a demandé à la métropole d’aller plus loin que les 15 propositions initialement validées avec le soutien de l’État, qui apporte un milliard d’euros répartis entre subventions et prêts. “Sur ces 15 projets, c’est lancé, ça déroule, assure la présidente. Il est indispensable de travailler sur la suite.” Et elle devrait pour ce faire demander une rallonge à l’État, remaniement ou pas : “J’espère qu’on va garder notre ministre marseillaise pour qu’on puisse continuer à avoir des mannes de l’État sur les transports.” Lors de la précédente réunion, en novembre, il était aussi question d’aller vers l’Est et le Nord de la ville, tout en développant un “RER métropolitain”…

La question a été objectivée par la chambre régionale des comptes. La métropole profite avant tout à ses communes les plus riches, qui bénéficient de volumineux versements indus maquillés en “attributions de compensation”. Alors que leur remise à plat était souhaitée par les magistrats financiers et l’État, Martine Vassal oppose un refus ferme : “Tant que je serai présidente, je ne toucherai pas aux attributions de compensation.” Une attention qui ira droit au cœur des maires des communes qui constituent le socle d’une majorité métropolitaine, dont ne participent plus la majorité marseillaise et les élus aixois. La présidente de la métropole assure que, malgré cette décision, elle aura les “marges financières” nécessaires pour financer les nouvelles lignes de tramway et rajouter à ces versements une dotation de solidarité communale promise à hauteur de 66 millions en 2025, dont 45 millions pour la mairie de Marseille.

Martine Vassal est également arrivée avec des propositions déjà toutes prêtes, comme des cadeaux de Noël pas encore déballés après ces fêtes de fin d’année. La première, et la seule aboutie pour l’instant, est une enveloppe financière de 5 000 euros pour l’achat d’une voiture électrique pour toutes les personnes habitant dans la zone à faibles émissions (ZFE) de Marseille, ou tout professionnel qui a son activité domiciliée dans ce périmètre. La présidente précise que cette bourse est indépendante des autres dispositifs existants et sera attribuée sous condition de revenus. Pour développer cette mesure, elle va créer un fonds et propose aux autres collectivités locales de l’abonder ensuite si elles le souhaitent. Cela prend le relais des 65 millions d’euros déboursés entre 2018 et 2022 par le département des Bouches-du-Rhône, une prime qui ne visait pas spécifiquement le territoire de la ZFE et se faisait sans conditions de revenus. “La liste des projets est bien sûre encore longue”, avertit Martine Vassal, qui annonce aussi une “aide pour les primo-accédants dans le centre-ville ancien”, sans donner plus de précision. Un dispositif similaire a récemment été supprimé par la Ville de Marseille.

Il n’y a pas que Marseille comme ville dans la métropole de Martine Vassal, il y a aussi Aix-en-Provence. Et les relations ne sont pas non plus au beau fixe entre la présidente et la maire Sophie Joissains (UDI). L’élue aixoise a en effet annoncé il y a quelques mois lancer une action en justice pour récupérer la gestion des parkings sur son territoire, aujourd’hui aux mains de la métropole. De son côté, Martine Vassal estime que ces infrastructures sont “un des maillons de la mobilité”, qui est une compétence métropolitaine et non municipale. Elle se dit toutefois ouverte pour œuvrer avec la commune et présente même à la dérobée “l’idée de pouvoir travailler sur des tarifs préférentiels pour les résidents.” La présidente en profite pour rappeler que la ville d’Aix-en-Provence vient tout juste de récupérer la gestion de ses équipements sportifs et culturels, précédemment dans le giron métropolitain. Et si le dialogue ne fonctionne pas cette fois entre les deux collectivités ? Martine Vassal donne rendez-vous au tribunal à Sophie Joissains : “Et que le meilleur gagne”. Plutôt la meilleure ici.

L’année 2024 sera aussi marquée par la réforme de la loi PLM, qui offre son système électoral dérogatoire aux mairies de Paris, Lyon et Marseille. Si cette proposition de loi prend racine dans les ambitions du parti politique Renaissance pour la mairie de Paris, les incidences sur l’arc politique marseillais et les institutions locales pourraient être nombreuses. Pour l’instant, rien n’a été acté et les discussions tournent autour d’une seule élection sur la ville et non plus par secteurs. L’occasion donc pour Martine Vassal de s’exprimer sur un sujet qu’elle ne juge en général pas “prioritaire”: “Il y a d’autres préoccupations que de s’occuper des modifications de scrutin. À Marseille, je ne vois pas en quoi ça peut changer les choses.” Si elle soutient l’idée que certaines compétences municipales de proximité doivent redescendre aux mairies de secteur, en raison de la taille de la ville, elle ne veut pas qu’on touche à sa métropole. “Je ne suis pas pour qu’on change aujourd’hui un dispositif pas si ancien que ça et qui commence à fonctionner”, juge la présidente.

Où habite politiquement Martine Vassal ? Alors que localement les adhérents du parti Les Républicains (LR) comme les plus zélés des macronistes font cause commune en vue des municipales 2026, l’élue cultive l’entre-deux. “Je suis aujourd’hui sans étiquette, je travaille pour essayer à ce qu’on soit rassemblés et le fait d’être aujourd’hui sans étiquette ne me dérange pas. Mais je reste quand même dans mes valeurs de droite”, expose-t-elle. Soutien tardif du président de la République lors de l’élection de 2022, Martine Vassal avait dans le même temps quitté son parti de toujours, LR, dont elle était secrétaire départementale. Cela ne l’empêche pas de se dire “ravie que Laure-Agnès Caradec soit élue” présidente du parti dans les Bouches-du-Rhône : elle est sa vice-présidente au département. À l’inverse, elle n’a au cours d’une petite heure et demi d’expression lors de ces vœux 2024 jamais cité le président de la République.

“La liberté de la presse est fondamentale, il faut que vous puissiez exercer sans un couperet sur la tête”, assure Martine Vassal. Elle répondait à une interpellation du club de la presse sur la garde à vue qui a visé la journaliste indépendante Ariane Lavrilleux, qui collabore notamment à Marsactu. Mais nous n’avons pu nous empêcher de l’interpeller sur la politique des institutions qu’elle préside de couper les vivres à La Provence sur fond de désaccord éditorial. “Ce n’est pas pour moi la question, ça doit être pour d’autres”, a-t-elle d’abord esquivé, visant par là-même son allié Renaud Muselier, président de la région, une collectivité qui ignore aussi le journal propriété de l’armateur CMA-CGM. La présidente suggère même un prochain dégel :  “Rien ne m’empêche de prendre – et c’est prévu – des pages dans La Provence. Il faut qu’on équilibre des budgets, vous verrez prochainement que j’ai demandé une page faite sur une certaine thématique par La Provence.” Et Martine Vassal de jurer : “Moi je n’appelle pas les rédactions à 7 heures du matin !”