MP2013, l'étendard de campagne de Jean-Claude Gaudin

MP2013, l'étendard de campagne de Jean-Claude Gaudin

Au Turkménistan, lorsque le président fait une chute de cheval, les médias sont aussitôt censurés, l'information, muselée. Moins loin, en Italie, Berlusconi use de son pouvoir d'intimidation et de séduction sur les journalistes. Ici, à Marseille, dans une autre mesure, le sénateur-Maire Jean-Claude Gaudin décide d'inviter tels médias et d'en ignorer certains, comme Le Ravi ou encore Marsactu, au mépris de ses 200 000 visiteurs uniques par mois.

Hier midi un repas de presse était organisé au J1, sous prétexte du lancement de la deuxième saison de l'année capitale culturelle, et très opportunément le jour du meeting d'Eugène Caselli. "Ce déjeuner sera l'occasion de présenter le deuxième épisode de la capitale européenne de la culture", était-il spécifié dans le mail d'invitation adressé à la presse que nous nous sommes procurés. En réalité, en termes de capitale européenne de la culture, seuls quelques chiffres de fréquentation ont été donnés notamment par Jacques Pfister, le président du conseil d'administration de Marseille-Provence 2013. Il y aurait donc eu deux millions de visiteurs jusqu'à présent – soit 1,85 millions plus les 475 000 du Pavillon M – avec une majorité enregistrée lors des événements gratuits tels la fête d'ouverture, les spectacles proposés par Karwan comme Entre Flammes et flots sur le Vieux-Port.

"Les Marseillais ont voté avec les pieds"

D'après la chambre de commerce et d'industrie (CCI), les chiffres ont été calculés essentiellement au niveau des billetteries, pour les expositions notamment. En ce qui concerne les événements gratuits et en plein air, les estimations sont celles de MP2013 et de la Préfecture. Sachant que d'après une source de la CCI, "Jean-François Chougnet, directeur de MP2013, a tendance à en enlever 50 000 à chaque fois". Les deux millions de visiteurs calculés depuis le début de l'année capitale englobent sans distinction les Provençaux et les touristes. Notons que ces derniers boudaient jusqu'à présent largement la capitale de la culture. Mais pour Jacques Pfister, avec les chiffres positifs d'avril et la campagne de publicité relancée à l'international, la saison est désormais bel et bien engagée.

Mais à part ces quelques chiffres balancés entre le rôti de veau – sur son lit de semoule – et la tarte à la framboise auxquels nous n'avons pas eu droit, le repas a, selon les dires de plusieurs confrères, tourné autour de 2014 et de la réélection hypothétique de Jean-Claude Gaudin. Pour commencer, les 400 000 personnes rassemblées lors du week-end d'inauguration ainsi qu'à l'occasion de l'événement Entre Flammes et Flots les 3 et 4 mai apportent pour le maire la preuve irréfutable que "les Marseillais ont voté avec les pieds. Les gens valident ainsi notre choix, effectué dès 2004 avec la candidature de MP2013, de repositionner Marseille sur l'industrie touristique." Les grands équipements culturels nés en 2013 serviraient à cela.

Marseille pas assez "Friendly gay"

C'est ensuite, selon une source de Marseille-Provence 2013, que "la discussion a viré à la Nouba." En effet, d'après un autre confrère, le sénateur-maire aurait déclaré, à propos du J1 : "A l'avenir, il faut qu'il reste accessible au peuple souverain. Qu'il garde aussi une utilisation culturelle et que la jeunesse vienne s'y amuser. Face à la mer, comme à Barcelone. Je lis qu'il n'y a pas assez de boîtes de nuits, que la ville n'est pas assez, heu, comment on dit déjà, ''friendly gay'' (sic) ?" Pas question en revanche de conserver le Pavillon M, contrairement à ce que pourrait laisser faire croire une consultation en ligne proposée par le site de la Ville  – et mise en avant par Didier Parakian avec la légitimité d'un sondage officiel – stipulant que près de 85% des Marseillais y sont favorables. "C'est illégal, l'architecte de la place Villeneuve Bargemon pourrait nous faire un procès car ça modifie sa perspective" a tranché Jean-Claude Gaudin. Mais tout ceci, nous ne l'avons pas entendu. Nous n'étions pas invités, faute de faire partie de la courte liste des médias autorisés par la Ville.

Alors que le mail d'invitation était officiellement envoyé par Marseille-Provence 2013, en réalité, selon le service de communication de l'association, "c'est bien à l'initiative de la Ville que ce repas a été organisé et c'est le service de communication de la Ville qui nous a fait suivre sa liste d'invités." Surpris que Marsactu et Le Ravi n'y figurent pas, l'un des organisateurs de MP2013 explique qu'il a essayé d'intervenir, sans résultat. "Clairement, vous n'étiez pas les bienvenus". De notre côté, nous avons vainement tenté d'obtenir des explications auprès d'Olivier Gineste, directeur de la communication et des relations publiques de la mairie. Nous nous sommes heurtés à un mur, n'obtenant pour l'heure aucune réponse.

Une question reste toutefois en suspens. Qu'est-ce qui est le plus choquant, qu'un média soit volontairement ignoré ou que la municipalité actuelle utilise Marseille-Provence 2013, selon "son bon plaisir", pour réaliser sa campagne électorale ? En attendant, Jean-Claude Gaudin, de plus en plus présent aux conférences de presse organisées par Marseille-Provence 2013, ne cesse de se féliciter d'être "la ville de France qui donne le plus pour la culture, 183 € par an et par personne. ça me désespère, je ne le vois écrit nul part." Encore faudrait-il inviter tous les médias et que ce chiffre soit vérifiable.

>> Réactualisation le 15 mai à 9 h 30 : Le chiffre avancé par Jean-Claude Gaudin est vérifié, toutefois il se situe en dessous d'autres grandes villes comme par exemple Lille, avec 264 € par an et par personne pour la culture.

Comme nous continuons malgré cela à faire notre travail sérieusement, vous trouverez ci-dessous le détail des chiffres officiels de fréquentation de la première partie des festivités de la capitale européenne de la culture.