Logements sociaux : quelques bons élèves et beaucoup de cancres

Décryptage
le 9 Déc 2020
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Le préfet des Bouches-du-Rhône s'apprête à signer des arrêtés contre 32 communes qui affichent un bilan trop maigre en matière de construction de logements sociaux. Paradoxalement, l'objectif global est presque atteint dans le département grâce à quelques locomotives, principalement les plus grandes villes.

Logements sociaux : quelques bons élèves et beaucoup de cancres
Logements sociaux : quelques bons élèves et beaucoup de cancres

Logements sociaux : quelques bons élèves et beaucoup de cancres

Ceyreste et son absence totale de nouveaux logements sociaux en trois ans. Meyreuil et son taux qui a… diminué depuis 15 ans. La Bouilladisse, Pélissanne, Peypin, Mimet, Éguilles, et leur taux inférieur à 5 %. Ces trois dernières étant sanctionnées par le préfet pour leur inaction depuis 18 ans, de même qu’Allauch. Aix-en-Provence et ses logements sociaux majoritairement réservés à la classe moyenne…

Emblématique des réticences de certains élus à se conformer aux obligations de mixité sociale, le département des Bouches-du-Rhône figure bien en place dans l’anti-palmarès dévoilé ce mardi par la Fondation Abbé-Pierre. Ce marronnier qui pousse tous les trois ans se cale sur le rythme de la loi SRU, qui cadre l’effort de rattrapage fixé par l’État à toute commune de plus de 3500 habitant située en zone urbaine, pour tendre vers 25 % de logements sociaux en 2025.

Une liste qui s’allonge

Le 16 décembre, le préfet présentera à un comité régional consultatif la liste des communes “qui n’ont pas démontré de volontarisme suffisant”, selon la terminologie ministérielle. Comme l’a révélé TPBM, sur les 66 communes du département concernées par le dispositif, 34 sont visées par cet arrêté préfectoral de “carence”, synonyme de sanctions et de possibilités de prise en main de leurs pouvoirs d’urbanisme. C’est dix de plus que lors de la précédente vague d’arrêtés, en 2017.

Récupérées par Marsactu, les données brutes préfectorales montrent que le bilan dans les Bouches-du-Rhône n’est pourtant pas loin du compte : 17 000 logements produits entre 2017 et 2019 soit 90 % de l’objectif. C’est bien mieux qu’au niveau régional, où à peine la moitié du nombre espéré a été produit. Mais l’effort est porté en grande partie par quelques villes. Si Marseille se distingue par son volume (près de 7900 HLM supplémentaires), les villes moyennes de Salon et La Ciotat, gérées par la droite, et Arles et Gardanne, communistes jusqu’en 2020, sortent du lot avec entre 500 et 1000 logements en trois ans, bien au-delà de leurs obligations. S’y ajoutent quelques bonnes surprises, comme un quatuor d’anciens récalcitrants (Ventabren, Peyrolles, Saint-Cannat et Noves).

Au total, les 32 communes non carencées ont construit plus de 15 000 logements sociaux en trois ans, soit 130 % de l’objectif qui leur était assigné. À l’inverse, les communes carencées ont à peine rempli le quart de l’objectif : 1898 logements sur 7269. Dans son bilan régional, consulté par Marsactu, l’État considère cependant que les arrêtés de carence ont “un effet positif”. Ainsi a-t-on vu sortir de terre 200 HLM à Allauch et 118 à Plan-de-Cuques, les voisines très en retard du 13e arrondissement de Marseille, 61 à Ensuès, ville d’ordinaire rétive de la Côte Bleue et même 52 à Mimet, dont le maire Georges Cristiani est le porte-étendard local de la fronde anti-SRU.

L’après 2025 se prépare

“L’impossibilité d’atteindre l’objectif SRU est aujourd’hui avérée.”

Rapport des services de l’État au comité régional de l’habitat

Mais ces quelques programmes immobiliers, 20 ans après la promulgation de la loi, sont encore trop loin du compte pour revenir dans les clous. Et, à mesure que l’échéance de 2025 approche, les objectifs vont devenir de plus en plus irréalisables, voire irréalistes, pour ceux qui s’y sont mis trop tardivement. “L’impossibilité d’atteindre l’objectif SRU est aujourd’hui avérée”, tranche même le document déjà cité. Au niveau régional, l’objectif pour 2020-2022 est presque équivalent au nombre total de logements mis en chantier, sociaux ou non. Et après ? L’objectif 2023-2025 “risque de décrédibiliser” le principe même du dispositif, craint la Fondation Abbé-Pierre, qui plaide pour un “aménagement” de cette dernière période, avec un rattrapage qui “pourrait s’échelonner sur six années supplémentaires”.

Sans se prononcer sur l’assouplissement, la ministre du Logement Emmanuelle Wargon prépare elle aussi l’après 2025, dans une tribune publiée le 6 décembre par le Journal du dimanche. Mais “le premier message est que ça continuera après 2025, au cas où certains maires seraient tentés de jouer la montre en pensant que ça va s’arrêter”, pose Saïd Ahamada, député LREM co-signataire du texte. Au passage, la Fondation Abbé-Pierre y verrait bien l’ajout d’objectifs par arrondissement à Paris, Lyon et Marseille. “J’y suis favorable depuis un moment”, commente l’élu. Et pour la première fois, la majorité municipale à Marseille est aussi favorable à ce rééquilibrage.

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Commentaires

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  1. martine Colombani martine Colombani

    à mimet où on ne veut pas de logements sociaux l’équipe municipale tente de leurrer l’Etat en construisant des confettis, dont certains ne sont pas mis à la la location durant deux ans parfois

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  2. Alceste. Alceste.

    Il vaut mieux quelques fois un petit graphique qu’un long discours.
    Ce dernier mis en illustration ci contre démontre une fois de plus la volonté politique assumée de Vassal et de la droite en général de paupériser Marseille et de “protéger” les alentours des miséreux, sans donner à Marseille les moyens financiers de faire face à cette situation . Nous allons voir si l’Etat va intervenir en dépouillant les maires réfractaires de leurs pouvoirs d’urbanisme.

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  3. BRASILIA8 BRASILIA8

    le Préfet ne fera rien il est là pour gérer sa carrière
    les communes paieront les pénalités, autant d’argent public qui ne sera utilisé pour le bien de tous, et tout continuera comme avant

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    • Julien Vinzent Julien Vinzent

      Bonjour, une précision : les pénalités sont reversées à la métropole pour être exclusivement dédiée au financement de la construction de logements sociaux. En amont, il est possible pour la commune de déduire des pénalités les dépenses qu’elles font pour ce même objet. Dans tous les cas, cela a pour conséquence pratique de réserver une partie de leur budget à cette politique.

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  4. BRASILIA8 BRASILIA8

    à J. Vinzent dans tous les cas l’argent manque au budget de la commune même s’il est utilisé ailleurs à la construction de logement sociaux
    je pense par ailleurs que cela ne doit pas déranger certains électeurs qui préfèrent cette solution à la présence d’ HLM sur leur commune

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  5. nathdemars nathdemars

    Tant que l’habitat social rimera avec trafic de stup, incivilités et dégradations, peu de chances que cela ne change. Le sujet doit être traité dans sa globalité , ce que personne ne fait et ne fera .
    Cachez ce HLM que je ne saurai voir !!

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  6. Jacques89 Jacques89

    Ramener les comptes au niveau de l’arrondissement permettrait aussi de mieux répartir les populations concernées. Reste à définir les modalités de calcul des pénalités… Une comptabilité probablement compliquée pour les services fiscaux ou pour les communes (suivant que la patate chaude est laissée aux uns ou aux autres). Quant à reporter encore l’échéance, c’est mener la politique de l’autruche. Plus on retarde, plus cela laisse d’arguments à ceux qui ne s’impliquent pas. Et en terme de prérogatives sur le droit des sols, dans les secteurs où les autorisations sont délivrées par l’intercommunalité, comment on fait ?

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  7. Régine HAMZAOUI Régine HAMZAOUI

    C’est dommage que vous n’ayez pas évoqué les communes de l’Ouest de l’Etang de Berre Martigues, Istres Port St Louis qui sont bons élèves et dont les cités qui abritent évidement une population plutôt en difficulté et donc proie facile pour les trafics et système B, sont bien entretenues et prises très en compte par les municipalités dont 2communistes!

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