Même retraité, Patrick Rué veut rester le patron des municipaux FO
Dans quelques jours, Patrick Rué aura atteint l'âge légal du départ à la retraite. Or, le syndicaliste souhaite se maintenir à la tête du premier syndicat de la Ville même si la municipalité ne le comptera plus dans ses effectifs.
Patrick Rué, avec d'autres cadres FO lors des vœux au maire de Marseille en 2020. (Photo : LC)
Cela fait quelques mois que le dossier fait la navette entre le service des ressources humaines et celui des affaires juridiques. Un dossier de retraite comme il y en a tant parmi les quelque 17 000 employés que compte la Ville de Marseille mais qui requiert une attention particulière. L’agent qu’il concerne n’est pas tout à fait un fonctionnaire lambda. Il s’agit de Patrick Rué, secrétaire général du syndicat Force ouvrière des agents territoriaux de Marseille et de la métropole, en poste depuis 2012. Selon nos informations, la Ville aurait décidé de ne pas prolonger Patrick Rué parmi ses cadres. Cette décision devrait être entérinée par un arrêté de mise en retraite, publié avant la date anniversaire.
En août prochain, Patrick Rué aura 67 ans. Un fonctionnaire né comme lui en 1954 ne peut aller au-delà du 13 mars et des 66 ans et sept mois, sauf à remplir plusieurs conditions dérogatoires lui permettant de gratter quelques mois supplémentaires à son poste. Selon nos informations, les services du personnel et des affaires juridiques ont eu à plancher sur ces conditions dérogatoires, sans trouver de solution pérenne pour le maintenir dans les effectifs. “Il y a plusieurs scénarios possibles : soit il est père de trois enfants à 50 ans, ce qui n’est pas le cas de Patrick Rué, soit il a encore un enfant toujours à charge, ce qui n’est toujours pas son cas, explique une spécialiste de ces questions de retraite. Il reste ensuite l’intérêt du service. Mais là encore, cela ne s’applique pas puisque Patrick Rué est détaché au syndicat FO depuis plusieurs décennies”.
Émondeur au début de sa carrière, Patrick Rué a rejoint très tôt les rangs des permanents du syndicat majoritaire. Même s’il a bénéficié d’une promotion en 2017 qui lui permet de finir sa carrière en tant qu’ingénieur, il est difficile de le prolonger dans les effectifs des parcs et jardins dont il a déserté les plates-bandes. À notre connaissance, la Ville a donc renoncé à prolonger le patron local de FO au-delà de l’âge légal, contrairement à ce qu’écrivaient le mois dernier nos confrères du Ravi, sans parvenir à confirmer cette information.
Rué, tendre avec le Printemps
Cela ne veut pas dire que l’idée n’a pas été longtemps caressée. Depuis l’entrée en fonction des maires successifs du Printemps marseillais, la nouvelle majorité n’a pas eu à se plaindre du premier syndicat de la Ville. Bien au contraire même, puisque Patrick Rué fait partie des syndicats signataires du protocole encadrant le droit de grève dans les écoles et les crèches, au côté de la CFTC-CFE-CGC et de l’UNSA.
Dans le long conflit des écoles qui a animé les premiers mois de la mandature du Printemps, le syndicat majoritaire n’a posé qu’une journée d’action, plutôt bien suivie, sans en rajouter dans le bruit de fond de protestation sociale des tatas relayé par la CGT, la FSU ou l’UNSA. En privé, les élus qui ont eu à fréquenter Patrick Rué louent volontiers son sens de la mesure et du dialogue.
Dès l’été, la question de la prolongation est sur le tapis
À l’heure où Gaudin est inquiété pour avoir maintenu en poste des collaborateurs trop âgés, prolonger Patrick Rué ferait tache.
Selon nos informations, la question de son maintien dans les effectifs a été discutée très tôt avec des représentants de la majorité actuelle. Notamment parce que la liquidation d’un dossier de retraite se prépare plusieurs mois avant la date anniversaire. Celle-ci était déjà sur le bureau de l’ancien maire et notamment du directeur général des services adjoint, Jean-Pierre Chanal dont les relations avec Patrick Rué n’étaient pas réputées pour leur cordialité. En fin de mandat, l’administration centrale avait signifié à l’intéressé son intention de ne pas le prolonger au-delà de 67 ans.
Un an plus tôt, le cabinet du maire recevait la visite des gendarmes dans le cadre d’une perquisition sur le maintien de collaborateurs hors d’âge. Elle a valu à l’ancien maire et à son ancien directeur de longues heures de garde à vue dans le cadre d’une information judiciaire diligentée par une juge parisienne en février. L’annonce d’un prolongement du même type accordé au patron d’un syndicat réputé en position de cogestion avec les maires successifs ferait donc tache.
Prolongé pour trois ans par ses pairs
De ce fait, Patrick Rué a poursuivi une seconde stratégie pour ne pas quitter la tête du syndicat. Le 26 janvier, sur sa page Facebook, il salue ainsi sa propre élection en lettres majuscules :
Après le bureau restreint il y a 15 jours, c’est le nouveau bureau exécutif qui a reçu un avis favorable à l’unanimité (…). Patrick Rué a été renouvelé comme secrétaire général du syndicat des territoriaux de la ville de Marseille et de la métropole pour les trois prochaines années.
Le syndicat des territoriaux défend en effet à la fois les intérêts des agents actifs, mais aussi ceux des retraités de la fonction publique territoriale. Dans l’article du Ravi qui annonçait cette prolongation à la tête du syndicat, Patrick Rué indique également faire “partie des dix-sept secrétaires fédéraux de la fédération des services publics qui bénéficient d’une décharge nationale et à ce titre [leurs] salaires sont pris en charge à 100% par la direction générale des collectivités territoriales [du ministère de la Cohésion des territoires, Ndlr] et non par la Ville de Marseille”.
Patrick Rué pourrait donc tranquillement continuer son mandat à la tête du syndicat, sans dépendre de son salaire de fonctionnaire. En revanche, il devra céder sa place au sein du comité technique, l’instance paritaire où se discutent toutes les délibérations qui mettent en jeu les conditions de travail des agents. Mais pourra tout de même préparer les élections professionnelles de 2022 avant d’organiser sa succession les années suivantes. Si plusieurs noms ont circulé pour s’installer dans son fauteuil, aucun ne fait de l’ombre au patron.
D’un félon à l’autre
En 2011, quand Élie-Claude Argy a dû quitter la tête du syndicat, alors que son nom apparaissait dans les remous médiatiques autour de l’affaire Guérini, c’est son second Patrick Rué qui fût aussitôt désigné. D’un style très différent, les deux hommes ont fonctionné en duo avant que leur relation ne se dissipe dans des accusations réciproques de trahison. Josette Ventre a, elle, tenu la maison après l’historique François Moscati, de 1993 à 2003, sans que sa succession ne fasse vaciller le syndicat.
Depuis plusieurs jours, alors que son anniversaire approche, Patrick Rué se mure dans le silence devant les questions de Marsactu. Il a d’abord pris des “vacances bien méritées” selon son secrétariat avant de multiplier depuis plusieurs jours “les rendez-vous extérieurs” et ce même quand son profil Facebook le montre en réunion au siège du syndicat. Patrick Rué a fort à faire. Élection après élection, la majorité jadis “absolue” du syndicat ne cesse de s’effriter, perdant 17% entre 2008 et 2018 à la Ville pour ne peser plus que 43% aujourd’hui. À la métropole, la dégringolade est plus sévère encore puisque le syndicat n’est plus majoritaire ni en voix, ni en siège. Trois ans ne seront pas de trop pour éviter que la maison FO ne prenne l’eau.
Actualisation le 11 mars 2020 à 12h30 : Correction des données chronologiques et chiffrées concernant, la date de naissance de Patrick Rué, les mandats de Josette Ventre et les résultats de FO aux élections professionnelles.
Commentaires
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La photo est terrifiante, merci. 🙂
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Bah, Patrick, si tu veux savoir : on ne te retient pas. “Les cimetières sont pleins de gens irremplaçables, qui ont tous été remplacés.”
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“En privé, les élus qui ont eu à fréquenter Patrick Rué louent volontiers son sens de la mesure et du dialogue.”
La grande alliance FO/municipalité a encore de beaux jours devant elle.
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fo se bat contre la réforme des retraites telle que préconisée par le gouvernement, et s’insurge sur l’âge pivot : 64 ou 65 ans, je ne sais plus…..
rue a 67 ans !!
comment peut on être légitime ( et légitimé ! )quand on se place à l’encontre des revendications de son syndicat ?
irremplaçable ou indéboulonnable ? consternant.
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Je crois que c’est le commentaire le plus pertinent quoique les
autres soient justifiés, l’heure c’est l’heure !! mais comme beaucoup d’autres, il n’est pas à une incohérence près et je souhaite que Payan applique la loi sans marchandage sinon ce printemps ne redeviendra qu’un hiver de plus pour notre ville.
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Rué, vu la connaissance parfaite du monde politique local devrait se reconvertir en visiteur de prison ,ses copains de carrière vont peut-être avoir besoin de visite à l’avenir,il restera ainsi dans le milieu.
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Allez zou, Patrick, à chaque âge ses plaisirs. Il est temps de passer la main à ceux que, votre sagesse sentant votre fin (de carrière) prochaine, vous avez bien évidemment formés et associés à votre action. Je me permets de rajouter une petite pierre à celle de l’Electeur du 8° :” (Si) la science progresse, (c’est) parce que la génération précédente vient de prendre sa retraite”. Max Planck
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La nouvelle municipalité vient de réussir à se débarrasser du syndicat FO tout en permettant à Rué de ne pas perdre la face , car jusqu’au bout il aura cru être prolonger dans ses fonctions selon l’article du Ravi du mois dernier
C’est donc un retraité qui va défendre les intérêts des fonctionnaires territoriaux de la mairie et de la métropole en activité pendant 3 ans!!
Aprés lui ,aucune tête ne dépasse, alors adieu à la cogestion?
Ce serait une bonne nouvelle pour notre Ville et merci à Benoît Payan pour ce coup de maître
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la municipalité viens de se débarrasser de FO ? ça c’est un scoop !! Main dans la main pourtant contre la CGT et la FSU
Il n’a rien fait Payan. Rué a 67 ans et il ne peut être maintenu. Faudrait m’expliquer le coup de maître
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Il y a beaucoup à faire dans le syndicalisme retraités (et peu de gratifications) même si ça n’intéresse guère la presse en général. Monsieur Rué pourrait se renseigner auprès de ses camarades de l’USR 13 FO, qui font du bon boulot dans l’unité avec les autres syndicats et assos… aujourd’hui même y a manif d’ailleurs !
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Est ce rémunéré ?
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Un syndicaliste qui demande un passe-droit.
Des syndiqués qui se choisissent un représentant pour un mandat allant au-delà de la limite d’âge (dérogations prises en compte) …
Une collectivité qui hésiterait à ne plus avoir comme interlocuteur qui n’est plus membre de cette collectivité ?
C’est bien Marseille !
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D’ailleurs la devise de la ville :” la ville qui brille par ses hauts faits” pourrait être modifiée
par ” la ville qui brille par ses magouilles”.
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Bon débarras de l immondeur ingénieur !du balais!
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L emondeur emondé en somme !
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Mais pourquoi tient-il autant à rester ? Répondre à cette question dévoilerait bien des défaillances du système marseillais et de FO. La place doit être bonne.
Par ailleurs pour quelqu’un qui a débuté comme émondeurs aux espaces verts, finir ingénieur, pas mal comme plan de carrière … en étant d’autant détaché depuis plusieurs décennies de tout travail dans son métier. Vive le syndicalisme !
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Il a une ultime ambition dans sa carrière, finir “Maréchal des Logis, Chef”,comme Pithiviers dans la 7e Compagnie.
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La place n’est pas bonne, elle est excellente
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Vous avez tout compris.
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A la retraite il ne pourra plus avoir l’avancement convoité d’ingénieur chef
Mais il veut conserver le pouvoir qui confère bien des avantages et flatte l’ego
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Comme les élus, il convient que les syndicalistes puissent briller par la précarité de leurs postes.
D’ailleurs, comme cela a été remarqué plus haut, les retraités ont besoin d’être représenté par un…retraité.
Sans faire de ”jeunisme” place aux jeunes; comme dirait le retraité qui écrit ces lignes.
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bravo à Sentenza pour la création de ce beau mot valise : IMMONDEUR
l’immonde émondeur !! bien vu.
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La CFDT et FO n’ont jamais pu se supporter. Puisque FO chute dans les adhésions depuis que Rué est en poste, est ce que ça ne serait pas intéressant pour Payan qu’il reste dans les parages? Comme ça, FO finit par se suicider, et les autres syndicats remontent un peu. C’est d’ailleurs assez étonnant que malgré l’intérêt que représentait d’être adhérent FO pour les employés municipaux sous la mandature de Gaudin, ceux-ci aient pu aller adhérer ailleurs. Pourquoi? Les autres sont devenus plus motivants? les nouveaux recrutements ont été happés par les autres syndicats? A priori, si Rué reste patron de FO municipal, il sera défenseur des retraités qui n’ont plus besoin de pointer temps plein et se pointer à mi-temps. Ca ne gêne personne. Et pour les non-retraités, FO continuera à couler puisque Rué manifestement les rue vers les autres. Tout bénéf. C’est un coup de maitre, Payan!
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