Moulins Maurel : un repreneur mais peu d'espoir
Moulins Maurel : un repreneur mais peu d'espoir
"Expliquez-moi pourquoi on est là !", peste Edouard Pagny, le délégué syndical CGT des salariés de la Grande minoterie de la Méditerranée, anciennement appelée Moulins Maurel. "Tout ça c'est du guignol, ça ne sert à rien". Il n'en démord pas, si Nutrixo a assigné 10 salariés devant le tribunal de grande instance de Marseille, c'est pour "[leur] faire perdre [leur] temps et [leur] énergie".
Depuis 8 heures ce matin, Edouard Pagny fait le pied de grue devant les portes vitrées du tribunal, accueille ses collègues et quelques journalistes. Symbole désormais habituel, les Fralib sont là et leur banderole solidement attachée de l'autre côté de la rue. Quelques élus du Front de gauche sont également présents, comme Jean-Marc Coppola ou Jacques Lerichomme. Pierre Laurent, le secrétaire général du PCF, en visite ce jour à Marseille, fera même un détour dans la matinée pour venir saluer les salariés avant de rencontrer ceux de LyondelBasell et les marins de la SNCM.
L'offre de reprise refusée
Ce que reproche le groupe agro-alimentaire à ses salariés, c'est d'avoir empêché le 5 mai dernier un camion de venir récupérer les 3000 tonnes de blés restés dans les silos depuis la fermeture des moulins à la fin novembre. Une entrave à la circulation selon l'avocat du groupe qui va à l'encontre des règles de sécurité. En effet, le blé stocké trop longtemps sans aération risque de s'échauffer et de provoquer des incendies. La décision du tribunal sera connue lundi 19 mai.
Pour Edouard Pagny, cet évènement n'aurait jamais dû avoir lieu. Un accord de présence a été signé avec la direction le 4 mars, autorisant ainsi les salariés à rester sur le site. De plus, le préfet a demandé au groupe de laisser le blé dans les moulins "pour apaiser les tensions", explique le délégué en reprenant les mots du représentant de l'Etat. "C'est absurde. Si on n'a pas de repreneur, on quitte l'usine au maximum dans la première semaine de juin et Nutrixo récupèrera le blé. Et si la proposition du repreneur est acceptée, il rendra aussi le blé", selon une clause signée par ce dernier.
Car un repreneur, il y en a bien un. Ce dernier a déposé une première proposition, refusée par le groupe à la fin du mois d'avril, jugeant le montage financier peu crédible. "Le constat est clair : aucune offre sérieuse n'a été communiquée à la société GMM", indiquait alors la direction par voie de communiqué. Elle ajoutait qu'elle allait "désormais pouvoir entreprendre un programme de revitalisation du bassin d'emploi". Un fonds permettant l'implantation de nouvelles entreprises sur le secteur. Or, l'usine se trouve à quelques centaines de mètres de la zone commerciale de la Valentine et son emprise pourrait permettre d'y installer de nouvelles enseignes.
Pourtant le 6 mai, le même repreneur Hamid Kasmi, un investisseur algérien, déposait une nouvelle offre. Cette fois, il propose de reprendre 40 salariés (contre 11 la première fois) et de mettre 10 millions d'euros sur la table selon Edouard Pagny. Une proposition également rejetée par Nutrixo. "Ils refusent de se mettre à la table des négociations", s'agace le syndicaliste. Une version contredite par le porte-parole de la direction, Gaëtan Comault : "Effectivement, M. Kasmi a présenté un certain nombre d'éléments qui laissaient penser qu'il s'intéressait au site mais son offre n'a rien de concret et présentait un certain nombre d'imprécisions, notamment sur les volumes de production".
"Nutrixo savait que les Moulins allaient fermer"
"Nutrixo a racheté les Moulins il y a cinq ans. Au bout de deux ans, ils savaient qu'ils allaient fermer". Pour Pierre Fedi, délégué des cadres au comité d'entreprise, le destin de l'entreprise s'est scellé aux alentours de 2012, quand la maison mère a fermé la gare qui permettait de receptionner directement sur le site le blé tendre acheminé depuis le centre de la France. Au mois de juillet de cette année, le groupe annonçait la fermeture de l'usine pour le mois de novembre 2013, son principal client Panzani ne renouvelant pas son contrat avec les Moulins.
La préfecture des Bouches-du-Rhône suit le dossier depuis octobre 2012. Des tables rondes ont été organisées avec les représentants de l'Etat, le commissaire au redressement productif Patrick Maddalone, les délégués du personnel, Nutrixo et le repreneur. Mais du fait de la période de réserve imposée par les élections européennes, la préfecture ne peut pas s'exprimer sur ce dossier.
Aujourd'hui, sur les 63 ex-salariés des la Grande minoterie de la Méditerranée, cinq ont été reclassés aux Grands Moulins Storione – 3e arrondissement, dont Nutrixo est aussi propriétaire – et 20 ont accepté le congé de reclassement. Les 32 restants occupent le site jour et nuit en espérant pouvoir récupérer leur outil. "On n'est pas fou ! Vous ne croyez quand même pas qu'on va s'attacher au portail avec des bouteilles de gaz ! Si on n'a pas de repreneur, on rentrera chez nous", lâche Edouard Pagny. Et se tournant une nouvelle fois vers les journalistes, confiant : "La prochaine fois qu'on vous appellera, ce sera pour vous annoncer qu'on reprend le travail".
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