Oublié du plan Marseille en grand, le projet de rénovation de Frais-Vallon à la relance
Le 17 juillet, le comité d'engagement de l'agence nationale de rénovation urbaine examinait les deux derniers projets marseillais. Grande oubliée du plan Marseille en grand, la rénovation de la cité de Frais-Vallon est de nouveau d'actualité. Le bailleur prévoit de démolir deux bâtiments et son propre siège social.
La piscine tournesol, la tour C et le Nautile, au coeur du projet de rénovation de Frais-Vallon. (Photo : B.G.)
Le dossier était tanqué et les 33 millions d’euros promis par l’Agence nationale de rénovation urbaine (Anru) suspendus dans les limbes où errent les promesses de financement public jamais honorées. Depuis le 17 juillet, le projet de renouvellement urbain de la cité de Frais-Vallon (13e) est de nouveau d’actualité, après sa présentation devant le comité national d’engagement, l’instance de l’Anru où élus, représentants d’habitants et bailleurs sociaux viennent passer leur grand oral.
Comme La Provence l’a rapporté, la séance de la semaine dernière ne comprenait que deux sujets marseillais : l’avenant du projet d’Air-Bel, dont le volume de démolitions a été recalibré, et le projet Frais-Vallon, une première fois recalé en 2022. Si, pour l’heure, rien ne filtre de l’avis de l’Anru sur le sujet, ce nouveau passage en commission national d’engagement, est plutôt de bon augure. “La directrice générale de l’Anru m’a promis une réponse durant l’été, affirme Patrick Pappalardo, le président d’Habitat Marseille Provence, le bailleur. C’est clairement une nouvelle ère qui s’ouvre pour nous dont le dossier de Frais-Vallon est un des symboles“.
Changement de tête
Entretemps, l’office a changé de tête en entérinant le départ de Christian Gil, poussé vers la retraite par la métropole Aix-Marseille Provence, la tutelle du bailleur social. L’homme était notoirement hostile au projet de rénovation de la grande cité du 13ème arrondissement marseillais, qu’il avait défendu du bout des lèvres devant la même instance en 2022. Du coup, le projet de renouvellement urbain de Frais-Vallon, déjà délesté de la rénovation de la Rose, était resté au point mort, en attente d’une relance effective par le bailleur.
En mars dernier, lors de la revue de projets initié par Sabrina Agresti-Roubache, la secrétaire d’État à la Ville, chargée du suivi de Marseille en grand, Patrick Pappalardo posait aux côtés des élus locaux, pour mieux symboliser son retour dans le jeu. L’office est désormais doté d’un nouveau directeur venu de l’Est, Jean-Bernard Dambier qui a trouvé le dossier de renouvellement sur la pile des urgences, en arrivant à la tête de l’office, en mai dernier.
Pour les représentants des locataires de la cité, ce nouveau passage devant la commission national d’engagement est un soulagement. L’inamovible Fathia Ziani, pour la CLCV (consommation, logement et cadre de vie), Guy Lucchesi, du conseil citoyen, Nouria Sirat, pour la CGL (confédération générale du logement), ont fait le déplacement jusqu’en région parisienne, tandis que d’autres représentants associatifs, actifs dans le collectif habitat et cadre de vie, suivaient la réunion à distance.
“Nous étions là pour porter la voix des habitants, raconte Fathia Ziani. Ils ont hâte que les travaux commencent et entraînent une amélioration réelle de leurs conditions de vie à la hauteur des besoins“. Les associations ont dit leur vigilance quant aux conditions de relogement des habitants concernés par la démolition, ainsi que sur la question de la reconstitution de l’offre, sur place et sur d’autres terrains que possèdent Habitat Marseille Provence, notamment du côté du Petit séminaire, où il y a du foncier disponible et à la Renaude, où la cité Hérodote est appelée à disparaître.
Projet en deux phases
Pour l’heure, le projet de rénovation de Frais-Vallon présenté devant l’Anru se décline en deux temps : le premier entre dans l’enveloppe initiale de 33 millions de financement de l’agence en complément des apports du bailleur et des collectivités. Il prévoit la démolition de deux bâtiments, la grande tour C qui marque l’entrée de la cité, et le bâtiment E, de plus petite taille, qui jouxte l’ancien supermarché ED de Frais-Vallon, depuis longtemps fermé. Cette partie du projet était prévue de longue date, notamment pour permettre une diversification de l’offre de logement, au cœur de la cité, avec vue sur la colline arborée qui jouxte le quartier.
En revanche, la démolition de la tour C est une nouveauté. D’abord, parce que le bailleur y avait mené d’importants travaux de réhabilitation, condamnant dans un premier temps, les derniers étages de ce bâtiment de grande hauteur, avant de remettre en location ces appartements. On se souvient du tollé qu’avait suscité le projet de les flécher vers d’éventuels réfugiés ukrainiens, alors que le conflit démarrait à l’Est.
Le bâtiment est également connu pour accueillir en son pied une partie du trafic de stupéfiants de la cité, du fait de sa proximité avec le métro. D’ailleurs, les tarifs pour le shit ou la coke sont indiqués dès la passerelle qui relie la ligne de transports au quartier. La démolition, si elle est actée, est aussi un signal, même si personne n’est vraiment dupe sur son effet sur le maintien ou pas d’un point de deal sur le quartier. “On a décidé de jouer le jeu, déclare tout de go Patrick Pappalardo. Ce n’était pas forcément de gaîté de cœur puisqu’on a fait des travaux de requalification des appartements et qu’on prévoit désormais de la démolir. Mais cela va dans le sens du projet global“.
L’adieu à la tour C
“Intégrer le bâtiment C au projet nous permet de participer à la requalification de l’entrée du quartier souhaitée par la métropole, estime Jean-Bernard Dambier, le nouveau directeur. C’est couplé à une intervention forte sur le bâti pour améliorer le confort de vie des habitants, avec d’importantes rénovations sur d’autres bâtiments (G, J, N et O) qui seront financés par l’Anru“. Le bailleur prévoir également un important chantier sur la chaufferie du quartier, objet de tensions récurrentes avec les habitants.
Le chantier sera mené de conserve avec la métropolisation de l’avenue de Frais-Vallon. L’artère qui traverse la cité est toujours propriété du bailleur social, alors qu’elle est empruntée quotidiennement par un flot de véhicules qui rejoignent le centre-ville ou la rocade L2. La nouvelle voie publique est censée être arborée sous la forme d’un “mail vert”, en lien avec l’aménagement de la colline en espaces verts, doté d’une ferme urbaine avec jardin partagé.
À l’entrée de la cité, le projet prévoit une intervention lourde sur l’entrée du métro, transformée en pôle d’échanges, avec la recomposition du petit noyau commercial. Là encore, le projet repart d’une page blanche puisqu’il prévoit la démolition du Nautile, qui accueille notamment le siège d’HMP. “La métropole va lancé une concession d’aménagement qui permettra de dessiner l’entrée de quartier“, précise le nouveau directeur. La pharmacie du quartier qui vient juste d’acquérir ces murs, vendus par HMP, devrait donc se retrouver expropriée dans quelques années.
Changement de siège
Quant au bailleur lui-même, il s’imagine un destin ailleurs dans la ville. “Pour l’heure, nous n’avons rien acté mais ma préférence va vers Euroméditerranée où il peut y avoir des opportunités avec des parkings et des accès rapides pour les personnels, prévient Patrick Pappalardo. On conservera une de nos agences à Frais-Vallon. Il y a une vraie opportunité pour dessiner une nouvelle entrée de quartier, avec un parking relais, des boutiques, des services publics…”
Côté Ville de Marseille, le projet prévoit la rénovation en profondeur de la piscine de Frais-Vallon, l’un des derniers vestiges du plan national des piscines tournesol, lancé dans les années 1970. Les amateurs de rondeurs en plastique pourront bientôt faire leurs adieux aux bassins vétustes. Les groupes scolaires Sud et Nord de la cité seront également rénovés par la société publique des écoles et le centre social du quartier doté de locaux dignes de ce nom.
C’est un autre des points clefs mis en avant par les représentants d’associations, lors du grand oral. “Il est temps que soit pris en compte l’avis des locataires de Frais-Vallon, a indiqué Fathia Ziani, en début d’audition. Mais aussi ceux des conseils citoyens, des associations de terrain, pour qu’elles soient dotées de locaux dignes de ce nom“. Elles militent notamment pour la création d’un centre de santé communautaire, géré par l’association Réseaux 13, et des locaux rénovés pour l’association sportive, Multipassions.
Le second temps du projet dépasse de l’enveloppe initiale de 33 millions et donc du chiffre global de 650 millions d’euros pour la rénovation urbaine dans le cadre du projet Marseille en grand. “Cela suppose de revenir devant le comité national d’engagement dans les années à venir pour obtenir des financements complémentaires et poursuivre la rénovation des autres bâtiments“, prévient Jean-Bernard Dambier. Rendez-vous en 2026, pour vérifier si le projet a bien démarré dans le concret.
Commentaires
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“le chantier sera mené de conserve..?”
de concert non ?
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Oui, il n’y a que les navires et les boîtes qui sont “de conserve”.
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(Je ne suis plus un acteur de Frais Vallon depuis une dizaine d’années, aussi peut-être que certaines de mes questions et remarques sont naïves. Mais 🙂
Qu’est-ce qui justifie le retour du siège d’HMP, plus ou moins dans les quartiers de centre ville d’où il est parti il y a une vingtaine d’années ? L’idée d’implanter l’administration et la direction du bailleur dans un grande cité des quartiers Nord faisait justement sens dans le contexte de “dé-ghettoïsation” de Frais Vallon.
Si l’ancien supermarché et le bâtiment E attenant disparaissent, comment se fait-il que l’on ne parle pas du traitement en parc public, demandé depuis très longtemps par les associations, de l’aménagement de la colline de Frais Vallon qui les surplombe ?
La création de locaux sportifs, culturels, éducatifs, et sociaux dignes pour les associations qui jouent un rôle historique immense dans la vie de la cité et les acteurs de santé et de services publics qui partagent ces locaux. J’ai bien lu qu’il y avait des projets à ce sujet, mais est-ce qu’il y a un plan d’ensemble ?
Enfin, si le “serpent de mer” de la propriété et de la gestion de la voie qui traverse la cité est enfin réglée, ce doit être au profit de la résorption du trafic routier sur cette voie et, avec la disparition : du siège d’HMP, des bâtiments E et C, de l’ancien supermarché… c’est une énorme reconfiguration à prendre en compte…
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A la relecture, je viens de voir que des projets sur la colline ont été avancés !
Si tout cela se mettait en oeuvre ce serait vraiment bien… Le problème c’est qu’à Frais Vallon… on a l’impression que tout prend tellement de temps que quand un bout est traité, il est déjà temps de penser à sa requalification… Certains des projets mentionnés existait déjà conjointement à l’arrivée du siège d’HMP dans la cité il y a bientôt 30 ans… le départ de ce siège risque fort de ne pas les accélérer mais plutôt de les voir oublier…
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