Logements, collège ou tiers-lieu, la friche Louis-Armand attend toujours un arbitrage

Actualité
le 14 Juin 2023
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L'ex-adjointe à l'urbanisme marseillaise a pointé la friche de l'ancien collège Louis-Armand, dans le 12e arrondissement, comme symbole de l'indécision de l'exécutif municipal. Entre logements, projet de nouveau collège et services publics, les élus locaux plaident pour une concertation encore à venir.

Laissé dans son jus, le bâtiment de l
Laissé dans son jus, le bâtiment de l'ancien collège est facilement accessible. Photo : B.G.

Laissé dans son jus, le bâtiment de l'ancien collège est facilement accessible. Photo : B.G.

Le crin-crin de l’escalator dialogue avec le jacassement d’un couple de pie. Juste en face du métro Louis-Armand (12e), la friche de l’ancien collège du même nom gît dans son jus, sans nouvelle de la décision pour fixer son avenir. Dans le sillon de son départ de la mairie de Marseille, l’ancienne adjointe à l’urbanisme, Mathilde Chaboche en a fait l’exemple même d’une forme d’inertie politique. Le projet qu’elle entendait porter là, un mélange de logements, d’espaces verts et d’équipements publics, aurait buté sur l’impossibilité du maire à trancher.

Voilà comment l’ex-adjointe le formule avec verdeur :

Nous sommes propriétaires, il y a deux hectares à proximité d’un collège, d’une piscine et d’un métro. On a une situation inouïe. Il y a tout pour en faire un projet qui ne soit pas un ghetto qui puisse proposer du logement social, de l’activité économique avec un espace vert. Et rien ne se fait parce que les élus du 11/12 s’y opposent. Alors, on ne fait rien.”

Dans le très paisible quartier de Saint-Barnabé, la friche n’a pas bougé d’un iota. En mars 2021 un point presse faisait suite à la décision de refus du permis de construire du groupe Sainte-Marguerite, qui prévoyait d’y bâtir un grand hôpital privé. Bras dessus-dessous, les adjoints à l’urbanisme et à la tranquillité publique, Mathilde Chaboche issue des rangs de Mad mars et le socialiste Yannick Ohanessian, annonçaient le lancement prochain d’un appel à manifestation d’intérêt (AMI), en vue de réfléchir avec les habitants au devenir de la friche.

La fin du projet d’hôpital puis… rien

Alors présents au côté des élus, des riverains du collectif Nos quartiers demain se disaient soulagés de voir le spectre de l’hôpital géant s’éloigner durablement. “Au départ, il était question d’un appel à manifestation d’intérêt qui devait s’inscrire dans une vague concernant 15 à 20 lieux sur Marseille, explique Cécile Vignes, membre du collectif et élue d’arrondissement sur le banc des non-inscrits. Ensuite, le projet d’AMI a été abandonné au profit d’un appel à projets“.

À l’automne, Nos quartiers demain rencontrent donc l’adjointe à l’urbanisme pour participer au cahier des charges du futur appel à projets. “Et là, on tombe des nues, en découvrant que la Ville prévoit d’y bâtir entre 250 et 350 logements, reprend la militante. Il n’y a pas besoin d’autant de logements à cet endroit, dans un lieu dont il faut, au contraire, protéger la biodiversité“.

Deux hectares à urbaniser

La friche couvre près de 20 000 mètres carrés, un espace suffisamment vaste pour y imaginer un projet mixte qui préserverait les arbres de haute tige qui entourent l’ancien collège décati, tout en permettant une urbanisation. Mais depuis les échanges automnaux, le collectif n’a plus eu de nouvelles.

Un nombre de logements trop important représentait un risque de mettre en danger notre quartier.

Jean-Marc Signes, élu Printemps marseillais

Élu métropolitain du Printemps marseillais, issu de ce secteur, Jean-Marc Signes a également participé à des réunions entre élus des 11/12 et l’adjointe à l’urbanisme d’alors, en 2022. “De mémoire, il était question de plus de 400 logements, se souvient l’ancienne tête de liste écologiste au premier tour des municipales dans le secteur. Après notre engagement de ne pas faire un super hôpital, notamment pour des raisons urbanistiques, un nombre de logements trop important représentait un risque de mettre en danger notre quartier”.

“Fidèles à la promesse du Printemps marseillais”

L’élu de secteur pose comme préalable la nécessité de concerter avec la population. “Nous sommes fidèles à la promesse du Printemps marseillais, se félicite Yannick Ohanessian, tête de liste dans les 11/12 en 2020. Nous avons mis un terme au projet d’hôpital comme nous nous y étions engagés. Nous souhaitons associer le plus largement possible la population pour apprécier le projet le plus adapté au quartier“.

Mot pour mot, les propos qu’il tenait en mars 2021. “Oui, cela prend du temps, reconnaît Yannick Ohanessian. Métropole, Ville, nous sommes tous d’accord pour faire du logement, avec un mélange de privé et de public. Cela est d’autant plus nécessaire que la dépollution et la démolition du site représentent au bas mot deux millions d’euros”. L’intervention d’un promoteur privé, couplé à un bailleur public serait donc bienvenue. “On se donne jusqu’à la fin de l’année pour faire émerger un projet cohérent en lien avec la population pour savoir quels types de services publics, d’activités, on associe au projet”, reprend l’adjoint.

Demande d’un collège supplémentaire

Du côté de l’opposition, on s’agace de voir le projet tanqué dans l’indécision. “J’ai échangé à de nombreuses reprises avec l’adjointe à l’urbanisme, à propos de la demande réitérée de la présidente du conseil départemental de voir une partie du terrain utilisée pour y construire un collège, explique Sylvain Souvestre, le maire de secteur (DVD). Martine Vassal a écrit à de nombreuses reprises au maire de Marseille, en ce sens. Sans réponse“.

Le maire de secteur fait état d’une carte scolaire saturée, avec la nécessité d’un second établissement pour désengorger le collège André-Chénier, situé à Montolivet, trop demandé. “Ce n’est pas le seul endroit où le département attend des réponses de la Ville, mais apparemment, cela tarde”, constate le maire, élu sur la liste de Martine Vassal en 2020. En mars dernier, La Provence avait déjà fait état de cette demande restée lettre morte.

Du côté du Printemps marseillais, personne ne défend le principe d’une rétrocession du terrain au département. Et au sein du collectif d’habitants, la perspective d’un nouvel établissement scolaire, juste à côté du collège Darius-Milhaud, ne fait pas l’unanimité. “J’étais présidente d’une association de parents d’élèves quand il y avait encore deux établissements côte-à-côte et je peux vous dire que c’est une très mauvaise idée, tranche Cécile Vignes. Cela ne faisait qu’encourager la concurrence scolaire“. Le collectif continue de plaider pour un “lieu vivant et innovant”. Renvoyant dos-à-dos le projet de collège comme la construction de logements sociaux.

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Commentaires

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  1. ALAIN B ALAIN B

    Nous attendons avec impatience un collège dans le 3ème, après des luttes des habitants du quartier nous avons obtenu le terrain pour la construction du collège Manon, alors construisons le vite

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    • Andre Andre

      Ce collège impasse Jolie Manon est un impératif. Je ne vous apprends pas que la carte scolaire du 3me remonte à l’avant guerre (celle de 14-18) ou presque. La pénurie de classes était déjà patente avant que de nombreuses opérations immobilière ne voient le jour dans cet arrondissement depuis une dizaine d’années, accroissant de fait la population et les besoins.
      Il ne faut pas opposer entre eux les besoins des quartiers et encore moins ceux des populations scolaires mais, nous sommes d’ accord, il y a des priorités.

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  2. Charlie Pierre Charlie Pierre

    C’était quand même plus facile dans l’opposition Benoît, la critique est facile, l’art…

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  3. Kitty Kitty

    Cette friche est sans doute une grande opportunité pour le PM de montrer que son approche de la fabrication de la ville est en rupture avec la municipalité précédente. Et ce, à la fois en termes de contenu du projet que dans son processus participatif d’élaboration.
    Depuis 2018, des habitants se sont mobilisés, des enquêtes ont été menées, des ateliers de créativité ont été mis en œuvre, de nombreuses réunions (fortement suivies) ont été tenues. Cette mobilisation de l’intelligence collective, parce qu’elle aussi attiré nombre d’experts, a abouti à proposer un espace novateur articulé autour de quatre thématiques :
    – Un espace d’engagement civique, de culture populaire et d’observation pour les urbanistes et les chercheurs.
    – Un lieu de convivialité pour favoriser les rencontres entre habitants et utilisateurs du lieu.
    – Un lieu « fabricant » pour créer, expérimenter, se former et fabriquer.
    – Un lieu de promotion et de sensibilisation à toutes les transitions (écologiques, économiques, sociales et civiques).
    Au moment où Marseille cherche à se réinventer, cette méthode expérimentale peut être une source d’inspiration majeure (aussi bien dans sa démarche que dans ses résultats). Elle a déjà suscité l’intérêt d’un collectif de chercheurs et continue à mobiliser les habitants et leurs représentants. Il faut maintenant espérer que, dans le respect de leur promesse électorale, les élus du PM s’engagent avec sincérité dans une phase de concertation afin de ne pas gâcher l’une des dernières opportunités pour inscrire Marseille dans une nouvelle approche urbaine où rien n’est plus imposé et tout est concerté.

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    • Patafanari Patafanari

      Le Seigneur soit avec vous

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    • julijo julijo

      en gros, ça fait quoi ? plus de 10 ans, non ?
      alors oui “Kitty” de très belles idées, et très réalistes en plus.
      il faudrait…”ya” plus qu’à….

      et si on “oubliait” des concertations qui durent éternellement, et qu’on -la mairie, les assoc, les élus- agisse enfin !!

      comme partout, si on attend que tout le monde soit d’accord, on n’est pas arrivé ! il faut que les décideurs, décident.

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    • Charlie Pierre Charlie Pierre

      «  Il faut maintenant espérer que, dans le respect de leur promesse électorale, les élus du PM s’engagent avec sincérité dans une phase de concertation afin de ne pas gâcher »
      La bonne blague, vous voulez une concertation sur la concertation qui a déjà eu lieu !?
      A ce rythme, les nombreuses bibliothèques et piscine promises par le pm il y a 3 ans sortiront avant cette friche…quoi que, c’est fort probable qu’on n’en voit jamais la couleur.

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    • RML RML

      Cest joli , mais je comprends les elus si le fruit de la concertation a donné ça.. parce que ca veut dire quoi? Cest quoi le projet?

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  4. polipola polipola

    Parce que construire une école, un lycée ou autre service public, c’est ni essentiel ni en rupture avec la précédente municipalité ?

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    • Kitty Kitty

      Bien sur ! vous avez raison totalement raison….sauf qu’il y avait déjà deux collèges de 900 élèves chacun côte à côte, et donc un collège a été rasé dans les années 2000 pour plusieurs raisons : vieillesse des établissements, embolie dans le secteur en cul de sac, concurrence mortifère entre les deux établissements, temps d’accès insupportable pour les familles et enfants. Il y a donc eu, dans le cadre de l’ opération “Concerto” de rénovation des collèges du département 3 collèges de 600 élèves qui ont été construits (et reconstruit sur place pour l’un des trois : Darius Milhaud) et bien mieux répartis sur tout le 12ème. Tout cela n’est pas si vieux….et c’est avec nos impôts qu’on construit les établissements publics. Alors, voir revenir un 2ème collège cote à cote pour se faire plaisir….qu’on a précédemment rasé pour de très bonnes raisons, avouez que ça fait désordre (je suis poli). La construction d’un établissement doit répondre à des besoins, respecter la sectorisation des établissements (pour les collèges et les lycées) pour une mixité des publics. Quelle tristesse de voir que nos élus ne connaissent pas l’histoire d’un lieu…..

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    • julijo julijo

      il faut arrêter avec des souvenirs à géométrie variable. oui, il y avait deux collèges ( plutôt 600 élèves chacun) quasiment mitoyens, la cuisine était commune, et les secteurs scolaires quasiment identiques dans le 12e.
      l’attitude des deux chefs d’établissement a été déterminante, les choix des options proposées en 6e également. la “concurrence” c’était celle là.
      l’ensemble des cohortes de 3e des deux collèges, qui partaient arrivaient principalement dans deux lycées, soit michelet, soit st charles, en seconde, les élèves n’étaient pas particulièrement distingués par leur origine.
      non, ce n’est pas cette “concurrence” qui a motivé le déménagement. cet argument n’est pas bon., ou ce n’est qu’un “détail”.
      concerto était prévu et a été appliqué (très tardivement) à cause de la vétusté de ces deux établissements, et de leur taille -trop petits-

      cependant, géographiquement, ce n’est pas vraiment le lieu pour coller un deuxième eple. il serait plus intéressant d’envisager le haut du 12e plus accessible pour les élèves.

      un parc serait nettement plus sympa.

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  5. Peuchere Peuchere

    Indécision complete de cette mairie sur tous les dossiers. Alors on lance des concertations…..
    Ca ne serait pas si grave que ca en serait risible

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  6. Jean-Cedric Ouachan Jean-Cedric Ouachan

    Il est plus que nécessaire d’avoir des parcs et jardins accessibles à tous dans toute la ville. Et Il est plus que temps d’arrêter de construire à tout va. Un parc à cet emplacement serait un bon début.

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    • Charlie Pierre Charlie Pierre

      Il y en a un juste à côté, le parc Felicien David, d’un hectare…

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  7. didier L didier L

    Et une salle de shoot dans le 12em au lieu du 1er … c’est pas une bonne idée ça !

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  8. Andre Andre

    Et oui, le 12me … C’était un enjeu politique et il le reste . C’est le secteur qui a fait la balance en faveur de Gaudin en 95 et que, depuis, on n’a pas manqué de soigner: deux lignes de tramway et une de métro y convergent, alors que des zones urbaines denses comme le 3me sont restées des blancs sur la carte des plans de déplacements urbains des municipalités précédentes.
    En ce qui concerne la proposition d’un nouveau collège sur ce terrain, je ne connais pas les besoins scolaires de St Barnabé mais je pense qu’il devrait y avoir de manière criante dans Marseille d’autres secteurs prioritaires pour le CG 13 et la Ville.
    Le 3me arrondissement justement.
    Quand aux logements sociaux que proposait, entre autres éléments de programme, l’ancienne adjointe à l’urbanisme qu’on a débarquée, j’imagine qu’ils ne doivent pas faire plaisir aux résidents de cet île urbaine privilégiée.
    On pourra toujours les construire dans les 15/16, qui semble-t- il en manquent. Samia Ghali n’attend que ça…

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