On a fait le 13e anniversaire d'un ado bruyant

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par Lagachon
le 3 Oct 2011
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On a fait le 13e anniversaire d'un ado bruyant
On a fait le 13e anniversaire d'un ado bruyant

On a fait le 13e anniversaire d'un ado bruyant

Pour son treizième anniversaire, Marsatac a encore secoué une Friche à guichets fermés pendant trois jours. Nous, on s’est contenté du week-end pour vous emmener à la rencontre d’un festival adolescent qui en met plein la gueule et qui tape fort.

La belle crise d’adolescence

A treize ans, c’est la crise, on grandit trop vite et rien ne suit autour de nous, on voudrait pousser les murs, on est serrés, on sent que ça bouillonne mais on s’en fout. Parfois ça bouche entre la Cartonnerie et la Seita ou à l’entrée, mais au fur et à mesure de la nuit on retrouve de l’espace.

Du côté de l’organisation on se félicite, même si c’est toujours frustrant de laisser du monde devant « On est ravis, on est complets tous les soirs avec une programmation pas vraiment variété, mais bon, quand on fait un festival, c’est pas pour refuser du monde » explique Dro Kilndjian. Les éconduits restés devant confirment, un brin énervés, comme cet avignonnais venu exprès (sans avoir réservé en avance) « je fais beaucoup de festivals et c’est la première fois que je ne peux pas rentrer quelque part ».

Le doux souvenir d’une enfance spacieuse au J4 revient souvent dans la bouche des « historiques » du rendez-vous, mais la Friche a séduit les organisateurs qui s’y verraient bien encore passer quelques années, « 2012 en tous cas » commence Dro avant de se raviser « enfin, avec les travaux on ne sait pas ». Marsatac, le festival à jamais itinérant ? « Le rêve ? Ça serait d’utiliser le Port dans toute la diversité de ce qu’il offre, intérieur et extérieur, jouer avec les esthétiques et l’histoire portuaires ».

Et oui, l’ado grandit, il a besoin de place, et il en a marre d’être considéré comme un enfant, il a fait ses preuves, alors il veut qu’on l’écoute. Jamais vraiment conciliant, il ne se trahit pas pour son treizième automne. « Une pierre de plus dans les vitres de la bienséance et du culturellement correct » provoque le flyer de présentation ! Même si, ça va mieux avec la Ville qui les a même conviés au Festival des festivals en juillet : « on a atteint un niveau de dialogue relativement respectueux et constructif », mais l’expérience lui a appris que rien n’est jamais acquis, alors il reste sur ses gardes.

Un phare dans la nuit

Il faut dire que l’événement aura attiré près de 28 000 personnes (si on ajoute les 5000 communiants de la messe dominicale Aires Libres, associé au festival cette année), dont plus de la moitié ne sont pas marseillaises. Un tiers du public vient du grand sud-est (Lyon, Nice, Toulouse), et le reste d’encore plus loin, même si on croise souvent des groupes « mixtes ». Comme cette quinzaine d’amis « serial-festivaliers » rencontrés samedi soir, venus de Toulouse, Lyon, Paris, Limoges, Rennes, Bourges… et de Chave, spécifiquement pour Marsatac, dont la marseillaise du lot nous détaille entre deux gorgées de bière derrière l’esplanade : « on s’est connus au Sziget à Budapest, depuis on se retrouve pour des festivals un peu partout en France, là on est trois de Marseille et dans la journée on fait visiter aux autres ». Leur verdict apporte de l’eau au moulin de l’organisation « La Friche, c’est un cadre génial mais il faudrait agrandir : les salles sont blindées, on voit plein de bouts de concerts mais je vois beaucoup de gens marcher ! »

C’est vrai qu’on marche…on croise tout ce que Marseille compte de fêtards pouvant payer 30 euros la soirée…ou avoir une invitation. Plus hip-hop le vendredi, plus électro le samedi avec un public sensiblement plus jeune, ambiance « défilé H&M, casquettes et slim » selon une fine observatrice, même si les habitués reconnaissent que les différences d’âges sont moins marquées par rapport aux autres années.

Côté programmation, on a souvent entendu revenir les noms de Modeselektor, Yuksek, The Death Set, Theophilus London, Xzibit… et bien sûr : Chinese Man, les stars du vendredi soir. « Ça fait du bien d’être à la maison », on peut dire que les chinois ont fait le travail à domicile malgré une acoustique ingrate. Chinese Man, Oh Tiger Mountain… on sait le regard bienveillant que porte Marsatac sur le vivier phocéen. Par contre, Dro reste sceptique quant à l’émergence d’une scène marseillaise: « Je n’arrive pas trop à l’identifier, je vois des groupes qui tournent bien, mais c’est quoi une scène ? A Manchester, il y avait un effet miroir avec la population, l’émergence de pleins de groupes, de salles de concerts, un engouement populaire… Ou alors je passe complètement à côté, et il y a une manière de faire qui est commune, un style poil à gratter, que l’on revendique complètement ».

Scène constituée ou pas, Marsatac fait briller le gratte-cul marseillais à l’étranger. Outre les 2 à 5% du public qui fait le pèlerinage d’automne, le festival exporte ses opérations « Marsatac calling… » et présentera par exemple un plateau d’artistes marseillais au A38 de Budapest les 17 et 18 novembre prochains. Et en 2013 sortira son coffret de quatre Mix-up, rencontres entre artistes français et venant de Beyrouth, Bamako, Essaouira ou Le Caire, encore un projet parmi tant d’autres. L’émeute musicale, ça stimule la créativité !

La nuit marseillaise n’est pas morte, on l’a vu se trémousser devant la fine équipe !

Ado compliqué, poil à gratter, rebelle et exigeant… Marsatac te bouge, ça fait du bruit et surtout, ça fait du bien après une fin d’été apocalyptique pour les nuits marseillaises !

Ah, les nuits marseillaises… Dro « pensait que c’était au cœur du projet 2013, on en a parlé, mais là, j’ai plus l’impression qu’on assiste à une régression qu’autre chose ». La faute aux politiques ? «Non, on a les politiques qu’on mérite ! » balaie-t-il un brin amer. Ce n’est pas forcément le regard que portent trois bretons venus étudier ici, pour l’instant satisfaits de ce qu’ils trouvent, « surtout dans le quartier de la Plaine ».

Quoiqu’il en soit, Marsatac est un petit oasis, une pierre dans les fenêtres d’une Préfecture qui voudrait nous empêcher de danser dehors. On a vus des soirées bien remplies, des pointures hip-hop et électro à Marseille et pas d’incident ! Des jeunes filles écoutant « Death in Vegas » dans le tram direction Longchamp, des groupes circulant en continu entre la Friche et les Réformés, « et tout d’un coup c’est moins glauque » explique l’une de ces groupies de la formation britannique.

Mais la nuit, ça n’est pas qu’une question de bruit : bravo aux efforts déployés pour l’accès au site autrement qu’en voiture pour la troisième année, dans le tas, un service de bus gratuits dans le centre toutes les 15 minutes toute la nuit et un parking à vélo, avec un certain succès. Beaucoup de monde dans les bus à partir de 3 ou 4 heures du matin, et les bénévoles de « vélo en ville » ont veillé sur près de 200 vélos. Mais il reste du travail, et c’est les aixois venus en bus et coincés samedi dans la nuit à cause du « stationnement anarchique » (dixit une employée de la RTM résignée) qui peuvent en témoigner.

Aires Libres au Parc Longchamp

Pour ne garder que le meilleur souvenir, on a remis le couvert dimanche après-midi dans un parc Longchamp comme on aimerait le voir plus souvent. Avec la gueule de bois des bons dimanches, on a prolongé et occupé les Aires laissées li
bres, l’occasion de débriefer, morceaux choisis : « Eux, ils sont à 16 dans un 26m² à Saint Charles, du coup les before c’était là-bas », « Abusé, c’était complet tous les soirs, j’ai pas pu rentrer ! », « Pourquoi à la Fiesta il n’y a pas les navettes gratuites ? », « Theophilus London est parti en slam, et bé on lui a tiré une basket…bon ils l’ont rendue mais il a halluciné », « Mais pourquoi il y a encore des gens qui viennent en voiture ? », « Je te jure, à un moment, quelqu’un a mixé du Witney Houston ! », « J’ai un pote qui bosse dedans, tu savais qu’ils mangent bio ?», «Nous on a un groupe qui s’appelle les K5, on fait du trash musette chore pop ».

Ajoutons-en une : « mèffi quand l’ado aura grandi ! ».

Un lien Le site du festival et la vidéo du Mix-up à Bamako

Un lien Des vidéos prises sur place par les Inrocks et sourdoreille

Un lien Le debrief musicale de Mademoiselle Julie avec photos et playlist pour rester dans l’ambiance

Un lien Et dans les archives maisons : « Marsatac fait son bilan carbonne » (25/03/2010), et « Ce matin au conseil municipal, Marsatac s’est encore bien fait balader… » sur les déboires du festival avant de s’installer à la Friche

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Commentaires

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  1. joliette13 joliette13

    Quand on voit le quartier de la friche en effervescence tout le week end, le monde que ce festival peut drainer, je ne comprends toujours pourquoi il ne se passe pas plus de choses à Marseille et surtout pourquoi les politiques ne se bougent pas plus pour ce genre de manifestation, plus bon enfants que repaire de drogués, comme aime à le dire les cuq. C’est agréable de voir Marseille en plein mouvement, on devient même optimiste, mais juste le temps de la gueule de bois.
    Il y a un vrai effort sur l’accès au site, sur la propreté où des pauvres jeunes filles et jeunes garçons passaient leur temps à ramasser les verres de bière jetés au sol à côté des nombreuses poubelles.

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  2. Xavier Xavier

    Fabien, visiblement nous n’étions pas au même festival :

    Le son franchement pourri (unanimité !), des salles tellement petites qu’elles étaient impénétrables, entrées et consos hors de prix, absence totale de décoration, pas de nourriture diététique (bio j’en parle même pas), des gobelets jetables (en 2011, quelle honte !), de la poussière bien dégueu partout et des marques commerciales mondiales omniprésentes.

    Ami journaliste :
    ———————
    1 – sort de l’espace VIP la prochaine fois !

    2 – fait les files d’attente, paye ta place à 32 euros et tes boissons à 4 euros (X 4 ou X 5 ou plus car pas de robinets d’eau pour le public !!! )

    3 – marche dans la poussière cimentée par les restes de bière des centaines de gobelets au sol.

    500 000 euros de subventions bien mal utilisées, 25 euros par personne (base réelle de 20 000 personnes sur 3 soirées)…

    Et une armée de bénévoles/esclaves (au black donc !).

    Par contre les Aires Libres tout le contraire, du pur bonheur enfin (!) le dimanche …

    ——————————-
    C’est la différence entre des acteurs de terrain expérimentés depuis plus de 20 ans (free, rave) et un trio de bureaucrates, anciens fonctionnaires territoriaux qui ont gardé les branchement vers les subventions.
    Et qui squattent les musiques actuelles après s’être fait jeté du milieu RAP et HIP HOP, en 2001 après leurs 3 premières éditions…

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  3. papaches papaches

    à quand les écocup …. ?

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  4. fabien fabien

    Je pense que oui, mais nous n’avons sûrement pas les mêmes exigences et du coup pas le même ressenti.
    Quoique… le son, le monde, le prix, c’est vrai (et je l’ai souligné). J’ai raté les gobelets jetables et tu as raison, c’est dommage (surtout avec le discours environnemental).
    Pour info, je ne savais pas qu’il y avait un espace VIP avant d’interviewer Dro samedi après-midi, et comme j’ai passé les 2 soirées avec des amis non-accrédités, j’allais pas rester tout seul aux grandes tables (et entre nous, je venais pas pour ça), du coup, j’ai bien senti le monde et la chaleur, mais j’ai l’habitude des foules et ça ne me gêne pas au point de ruiner mes soirées.
    Tu décris la différence entre deux visions, je suis d’accord avec toi, encore une fois, je pense que c’est une différences d’attentes à la base.
    Par contre sur les subventions, je crois qu’ils sont auto-financés à 60% (d’où la présence de marques et le prix des billets d’entrée) et vu les relations qu’ils entretiennent avec les institutions je ne suis pas sur que ce soit le meilleur exemple d’aspire-subventions.

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  5. Silvano Silvano

    Xavier, je ne connais pas un festival de Zik’ (avec une production digne de ce nom) bon marché. Les concerts sont devenus la quasi-unique source de revenus des artistes et les cachets sont en conséquence.
    Je salue au passage l’équipe de Marsatac. En ces temps où Marseille rivalise dans le ridicule, le désastreux et le pathétique… il est bon d’avoir une manifestation comme Marsatac, reconnue et encensée au niveau national. Longue vie à ce festival.

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  6. Stéphane Sarpaux Stéphane Sarpaux

    Bonjour,

    en tant que journaliste, j’étais accrédité pour marsatac. Et je souhaite préciser les choses.

    – 33cl de Bière Kro à 3 tickets, soit 3 euros la bière dans les stands du festival

    – 33cl de Bière Kro à 4 euros au bar des grands terrains, où avaient accès les journalistes et d’autres “privilégiés”.

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  7. Casanovette Casanovette

    … Marsatac, c’est l’arnaque ! … Faut avoir travaillé avec eux pour en être tout à fait convaincu ! Des gros nuls imbus d’eux même et qui se tire la bourre entre eux. Ambiance de merde niveau moins zéro … On mettra ça sur le compte de leur âge, mais ça promet … avec ça, on a la relève des requins.

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  8. Simon L Simon L

    Le prix,( entrée et conso) l’accueil, la poussière, la mauvaise sono, les subventions qui servent à qui, les jeunes gens exploités, les invitations distribuées aux amis, des “vip” que se la pètedans leur ” carré”, les pub de marques partout, tiens ça me rappelle la dernière fois où je suis allé à la Fiesta des sud ( au moins quatre ou cinq ans), il y avait des gorilles patibulaires à l’entrée qui se prenaient pas pour rien, à l’intérieur les gens se marchaient dessus, une sono à chier et de la bouffe deguelasse, restait plus qu’à boire, mais au prix de la conso !! … bref tout est business, cette époque et ses pratiques ne me plaisent pas

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