Michel Vauzelle, trois mandats et puis s'en va

Michel Vauzelle, trois mandats et puis s'en va

"Je ne veux pas être un obstacle pour mon propre camp. Je ne veux pas être celui qui s'accroche." À 70 ans, Michel Vauzelle a annoncé son départ de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur aux fonctionnaires ce mercredi : il ne se présentera pas aux régionales de décembre. Quelques minutes plus tôt, il avait réservé la primeur de l'annonce à quelques élus et membres de son cabinet. Dans la semaine, il avait convié les présidents des groupes socialiste, écologiste et Front de gauche pour leur expliquer un choix mûri durant les vacances, mais pensé selon ses dires depuis le début de ce troisième mandat en 2010.

Cette décision, il l'a prise seul ou presque. L'annonce matinale a surpris plus d'un élu de ses proches. "Je l'ai appris ce matin comme tout le monde, confie ainsi le vice-président en charge de l'économie Bernard Morel qui a été son directeur de cabinet. Honnêtement, j'avais toujours hésité sur son choix. Je savais très bien qu'il se posait des questions. Il avait toujours dit qu'il ne ferait pas le mandat de trop et là, il y avait un risque."

Quand nous l'avions interrogé en décembre dernier, le président du conseil régional avait répondu qu'il ne "souhait[ait] pas se déclarer trop tôt car tous les canons se tourneraient contre [lui]", ce qui avait laissé planer le doute. Pourtant, dès cette époque-là, sa décision était prise : pas envie de prendre des coups, de subir "la twitterisation" de la vie politique, lassitude face à la montée de la haine. Pas envie non plus de terminer sa carrière par une défaite. Député, il voyait arriver la loi sur le non cumul des mandats et son âge avancer. Il préférerait consacrer ses dernières années de vie politique à la Méditerranée, objet de toutes ses préoccupations ces dernières années, parfois plus que la région elle-même où beaucoup l'y trouvaient trop peu présent.

Quel candidat à gauche ?

Michel Vauzelle s'arrête donc au bout de trois mandats. "Une décision honorable et respectable", juge la co-présidente du groupe EELV-Partit Occitan Sophie Camard qui ne compte pourtant pas parmi les plus conciliantes avec le président de région. Avec son groupe, elle a mené la vie dure au président Vauzelle. Le groupe Front de gauche a aussi pris parfois ses distances et les dissensions de la majorité ont culminé lors d'une séance houleuse le 12 décembre marquée par deux votes délicats sur le budget comme sur la Villa Méditerranée. À un an des élections, le porte-à-faux marseillais cristallise les critiques en gigantisme quand  Michel Vauzelle en fait le symbole de sa volonté de faire de Marseille la capitale de la Méditerranée.

En se retirant, Michel Vauzelle ouvre le champ des possibles politiques autant qu'il complique la tâche de ses camarades. Les hiérarques socialistes racontaient depuis des mois qu'il rempilerait. Une candidature faute de solution de remplacement suffisamment crédible et affirmée. Aujourd'hui, le nom le plus souvent cité est celui du député-maire de Forcalquier, Christophe Castaner. Longtemps présenté comme le dauphin, celui-ci avait quitté la région et son poste de vice-président à l'économie lors de son élection à l'Assemblée nationale en 2012 alors que les relations avec le président s'étaient tendues.

Actuellement rapporteur de la très débattue loi Macron au palais Bourbon, l'élu des Alpes ne cache pas son ambition. "J'avais marqué mon intérêt pour être aux côtés de Michel Vauzelle dans cette campagne. Je pensais que c'était la meilleure configuration. Mais mon intérêt reste entier. Il faut voir si on est capable de réunir d'abord le PS puis l'ensemble de la gauche." Toutefois, il estime qu'il est "trop tôt" pour se déclarer candidat.

Divergences à gauche

Il devra le faire avant la fin du mois, limite imposée par le PS pour déposer des candidatures. Parmi les prétendants possibles figure aussi Patrick Allemand, le premier vice-président. Le Niçois "ne souhaite pas s'exprimer avant que Michel Vauzelle ait présenté ses voeux à la presse le 12 janvier". Dans les couloirs du conseil régional, on glisse qu'"il pourrait ramener à lui la vieille garde, étant déjà en place".

D'autres intentions devraient se dévoiler dans les jours qui viennent. Dans les rangs socialistes, face au risque Front national, on juge nécessaire de faire l'union de la gauche dès le premier tour pour viser une des deux premières places et ainsi éviter de devoir se désister pour la droite républicaine au second. Dans ce sens, le profil de député loin d'être frondeur de Christophe Castaner n'est pas le plus à même de rassurer EELV comme le Front de gauche.

Les deux formations s'exprimeront lundi sur leur stratégie en vue de ce scrutin. "Déterminé à ne pas laisser cette région à l'extrême droite", le vice-président PCF aux lycées Jean-Marc Coppola imagine "un rassemblement sur des bases clairement de gauche" qui devrait exclure le parti socialiste. Au sein d'Europe écologie, certains s'imaginent en "pivot" d'une future majorité rose-vert-rouge. "De toute façon, le candidat devra porter le bilan de Michel Vauzelle, argumente Christophe Castaner. Plus que la gauche qui ne fait pas vraiment recette en ce moment, notre première qualité, c'est le bilan de Michel Vauzelle et ce qu'il représente." Élu du Mouvement républicain et citoyen, Ladislas Polski voit même plus large : "Dans le contexte actuel, il faut, comme Michel Vauzelle a su le faire, porter un discours républicain qui parle au-delà des rangs de la gauche. Sinon, on ne peut plus espérer diriger la région." Manière de dire aussi que l'UMP et le FN partent largement favoris du scrutin.