Municipales à Marseille : dans les coulisses de “la traque aux abstentionnistes”
Entre un premier tour marqué par une inhabituelle abstention et un entre-deux tour à rallonge, la course aux abstentionnistes est bien plus développée que d'habitude. Chaque camp affine ses méthodes.
Photo JML
L'enjeu
Quel que soit leur score au premier tour, les candidats déploient leurs équipes pour ramener vers les bureaux de vote un maximum d'électeurs qui leur sont proches.
Le contexte
Près de 100 000 Marseillais de moins sont allés votés au premier tour des élections municipales par rapport à 2014.
Comparé à 2014, 96 873 personnes de moins se sont rendues aux urnes le 15 mars pour le premier tour des municipales à Marseille. Si l’on remonte aux élections particulièrement mobilisatrices de 2008, l’écart monte à plus de 114 000 votants. Cela représente à chaque fois autour de 20 points de participation en moins. Seuls 33 % des 506 000 Marseillais inscrits sur les listes électorales sont allés voter.
Ces chiffres aident certainement à relativiser les scores du premier tour. Mais ils donnent aussi la mesure des marges de progression des différents candidats vis-à-vis de leur électorat. Tous ont été touchés par cette vague de désertion des bureaux de vote sur fond de crise sanitaire, quoiqu’à des degrés divers. Ils savent aussi que la campagne habituelle, faite de meetings et de tractage, reste compliquée dans la période. Ce deuxième tour devient donc synonyme de courses aux abstentionnistes et les quatre semaines entre le dépôt des listes et le vote reposent sur une mobilisation inédite.
Ravier : “Les conditions sanitaires seront réunies”
D’abord, il faut tenter de rassurer l’électeur. C’est ce à quoi s’est employé le candidat du Rassemblement national dans son premier communiqué de second tour. “Les Marseillais électeurs doivent savoir que toutes les conditions sanitaires seront réunies pour que le scrutin du 28 juin se déroule dans les meilleures conditions.” Après avoir largement critiqué la Ville de Marseille tout au long de la crise et notamment sur le plan sanitaire, la tenue des bureaux de vote et la réouverture des écoles, l’exercice confine à l’équilibrisme. Mais pas question de rater une seule voix, notamment dans le duel qui l’opposera dans les 13e et 14e arrondissements à David Galtier, représentant local de Martine Vassal (LR).
Vient ensuite le travail fin de mobilisation. Au mois de mai, les candidats ont pu consulter comme tout citoyen les cahiers d’émargement du premier tour. Les plus malins avaient réussi à en voir une partie dès le 16 mars avant que la préfecture ne ferme ses portes au public, comme toutes les institutions. Les rendez-vous en préfecture ont un but principal : photocopier ou photographier les listes. “Une fois que nous avons ces listes, nos militants viennent tour à tour les consulter, raconte une candidate du Printemps marseillais. Chacun pointe les gens qu’il connaît et indique leur numéro en face de leur nom. Ils seront tous rappelés un à un en vue du second tour. Mais, évidemment, cela ne marche que si vous avez une vraie connaissance du secteur où vous vous présentez.”
Quand on voit que quelqu’un n’est pas allé voter et qu’on l’a aidé pour quelque chose, on en garde une trace.
Un candidat de Martine Vassal
La gauche n’a pas le monopole de cette pratique. Chaque camp réalise cela avec plus ou moins de précision. “Comme l’écriraient des journalistes, on traque, on chasse les abstentionnistes”, admet Yves Moraine, le maire sortant des 6e et 8e arrondissements qui y coordonne la campagne de Martine Vassal. Un candidat de la même équipe raconte les amicales pressions qui peuvent s’organiser sur les électeurs et les astuces : “Pointer les listes électorales est un travail de bénédictin. Nous avons un fichier des relations avec les gens, les interventions en mairie de secteur mais pas que. Quand on voit que quelqu’un qu’on a aidé par le passé n’est pas allé voter, on en garde une trace et on le rappelle.” Et quand on s’étonne de ce traçage, notre interlocuteur tente une image : “C’est comme vous à Marsactu quand vous faites une campagne d’adhésion, que vous envoyez vos newsletters et que cela ne débouche pas sur un abonnement, eh bien, vous les relancez.”
Il faut dire que la révélation des listes peut réserver quelques surprises amères. “On a trouvé parmi les abstentionnistes des gens qui travaillent à la mairie de secteur et qui ne sont pas allés voter. Depuis la reprise, ils rasent les murs”, raconte-t-on dans l’entourage de Bruno Gilles (DVD), maire des 4e et 5e arrondissements de 1995 à 2017 avant que sa colistière Marine Pustorino lui succède. Dans le camp du sénateur, une petite équipe de militants expérimentés bat elle aussi le rappel, comme plus au Nord chez Stéphane Ravier.
“Du porte-à-porte ciblé”
Ce travail de fourmi a ses limites et d’autres moyens sont aussi mobilisés. Jean-Marc Coppola, candidat du Printemps marseillais dans les 15e et 16e arrondissements, n’a pas souhaité éplucher les listes. “On ne travaille pas à partir des cahiers d’émargement parce que c’est particulièrement fastidieux, explique-t-il. Et puis, s’il s’agit de savoir qui a voté dans des cités populaires où il y a eu 12 à 15 % de participation, vous avez vite fait le tour. Donc on fait du porte-à-porte ciblé, des gens qui ont un certain réseau dans les bureaux qui n’ont pas voté. Dans ces quartiers, le Printemps marseillais est un peu un objet politique non identifié lors du premier tour. Là, ils ont intégré qu’il y a une force qui est arrivée au second tour. On travaille sur ça pour leur dire qu’il faut que ces arrondissements, pour qu’ils ne soient plus délaissés, fassent partie de la future majorité municipale.”
Autre technique : les tracts thématiques qui se multiplient pour coller au plus près des préoccupations. “En fonction des bureaux de vote, on regarde si ce sont plutôt des vieux, des gens qui s’intéressent à l’environnement, à la culture, au développement des commerces et on cible ensuite comme ça”, explique une proche de Bruno Gilles. “On a un outil assez fin pour analyser le vote et former des groupes de bureaux de vote, raconte un candidat du Printemps marseillais dans le centre-ville. Catégorie par catégorie, on cible les sujets porteurs. C’est du marketing politique.”
Et parfois, de bonnes âmes viennent vers vous pour vous assurer d’un coup de main : “On voit des personnes qui viennent nous voir en nous disant qu’ils pèsent 500 voix par exemple. On sait qu’ils ont fait campagne au premier tour mais là, ils sentent le vent changer, raconte la candidate du Printemps marseillais déjà citée. On sait ce qu’ils veulent dans ces cas-là, c’est toujours la même chose : des emplois, des logements…” Cette candidate l’assure : “nous, on ne promet rien à personne mais on leur dit que s’ils veulent que ça change, il faut voter pour nous”. Libre à chacun d’y croire, ou pas.
Commentaires
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On déclare nos impots, on télétravaille, on se surveille via des applications “révolutionnaires” mais on n’a toujours pas pensé à mettre en œuvre un système de vote électronique. Serait-ce la peur d’en venir au RIC?
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Je ne connais pas d’autres pratiques de vote meilleures que celle qui est en vigueur.
Elle est claire, transparente et sous le contrôle des citoyens.
Les citoyens peuvent être: délégué; assesseur; scrutateur et assister au dépouillement qui est public.
Je ne penses pas qu’un “vote électronique” puisse présenter autant de garantie.
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Le vote électronique ? Quand on voit la gestion pitoyable de la cybersécurité dans nos collectivités, on y regarde à 2 fois. Tout à fait d’accord avec Jean Pierre Ramondou, le meilleur système est bien celui en vigueur !
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Le vote électronique ? Allez donc en discuter dans certains secteurs professionnels tous les pb que cela soulève sans parler de la fraude !!
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La peur, certainement, mais pas celle du RIC : plutôt la peur de l’altération de la sincérité du scrutin, voire la peur de la rupture de l’anonymat du vote. Quand on a lu cet article, on n’est sûr que d’une chose, c’est qu’il n’est pas urgent de mettre un terme au vote physique, même s’il paraît désuet : https://www.franceculture.fr/politique/le-vote-electronique-en-mal-de-confiance-dans-le-monde.
Et quand on habite une ville qui a mis deux mois à se remettre d’une cyber-attaque, on est encore moins pressé de fragiliser encore plus ce qui constitue le fondement de la démocratie.
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“On voit des personnes qui viennent nous voir en nous disant qu’ils pèsent 500 voix par exemple.”
Qui peut le croire ?
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A propos de “tracts thématiques”, il semble que la droite diffuse des affiches et des prospectus apocalyptiques selon lesquels l’Armée rouge, commandée par Staline en personne, serait massée derrière le corset montagneux qui enserre Marseille et s’apprêterait à fondre sur la ville.
On reconnaît là le talent de ses communicants : ne surtout pas parler du bilan (il est mince), éviter de parler du projet (il est mince), faire peur à l’électeur et le prendre pour un c.n.
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Si je pouvais poster une copie d’écran, je partagerais avec vous les dites affiches de fin du monde qui existent bel et bien (facilement trouvables sur le Net)…(Canebière en feu, voitures qui brulent…)
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quand on lit ici certains commentaires au sujet du député mélenchon on a effectivement l’impression que l’armée rouge est aux portes de marseille. on va nous refaire le coup de 1981.
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J’avais vu quelques affiches comme ça apparaître sur les panneaux municipaux avant le confinement. Apparemment elles ont été gardées au frais.
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Cher 8e la droite marseillaise se fait peur toute seule avec ses prospectus. Il y a belle lurette que l’angoisse de mai 81 ( peur totalement absurde) est passée aux oubliettes. Peur doublement ridicule et notamment vis à vis de notre ami Mélanchon ( notez son nom est bien orthographié) car Miterrandiste béat, notre député soutenait notre feu président à l’époque et plus précisément sur un texte ” le coup d’Etat permanant” qui en résumé, pour les plus jeunes, soutenait que la Constitution de 1958 était quasiment dictatoriale. Dans sa grande cohérence la Gauche qui à l’époque avait toutes les manettes n’a pas modifié d’un iota la dite Constitution. Et pourtant le référendum était comme aujourd’hui à sa disposition et qui l’un des moyens pour modifier le texte le plus important de notre République. Alors in fine , je dirais que notre cher député , avec un clin d’œil amical vers Patrick , est un peu comme la fraise Tagada , rose à l’extérieur et blanc à l’intérieur. J’exagère sûrement un peu , mais bon …….
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Vassal utilise le même genre de ficelle que son mentor en 2014. Souvenez-vous de l’argument unique utilisé pour dénigrer Menucci : “le candidat du gouvernement “, formule rabâchée sans complexes jusqu’à la nausée, comme une pub “Comme j’aime” à la télé. Ça avait marché. Alors elle se dit qu’elle va faire pareil avec “l’ultragauche” pour épouvanter les électeurs âgés qui ont connu la peur du communisme. Pas très glorieux, mais potentiellement efficace sur la cible du quatrième âge
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Le quatrième age c’est bien celui qui a fait 68 ? Je ne pense pas que la peur des rouges fonctionnent encore, même avec eux.
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“Quand on voit que quelqu’un qu’on a aidé par le passé n’est pas allé voter, on en garde une trace et on le rappelle” : ça ne s’appellerait pas le clientélisme ?
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Je dirai mieux du fichage.
La CNIL en est elle informée ?
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À la CNIL, j’ajoute le RGPD, ce fameux règlement général de protection des données personnelles qui dit pour faire court que l’on n’a pas le droit d’utiliser un fichier « des gens qu’on a aidé par le passé » pour faire de la retape. C’est interdit et sanctionnable. À bon entendeur….
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Incroyable les propos du colistier de Vassal… En gros, tu t’es rendu en mairie pour renouveler un passeport ou faire une quelconque démarche administrative et, si tu ne votes pas, ils viennent te mettre la pression comme quoi ils t’ont aidé un jour et qu’il faut un renvoie d’ascenseur !
C’est complétement insensé de lire ça. On parle bien de service public ? Et niveau légalité, j’ai quand même l’impression qu’ils franchissent allégrement la ligne rouge.
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aaaaa
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